LANG Jack [LANG Jacques]

Par Laurent Martin

Né le 2 septembre 1939 à Mirecourt (Vosges) ; docteur et agrégé de droit public et sciences politiques ; militant culturel ; militant mendésiste, du PSA puis du Parti socialiste ; maire de Blois (Loir-et-Cher) de 1989 à 2001  ; ministre socialiste de la Culture et de l’Éducation nationale.

Une légende tenace fait de Jack Lang un saltimbanque égaré en politique. Rien n’est plus faux. Né dans une famille lorraine au laïcisme militant, imprégné très jeune des idéaux de la gauche libérale et radicale-socialiste, humaniste, franc-maçonne, il s’investit en politique dès son adolescence sous l’influence de deux personnages, l’avocat Philippe Serre, pacifiste, catholique de gauche, ancien député et membre du premier gouvernement de Léon Blum devenu mendésiste, et Pierre Mendès France. Jack Lang adhéra au parti radical en 1956, « par attachement à la politique généreuse et exaltante » préconisée par ce dernier. Secrétaire général des Jeunesses radicales de Meurthe-et-Moselle, il en fut exclu en 1958 et suivit l’ancien président du Conseil dans sa tentative de reconstruction d’une alternative politique au sein de la gauche non communiste. Il créa une section départementale du Parti socialiste autonome (PSA) et du Centre d’action démocratique, la composante mendésiste de l’Union des forces démocratiques qui se constitua autour de François Mitterrand dans le prolongement du référendum sur la Constitution de septembre 1958. Il anima à Nancy un cercle d’ « amis des Cahiers de la République », la principale publication mendésiste. Mais devant l’impuissance de Mendès France à s’imposer au sein du nouveau parti issu de la fusion du PSA et de l’UGS, le PSU, accaparé aussi par ses études (qui en font un professeur de droit, spécialiste du droit international mais aussi du droit de la culture) et la direction du Festival de théâtre étudiant de Nancy, qu’il créa en 1963 (et dont il fit dans les années 1960-1970 l’une des principales manifestations théâtrales de France), le jeune nancéien s’éloigna pendant quelques années du militantisme politique actif.

Lang renoua avec celui-ci dans le sillage de François Mitterrand, qu’il soutint lors de la campagne présidentielle de 1974 et qui le soutint la même année lorsque Jack Lang fut évincé du théâtre national de Chaillot par Michel Guy, ministre de la Culture de Valéry Giscard d’Estaing. En 1977, Jack Lang fut élu conseiller de Paris, sur une liste conduite par un ami personnel de François Mitterrand, Georges Dayan. Un an plus tard, il devint conseiller personnel de François Mitterrand pour les questions culturelles et chargé d’organiser la campagne des européennes, à laquelle il donna un tour résolument festif et international ; définitivement adoubé par le leader socialiste, il fut nommé en 1979 délégué national à l’action culturelle, remplaçant l’ancien secrétaire national à l’action culturelle, Dominique Taddéi. Lorsque François Mitterrand fut élu président de la République en mai 1981, il fit de Jack Lang, qui avait alors trente-huit ans, son ministre de la Culture. Il le resta dix ans, en deux fois, égalant le temps passé par André Malraux à la tête du ministère des Affaires culturelles et faisant preuve d’un soutien indéfectible –dont les excès furent parfois raillés – pour celui qui resta à ce jour le seul président socialiste de la Ve République. La comparaison entre Jack Lang et André Malraux et entre les couples De Gaulle-Malraux / Mitterrand-Lang a souvent été faite ; si Jack Lang n’avait pas l’aura ni la stature intellectuelle d’André Malraux, il manifesta une imagination institutionnelle et une capacité à agir – surtout durant le premier septennat de François Mitterrand – qui valaient bien celles de son auguste prédécesseur. Sous sa conduite, la politique culturelle française fut réformée en profondeur.

Les années 1980 furent aussi celles d’un enracinement local et provincial : élu pour la première fois député du Loir-et-Cher en 1986, il conquit la mairie de Blois en 1989 et fut réélu en 1995. Entre-temps, il ajouta d’autres attributions à son titre de ministère de la Culture pendant le second septennat de François Mitterrand, étant officiellement chargé de la Communication, des Grands Travaux et de l’organisation du bicentenaire de la Révolution française mais aussi, entre 1992 et 1993, du ministère de l’Éducation nationale. Invalidé en 1993 pour dépassement des frais de campagne durant les élections législatives, il devint député européen en 1994 mais retrouva son siège de député national en 1997. Il dirigea la Commission des affaires étrangères entre 1997 et 2000, date à laquelle Lionel Jospin l’appela au gouvernement pour diriger, une seconde fois et jusqu’en 2002 le ministère de l’Éducation nationale, où il proposa notamment un ambitieux plan de développement des arts à l’école. Battu aux élections municipales à Blois en 2001, il quitta le Loir-et-Cher et fut élu député du Pas-de-Calais en 2002, réélu en 2007, après avoir présenté puis retiré sa candidature à l’élection présidentielle.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article137497, notice LANG Jack [LANG Jacques] par Laurent Martin, version mise en ligne le 8 juillet 2011, dernière modification le 6 septembre 2011.

Par Laurent Martin

ŒUVRE : L’État et le théâtre, 1968, LGDJ bibliothèque de droit public. — Le plateau continental de la mer du Nord : Arrêt de la Cour Internationale de Justice, février 1969 LGDJ bibliothèque de droit international. — Éclats (avec Jean-Denis Bredin), Éditions Jean-Claude Simoën, 1978. — Demain, les femmes, Grasset, août 1995. — Lettre à André Malraux, Éditions n° 1, novembre 1996. — François Ier, Perrin, octobre 1997. — Les araignées, Pocket, 2000. — La politique, d’où ça vient ? L’origine de l’État, Les fondements de la République, La genèse de l’impôt (avec Odon Vallet et Gaëtan de Séguin des Hons), Flammarion, 2000. — Qu’apprend-on au collège ? Pour comprendre ce que nos enfants apprennent (avec Claire Bretécher), XO éditions, 2002. — Anna au muséum, Hachette Jeunesse, 2002. — Laurent le Magnifique, Perrin, 2002 (ISBN 978-2-262-01608-1). — Une école élitaire pour tous, Gallimard, 2003. — Un nouveau régime politique pour la France, Odile Jacob, 2004. — Nelson Mandela : Leçon de vie pour l’avenir, Perrin, 2005 – (ISBN 978-2-262-02194-8). — Changer livre programme pour 2007, Plon, 2005. — Immigration positive, Jack Lang et Herve Le Bras, Odile Jacob, 2006. — Faire la révolution fiscale, Plon, 2006. — Demain comme hier, avec Jean-Michel Helvig, Fayard, 2009. — La bataille du Grand Louvre, Éditions Réunions des Musées Nationaux, 2010. — Ce que je sais de François Mitterrand, Le Seuil, 2011. — François Mitterrand, fragments de vie partagée, Le Seuil, 2011.

SOURCES : Presse. — Jean-Pierre Colin, L’Acteur et le Roi, Georg, 1994. — Jean-Pierre Colin, Le Mystère Lang, Georg, 2000. — Nicolas Charbonneau, Laurent Guimier, Docteur Jack et Mister Lang, Le Cherche midi, 2004. — Marie Delarue, Les Aventures de Lang de Blois, enquêtes, Jacques Granger, 1995. — Marie-Ange Rauch, Le théâtre en France en 1968, histoire d’une crise, thèse, Nanterre, 1995, 475 p. Voir chapitre 2 : « les étudiants le théâtre et le Festival de Nancy », p. 135-143. — Laurent Martin, Le prix unique du livre 1981-2006. La loi Lang, coordonné par Laurent Martin, Comité d’histoire du ministère de la Culture et des institutions culturelles, IMEC, collection L’édition contemporaine, 2006, 197 p. — Laurent Martin, « Oui, le livre a un prix », L’Histoire, no 216, janvier 2007. — Philippe Poirrier, L’État et la culture en France au XXe siècle, Le Livre de Poche, 2006. — Michel Schneider, La Comédie de la Culture, Seuil, 1993.

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