Par Jacques Droz
Né le 8 mars 1869 à Göttingen, mort en décembre 1962 à Berlin ; parlementaire et ministre social-démocrate.
Employé à la construction de machines et tourneur à Kiel, Rudolf Wissell était le fils d’un pilote qui était entré en 1888 dans le SPD. Il fit une carrière syndicale rapide dans la Confédération des métallurgistes (DMV), fut nommé de 1901 à 1908 secrétaire des syndicats de Lübeck et de 1908 à 1918, il assura à Berlin le secrétariat général (Zentralarbeitersekretariat) des syndicats libres. Persuadé de la nécessité pour la classe ouvrière de participer à une guerre victorieuse, il exposa au congrès du SPD à Wurzbourg (1917) les revendications des sociaux-démocrates majoritaires sur le plan social : journée de huit heures, amélioration des assurances-maladie, aide financière aux chômeurs, création d’un ministère du Travail pour le Reich, organisation paritaire des Offices du travail. Élu au Reichstag en mai 1918 et ayant pris à la fin de la guerre la présidence de la Commission générale des syndicats allemands, il participa aux négociations du 15 novembre 1918 entre le patronat et les organisations ouvrières prévoyant la création d’une Communauté de travail (Arbeitsgemeinschaft), la réalisation de la liberté syndicale, la signature de conventions collectives, la mise en route de la journée de huit heures. Après le départ des membres de l’USPD du Conseil des commissaires du peuple, il y fut appelé comme spécialiste des questions économiques. Élu à l’Assemblée nationale et réélu au Reichstag en 1919, il fut de février à juillet ministre de l’Économie dans le cabinet Scheidemann et présenta un programme élaboré par le secrétaire d’État Richard von Mœllendorf, qui prévoyait la planification de l’économie et son contrôle par l’État, mais qui ne fut pas soutenu par ses collègues et abandonné par son successeur. Rappelé par l’ADGB, il fut désigné comme secrétaire de son Comité directeur et lors de son congrès de juin 1922, il intervint une nouvelle fois en faveur de l’Arbeitsgemeinschaft. Ayant en 1923 abandonné ses fonctions officielles au sein de l’ADGB, il se contenta pendant plusieurs années de jouer le rôle de conciliateur (Schlichter) dans les conflits sociaux de la région de Berlin. Mais en 1928, il fut rappelé par Hermann Müller comme ministre du Travail dans le cabinet d’Empire : quand par suite de l’aggravation de la crise, il fut question de diminuer les allocations de chômage, il prit position en faveur des syndicats, considérant que toute concession aux exigences du patronat signifierait la destruction de l’organisation syndicale toute entière et la défaite irrémédiable du monde ouvrier. Disposant d’une grande autorité parmi ses collègues, il fut suivi par la majorité de la fraction social-démocrate au Reichstag (mars 1930). Sa position intransigeante fut donc la cause de la chute du cabinet de grande coalition, qui annonça le déclin de la République.
Wissell traversa presque sans encombre la période hitlérienne. Après la guerre, il reprit place dans les commissions économiques social-démocrates de Berlin-Ouest, sans pouvoir surmonter la méfiance que professait Schumacher à l’égard des responsables de la catastrophe de 1933.
Par Jacques Droz
ŒUVRE : Praktische Wirtschaftspolitik, 1919. — Kritik und Aufbau, 1921. — Des alten Handwerks Rechtund Gewohnheit, 2 vol., 1929. — Der soziale Gedanke im alten Handwerk, 1930. — Zur Gestaltung der Sozialversicherung, 1947. — Alus meinen Lebensjahren, éd, par E. Schraepler, 1983.
SOURCES : A. Duennebacke et alii., Rudolf Wissell. Ein Leben für soziale Gerechtigkeit, Berlin, 1959. — W. Conze, H. Raupach (éd.), Die Staats- und Wirtschaftskrise des deutschen Reiches 1929-1933, Stuttgart, 1967. — Lexikon, op. cit. — Benz et Graml, op. cit.