IZZO Jean-Claude

Par Gérard Leidet

Né le 20 juin 1945 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 26 janvier 2000 ; libraire, bibliothécaire, journaliste et écrivain (romancier, poète, nouvelliste) ; militant du PSU (1967-1968) puis du PCF (1968-1978) ; membre fondateur du COBIAC en 1979 (Collectif de Bibliothécaires et d’Intervenants en Action Culturelle) ; rédacteur en chef de La vie mutualiste (1982-1986) puis de Viva (1987).

J. C. Izzo en 1971, lors d’une séance de signatures à la librairie Paul Eluard (Marseille), à l’occasion de la parution d’un numéro de la revue Europe consacré à la Commune.

Les parents de Jean-Claude Izzo étaient des immigrés, italien d’une part, et d’origine espagnole, d’autre part. Son père, Gennaro Izzo dit "Ciccio", était né en 1916 à Torello, un village des environs de Castel San Giorgio (commune italienne de la province de Salerne dans la région Campanie en Italie). Arrivé « Enfant migrant sans les parents. » à Marseille en 1929, il fut rebaptisé François. Après avoir exercé des "petits boulots" sur le port, il devint barman à l’Amicale ajaccienne, place de Lenche (située à proximité du Vieux-Port, derrière l’Hôtel de ville). Sa mère, Isabelle Navarro (dite Babette), dont les parents étaient venus du sud de l’Espagne, était née à Marseille - elle sera naturalisée à l’âge de 16 ans. La famille résidait au Panier - quartier populaire de Marseille situé dans le 2e arrondissement. Fille d’un docker mort sur un quai du Vieux Port, elle exerçait le métier de couturière première main, rue de Rome. Leur mariage eut lieu au Panier en 1941, quatre ans avant la naissance de leur fils. Entre le 22 et le 24 janvier 1943, une partie du quartier fut rasée par la police allemande aidée par la police française. 30 000 habitants du Panier furent expulsés en direction du camp de Fréjus. Puis 13 000 d’entre eux furent envoyés dans des camps de concentration en Allemagne. Les autres furent libérés, dont les parents de Jean Claude Izzo. Leur logement détruit, après deux ans d’errance, ils s’installèrent alors au boulevard Boisson (4e arrondissement) où Jean-Claude Izzo naquit. Socialistes non encartés à la SFIO, ils participèrent, après la guerre, aux campagnes municipales de Gaston Defferre.

Jean-Claude Izzo passa plus de vingt ans dans ce 4ème arrondissement de Marseille, et différents quartiers de Marseille, « à l’ombre d’un père absent mais aimé » (Nadia Dhoukar). Très bon élève de l’école primaire du boulevard Boisson, puis au Collège Thiers, il fut, comme beaucoup d’enfants issus des classes populaires, orienté dans une filière du lycée technique des Remparts, boulevard de la Corderie. Il y obtint un CAP de fraiseur tourneur. Entre temps, son professeur de français lui avait confié la direction de la rédaction du Canard Technique, journal scolaire ronéotypé qui évoquait la réalité sociale et culturelle de ce début des années 1960. Il vécut alors une adolescence faite de "silences, de réflexions, et de poésie" (S. Nardini).

Commençait alors pour Jean-Claude Izzo une longue période faite d’engagements spirituels et sociaux dont le premier acte concret résida dans son adhésion à Pax Christi - mouvement catholique dont les finalités reposaient sur cinq axes essentiels : dialogue et éducation à la paix, désarmement, défense de la création et de l’environnement, droits de l’Homme, et développement. Il fut amené au mouvement par l’aumônier du collège et par son professeur de français. C’est là, lors de campements pacifistes, qu’il rencontra Marie-Hélène Bastianelli* qui allait devenir sa première compagne et épouse. Cependant sa passion déjà là pour la littérature, notamment la poésie et la philosophie, mais aussi pour l’écriture (enfant il écrivait déjà des poèmes sur des bouts de papier autour des thèmes de l’amour et de la liberté) expliquait son rêve de devenir journaliste. Il tenta alors en 1963 une démarche auprès du Provençal - le quotidien représentait un soutien politique fidèle et solide envers son propriétaire Gaston Defferre - qui n’aboutit pas ; il opta alors pour un emploi de libraire à la librairie Clairière, installée rue Grignan.
Après avoir hésité entre l’objection de conscience et un engagement pacifiste dans l’armée, Jean-Claude Izzo opta pour le service militaire. À la suite d’ un court séjour à Carpiagne (camp militaire de l’Armée de terre française situé à l’est de Marseille, en bordure du Parc national des Calanques), du fait de son engagement pacifiste - notamment pour le statut d’objecteur de conscience - il fut affecté dans un bataillon disciplinaire à Djibouti. Suite à des actes de maltraitance sur des jeunes appelés, il effectua une grève de la faim d’un mois. Il y fit l’expérience d’un quotidien dur et douloureux. Il rentra à Marseille en 1966, au moment où la section marseillaise de Pax Christi entrait en conflit avec l’Église qui ne tolérait plus la "ligne" du mouvement. Il adhéra alors au Mouvement de la Paix.

En 1967, bien qu’il ait rencontré de nombreux militants communistes à l’intérieur du Mouvement de la paix, Jean-Claude Izzo adhéra au PSU (Parti socialiste unifié) dont le siège se trouvait rue des bergers (6e arrondissement). Il ne semble pas qu’il ait été candidat (en juin 1968) du parti autogestionnaire aux élections législatives dans la deuxième circonscription (comprenant les 5e et 10e arrondissements de Marseille où se présentait par ailleurs Georges Lazzarino, le secrétaire de la Fédération du PCF). Il fut par contre très déçu par le score, bien faible au demeurant, pour le PSU - 2,16 % des suffrages contre 18,30% pour le candidat du PCF et 19,83 % pour Emile Loo, candidat de "L’Union des socialistes, républicains et démocrates" (FGDS). En effet, la généralisation des candidatures, notamment dans les départements très urbanisés comme dans les Bouches-du-Rhône, n’eut pas l’effet escompté : le PSU présent dans les 11 circonscriptions, ne put obtenir un score supérieur à 3,3 % des voix. Par ailleurs, sans projet de parcours militant précis (comme permanent ou dirigeant), il semble que Jean-Claude Izzo ait vécu cette expérience au sein du PSU comme une "simple participation", une attitude qui correspondait assez bien à la culture militante des nouveaux arrivants, pour qui la priorité politique n’était pas la conquête des mandats, des positions politiques. Il demeura ainsi deux années au PSU.

Jean-Claude Izzo se rapprocha désormais du Parti communiste français qui allait désapprouver (avec modération et sans en tirer toutes les conclusions) l’intervention soviétique à Prague. C’est après cette condamnation de l’acte militaire et politique de l’URSS par le PCF, en août 1968, que Jean-Claude Izzo adhéra au Parti communiste à la cellule Gabriel Péri du 8e arrondissement - y côtoyant notamment Micheline Abours*, alors étudiante en sciences physiques, Lucien Ailloud, ancien conseiller municipal et secrétaire de la cellule, et Jean-Jacques Brémond, instituteur et militant du SNI). Son adhésion intervenait dans une période où le Parti communiste avait effectué, selon lui et Marie-Hélène, un "choix courageux". Il suivit successivement les cours de l’École élémentaire du Parti en 1969, puis en 1970, ceux de l’École Fédérale à La Pounche (quartier de la commune d’Allauch) où il fit la connaissance de René Féniche*, militant communiste autodidacte (et formateur pour les écoles du Parti) très estimé par les militants communistes de la période. Devenu ensuite secrétaire adjoint de la section du 5e arrondissement de Marseille, plus tard membre de la section de Martigues, Jean-Claude Izzo devint un militant communiste fidèle et assidu, tout en demeurant "attaché à ses idéaux de liberté individuelle" (S. Nardini).

En mars 1969, Jean Claude Izzo épousa Marie-Hélène Bastianelli (le couple résidait rue Nau à Marseille). En ce même printemps 1969, après un entretien avec [Alain Fabre], responsable de La Marseillaise-Dimanche il commença sa collaboration au quotidien communiste La Marseillaise. Il signa ainsi ses premiers articles chaque dimanche dans le supplément hebdomadaire du journal tout en poursuivant son métier de libraire. Journaliste bénévole puis pigiste de 1970 à 1972, poète à ses heures, il conservait la volonté de devenir écrivain. En témoigne déjà l’écriture d’une première pièce consacrée à Angela Davis et son premier recueil de poèmes qu’il écrivit en 1971. La documentation qu’il rassembla sur les questions de racisme, les mouvements de libération, les descriptions des prisons, etc. , très abondante était adossée à un style déjà là : " Si à Marseille la mer était aux pauvres, en Amérique, la prison est aujourd’hui encore l’institution de contrôle sur les pauvres...". 1871, ce fut aussi l’année du centenaire de la Commune de Paris et... de Marseille. Jean-Claude Izzo s’inspira des événements marseillais pour écrire un article sur Clovis Hugues pour la revue Europe, et une Esquisse pour une histoire de la Commune de Marseille publiée en feuilleton dans La Marseillaise (rééditée plus tard, en mars 1977, dans La Commune – "Revue d’histoire de l’association des Amis de la Commune de Paris" 1871) ; il y exprimait de nombreuses réserves concernant l’ouvrage d’ Antoine Olivesi paru en 1950 (La Commune de 1871 à Marseille et ses origines, Ed. Rivière et Cie), se référant alors à la critique de ce livre par Jean Dautry dans la revue Europe ; et se situant nettement dans la lignée du chapitre de Jean Bouvier sur les "Communes de province" présent dans l’ouvrage collectif La Commune de 1871 dirigé par Jean Bruhat, Jean Dautry et Émile Tersen (Éditions sociales, 1960). Entre temps, en octobre 1970, le couple s’était installé à Saint-Mitre-les-Remparts, village proche de Martigues. La nécessité d’un emploi plus stable et surtout plus proche de son lieu d’habitation motiva son envie de travailler à la bibliothèque du CE de la compagnie pétrolière BP. Cependant, un an plus tard, en 1972, La Marseillaise l’engagea définitivement comme journaliste professionnel. Georges Righetti (Ancien directeur adjoint de La Marseillaise entre 1958 et 1961) ayant reçu l’apprenti journaliste, lui révéla au cours de leur entretien privé que lui aussi était venu au Parti communiste après un parcours emprunté dans les rangs du christianisme social.

Entre 1968 et 1975, les décisions conjointes du gouvernement et de l’action de la chambre de commerce de Marseille aboutirent à la création d’une zone industrialo-portuaire. Jean Claude Izzo participa activement aux luttes d’opposition contre ce projet jugé dangereux pour cette zone naturelle et pour le « Volèm viure al pais » ("Nous voulons vivre au pays"). En journaliste et en militant actif il couvrit pour La Marseillaise le « grand scandale de Fos-sur-Mer », symbole aussi pour la rédaction d’un « désastre social et environnemental organisé au nom du profit ». En effet près de 25 000 ouvriers, surtout immigrés (Maghrébins, Turcs, Yougoslaves et Lorrains, victimes de la destruction de la sidérurgie…) travaillèrent sur le site sans discontinuer tout au long de longues journées harassantes. Avec son camarade et ami Jacques Roger - rédacteur en chef du journal, et compagnon de batailles sociales âpres mais aussi culturelles - il mena durant quatre années des enquêtes quotidiennes, lançant une campagne de presse qui dénonçait des issues tragiques souvent tues par ailleurs : celles des nombreuses morts d’ouvriers qu’on devait déplorer chaque semaine sur les chantiers. Ces années « fosséennes » furent pour lui des années de formation. En plus de ses enquêtes quotidiennes sur le monde du travail, il put approfondir sa connaissance d’un espace marseillais élargi prenant en compte le monde méditerranéen - des aspects que l’on allait retrouver un peu plus tard dans son œuvre romanesque et poétique. En 1974, il devint ainsi rédacteur en chef adjoint en charge des pages culturelles de La Marseillaise, et trouva ici d’autres chemins d’expression qui rejoignaient ses désirs d’écriture et de création. Il travailla avec ferveur au sein d’une équipe rédactionnelle marquée par la présence mêlée de militants issus de la Résistance et de nouvelles figures marquantes : André Remacle (pour la rubrique littéraire), Gabriel Vialle (pour la critique musicale), Jacques Corot*, Paul Teisseire, Jean-Noël Tassez*, etc.

En 1975, Jean-Claude Izzo prolongea ses recherches sur la Commune de Marseille en publiant un ouvrage Clovis Hugues, un Rouge du Midi (voir « œuvre »). S’identifia-t-il à ce personnage qui (comme lui ?) avait voulu raccorder création poétique et programme politique ? Toujours est-il que le livre, dédié à sa compagne Marie-Hélène Bastianelli, mettait en scène avec Clovis Hugues poète, journaliste et (futur) député socialiste, celui qui essayait d’atteindre le bonheur à travers un message d’espérance sociale.

Vers la fin de 1978 Jean-Claude Izzo quittait le parti communiste. À la différence de plusieurs intellectuels communistes de la décennie, il le fit de façon silencieuse et mélancolique : « Il ne le fit pas en criant ou en polémiquant, mais à sa manière, en homme cultivé et raffiné » (Jacques Roger). Plusieurs positions du PCF l’éloignèrent peu à peu de sa « foi communiste », notamment une résolution plutôt ambiguë du Comité central sur l’immigration qui froissa son inclinaison internationaliste, et dût heurter l’ancien militant de Pax Christi. Après la rupture du programme commun de gouvernement (septembre 1977) vis-à-vis duquel, vu de Marseille (avec les rapports conflictuels très anciens entre Gaston Defferre et le Parti communiste) il fut pourtant toujours assez défiant, Izzo cachait difficilement son déchirement interne devant une Union de la gauche, désormais chaotique, qui ne pourrait prolonger les promesses du mouvement ouvrier. En fait, il acceptait de moins en moins les logiques bureaucratiques du Parti - trop centré selon lui sur les décisions prises par les directions, et sur une volonté collective militante qui, majoritairement, continuait de croire en une « supériorité organique et culturelle ». Il évoquait ce faisant un « processus de normalisation » qui laissait de moins en moins de place aux idéaux. Il discuta alors longuement avec Jacques Roger, militant communiste fidèle - Izzo conserva toujours une certaine tendresse à l’égard des militants sincères et dévoués. Pour lui, le Parti communiste était hiérarchisé, incapable désormais d’inventer des mouvements : « Tout était décidé à Paris. Il fallait occuper les institutions clés de l’État et il n’y avait pas le temps pour faire la révolution ». Les deux amis convinrent de l’issue suivante : Izzo ne quitterait pas le Parti, comme tant d’autres, en rendant sa carte et en envoyant une lettre de démission, mais en choisissant une forme plus singulière : le détour par l’écriture de la biographie de leur cher Clovis Hugues – Clovis Hugues, un rouge du Midi. La Commune de Marseille avait constitué le contexte idéal qui exprimait le mieux sa pensée sociale.

En 1979, Jean-Claude Izzo se trouvait à un tournant important de sa vie. Après avoir quitté le Parti, s’être séparé de sa femme, Milène, il démissionna de La Marseillaise pour se consacrer désormais à l’écriture, et vivre au quotidien de « petits boulots ». Cependant, les activités qu’il allait mener se situaient toujours dans un registre social. Ainsi l’expérience qui le mena à Port-de-Bouc pour un travail collectif de recueil de la Mémoire Ouvrière du chantier naval de Port-de-Bouc. Avec Jo Ros (alors Éducateur à la Protection Judiciaire de la Jeunesse, puis écrivain) il codirigea un projet (« aventure psycho-culturelle » selon des termes bien en vogue dans ces années-là) consigné dans un journal quotidien (ronéoté et distribué de façon militante) Les cahiers de la mémoire. Jean-Claude Izzo expérimenta ici un style d’écriture bien singulier qui se (le) distinguait nettement de la presse traditionnelle- notamment Le Provençal et même La Marseillaise. Dans ce cadre collectif et libre qui affirmait fièrement « La culture c’est nous ! », il fédéra un ensemble de témoignages patrimoniaux fait de souvenirs et de mémoires multiples. Il se sentait très proche en fait de ces populations arabes, italiennes, espagnoles, gitanes, sardes … ce mélange, pas inaccoutumé pour lui le marseillais du Panier, qui révélait « la vie d’un lieu où leurs pères avaient posé pour toujours leur valises ». À l’initiative de la librairie Paul Éluard, animée par une militante communiste, Marie-Rose Tassy*, il prolongea cette expérience culturelle à Marseille pour participer à la fondation du COBIAC (Collectif de Bibliothécaires et d’Intervenants en Action Culturelle).

En décembre 1980, il commença sa collaboration comme journaliste indépendant (pigiste en fait) à La vie mutualiste, journal de la mutualité ouvrière fondée à Marseille par Lucien Molino, militant communiste et syndicaliste, dirigeant de la CGT et de l’Union départementale mutualiste des travailleurs (UDMT) des Bouches-du-Rhône, l’un des acteurs, à la libération, du renouveau du mutualisme de sensibilité communiste. En ce début des années 1980, les radios libres commençaient à essaimer, Jean-Claude Izzo devint rédacteur en chef de la radio Forum 92 tout en poursuivant son activité de journaliste à La Vie mutualiste où il fut rapidement promu au poste de rédacteur (1982-1987). À la fin de cette période, en 1986-1987, le journal La Vie Mutualiste se transforma pour devenir un magazine, Viva, nouvelle formule de la revue dont il devint le rédacteur en chef. Puis il s’installa quelque temps à Paris pour diriger Viva avant de quitter le magazine le 31 juillet 1987.
En 1989, sa situation personnelle, professionnelle était redevenue quelque peu précaire. Il fut embauché un temps (de janvier à juin) par la municipalité de Septèmes-les-Vallons afin de monter un spectacle interactif avec les élèves de Cours moyen de la commune dans le cadre du bicentenaire de 1789 : « La révolution renaît à Septèmes ».

Sa rupture avec le PCF et avec le journal La Marseillaise n’avaient nullement signifié la fin de ses idéaux politiques et sociaux, ni accompagné le fait qu’il aurait renoncé doucement à ses idées révolutionnaires : Izzo demeurait un homme de gauche. Il participa à l’organisation des Salons du livre antifasciste à Gardanne, notamment celui qui se tint du 15 au 23 novembre 1997 et qui eut un succès considérable (selon Jean Tabet coordinateur du salon, plus de 58 000 personnes franchirent en huit jours les portes de la manifestation). Il avait écrit un an auparavant dans Chourmo : " La seule chose que je ne pouvais tolérer, c’était le racisme. J’ai vécu mon enfance dans cette souffrance de mon père. De ne pas avoir été considéré comme un être humain, mais comme un chien...". Le travail militant pour l’espérance sociale, il allait le poursuivre, le prolonger – certes de façon distanciée comme l’accomplissent les artistes et les écrivains – dans ce qui fut toujours pour lui l’essentiel, l’écriture. En 1995, encouragé par Michel Le Bris et Patrick Raynal il publia dans la « Série Noire » de Gallimard Total Khéops qui remporta très vite un immense succès populaire (le record des ventes de la collection fut pulvérisé) et plusieurs prix (le Prix des lycéens de Marseille, le Trophée 813). La reconnaissance de son travail d’écrivain était enfin au rendez-vous et ne fut jamais démentie par la suite - le succès prolongé de sa trilogie avec Chourmo (1996) et Soléa (1997), puis de ses écrits ultimes jusqu’à sa mort précoce à l’âge de 54 ans en témoignèrent. Du militant (entre christianisme social et communisme) au romancier, il s’agissait toujours d’être « irrémédiablement du côté des pauvres, des oubliés, des démunis… J’ai toujours regardé les gens, les chômeurs, ceux qui n’avaient rien, les maux de Marseille… ». A la fin des années 1970, Jean-Claude Izzo, militant communiste en partance, avait déjà jugé (de façon prémonitoire ?) que le rêve de 1945 était mort, comme celui de 1968 : « Il fallait inventer une nouvelle révolution, parce qu’on nous claquait la porte au nez ; la porte au nez de nos rêves… »

Jean-Claude Izzo avait épousé Marie-Hélène Bastianelli, bibliothécaire, militante communiste et syndicaliste de la CGT (UGICT), à Marseille en mars 1969 ; le couple eut un enfant, Sébastien né le 24 novembre 1972. Il eut ensuite trois compagnes, Emmanuelle Brunswig, comédienne, Béatrice Gicquel, son assistante à Viva, et Laurence Rio, responsable culturelle avec laquelle il revint s’installer à Ceyreste (commune des Bouches-du-Rhône à la limite du département du Var), avant d’épouser en février 1999, Catherine Bouretz, bibliothécaire et photographe.
Hospitalisé à l’Hôpital Sainte-Marguerite de Marseille, Jean-Claude Izzo mourut à Marseille le 26 janvier 2000.
Une place et un collège de Marseille (Place d’Espercieux), situés dans le 2ème arrondissement de Marseille, portent le nom de Jean-Claude Izzo ; ainsi que la médiathèque de Châteauneuf-les-Martigues (Bouches-du-Rhône) et une salle communale à Frontignan (Hérault).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article249830, notice IZZO Jean-Claude par Gérard Leidet, version mise en ligne le 26 juillet 2022, dernière modification le 13 septembre 2022.

Par Gérard Leidet

J. C. Izzo en 1971, lors d’une séance de signatures à la librairie Paul Eluard (Marseille), à l’occasion de la parution d’un numéro de la revue Europe consacré à la Commune.
Jean-Claude Izzo, au temps de Pax Christi
J.-C. Izzo, journaliste de radio, ici à Forum 92

ŒUVRE : Poèmes à haute voix, P.J. Oswald, 1970. – Terres de feu , P.J. Oswald, 1972. – État de veille , P.J. Oswald, 1974. – Braises, brasiers, brûlures (poèmes illustrés par E. Damofli), 1975. – Paysage de femme, Guy Chambelland, 1975. – Le réel au plus vif, Guy Chambelland, 1976. – Clovis Hughes, un rouge du Midi, J. Laffitte, 1978 (réédition 2001, Foglio). – Total Khéops, Gallimard, Série Noire, 1995, (réédition 2001, Folio). – Chourmo Gallimard, Série Noire, 1996 (réédition 2001, Folio). — Loin de tous rivages, Ed. du Ricochet, 1997, (réédition 2000 Ed Librio). — Les marins perdus, Flammarion, 1997, (réédition 1998, Ed. J’ai lu). – Vivre fatigue, Librio, 1998. – Solea, Gallimard, "Série Noire", 1998 (réédition 2001 Folio. – L’Aride des jours (Ed. du Ricochet), 1999, (réédition 2000 Ed Librio) 1999. – Le soleil des mourants, Flammarion, 1999 (réédition 2000 Ed. J’ai lu). – Un temps immobile, Filigrane Éditions, 1999. – Marseille, Hoëbeke, 2000
Participation à des ouvrages collectifs : Revue Europe, " La Commune de Paris", 1970. – Revue Europe, "Stendhal", 1972. – Revue Europe, "Gloire à Molière", 1972. – Méditerranées, Librio, 1998. – La Méditerranée française, Maisonneuve et Larose, 2000. – Je t’écris de mémoires (Jo Ros), suivi de Du bon usage de la réalité (Jean-Claude Izzo), Le temps des cerises, 2000. – Marseille, le guide Autrement, Édition « Autrement », 2000.
Pièces de théâtre : – Libérez Angela Davis, 1971. – Allô Paris, 1978. – La Commune de Marseille, (coécrit avec Claude Alranq, Lo théâtre de la Carriera), 1980. – La révolution revit à Septèmes, 1989.
- Scénario de Film : Une mort olympique, co écrit avec Andreu Martin, réalisé par Manuel Esteban, téléfilm sur Manuel Vasquez Montalban, 1984. – La mort couleur d’automne, réalisation par Alain Leblanc, téléfilm sur Robin Cook, 1984. – Les matins chagrins, réalisé par Jean Pierre Gallepe produit par matin film, 1987. –
Non réalisé : Lou Andrea Salomé. – Blokhaus.
Paroles de chansons : – Enfin seul, Jean-Guy Coulange, paroles de la chanson « Nighthawks », 1992. –– Valse d’un jour, Gian Maria Testa, paroles de la chanson « Plage du prophète », 2000.

SOURCES : Archives du quotidien La Marseillaise. – Stefania Nardini, Jean-Claude Izzo, histoire d’un marseillais, Éditions des Fédérés, 2019. – Jean-Marc Matalon, Jean-Claude Izzo, Les vies multiples du créateur de Fabio Montale, Éditions du Rocher, 2020. – Réponse au questionnaire et témoignage de Marie-Hélène Bastianelli. – Rencontre avec l’écrivain à Septèmes-les-Vallons (mars 1998). – Témoignages de Patrick Magro et Jacques Roger. – Notes de Micheline Abours. – Libération, Article de Hervé Vaudoit : "Succès du Salon du livre antifasciste de Gardanne", 25 novembre 1997.

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