TRÉLAT Ulysse

Né le 13 novembre 1795 à Montargis (Loiret), mort le 29 janvier 1879 à Menton (Alpes-Maritimes). Médecin. Républicain. Membre de diverses sociétés secrètes ou républicaines. Représentant du Puy-de-Dôme en 1848.

Coll. Musée d’histoire vivante.
Communiqué par Véronique Fau-Vincenti

Fils d’un notaire. Étudiant en médecine à Paris en 1813, Trélat fut incorporé comme aide-chirurgien militaire, et c’est en cette qualité qu’il fit toute la campagne de France en 1814. Pendant les Cent-Jours, il fut combattant volontaire pour une éventuelle défense de Paris. Il reprit ses études après la défaite et passa le concours d’interne à ce que nous appellerions aujourd’hui l’hôpital psychiatrique de Charenton. Lorsqu’il soutint son doctorat, en 1821, il était tenu parmi les étudiants pour un libéral très prononcé. Homme de devoir et de charité, sa profession le mettait en contact avec les prolétaires. C’est le spectacle de la misère qui le fit devenir républicain : « Savez-vous qu’au temps actuel, une portion de la société n’est en lutte avec l’autre que parce qu’elle a faim ? » Membre des « Amis de la Vérité » et l’un des trente premiers adhérents de la Charbonnerie où, ami de Lafayette, il siégea dans la Haute Vente, puis membre de la société de « secours aux détenus politiques », il fut l’un des fondateurs de la société libérale « Aide-toi, le Ciel t’aidera », chacune de ces sociétés étant issue de la précédente, il participa très activement, à la fin de 1827, à l’agitation électorale contre Villèle, puis en 1829 contre Polignac. Il fit partie de la Commune centrale qui coiffait les "municipalités" occultes organisées dans les arrondissements de Paris par les chefs républicains et dont il était l’un des plus anciens animateurs (Voir Ch. Teste*).
Trélat était sur les barricades de juillet 1830 et fut parmi les « décorés de juillet ». Il prit une part active à la réunion Lointier, créatrice de la Société des Amis du Peuple, et fut parmi les délégués auprès de Lafayette et de la commission municipale le 30 juillet 1830. Républicain proche de Godefroy Cavaignac*, il protesta, avec lui et d’autres, contre l’avènement de Louis-Philippe. Le 6 août, il était l’un des 37 républicains qui avaient signé une adresse à la Chambre lui déniant tout pouvoir constituant, transmise par une colonne de 3 000 jeunes gens. Il fut arrêté le 24 décembre pour participation aux manifestations du 22. Cofondateur puis président de la Société des Amis du Peuple, il fut à ce titre poursuivi pour complot, mais acquitté, au procès d’avril 1831 des Dix-Neuf républicains prévenus pour les événements de décembre 1830, qui fut pour lui comme pour les autres l’occasion d’une véritable profession de foi. Ainsi que nombre d’autres militants de l’opposition républicaine, qui avaient compris que les révolutions de Paris laissaient la province hostile ou indifférente dans sa masse, et qu’il fallait à tout prix, en vue des révolutions futures, passionner les provinciaux, Trélat partit, en 1831, pour une tournée de conférences à travers la France.
La même année, ou en 1832, il devint rédacteur principal et presque unique du Patriote du Puy-de-Dôme, l’un des organes bien faits et influents des républicains français, qui résista jusqu’aux lois de septembre 1835 sur la presse. Il dut faire face à de nombreux procès de presse, dès 1833. Entre temps, inculpé en décembre 1832 au procès du droit d’association de la SAP, il fut acquitté, comme chaque fois qu’il comparut devant un jury.
Au centre des discussions sur la défense des accusés d’avril devant la Cour des pairs, Trélat se chargea de répandre dans la presse la fameuse « lettre des défenseurs » en soutien aux accusés, rédigée par Michel de Bourges*. Devant l’attitude passive, sinon équivoque de l’ensemble des signataires, il en prit avec Michel de Bourges l’essentiel de la responsabilité et fut condamné le 4 juin 1835 par la Chambre des Pairs, à trois ans de prison et 11 000 F d’amende, ayant ainsi apostrophé ceux qui voulaient le juger : « Vous êtes mes ennemis politiques, vous n’êtes pas mes juges... Condamnez-moi, mais vous ne me jugerez pas, car vous ne pouvez me comprendre ». C’était la plus lourde peine du procès. Il fut incarcéré le 26 juin 1835 à Sainte—Pélagie où il s’était porté prisonnier le jour même, transféré le 13 août 1835 à Clairvaux (Aube), où, suite aux mauvais traitements, il tomba malade.
Amnistié en 1837, il redevint d’abord journaliste au National, dont il partagea la direction en chef avec Jules Bastide*, de juillet 1837 à mai 1837 tout en poursuivant sa carrière médicale. En 1840, il fut en effet nommé, au concours, médecin-adjoint à l’hospice de la Salpêtrière. Il exerça son métier avec conscience et dispensa généreusement les consultations gratuites parmi les pauvres du XIIe arrondissement ancien (actuels Ve et XIIIe arrondissements). Il écrivit des articles dans la Revue du progrès fondée par Louis Blanc* en 1839.
La révolution de Février fit de lui un Commissaire de la République dans le Puy-de-Dôme, de pair avec le journaliste Altaroche*, et commissaire régional pour plusieurs départements, dont la Haute-Vienne. A ce titre, il vint plusieurs fois à Limoges : il amena Pierre Leroux* à retirer sa candidature dans la Haute-Vienne aux élections du 23 avril 1848, il obtint la démission des membres du Comité révolutionnaire du 27 avril formé à Limoges et la nomination d’un nouveau commissaire départemental. Aussi fut-il élu député du département à l’Assemblée constituante, cinquième sur quinze. Ministre des Travaux publics du 12 mai au 18 juin 1848, date à laquelle il donna sa démission, il affronta le problème des ateliers nationaux. Ses atermoiements ne donnèrent aucune satisfaction à la droite qui voulait la dissolution immédiate. Il s’illustra surtout en faisant tenir secret le rapport concluant à la suppression, dont il avait confié la rédaction à une commission extraparlementaire d’ingénieurs de l’État et d’ingénieurs civils, en faisant communiquer aux ouvriers des ateliers nationaux par l’intermédiaire de leur directeur l’ingénieur Émile Thomas une espèce d’ultimatum, le 24 mai, prévoyant comme solutions l’engagement dans l’armée pour les jeunes et l’envoi sur des chantiers de travaux publics en province pour les moins jeunes, en faisant saisir dans des conditions arbitraires Émile Thomas et en l’expédiant, entre deux policiers, à Bordeaux sous couleur de mission technique. Au surplus, Trélat remplaça Émile Thomas par Lalanne, et il se montra moins pressé de liquider les ateliers nationaux ; il est vrai que le gouvernement, par crainte d’être débordé sur sa droite, recherchait alors des appuis populaires et retardait d’un commun accord la fin des ateliers nationaux.
Sa démission du 18 juin 1848, quatre jours avant le début de l’insurrection ouvrière parisienne, mit fin à l’activité politique de premier plan du Dr Trélat. Après la Commune, il fera une courte réapparition sur la scène comme conseiller municipal du quartier du Panthéon (1871-1874). Il avait été élu en juillet 1871 sur un programme républicain très anticommunaliste, et fort conservateur.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article38400, notice TRÉLAT Ulysse, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 16 septembre 2022.
Coll. Musée d’histoire vivante.
Communiqué par Véronique Fau-Vincenti

ŒUVRES : Comme médecin, le Dr Trélat a collaboré au Journal du Progrès des Sciences médicales, autour de 1826 et publié, outre sa thèse, en 1827, De la Constitution du corps des médecins et de l’enseignement médical. — Comme homme politique, Discours du président de la Société des Amis du Peuple, prononcé sur la tombe de Benjamin Constant, le 12 décembre 1830, Paris, Imprimerie de David, s.d, in-8°, 3 p. — Anniversaire des 27, 28, 29 juillet 1830., Paris, 1831, 15 p. — Notice biographique sur Buonarroti, Épinal, Thirion-Jouve, juin 1838, 16 p.

SOURCES : Arch. PPo., E a 75 (26). — Arch. Dép. Paris (Seine), registres d’écrou DY/8 8-1923) — Procès des Dix-Neuf citoyens accusés de complot tendant à remplacer le gouvernement royal par la république. Contient leur défense et celles de leurs avocats, Prévot, libraires éditeurs, 22, rue de Vaugirard, 1831. Introduction d’Achille Roche. — Procès du droit d’association soutenu et gagné en décembre 1832 par la Société des Amis du Peuple, Rouanet, Chaumerot, 1833. — Biographie des neuf cents députés à l’Assemblée nationale, Paris 1848. — Robert, Bourloton et Cougny, Dictionnaire des Parlementaires français. — Jean Dautry, 1848 et la IIe République, Paris, 1957. — J.-Cl. Caron, La société des Amis du Peuple (1830-1833), mémoire de maîtrise, sous la direction de Louis Girard, Paris IV, 1978. — L.-A. Blanqui, œuvres I. Des origines à la Révolution de 1848, textes présentés par D. Le Nuz, Nancy, Presses Universitaires, 1993. — Les Révolutions du XIXe siècle. (1830-1834) (catalogue), Paris, EDHIS, s. d. — Gazette des Tribunaux, 28 juin 1835, p. 841, 3e col. — Notes de Jean Risacher et Rémi Skoutelsky.

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