POTTIER Jules, Auguste

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 15 juillet 1880 à Villaines-sous-Lucé (Sarthe), mort le 7 mars 1945 à Buchenwald (Allemagne) ; tourneur sur métaux ; secrétaire général de l’Union départementale CGT de la Sarthe ; secrétaire administratif de la Fédération socialiste départementale ; résistant.

Fils de Noémie Pavard, légitimé par le mariage de sa mère avec un employé de la Compagnie des tramways à vapeur du Mans, Jules Pottier entra comme apprenti mécanicien chez un patron puis, dix ans plus tard, travailla en usine comme tourneur. Il fut membre de la commission exécutive (1906), puis secrétaire (1907-1909) de la Chambre syndicale CGT des ouvriers des constructions mécaniques de la Sarthe, avant d’être élu secrétaire du Syndicat des ouvriers métallurgistes de la Sarthe, à compter de sa création le 19 octobre 1909 et jusqu’en 1914. Il résidait 75 rue du Chemin de fer au Mans.
Il représenta la chambre syndicale au XIIIe congrès national des ouvriers métallurgistes à Paris en septembre 1907 et au congrès d’unité des Fédérations CGT des métallurgistes, des mouleurs et des mécaniciens à Paris, les 28-30 mai 1909.
En août 1914, il assurait le secrétariat du comité d’action, chargé d’une activité d’entraide et composé de cinq membres de l’Union départementale CGT plus cinq militants du groupe socialiste du Mans. L’Union avait été constituée en juillet 1908 par [Narcisse Richer_>84980] avec l’appui de vingt syndicats. Il n’en restait plus que dix (1 200 cotisants) en 1913 et trois en août 1914.
Jules Pottier tenta de reconstituer le mouvement syndical local pendant la guerre. En mars 1917, à la suite du départ de Richer, il prit la tête de l’Union départementale et de la Bourse du Travail. L’Union dut abandonner son immeuble du boulevard de la République, et trouva asile au local du groupe socialiste. Malgré ces difficultés, l’UD se renforça. Le congrès départemental du 30 septembre 1917 se réclamait de 3 311 cotisants organisés en quatorze syndicats, les plus actifs étant ceux des cheminots du Mans, des ouvriers de la Manufacture des tabacs, des métallurgistes, des typographes, des instituteurs.
Pottier était hostile au courant pacifiste représenté par le Comité de défense syndicaliste. Dans une lettre adressée le 13 mai 1918 à Raymond Péricat, il transmettait un ordre du jour voté par l’UD le 11 mai : « Il n’appartient à aucun groupement de se substituer à la CGT pour l’organisation des assises ouvrières » et il protestait « contre l’action entreprise par le CDS. », « œuvre de division ouvrière ». Forte de vingt-cinq syndicats et de 5 084 cotisants en 1918, l’Union choisit Pottier comme secrétaire permanent. Le congrès départemental du 19 septembre 1920, réuni en présence de trente syndicats sur quarante (huit mille cotisants), vota le rapport moral à l’unanimité. Pottier fut réélu secrétaire et, avec Bellœuvre, il représenta la Sarthe au congrès confédéral d’Orléans (27 septembre-2 octobre 1920).
L’année suivante, le secrétaire de l’Union départementale dut faire face à l’opposition des militants des Comités syndicalistes révolutionnaires. Il conserva le contrôle de l’Union mais dans les réunions publiques, les communistes et les minoritaires réussissaient à le mettre en difficulté. Ainsi le 23 avril 1921 au Mans, l’ordre du jour des CSR aurait obtenu une légère majorité. Découragé, Pottier démissionna en juillet 1921. Eugène Carré, majoritaire comme lui, devint secrétaire général. Pottier ne revint à l’Union départementale qu’après la scission de décembre 1921. Il accepta le secrétariat adjoint en 1922 puis démissionna en janvier 1923. Il restait un militant actif de la Fédération des Métaux. L’ancien dirigeant de l’UD siégeait au conseil de prud’hommes depuis 1912 environ et il en fut à plusieurs reprises vice-président ou président.
Pendant quelques années, Pottier donna priorité au militantisme politique. Il assura le secrétariat du groupe manceau en 1922 et le secrétariat administratif fédéral jusqu’en mai 1924. Conseiller municipal depuis les élections de novembre 1919, il démissionna avec les autres socialistes en 1923 mais fut réélu en février 1924. Pottier quitta Le Mans au cours de l’année 1924 pour s’installer à son compte à Yvré-l’Évêque (Sarthe). Bien que nouveau venu et à peine connu, il obtint en mai 1925 la confiance des électeurs qui l’envoyèrent siéger au conseil municipal. La Fédération socialiste le présenta aux élections législatives partielles du 27 février 1927 où il obtint 9 852 voix sur 108 149 inscrits, puis à celles du 22 au 29 avril 1928 dans la 1re circonscription du Mans. Il recueillit 1 833 voix sur 26 149 inscrits et se désista en faveur du socialiste indépendant [Henri Lefeuvre6>107793].
Pottier revint à l’action syndicale en 1931. À partir de cette date, il fut constamment secrétaire général permanent de l’UD et dirigea avec détermination les grèves et les occupations d’usines en juin 1936.
Jules Pottier avait été pendant de nombreuses années président de la section mancelle de la Libre pensée.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Jules Pottier fut arrêté en juin 1941 pour « activités communistes », l’intervention du préfet affirmant qu’il n’était pas communiste lui permis d’être relâché. En 1942, les manifestations contre la politique de la « Relève » se multiplièrent, aussi à partir du 4 novembre 1942, Jules Pottier ne vint plus siéger à la commission chargée d’envoyer des travailleurs en Allemagne. ll assura la responsabilité de délégué confédéral pour la région Nord-Ouest de la CGT clandestine. Il reconstitua secrètement l’Union départementale de la Sarthe. En organisant l’aide aux ouvriers désireux d’échapper aux STO, il agissait au sein du Comité d’Aide contre la Déportation des Ouvriers en Allemagne (CADO) et avec le Secours Ouvrier de la Résistance (SOR), il fut arrêté par la Gestapo le 20 novembre 1943 à son bureau de la Maison du Peuple rue d’Arcole. Torturé, il fut déporté en Allemagne à Buchenwald où il arriva le 29 janvier 1944, matricule 44 932, et y mourut d’épuisement et de dysenterie, le 7 mars 1945.
Jules Pottier a été reconnu Mort pour la France et Combattant volontaire de la Résistance au grade de capitaine. L’ancienne rue Traversière à Yvré-l’Évêque porte son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article127102, notice POTTIER Jules, Auguste par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 5 octobre 2021.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat. F7/13014. — Arch. Dép. Sarthe, série M, supplément 367/42 ; 10 M 92 et 10 M 118. — Mémorial de Buchenwald, Dora et Kommandos, édité par l’Association du même nom, 1999. — La République sociale de l’Ouest, 1919-1939. — Le Socialiste du Maine, 1er mai 1921. — Le Travailleur sarthois, 1912, 1937. — Le Peuple, 21 février 1928. — Notes de Jean-Pierre Besse, Annie Pennetier et Emeric Tellier. — Joseph Estevès, 200 Figures de la Résistance et de la déportation en Sarthe, 2009.

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