PANNEQUIN Roger

Par Daniel Hémery

Né le 19 janvier 1920 à Bully-les-Mines (Pas-de-Calais), mort le 13 octobre 2001 à Verberie (Oise) ; instituteur ; membre des Jeunesses socialistes de 1936 à 1939 ; résistant, plusieurs fois évadé, responsable du régional du Front National ; secrétaire de la Fédération communiste du Pas-de-Calais, membre du comité central et de l’appareil central du PCF, démis de ses fonctions en 1953.

Issu d’une famille ouvrière, Roger Pannequin appartient à la génération communiste de la Résistance. Son père, Louis, né à Pelves, près d’Arras, en 1887, ajusteur aux Mines de Bully-les-Mines (Pas-de-Calais), était proche de la SFIO, sa mère, née Julienne Duthérage en 1882, était ménagère. Il fut admis à l’École Normale d’instituteurs d’Arras en juin 1936, milita au groupe des Jeunesses socialistes de l’École qui était proche des “ pivertistes ”, fut reçu au brevet supérieur et à l’écrit du CAP, nommé instituteur stagiaire à Grenay (Pas-de-Calais) en 1939 et aux épreuves pratiques du CAP en janvier 1940.

En instance de mobilisation, il tenta d’échapper à bicyclette à l’avancée des armées allemandes en mai 1940 en cherchant à gagner les côtes de la Manche, puis en revenant vers Arras où il fut fait prisonnier par les Allemands et emmené à la citadelle. Il réussit à s’évader avec un camarade du convoi en route vers l’Allemagne et à gagner Bully-Grenay où les troupes allemandes ne sont pas encore cantonnées. À la rentrée d’octobre 1940, il fut instituteur au groupe Thiers de Liévin (Pas-de-Calais), tout en habitant à Lens. En janvier ou février 1941, il entra en contact avec Julien Hapiot, ancien des Brigades Internationales et responsable clandestin des Jeunesses Communistes, auxquelles il adhéra et qu’il contribua à réorganiser. Avec Julien Hapiot, il tira et diffusa des tracts, fit partie des groupes de militants des Jeunesses qui récupèrent matériel, papier, argent et commencèrent les premiers sabotages. En octobre 1941, il entra au Parti communiste clandestin et rejoignit le groupe de Charles Debarge avec lequel il participa à l’action armée. Il fut arrêté une première fois le 6 mai 1942 par le commissaire spécial de Lens pour usage de faux papiers d’identité et activité communiste, torturé, condamné à cinq ans de travaux forcés et révoqué. Son épouse, Paulette, institutrice, fut mutée à Anvin (Pas-de-Calais). Interné à la prison de Cuincy, près de Douai, jusqu’en décembre 1942 puis transféré alors à la forteresse de Huy (Belgique), il fut conduit pour interrogatoires à Aix-la-Chapelle puis ramené à Huy d’où il s’évada le 17 juillet 1943. Il gagna l’Ardenne belge et y resta jusqu’au 28 juillet, rentra en France avec une fausse carte d’identité d’ouvrier frontalier belge et regagna le Pas-de-Calais par petites étapes en octobre ou novembre 1942. Il reprit l’action clandestine, rédigea Le Patriote du Pas-de-Calais, organe du Front National, mouvement qu’il organisa dans le département, tout en poursuivant la lutte armée dans le cadre des FTP. Il fut arrêté une nouvelle fois le 24 mai 1944 à Lens et à nouveau écroué à la prison de Cuincy mais parvint à nouveau à s’évader, en compagnie d’autres prisonniers, le 26 juin au cours d’un transfert à l’hôpital de Douai et quitta alors la région pour assurer, sous le pseudonyme de “ Marc ”, la responsabilité des liaisons entre le Front national et les FTP dans les départements de l’Aisne, des Ardennes et de la Meuse.

À la Libération, il fit partie, au titre du Front national, du Comité départemental de libération (CDL) du Pas-de-Calais, dont il fut vice-président à partir de l’été 1944, et préside le Comité de libération de Liévin (Pas-de-Calais). Il est blessé dans un accident de voiture le 14 décembre 1944. Il eut deux filles de son premier mariage avec Paulette Foucart, institutrice à Lens. Il est également nommé membre le 21 novembre 1944, du Comité départemental d’enquête et de taxation et, le 15 janvier 1945, de la section de Douai de la commission professionnelle des Houillères. En septembre 1945, il fut candidat du PCF aux élections cantonales dans le canton de Bertincourt. Le 7 janvier 1946, il présida la séance du Comité de Libération du Pas-de-Calais qui protesta contre la mise en sommeil des Comités de Libération et contre le projet de leur transformation en associations. Le 13 mai 1945, il fut élu premier adjoint de la municipalité de Lens aux côtés d’Auguste Lecoeur, nouveau maire de la ville, et de Louis Lambin, deuxième adjoint et secrétaire fédéral du PCF. Il avait la charge du budget et des écoles, responsabilités qu’il conserva jusqu’en 1947.

Roger Pannequin fut désigné en décembre 1945 pour faire partie de la Commission départementale d’enquête auprès des Comités de libération locaux sur le bilan de l’épuration, créée à l’initiative de la Commission de la justice du Conseil national de la Résistance. Il participa à la réunion du 17 avril 1945 au cours de laquelle Guy Mollet présente le dossier de l’accusation de détournement de fonds portée contre Gaston Dassonville. Il fut proposé pour exercer le mandat de conseiller général du canton d’Aubigny-en-Artois le 29 janvier 1945 et fit parti du Comité de confiscation des profits illicites d’Arras. Devenu membre du secrétariat de la Fédération communiste du Pas-de-Calais en 1947, il justifie dans Le Patriote du Pas-de-Calais des 9-10 février 1945 la déclaration de Maurice Thorez sur l’illégalité des Milices patriotiques. Il représenta le CDL du Pas-de-Calais aux États Généraux de la Renaissance française et y fut le rapporteur pour le thème de la défense de la République et de la démocratie. Candidat sur la liste communiste aux élections législatives d’octobre 1945 puis de juin 1946, il ne fut pas élu. En 1946, il siégea au comité fédéral du Parti communiste tout en restant secrétaire général du Front National pour le département et organisa en juin 1946 la campagne contre le MRP. Il fut élu le 14 juin 1946 vice-président de l’association “ Comité départemental de libération du Pas-de-Calais ”. Il suivit l’École centrale du PCF à l’hiver 1946-1947, entra au secrétariat de la Fédération communiste du Pas-de-Calais aux côtés de René Camphin et de Louis Lambin, et participa au XIe congrès du PCF à Strasbourg en juin 1947.

Roger Pannequin joua un rôle considérable à la direction de la Fédération communiste du Pas-de-Calais comme secrétaire à l’organisation puis, en 1947 comme secrétaire fédéral, notamment pendant les dures grèves de 1947-1948. Auguste Lecoeur, déjà de fait responsable de l’organisation du PCF à l’échelle nationale, le fit “ monter ” à la Section d’Organisation du Comité Central en 1949. En avril 1950, il est élu au comité central du Parti communiste au XIIe congrès du parti à Gennevilliers et se vit confier, dans l’appareil central du Parti, la responsabilité des organisations de masse, de la MOI et le suivi des plusieurs fédérations du Nord-ouest de la France. Après “ l’affaire ” - ou la provocation - de Grenay (Pas-de-Calais, février 1951), Roger Pannequin reçut du comité central un “ blâme intérieur ” le 27 avril 1951. Il devint alors rédacteur en chef des Cahiers du Communisme et, à l’automne 1952, directeur de l’École centrale du Parti de Viroflay. Mais, il perdit ses responsabilités dans l’appareil central communiste en septembre 1953, avant d’être éliminé du comité central en octobre, sous l’accusation d’autoritarisme et d’aventurisme, à l’initiative d’Auguste Lecoeur, peu de temps avant que ce dernier ne subisse le même sort.

Dès lors, Roger Pannequin cessa de militer et reprit un poste d’instituteur en octobre 1953 à Sallaumines. Il resta membre du Parti jusqu’aux années 1968 mais sympathisa avec les groupes oppositionnels “ Débat communiste ” et “ Unir ”. Il quitta le PCF en 1968 et participa à la création et aux activités du Secours Rouge en 1970. Au-delà, il se consacra à la rédaction de ses mémoires qui, publiées en 1977, eurent un grand écho.

Entre temps, Roger Pannequin s’est remarié en janvier 1957 avec Éliane Crépin, institutrice, dont il eut un fils. Il a été décoré de la Croix de Guerre, de la Médaille des Évadés médaille de la Résistance ( 31 mars 1947) et de la Légion d’honneur (février 1986). Retiré à Verberie (Oise), il y mourut à 82 ans en 2001.

Roger Pannequin aura été l’un des principaux animateurs de la Résistance communiste dans le Nord-Pas-de-Calais et de son prolongement, le communisme radical, voire révolutionnaire, des lendemains de la Libération, l’un et l’autre préparés et surgis dans la région de manière largement endogène entre 1936 et la fin des années 1940. “ Ce n’est pas parce que des carriéristes et des incapables ont dénaturé cette cause qu’il faudrait croire que les sacrifices qu’elle a suscités furent vains... ”, écrivait-il en 1986 dans une lettre privée,
“ ... Plus tard d’autres générations se souviendront (ou plutôt apprendront à se souvenir) et appliqueront à une nouvelle grande cause les leçons de cette lutte ”.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article144947, notice PANNEQUIN Roger par Daniel Hémery, version mise en ligne le 13 février 2013, dernière modification le 2 novembre 2021.

Par Daniel Hémery

ŒUVRE : Ami si tu tombes (Les années sans suite ), Paris, Le Sagittaire, 1976, 380 p. ; Adieu camarades (Les années sans suite ), Paris, Le sagittaire, 1977, 380 p.

SOURCES : les deux ouvrages ci-dessus indiqués ; R. Bargeton, “ Le comité départemental de libération du Pas-de-Calais (1943-1946) ”, “ Mémoires de la Commission d’Histoire et d’Archéologie du Pas-de-Calais ”, t. 33, 1997 ; lettre personnelle à Arnold Normand, de Roeux (Pas-de-Calais), aimablement transmise par ce dernier ; Arch. départ. du Pas-de-Calais, ADPC, 12 677, M 5101/1, M 5360.

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