SOUBRIER Annette, épouse Chiericotti [Dictionnaire des anarchistes]

Par Guillaume Davranche, Marianne Enckell, Rolf Dupuy, Dominique Petit

Née le 30 août 1865 à Paris (IIIe arr.) ; morte à Londres au printemps 1951 ; marchande de volailles, couturière ; anarchiste ; inculpée du « procès des Trente ».

Photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art. New-York

Son père « brocanteur », tenait un petit hôtel et demeurait 10 rue des Vertus à Paris. Sa mère (née Vincent) et trois de ses tantes, originaires d’Espinasse (Cantal) avaient gagné la capitale à la fin des années 1840. Orpheline de sa mère à l’âge de trois ans, Annette et sa sœur aînée Thérèse, furent vraisemblablement élevées par leur père et l’une de leurs tantes Marianne Vincent, marchande de quatre saisons, veuve de la Commune et remariée avec un certain Jean Baptiste Lenfant un menuisier qui aurait eu des sympathies anarchistes
Le 21 février 1885, à la mairie du XVIIIème , en présence de toute la famille Soubrier et Vincent, elle épousa Paul Chiericotti avec , comme témoins son oncle Charles Vincent et le compagnon Constant Magnani. Le couple demeura à Montmartre d’abord, rue Saint Vincent puis 2 rue du Ruisseau. Entre 1885 et 1892, ils eurent 4 enfants
Après avoir accouché d’une petite fille, Ida, le18 janvier 1892, elle suivit vraisemblablement son compagnon en Grande Bretagne lorsque ce dernier avait été expulsé de France, le 2 avril 1892. Début avril 1893, l’indicateur Z n°6, signalait que Chiericotti était à Londres.
Elle ne l’accompagna pas de suite quand il rentra clandestinement en France sous le nom de Paul Laurent pour participer à la bande de cambrioleurs d’Ortiz. En effet l’indicateur Z n°6 faisait savoir le 1er septembre 1893 que Chiericotti était en France et qu’il n’écrivait pas à sa femme qui était à Londres encore pour 15 jours. Selon lui, elle croyait que son mari l’avait abandonnée avec son enfant, elle pensait retourner chez son père. A Londres, elle demeurait chez Louis Bergues.
Toutefois il semble que dès octobre 1893, Annette Soubrié avait rejoint Chiericotti qui s’était caché 1 boulevard Brune, sous le faux nom de Laurent – avec Victorine Belloti et son fils, Louis et Marie Milanaccio – où le groupe entreposait le butin des cambriolages. Annette Soubrié était-elle restée à Londres ou habitait-elle avec son mari, 1 boulevard Brune ?
Le 18 mars 1894, alors qu’elle venait d’arriver à gare du Nord, en provenance de Londres, elle était arrêtée Boulevard Rochechouart avec son compagnon qui l’attendait et tous deux étaient emmenés Boulevard Brune pour les premières perquisitions tandis qu’étaient également perquisitionnés et arrêtés comme « receleurs », François Liegeois et Louis Selle.
Elle fut alors impliquée comme son compagnon dans le procès des trente – mêlant anarchistes connus et cambrioleurs illégalistes – qui se tint du 6 au 12 août 1894 (voir Élisée Bastard). Lors du procès, elle fut interrogée par le président :
D. On vous accuse de complicité dans ces différents vols. Vous êtes allée à Londres ?
R. On nous a expulsés. Nous avions un commerce et on nous a mis sur la paille.
D. Vous êtes venue à Paris plusieurs fois.
R. Au mois de janvier, et je suis restée trois semaines ; puis je suis revenue quand on m’a arrêtée. J’étais venue près de mon mari pour le voir.
D. On a trouvé sur vous des objets nombreux de valeur, une broche en diamant.
R. C’est du verre ; elle vaut vingt-cinq sous, je l’ai achetée à Londres.
On montre aux jurés la broche en question.
D. On retrouve sur vous une chaîne d’or.
R. Mon mari me l’a donnée le jour de mon arrivée à Paris ; je pensais qu’il pouvait me l’avoir achetée, nous avions fait longtemps le commerce de volailles et nous avions des économies.
Alors qu’elle reconnut lors du procès être déjà revenue en janvier 1894, elle ne fut pas interrogée sur les motifs de ces allers et retours vers Londres qui pourraient laisser supposer qu’elle était beaucoup plus impliquée dans le recel des objets volés, Londres étant la plaque tournante du recel.
Elle fut acquittée, tandis que son compagnon était condamné à 8 ans de travaux forcés et envoyé au bagne de l’île du Salut où en 1901 il sera assigné à résidence en Guyane.
Son nom figurait sur une liste d’anarchistes établie en septembre 1894, par la police des chemins de fer en vue d’une surveillance aux frontières
Elle repartait alors en exil en Grande Bretagne où en 1911, elle vivait à Londres avec le compagnon Cesare Cova et élevait ses trois enfants, nés sous le nom de Chiericotti.
Annette Chiericotti était décédée entre avril et juin 1951 à Hemel Hemstead (Londres).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article155985, notice SOUBRIER Annette, épouse Chiericotti [Dictionnaire des anarchistes] par Guillaume Davranche, Marianne Enckell, Rolf Dupuy, Dominique Petit, version mise en ligne le 27 mars 2014, dernière modification le 7 février 2022.

Par Guillaume Davranche, Marianne Enckell, Rolf Dupuy, Dominique Petit

Photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art. New-York
Fiche photo anthropométrique Alphonse Bertillon. Collection Gilman. Métropolitan museum of art. New-York

SOURCES : Le Journal des débats du 15 juillet 1894 et du 6 au 13 août 1894 — Vivien Bouhey, op. cit., annexe 56 — Sébastien Faure, Le Procès des Trente, Editions antisociales, 2009. — ANOM, Aix en Provence "Dossier P. P. Chiericotti) — Recherches de Dominique Bassano (mai 2019) — Notice Soubrier Annette du Dictionnaire des militants anarchistesLe Temps 9 août 1894 — Le Soleil 8 août 1894 — Archives de Paris. Etat civil — La Lanterne 7 août 1894 — Archives de la Préfecture de police Ba 1508.

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