VEYLIT Michel, Christian, Pierre

Par Alain Dalançon

Né le 17 décembre 1939 à Tarbes (Hautes Pyrénées) ; professeur ; militant syndicaliste de la FEN, secrétaire de la section départementale de la Vienne, dirigeant national de la tendance « Unité et Action », membre du bureau fédéral, fondateur de la FSU ; militant communiste.

Congrès FEN 1982

Son père, fils de petits paysans du Libournais en Gironde, commença à travailler comme journalier agricole après avoir obtenu son certificat d’études primaires, puis s’engagea dans l’armée en 1935, où il termina sa carrière au grade d’adjudant-chef dans l’Artillerie. Sa mère, orpheline abandonnée à Lourdes par une réfugiée du Nord pendant la guerre 1914-1918, fut élevée dans une institution catholique puis des familles d’accueil jusqu’à sa majorité.

Après avoir changé d’école élémentaire au gré des affectations de son père en Allemagne en zone d’occupation française, il entra en classe de 6e au lycée français de Constance. Puis il effectua toutes ses études secondaires, à partir de la 5e, au lycée de garçons Henri IV de Poitiers (Vienne), ville où son père était affecté au 33e régiment d’artillerie. Ses parents souhaitèrent en effet que leurs cinq enfants, dont Michel était l’aîné, aillent jusqu’au bac et poursuivent des études supérieures pour atteindre un statut professionnel et social supérieur au leur.

Après le baccalauréat « mathématiques élémentaires » obtenu en 1958, puis une année en classe de mathématiques supérieures dans le même lycée, il poursuivit des études supérieures à la faculté des Sciences de Poitiers. Ayant réussi le concours des IPES (Institut préparatoire au professorat du second degré) en même temps que l’examen de propédeutique MPC (mathématiques-physique-chimie), il commença une licence de physique. Il était également très sportif et jouait dans l’équipe de hand-ball du PEC (Poitiers étudiants club) puis du Loudun athletic club.

L’éducation qu’il avait reçue ne le prédisposait pas particulièrement au militantisme. Il avait été baptisé et avait fait sa communion comme la majorité des enfants de son époque ; ses parents n’affichaient pas de préférence politique ; c’est plus tard, après le congrès d’Epinay du Parti socialiste en 1971, que son père manifesta un engagement et devint à sa retraite, maire de sa commune d’origine, Les Billaux (Gironde), dans le vignoble de Saint-Émilion.

Étudiant sursitaire, Michel Veylit s’engagea dans l’action pour la paix en Algérie et, dès son entrée à la faculté en 1960, il adhéra à l’Union des étudiants communistes et un peu plus tard au Parti communiste français. Il participa au VIe congrès de 1963 de l’UEC, où le cercle de Poitiers dirigé par Robert Roland défendit les positions des « orthodoxes » contre la ligne de la majorité « italienne ».

Il épousa, le 14 septembre 1964 à Abzac (Charente), Michèle Gouranchat, institutrice, avec laquelle il eut trois filles : Muriel (née en 1967), Sarah (née en 1970) et Julie (née en 1974). Il arrêta alors ses études à la faculté où il avait obtenu quatre certificats sur les six nécessaires à la licence d’enseignement de physique et fut employé comme maître auxiliaire en sciences physiques au lycée Guez de Balzac à Angoulême (Charente).

Dispensé du service militaire en 1964, il intégra à la rentrée 1965 le centre de formation des maîtres de CEG (collège d’enseignement général) de Poitiers, directement en deuxième année, obtint le CAP primaire et le CAP-PEGC l’année scolaire suivante (1966-1967), tout en enseignant au collège de Loudun (Vienne), et fut titularisé PEGC au 1er octobre 1968.

Syndiqué d’abord au Syndicat national des enseignements du second degré, quand il était ipsésien puis MA, Michel Veylit adhéra ensuite au Syndicat national des instituteurs dont il devint très vite responsable du secteur de Loudun. Il s’opposa à René Monory, maire de Loudun, au sujet de l’implantation au collège de « classes de transition », responsables d’une irréversible ségrégation, ce qui lui valut d’être convoqué par l’inspecteur d’académie pour une mise en garde. En mai-juin 1968, il anima la grève dans le Loudunais où il fallait soutenir régulièrement les jeunes collègues qui se trouvaient souvent isolés en milieu hostile. Cette période lui apporta une expérience enrichissante, porteuse de questions sur l’exercice du métier, la démocratie, le rôle du syndicat. À la rentrée suivante, Amédée Nony, secrétaire de la section départementale de la Fédération de l’Éducation nationale, et René Bibault, secrétaire de la section départementale du SNI, tous deux militants communistes « Unité et Action », firent appel à lui pour participer au bureau départemental de la FEN. Dès la rentrée 1971, il fut élu secrétaire de la section FEN, remplaçant Nony qui souhaitait arrêter sa fonction et, au congrès fédéral national du mois de novembre, il fut élu suppléant à la commission administrative nationale au titre des SD « Unité et Action ».

Après avoir enseigné l’année scolaire 1971-1972 au collège de Chauvigny (Vienne), il obtint sa mutation au collège Ronsard, dans le quartier populaire des Trois cités à Poitiers, où il exerça de la rentrée 1972 jusqu’à son départ en retraite, le 17 décembre 1999. Il put ainsi se consacrer plus facilement au militantisme syndical dans la Vienne et au plan national.

Comme secrétaire départemental de la FEN, il s’efforça surtout d’animer une authentique vie fédérale, par secteurs géographiques et dans les lieux de travail où œuvraient ensemble les personnels des différentes catégories enseignantes et non-enseignantes. Une section départementale pouvait et devait avoir, selon lui, un véritable rôle de contribution à l’élaboration des positions fédérales et organiser des actions, sans se limiter à une coordination de celles des SN, même si les rapports entre eux étaient bons. Ce qui était le cas dans la Vienne où cohabitaient dans les mêmes locaux de la Maison syndicale (16 avenue du parc d’artillerie à Poitiers) à côté de la SD/FEN, les sections à majorité U-A du SNI devenu SNI-Pegc (dirigée par Alain Garreau, successeur de René Bibault) et du Syndicat national des enseignements de second degré (section académique dirigée par Alain Dalançon*). Ainsi la section FEN joua un rôle important dans la campagne d’opinion lancée par la SNES autour de ses films en 1972, contre la réforme Haby, pour la défense des auxiliaires, l’occupation du rectorat en 1978, la défense du professorat d’EPS contre le plan Soisson… Elle organisa des assises réunissant enseignants, chercheurs, parents d’élèves, mouvements pédagogiques sur « l’échec scolaire dans le département de la Vienne et les moyens à mettre en œuvre pour le combattre », sur la formation des enseignants et les perspectives de son unification suivant les objectifs du plan Langevin-Wallon.

Un autre axe important de l’activité de la SD/FEN était de rechercher en toute circonstance la rencontre et l’unité d’action intersyndicale, professionnelle et interprofessionnelle, sans exclusive, pour la mise en œuvre d’initiatives communes sur les problèmes rencontrés dans le département, particulièrement sur l’emploi et la formation. Ainsi de nombreuses actions furent organisées avec l’UD et l’UR-CGT, la CFDT, la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves). Les manifestations les plus spectaculaires eurent lieu lors de la venue à Poitiers du président Georges Pompidou au début de l’année 1974, puis celle du président Valérie Giscard d’Estaing en 1979.

Cette activité fédérale était inséparable d’une organisation démocratique de la section. Une partie de la commission administrative départementale était élue sur listes de tendances, l’autre était constituée par des représentants directs des syndicats nationaux. Avant les congrès départementaux et nationaux une consultation individuelle à bulletin secret de tous les syndiqués était organisée sur les projets de motions débattus. Ces pratiques n’étaient pas obligatoires au regard des statuts et du règlement intérieur national, et la majorité fédérale « Unité, Indépendance et Démocratie » ne leur reconnaissait aucune valeur. Elles étaient en revanche répandues dans les sections à direction U-A qui en faisaient un argument en faveur de l’orientation qu’elles défendaient.

Dans le département de la Vienne, elles fonctionnaient bien, y compris aux yeux des minoritaires UID et des militants de l’ « École émancipée ». C’est sans doute une des raisons qui conduisit le collectif national U-A à faire élire Michel Veylit comme titulaire à la CA fédérale au congrès de 1973, et à l’associer à son travail, en le chargeant d’intervenir plus spécialement sur les questions de la vie fédérale et dans la commission revendications. Il participa bientôt régulièrement au secrétariat fédéral U-A avec la responsabilité du suivi de la vie fédérale, des relations avec les SD et les collectifs départementaux, et de la diffusion de la Revue U&A, outil indispensable au débat dans la tendance, dans laquelle il écrivit de plus en plus souvent. Il travaillait aux côtés de Gérard Alaphilippe et d’Alfred Sorel, porte-parole national de la tendance, dont les capacités d’analyse et de réaction rapides l’ impressionnaient.

Au congrès fédéral d’Avignon de 1982, les statuts de la FEN furent modifiés et Michel Veylit fut élu suppléant dans le nouveau bureau fédéral, puis titulaire après le départ en 1985 d’Alfred Sorel qui devait prendre sa retraite. Cette année-là, c’est lui qui présenta la motion d’orientation U-A au congrès fédéral de Lille. Quel que soit le gouvernement, le rôle du syndicalisme était de débattre des revendications avec les personnels et de les faire prendre en compte par le pouvoir politique. C’était la meilleure contribution que le syndicalisme pouvait apporter à l’amélioration du service public et de la situation de ses personnels en liaison avec l’évolution de la société. Cette démarche s’opposait à celle de la direction UID de la FEN qui théorisait alors sur la non-légitimité de revendications qui n’entraient pas dans le cadre des « marges du possible » définies en dehors du mouvement syndical.

En 1985, Roland Maurel* lui succéda comme secrétaire départemental de la FEN, ce qui lui permit de pouvoir mieux se consacrer à son militantisme au plan national. À partir de 1986, après le départ à la retraite d’Alfred Sorel, il travailla en collaboration étroite avec Raphaël Szajnfeld devenu porte-parole du courant de pensée. Outre les questions de la vie fédérale qu’il continua à suivre, il coordonna le travail fédéral sur les questions revendicatives, particulièrement sur les salaires et la fonction publique.

Au congrès fédéral de Clermont-Ferrand en février 1991, il participa activement à l’élaboration de la « charte » signée par 11 syndicats nationaux, 30 sections départementales et 4 courants de pensée pour opposer au projet de congrès extraordinaire de réforme des statuts les grands principes garantissant l’unité de la fédération.

Après le limogeage du secrétaire général, Yannick Simbron, et son remplacement par Guy Le Néouannic, le processus de création du Syndicat des enseignants, accompagné du procès et de l’éviction du Syndicat national de l’éducation physique et sportive et du SNES et de la création de l’UNSA s’accéléra sous l’impulsion des dirigeants du SNI-Pegc. Michel Veylit participa activement durant toute cette période marquée par les congrès de Créteil (octobre 1992) puis de Perpignan (décembre 1992) à la constitution de comités de liaison unitaires, notamment avec Eugenio Bressan* et Pierre Toussenel. Lors de la rencontre nationale des CLU à Perpignan, il présenta la motion commune des revendications élaborée les mois précédents à la suite d’un travail persévérant entre U-A, l’EE et le SNETAA, pour arriver à une plate-forme consensuelle sur les modes de revalorisation des salaires, des carrières et de la résorption de l’auxiliariat. Cette plate-forme resta longtemps la référence de la nouvelle Fédération syndicale unitaire. Du congrès de Perpignan au congrès constitutif de la FSU de Mâcon en 1994, il eut la responsabilité de coordonner le travail régulier du CLU sur les revendications.
Puis dans la FSU jusqu’en 1999, date de son départ à la retraite, il collabora avec Michel Deschamps* dont il appréciait la hauteur de vue et la capacité à exercer la fonction difficile de premier secrétaire général. Il anima et coordonna le travail du secteur « situation des personnels » où se rencontraient chaque semaine des représentants des SN et des courants de pensée. En même temps, il militait dans son nouveau syndicat, le SNES. Informé de son exclusion du SNI-Pegc à l’ouverture du congrès de Perpignan, il avait alors adhéré au nouveau SNUIpp jusqu’à son intégration comme stagiaire dans le corps des certifiés en 1994. Il redevint alors militant du SNES, fut élu à sa CA nationale en 1995 et apporta sa contribution au « secteur revendications » sous la responsabilité de François Labroille*.

Dans le cadre du secteur fédéral, Michel Veylit anima avec Albert Daum et Marcel Brissaud un « groupe de travail retraite-retraités » associant syndicats et tendances, qui produisit une plaquette revendicative. La question des retraites était devenue en effet un enjeu de première importance et la FSU put prendre toute sa place dans les grandes grèves de 1995 au plan national et départemental.
Il plaida dès ce moment-là pour que la FSU et ses syndicats conduisent un véritable syndicalisme des retraités, qui prenne en charge leurs revendications spécifiques : non seulement les pensions de retraite mais aussi les problèmes liés au vieillissement, aux modes de vie et préoccupations des retraités, en cherchant constamment à les articuler avec les revendications des actifs, particulièrement dans le domaine de la protection sociale.

Il cessa son activité dans le groupe retraite-retraités en 2001 et prit ensuite du champ par rapport au militantisme syndical. Il avait quitté en 1989 le PCF, où il n’avait jamais exercé de responsabilités, mais continuait à se ressentir communiste.

Durement éprouvé par le décès de son épouse en 2010, il se consacrait de plus en plus à la peinture, exposant régulièrement ses toiles en partie inspirées par les valeurs qu’il avait toujours défendues en tant que militant politique et syndical.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article179470, notice VEYLIT Michel, Christian, Pierre par Alain Dalançon, version mise en ligne le 22 mars 2016, dernière modification le 7 avril 2022.

Par Alain Dalançon

Congrès FEN 1982
A côté d’Alfred Sorel, journée UA rentrée 1983
Congrès SNES 1997
Exposition peinture 2015

SOURCES : Arch. Section FEN 86. — Arch. IRHSES (fonds Unité et Action, FEN et FSU). — Témoignage de l’intéressé et autres témoignages de militant.es syndicalistes et politiques.

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