CANONGE Fernand, François, Léon

Par Alain Dalançon, Julien Veyret

Né le 22 octobre 1905 à Laval-Pradel (Gard), mort le 26 avril 1981 à Bry-sur-Marne (Val-de-Marne) ; professeur de l’enseignement technique ; militant communiste et syndicaliste du SNET.

Fernand Canonge, debout à gauche
Fernand Canonge, debout à gauche
Bureau de la FGE recevant des militants étrangers

Fils d’un mineur des houillères de Laval-Pradel, Fernand Canonge entra à l’École normale d’instituteurs de Nîmes (Gard) en 1922. Il effectua une quatrième année d’études (1925-1926) à l’ENI de Lyon (Rhône) et fut reçu à la première partie du certificat d’aptitude au professorat des écoles normales et des écoles primaires supérieures en juillet 1926.

Il fit son service militaire de novembre 1926 à novembre 1927, d’abord à l’École de Saint-Maixent (Deux-Sèvres) puis, à partir de mai 1927, comme sous-lieutenant dans les Chasseurs alpins à Grenoble (Isère).

À son retour à la vie civile, il fut maître interne à nouveau à l’ENI de Lyon, puis instituteur intérimaire à l’école d’application annexée à l’ENI à partir d’avril 1928. Titularisé instituteur, il exerça à l’école primaire d’Apinac (Loire) d’octobre 1928 à octobre 1931, tout en poursuivant des études à la Faculté des Lettres de Lyon où il obtint une licence ès lettres (certificats de géographie en 1928, d’histoire moderne et contemporaine en 1930, de pédagogie en 1930, d’histoire du Moyen-Age en 1931). Ces diplômes lui donnèrent la possibilité d’être nommé professeur délégué à l’école primaire supérieure d’Aubin (Aveyron) de novembre 1931 à décembre 1933. Ayant obtenu l’équivalence de la deuxième partie du professorat pour l’enseignement technique, il devint professeur de lettres-histoire-géographie à l’École nationale professionnelle de Thiers (Puy-de-Dôme), de janvier 1934 à 1938. Puis il fut nommé à l’école pratique de commerce et d’industrie de Nogent-sur-Marne (Seine, Val-de-Marne) à la rentrée 1938.

Il se maria le 18 septembre 1939 à Rive-de-Gier (Loire) avec une institutrice originaire de Saint-Chamond (Loire) ; ils n’eurent pas d’enfant.

Dès le milieu des années 1930, Fernand Canonge milita au Syndicat du personnel de l’enseignement technique.

Mobilisé en septembre 1939, démobilisé en 1940, il reprit son service dans son établissement qui devint collège technique et dont il occupa la sous-direction d’octobre 1942 à novembre 1945.

Après avoir participé à la Résistance, notamment au sein du Front national universitaire, Fernand Canonge, adhérent du Parti communiste français, fut membre du bureau provisoire du Syndicat national de l’enseignement technique, désigné par l’assemblée générale du 30 septembre 1944, chargé des relations avec la Fédération générale de l’enseignement (CGT) puis de la réforme de l’enseignement et des traitements.

Membre du bureau de la FGE, il représenta l’enseignement technique dans la commission Philip d’étude sur le statut de l’enseignement privé (fin 1944-début 1945). Il défendit en particulier la transformation des écoles professionnelles privées des houillères nationalisées en écoles publiques et la transformation des centres de formation professionnelle en centres d’apprentissage publics. Il avait enseigné l’Histoire-Géographie au centre de formation professionnelle de Nogent-sur-Marne jusqu’au 1er novembre 1943 et avait pris encore mieux la mesure de l’importance de la formation professionnelle. À la Libération, la CGT s’empara de cette question décisive pour la Reconstruction. Au nom du SNET, Fernand Canonge joua un rôle décisif dans la création (ordonnance de novembre 1945) des Écoles normales nationales d’apprentissage pour former les maîtres des centres d’apprentissage et fut, dès sa création, professeur à celle de Paris, enseignant de psychologie et de pédagogie.

Il fut en effet avec Georges Court, Henri Giriat, puis Jean Sclafer un initiateur de la psychopédagogie. L’objectif de la formation des enseignants de l’enseignement professionnel des centres d’apprentissage visait selon lui à faire se rencontrer des sphères qui jusqu’alors s’ignoraient : production et culture. Aux professeurs « techniciens » revenait la responsabilité d’extirper le métier de ses racines empiriques, en lui conférant une assise rationnelle à partir des méthodes des sciences expérimentales, et aux professeurs « généralistes », celle d’associer apprentissage du métier à la formation de l’être social, à son épanouissement personnel, à la compréhension de son rôle et de sa place dans la société. La technologie s’installait au cœur des humanités, la transformant en « discipline de l’esprit ». Le psychopédagogue se situait à la charnière des « techniciens » et des « généralistes » pour être le « ciment » et permettre aux futurs enseignants de se penser comme acteurs d’un même projet. Les psychopédagogues aidaient ainsi les ouvriers à se transformer en enseignants.

À partir de novembre 1944, comme représentant du SNET, Fernand Canonge fit également partie de la commission qui élabora le plan de réforme Langevin-Wallon. Lors des débats de la commission, il se prononça contre l’introduction du latin optionnel en classe de 6e, qu’il repoussait en 4e, pour faciliter l’orientation vers quatorze ans. Il fut très critique à l’égard de l’expérience des classes nouvelles, « institution de luxe à l’usage des familles et des élèves les plus favorisés », qu’il considérait comme des classes de sélection, n’abordant les difficultés d’application de la réforme que sous l’angle de la pédagogie. Aimant parler « d’interpénétration de la culture générale et du métier » et non pas « de culture générale parallèle au métier », il défendait la conception d’une culture universelle humaniste intégrant les dimensions de la culture technique chère à Paul Langevin, dont le décès fut considéré par lui et le SNET comme « un vide dans la pensée française et parmi les éducateurs ». Il signa dans L’enseignement public, le 13 novembre 1946, un article « La portée économique et sociale de la Réforme ». Soucieux de former l’homme, le citoyen et le travailleur, il joua un rôle important dans la rédaction des nouveaux programmes de morale et d’instruction civique des centres d’apprentissage.

Chargé des questions pédagogiques et des ENNA dans le BN du SNET, il militait pour « l’interpénétration » des enseignements et donc la nécessité pour les maîtres des enseignements généraux de « ne pas ignorer leurs collègues de l’atelier. » Il estimait également que la CGT devait se saisir de toutes les questions de l’école, et pas seulement de l’enseignement technique. Il exposa ses idées notamment dans un article paru dans Le Peuple en 1949 sur « l’École du peuple ».

Fernand Canonge, depuis longtemps partisan de la constitution d’un syndicat unique du second degré dans la Fédération générale de l’enseignement, puis la FEN, défendit ses idées dans la commission pédagogique du comité de fusion du second degré créée en 1945, puis à l’Union des syndicats du second degré. Secrétaire national de la FEN-CGT en 1946 et 1947, il siégea dans son bureau par la suite. Membre du bureau national du SNET après le congrès d’avril 1946, chargé des liaisons avec la FEN, membre de son secrétariat national en 1946 et 1947, il fut, le 24 décembre 1947, un des signataires de la motion de la commission administrative unanime du SNET pour le maintien de l’unité du syndicat. Il avait aussi préconisé dans la presse syndicale le maintien de l’adhésion du SNET et de la FEN à la CGT. Signataire de la lettre de la liste « cégétiste » à la suite de la fin des congrès régionaux de 1948, intitulée « Pour l’unité du SNET », mettant en valeur qu’il y avait autant de voix pour la CGT que pour l’autonomie, lors du congrès de 1948, il fut élu au bureau national au titre d’adhérent de la CGT. Responsable des questions pédagogiques au BN, il fut en 1951-1954 chargé de la liaison avec les centrales syndicales. Il était en même temps membre du bureau de la FEN-CGT. Il demeura titulaire de la CA du SNET jusqu’en 1957, puis suppléant jusqu’en 1959, élu successivement sur les listes cégétistes, « Unité et Action » puis « Union pour une action syndicale efficace ». Jusqu’en 1963, il signa l’appel à voter UASE aux élections à la CA.

Fernand Canonge fut élu en juin 1946 au Conseil de l’Enseignement technique au titre des personnels enseignants (enseignement général et atelier) des Écoles Normales Techniques garçons et jeunes filles (63 voix sur 65), et réélu en 1950 par 34 voix sur 36. En 1950, il représenta en outre le CET au Conseil de l’Enseignement du Second degré, et siégea à la section permanente du Conseil de l’Enseignement technique et au Conseil Supérieur de l’Éducation Nationale, statuant en matière contentieuse et disciplinaire. Il fut aussi élu titulaire de 1948 à 1952 à la commission administrative paritaire nationale (CAPN) des personnels agrégés et assimilés, puis suppléant de 1952 à 1961.

Membre du comité de rédaction de la Revue de l’enseignement technique. Technique, arts, sciences, publiée mensuellement à partir d’octobre 1946, il écrivit plusieurs articles dans les Cahiers laïques, publication du cercle parisien de la Ligue française de l’enseignement, dont « La laïcité dans l’enseignement technique » (1951) et « La misère de l’enseignement technique » (1954). Il participa à des ouvrages collectifs sur la pédagogie de l’enseignement technique.

Fernand Canonge prit sa retraite en décembre 1966 à l’École normale nationale d’enseignement professionnel, ancienne ENNA, au grade de professeur assimilé agrégé. Il vivait avec son épouse à Nogent-sur-Marne, puis à Bry-sur-Marne à partir de 1966.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18575, notice CANONGE Fernand, François, Léon par Alain Dalançon, Julien Veyret, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 30 octobre 2022.

Par Alain Dalançon, Julien Veyret

Fernand Canonge, debout à gauche
Fernand Canonge, debout à gauche
Bureau de la FGE recevant des militants étrangers

ŒUVRE  : « Conseils » à Jacques Heurtematte, Cours de technologie professionnelle de spécialité du bois, Delagrave, 1957. — Collaboration à Henri Giriat, Pédagogie de l’enseignement technique, Foucher, 1967. — Avec Henri Ducel, La pédagogie devant le progrès technique, PUF, 1969, 216 p., réédition, même titre, PUF, collection « L’Éducateur », 1975, 223 p.

SOURCES : Arch. Nat., F1a 3207, 3252, F17/28636. — APPO, Renseignements Généraux, 632207. — Arch. IRHSES (fonds Rabier). — Le Travailleur de l’enseignement technique, L’enseignement public, Le Peuple, Les Cahiers laïques, Revue de l’enseignement technique. — Etya Sorel, Une ambition pour l’école. Le plan Langevin-Wallon, Éditions sociales, 1997. — État-civil. — Notes de Jacques Girault.

ICONOGRAPHIE : F. Canonge (bureau de la FEN en 1946)

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