PRENANT Lucy [née SOTO Lucy, Rachel]. Dite souvent Lucie

Par Jacques Girault

Née le 10 juillet 1891 à Paris (VIIIe arr.), morte le 29 janvier 1978 à Paris (XIIIe arr.) ; directrice de l’École normale supérieure de jeunes filles ; « compagnonne de route » du communisme français.

Octobre 1946, Lucy Prenant à Marseille
Octobre 1946, Lucy Prenant à Marseille

La famille de Lucy (prénommée souvent Lucie) Soto appartenait à la bourgeoisie juive d’origine espagnole. Son père était un riche négociant originaire de Tétouan (Maroc). Sa mère Malvina Bloch, sans profession, à la pratique religieuse épisodique, faisait partie d’une famille d’intellectuels (écrivains, enseignants et journalistes), dont l’un d’entre eux fut fusillé pendant la Commune de Paris. Lucy Soto, qui habita avenues d’Iéna puis Georges V, fut élevée dans l’opulence, éduquée par des précepteurs. Après la faillite de son père en Argentine, elle vécut son adolescence dans le Veme arrondissement avec sa mère. Bachelière (option “Philosophie“) en 1908, elle fut admise à la licence ès lettres (Philosophie) en 1910 et au diplôme d’études supérieures de Philosophie en 1912 à la Sorbonne. Seule femme sur vingt-deux lauréats, elle fut reçue première avec un mémoire « Rapport des théories biologiques de M. René Quinton avec la théorie de l’évolution » et une interrogation sur un texte de Spinoza. Sans doute, son travail s’inscrivait dans la remise en cause des critiques de Quinton visant les conceptions de Darwin. Parallèlement, elle obtint le certificat d’études supérieures d’embryologie (1910), puis la licence ès sciences (certificats de zoologie, de géologie, de botanique) en 1912. Pendant ses études scientifiques, elle rencontra en 1912 Marcel Prenant.
Après un stage pédagogique au lycée Condorcet à Paris en 1913, Lucy Soto eut l’intention de poursuivre ses études à la Faculté de Médecine. Depuis septembre 1914, pendant toute la guerre, avec sa mère, elle fut infirmière dans une ambulance de la Croix rouge, puis travailla dans des hôpitaux (Vosges, Pitié à Paris). Elle dirigea ensuite des foyers du soldat dans l’Oise et dans l’Aisne jusqu’en mars 1919. Elle interrompit ce service pour enseigner comme professeur déléguée au collège de garçons d’Étampes (Seine-et-Oise/Essonne) en classes de philosophie et de première (octobre 1916 - juin 1917).
Lucy Soto épousa en mai 1917 à Paris (XVIIeme) le futur militant communiste, Marcel Prenant, frère d’une victime des combats à Verdun, fils d’Auguste Prenant, professeur à la Faculté de Médecine, un des fondateurs de l’histologie moderne. Alors mobilisé, futur agrégé de sciences naturelles, il devint préparateur de zoologie à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm. Ils eurent une fille en 1919 (voir Jeannette Colombel) et un garçon en 1926 (voir André Prenant).
Après la publication d’un article dans la Revue philosophique en 1918, son mari l’encouragea à préparer l’agrégation ou une thèse. Elle réussit à l’agrégation de philosophie en 1920, au premier concours ouvert aux femmes. L’année suivante, elle fréquenta l’École des Hautes études sociales créée pour donner un enseignement des sciences sociales. Pendant l’année 1919-1920, quatre conférences sur la philosophie, dont deux de Léon Brunschwicg sur Descartes et sur Spinoza, y furent organisées dans un ensemble intitulé « La tradition philosophique ». En 1920-1921, d’autres auteurs moins prestigieux par un « retour direct aux œuvres françaises du XIXeme siècle » voulurent montrer qu’elles « ne doivent rien d’essentiel à la métaphysique allemande » et souligner « les traditions humanistes de notre civilisation ». Lucy Prenant y présenta deux conférences sur les philosophes Antoine-Augustin Cournot et Charles Renouvier, qui après avoir connu « les résultats positifs des sciences » firent « l’effort pour dominer celles-ci et apprécier […] leur valeur respective ». Les textes de neuf hommes et une femme furent regroupés dans l’ouvrage collectif, La tradition philosophique et la pensée française contemporaine édité chez Félix Alcan en 1922 dans la collection "Bibliothèque de philosophie contemporaine".
Lucie Prenant enseigna les lettres pendant deux heures hebdomadaires en classe préparatoire à l’École centrale au lycée Jules Ferry à Paris en 1920-1921 puis obtint des suppléances au lycée de jeunes filles du Havre (Seine-Inférieure) en 1921-1922. Nommée au lycée Jeanne Hachette de Beauvais (Oise), elle y enseigna deux mois puis obtint un congé avec bourse (novembre 1922-novembre 1924) pour préparer une thèse sur « la part de l’engagement personnel dans la recherche de la vérité » (Geneviève Rodis-Lewis), sans doute sous la direction de Léon Brunschwig. Elle rejoignit son mari devenu directeur du laboratoire de Roscoff (Finistère). Elle prolongea son congé, sans bourse et sans traitement, de novembre 1924 à avril 1925. Professeur de lettres et de philosophie au collège d’Avranches (Manche) pendant quelques mois, elle fut nommée professeur de philosophie au lycée Fénelon à Paris en octobre 1925.
Elle voulait pouvoir élever sa fille selon les préceptes de Jean-Jacques Rousseau, sans intervention de l’école primaire, mais se résigna à l’inscrire dans les classes primaires du petit lycée Victor Duruy, proche de son domicile rue Labrouste (XVeme arrondissement). Puis le couple habita à partir de 1927 rue Toullier (Veme arr.) dans l’appartement des parents décédés de Marcel Prenant.
En mars 1930, son mari étant invité en Roumanie, elle demanda un congé de deux semaines à la suite des vacances de Pâques avec, lors du voyage retour, la possibilité de passer par la Grèce pour assister aux fêtes de Delphes (1er-3 mai). Elle expliquait : « la nécessité de passer par la Roumanie m’empêche de bénéficier de cette croisière [de l’association Guillaume Budé] en congé payé comme font plusieurs de mes collègues ». Deux ans plus tard, l’inspecteur général Dominique Parodi estimait que ses « qualités pédagogiques sont certainement inférieures aux qualités morales et proprement intellectuelles ». En 1938, la directrice du lycée Fénelon la jugeait « bonne et gentille avec ses élèves et collaboratrice agréable ». Aussi obtint-elle la classe de 1ere supérieure (Hypokhâgne) à partir d’octobre 1939.
Au milieu des années 1930, Lucy Prenant, syndiquée (sans doute à la section des professeurs de la Fédération unitaire de l’Enseignement), rejoignit en 1936 le Syndicat des professeurs de lycées de CGT, puis, à partir de décembre 1937, avec sa collègue de lycée Jacqueline Marchand), le Syndicat du personnel de l’enseignement secondaire affilié à la Fédération générale de l’Enseignement CGT.
Elle fit partie du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes et d’associations qui se retrouvèrent dans le soutien au Front populaire. Militante du comité des femmes contre la guerre et pour la paix, elle fut active dans le soutien à la République espagnole. Après avoir hébergé des antifascistes allemands, elle fit de même avec des réfugiés espagnols. Elle appuyait aussi la création de la revue La Pensée où se retrouvaient nombre de ses amis, dont René Maublanc, qu’elle connaissait depuis ses études. Adhérente depuis la fin des années 1920 au cercle des « Amis de la Russie neuve », elle était assidue aux réunions avec son mari.
Ses recherches sur la pensée philosophique privilégiaient « la psychologie de l’intelligence » (G. Rodis-Lewis) chez Descartes, Spinoza et Leibniz. Elle publia un article dans la revue Europe, en juillet 1937 « Les moments du développement de la raison chez Descartes ». Elle participa à la publication en deux volumes des causeries faites par des intellectuels engagés sous le titre général « À la lumière du marxisme ». Elle dut aussi, comme son mari, donner des cours à l’Université ouvrière.
Jeannette Colombel, sa fille, écrivit deux ouvrages de type autobiographique qui permettaient de saisir certains aspects de sa personnalité de Lucy Prenant. D’un « genre de beauté altière à l’espagnole » (Les amants de l’ombre, -A- p. 17), elle valorisait la santé physique par la marche et la natation. Peu portée sur les tâches ménagères, pendant longtemps secondée par sa mère « bonne mamma juive » (La nostalgie de l’espérance, - E -p. 18), elle employa après son installation à Paris une domestique et après la guerre, une autre femme, prénommée Régine, qui l’accompagna jusqu’à son décès. De caractère rigide, souvent prude, particulièrement sur les questions morales, elle privilégiait la réussite universitaire considérant l’agrégation comme un « minimum requis » (E, p. 183)
Au début de la guerre, à la mi-octobre 1939, Lucy Prenant commença à enseigner au lycée de jeunes filles de Bordeaux (Gironde), son poste parisien ayant été transféré en province au centre préparatoire aux grandes écoles. Son enseignement portait sur Descartes et Spinoza en hypokhâgne et sur Leibniz en khâgne. Elle préparait pour les éditions Aubier-Montaigne la publication d’œuvres de ce dernier qu’elle acheva en mai 1940. Elle habita dans la préfecture de la Gironde pendant l’année scolaire 1939-1940 avec sa mère et son fils, élève au lycée Montaigne. Séparée de son mari, mobilisé dans l’Aisne comme capitaine dans les transmissions, elle entretenait avec lui une correspondance journalière, dans laquelle revenaient souvent des questions financières résultant de l’obligation d’avoir deux logements et de la dépendance financière imposée aux femmes par rapport au mari. Après quelques semaines de silence et d’inquiétude, la correspondance avec son mari, fait prisonnier le 18 mai, puis en captivité (oflag 4D), reprit, plus clairsemée et plus générale, fin juin 1940. Après son dernier cours pour huit élèves, le 30 juillet, elle regagna Paris. Elle retrouva son poste au lycée Fénelon et commença des cours destinés aux 15 élèves préparant la session de septembre du baccalauréat. Depuis novembre 1940, elle s’attendait à être mise à la retraite et envisageait de travailler dans des cours privés qui refusèrent de l’engager. Le 20 décembre 1940, un arrêté la mettait à la retraite comme israélite. Fit-elle la demande de réintégration comme le lui conseilla son mari en août 1941 ? Plus tard, elle fut empêchée par son mari de porter l’étoile jaune mais, en relation avec l’Union générale des Israélites, mit son ancienne expérience d’infirmière pour soigner des familles juives.
Lucy Prenant resta à Paris avec son fils, élève au lycée Henri IV, reçu à la première partie du baccalauréat en juillet 1941. Elle allait souvent travailler avec son fils dans le bureau de son mari à la Faculté des Sciences pour des raisons de chauffage. « Je travaille au labo comme un moine par thermotropisme » (25 janvier 1941). Sa fille Jeannette, mariée, passait l’agrégation et attendait un enfant qui naquit en décembre 1941.
Dans sa maison de campagne à Achères-la-Forêt (Seine-et-Marne), Lucy Prenant avait laissé des manuscrits de son mari et celui de sa thèse sur Spinoza. A la fin de septembre 1940, elle constata que la maison avait été l’objet de vandalisme et ne retrouva pas le manuscrit de sa thèse. Elle annonça ce « coup dur » à son mari et ajouta « J’en ai beaucoup de peine. Mes nuits ont été heurtées » (lettre du 1er octobre 1940). Encouragée par son fils, elle annonça, le 6 octobre 1940, « Je suis en train d’organiser le bureau pour pouvoir me remettre avec ardeur à ma pauvre thèse ». L’état de « professeur honoraire […] me laisse tout mon temps […] » ironisait-elle (lettre du 13 décembre 1940). Elle reprit sans doute contact avec Léon Brunschwig, privé de sa chaire, replié à Aix-en-Provence. La disparition de sa thèse fut-elle la conséquence d’un pillage des troupes allemandes qu’elle n’aurait pas indiqué en 1940 en raison de la captivité de Marcel Prenant ? Après la guerre, cette explication fut la seule retenue. Elle vécut cette disparition comme une « humiliation ».
Elle évoquait parfois son travail « assidu » sur Descartes, Leibniz et Spinoza dans ses lettres à son mari dont la captivité fut prolongée. Lors du retour des officiers anciens combattants, il fut retenu en captivité à la suite de malveillances de la part de certains français : « Qui eût pu imaginer pareille méchanceté calomnieuse, et chez les camarades ? » jugea-t-elle, le 17 août 1941. Elle fit plusieurs démarches pour obtenir sa libération et, notamment, rencontra, vers le 15 octobre, Jérôme Carcopino, secrétaire d’État à l’Éducation nationale et à la Jeunesse. Le retour en France de Marcel Prenant intervint en novembre 1941.
Lucy Prenant publia un article dans la Revue d’Histoire de la Philosophie et d’Histoire générale de la Civilisation (avril-juin 1942), sous le titre « Esthétique et sagesse cartésienne » à partir du premier écrit de Descartes, l’Abrégé de musique. Avec sa mère, elle vécut le plus souvent à Achères-la-Forêt après le retour de captivité de son mari qui reprit son service à la Faculté des Sciences et s’engagea progressivement dans la Résistance combattante. En liaison avec ses amis engagés dans les luttes antifascistes, proche du groupe FTP de la forêt de Fontainebleau qui comprenait son fils, elle fut cachée avec sa mère par des amis à Achères, puis à Paris. Elle resta en contact, avec la revue clandestine L’Université libre. Sa fille assura au début la relation avec les mouvements clandestins de la Résistance coordonnés par le Front national.
A la Libération, Edmée Hatinguais, directrice de l’École normale supérieure de Sèvres depuis 1941, fut suspendue le 24 août 1944. Le secrétaire général à l’Éducation nationale Henri Wallon remit en fonction l’ancienne directrice, Eugénie Cotton, écartée par le gouvernement de Vichy en 1941. Comme cette dernière ne souhaita pas reprendre son service, Lucy Prenant, qui participait aux commissions universitaires, fut « chargée des fonctions de directrice de l’ENS de Sèvres » selon l’arrêté du 30 août 1944, confirmé le 24 novembre 1944. La commission d’enquête ne retint aucune faute contre Edmée Hatinguais, le 26 janvier 1945, qui fut rétablie dans des fonctions de directrice du Centre international des études pédagogiques à Sèvres, notamment chargée de la mise en place pédagogique des « classes nouvelles ». Lucy Prenant, soucieuse d’aligner ses élèves sur les garçons, fut considérée comme directrice de l’ENS qui libéra les locaux de l’établissement de Sèvres, pour s’installer dans divers locaux parisiens. En raison du manque de crédits, après de nombreuses difficultés surmontées grâce à la ténacité de sa directrice, des bâtiments furent aménagés sur des terrains du ministère en face de la Cité universitaire, 48 boulevard Jourdan à partir d’avril 1949, l’inauguration officielle se déroulant en décembre 1949. A partir de l’année suivante, Lucy Prenant, dépendant comme le directeur de l’ENS de la rue d’Ulm, de la direction de l’enseignement supérieur, assurait des cours pour les élèves. Elle demanda l’autorisation du Ministère pour répondre à une invitation du doyen de la Faculté de Leyde (Pays-Bas), pour accompagner des élèves géographes ou naturalistes au Maroc sous la direction de Jean Dresch pendant les vacances scolaires en octobre 1951 ou pour aller en vacances en Italie le mois précédent. En septembre 1952, pour accompagner son mari invité, avec d’autres universitaires communistes, en Roumanie par l’Institut roumain pour les relations culturelles avec l’étranger, elle obtint l’autorisation mais y renonça prétextant une blessure de son mari lors d’une chute dans les rochers de Roscoff. En septembre-octobre 1954, invitée avec d’autres universitaires à venir en Chine dans le cadre des amitiés franco-chinoises, elle écrivit « Je suis revenue très enthousiaste, apportant une impression de libération véritable pour la quasi unanimité de la population. »
Durant sa direction très libérale de l’ENS, cherchant à répondre « à ses principes d’égalité entre les femmes et les hommes » (E, p. 148), elle encouragea les élèves motivées à s’orienter vers la recherche. Le statut de fonctionnaires pour les élèves fut acquis en deux étapes, 1948 et 1953. Le nombre des élèves s’accrut progressivement. Des modifications furent introduites (stages à l’étranger, bibliothèque, création de postes d’enseignants, conférences etc…). Lors du centenaire de Sèvres, Annie Kriegel, dans Le Figaro du 3 décembre 1981, évoquait cette « image vivante et douce de la bonté et de la dignité » tandis que « sa tolérance est proverbiale » (E, p. 176). Elle aspirait à un œcuménisme et entretenait de bonnes relations avec les responsables et les pratiquants des diverses religions. Elle poursuivit ses recherches sur Descartes, Spinoza et Leibniz dont elle republia des pages choisies après sa retraite d’autant que le premier ouvrage paru en novembre 1940 avait été bien accueilli mais mal diffusé. Elle n’eut pas le temps de terminer le deuxième tome. Elle publia un article en 1946 sur « Le “raisonnable“ chez Leibniz » (1946) et un autre sur « Le sentiment de l’évidence », commencé avant la guerre, « reconstruit » (selon elle, lettre du 1er octobre 1940), où apparaissaient des critiques de la pensée de Descartes (1951) dans la Revue philosophique. Elle les prolongea dans une communication (« Rôle et limite de la psychologie dans la méthode et la philosophie de Descartes ») au colloque sur Descartes (1955) à l’Abbaye de Royaumont (publié dans Cahiers de Royaumont aux éditions de Minuit en 1957).
En 1955, elle demanda à être maintenue en activité au-delà de 65 ans en raison de son éviction par le gouvernement de Vichy. Le ministère refusa car elle n’avait pas eu trois enfants. Sa mise à la retraite fut fixée au 10 juillet 1956 avec maintien jusqu’à la fin de l’année scolaire. L’administration s’aperçut alors qu’elle n’avait jamais été nommée directrice, mais « faisant fonction » et qu’elle ne pouvait prétendre qu’à une retraite de professeur agrégée au neuvième échelon. Elle protesta de diverses manières à propos de ce qu’elle qualifia de « subtilité juridique qui m’avait échappée ». Elle estima que la lettre du 7 décembre 1950 où elle était qualifiée de directrice « Madame la Directrice », accompagnant l’arrêté de promotion du 14 octobre 1957, apportait une preuve. Après sa demande de remboursement des cotisations excessives retenues sur son traitement pendant la période de direction puisqu’elle n’avait pas été payée comme détachée de l’enseignement secondaire, le directeur du service concerné au ministère estima que sa requête n’était pas recevable.
Pendant cette période, les positions politiques de Lucy Prenant furent une des raisons de ses difficultés. Non-adhérente du Parti communiste français, plutôt de sensibilité libertaire, après avoir été une des responsables de l’Union française universitaire, elle gardait de la sympathie pour diverses revues communistes (dont La Pensée et A la lumière du marxisme) qui reparurent à la Libération. Membre influente de France-URSS et des Amitiés franco-chinoises, elle prit souvent des positions distantes par rapport aux engagements de son mari mais tous deux se retrouvaient dans une opposition à la politique algérienne des divers gouvernements français. Elle fréquentait des philosophes de son temps dont Gaston Bachelard et sa fille, Maurice Merleau-Ponty, Vladimir Jankélévitch et des intellectuels communistes critiques. Elle suivait avec intérêt le devenir des anciennes normaliennes. Utilisant régulièrement les services de la Bibliothèque nationale notamment pour parfaire sa connaissance de Leibniz, elle sympathisa beaucoup, à la différence de son mari, avec le mouvement étudiant de 1968.
Lucy Prenant, décédée à l’hôpital de la Pitié-Salpétrière, fut enterrée, comme sa mère, dans un des deux carrés juifs du cimetière Montparnasse.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article189467, notice PRENANT Lucy [née SOTO Lucy, Rachel]. Dite souvent Lucie par Jacques Girault, version mise en ligne le 8 février 2017, dernière modification le 22 mars 2022.

Par Jacques Girault

Octobre 1946, Lucy Prenant à Marseille
Octobre 1946, Lucy Prenant à Marseille
1970 Carte de la Bibliothèque nationale
1970 Carte de la Bibliothèque nationale
Avril 1909, Lucy Soto à la Faculté des Sciences
Avril 1909, Lucy Soto à la Faculté des Sciences
 1940 Ouvrage sur Leibniz
1940 Ouvrage sur Leibniz

ŒUVRE : Le fichier de la BNF comportait en 2016 une référence, la réédition de textes de Leibniz, revue et complétée chez Aubier-Montaigne en 1972.

SOURCES : Arch. Nat. AJ/16/ 4954, 5744, F/17/26592. — Arch. privées (André Prenant, son fils, Michèle Prenant, son épouse). — Presse nationale. — Entretiens avec Jeannette Colombel sur France Culture, « Ça me dit l’après-midi », 29 décembre 2007, « A voix nue », juillet 2011 (cinq émissions). — Renseignements fournis par Yves Colombel, Françoise Glucksmann, Marie-Claude Janin, Françoise Prenant. — Notes de Robert Manaranche.— Articles nécrologiques de G. Rodis-Lewis et de J. Serre, dans Sévriennes d’hier et d’aujourd’hui, septembre 1978. — Prenant (Marcel), Toute une vie à gauche, Paris, Encre, 1980. — Sirinelli (Jean-François), École normale supérieure — Le livre du Bicentenaire, Paris, PUF. — François Chaubet, « Léon Brunschvicg, destin d’un philosophe sous l’Occupation » (actes du colloque, « Déplacements, dérangements, bouleversement : Artistes et intellectuels déplacés en zone sud (1940-1944) », Marseille, 3-4 juin 2005, in « http://publications.univ-provence.fr/ddb/document.php?id=87. — Notes d’Alain Dalançon, de Pierre-François Moreau.
NB : Cette notice biographique résulte d’une commande tardive passée par la direction du Maitron à Jacques Girault qui a pris connaissance, après avoir achevé la rédaction de sa notice, de l’article de Frédérique Mattonti, « Quelques fragments de Lucy Prenant » dans L’archicube, décembre 2016, p. 34-40.

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