CONSTANT Pierre, Éloi

Par Josette Ueberschlag

Né le 12 octobre 1923 à Visan (Vaucluse), mort le 1er juillet 1999 à Orange (Vaucluse) ; instituteur, conseiller pédagogique ; résistant, militant syndicaliste du SNI (tendance École émancipée), adepte des techniques Freinet ; militant pacifiste et espérantiste ; maire de Visan (Vaucluse) de 1979 à 1989.

Pierre et Josette Constant
Pierre et Josette Constant
1984, départ en retraite de Josette Constant

Pierre Constant était l’unique enfant d’une famille visanaise. Sa mère Berthe, Joséphine Clauzonnier (1896-1983) était ouvrière cartonnière ; son père Alphonse, Bertin Constant (1891-1963) était épicier à la naissance de son fils, ne pouvant plus exercer son métier de cultivateur pour cause de blessure de guerre. Envoyé au front au début de la Première Guerre mondiale et ayant fait preuve comme brancardier « d’un dévouement digne de tous les éloges dans la relève et le transport des blessés », il avait été gravement atteint par des éclats d’obus, le 5 septembre 1918 à Margival (Aisne).

Après l’obtention du brevet élémentaire en 1939, Pierre Constant devint élève maître à la rentrée scolaire d’octobre 1941 en classe de seconde au lycée de garçons Frédéric Mistral d’Avignon (Vaucluse) et fut reçu à la 1e partie du baccalauréat en 1943. Il fut enrôlé durant 8 mois aux Chantiers de jeunesse, de juillet 1943 à février 1944. Son père, qui avait été remobilisé en 1939-1940, s’était engagé dans les Forces françaises combattantes (réseau Scorpion) en décembre 1942 ; arrêté par la Gestapo, il fut emprisonné. À son tour, Pierre Constant, pour échapper au STO, se porta volontaire dans ce réseau Scorpion en mars 1944, et y demeura actif jusqu’au 8 mai 1945. Au cours de cette période, il obtint des facilités pour préparer et réussir la 2e partie du baccalauréat en novembre 1944.

Il effectua sa formation professionnelle à l’École normale d’instituteurs d’Avignon du 20 octobre 1945 au 28 avril 1946, année scolaire écourtée de quelques mois pour terminer son service militaire en application de l’ordonnance du GPRF du 8 septembre 1945. Cette dernière année d’étude scella une grande et forte amitié entre lui et plusieurs anciens camarades de lycée, élèves-maîtres : Martial Baillaud, Pierre Faraud, André Gente*, Lucien Perret* et Eugène Nicolas. Ces jeunes instituteurs se sentaient investis de grandes responsabilités dans la reconstruction du pays, notamment pour faire advenir une école émancipatrice pour le peuple et militèrent au Syndicat national des instituteurs aux Amis de l’École émancipée.

Pierre Constant fut nommé instituteur à Richerenches à la rentrée 1946, ce qui comblait ses vœux de repli sur « la petite patrie », dans cette commune qui, comme son village natal, appartient au canton vauclusien de Valréas, entièrement enclavé dans le département de la Drôme.

Aux congés de Pâques 1946, il avait rencontré Célestin Freinet à Cannes : « Mon adhésion [à la pédagogie Freinet] date de cet instant ; elle fut profonde et totale, je dirais instinctive. Je l’ai mûrie et j’ai tâché de lui rester fidèle tout au long de ma vie. L’École normale avait mis à notre disposition la revue L’Éducateur avec sa couverture rose dont j’ai encore la nostalgie… L’Éducateur, ce fut pour nous comme une bouffée d’air qui nous donnait des exemples et nous portait à les suivre en nous expliquant les diverses techniques. » Pierre Constant pratiqua donc tout de suite le texte libre et la technique de l’imprimerie avec ses élèves d’une classe géminée de CM-fin d’études. En 1947, il entreprit une correspondance interscolaire en espéranto avec la classe allemande de Margaret Waldowski à Birkenverder, à 25 km au nord de Berlin.

Il aida aussi dès cette période à la renaissance de la Fédération des œuvres laïques en Vaucluse en s’investissant dans les activités péri et post-scolaires. Il fonda au début des années cinquante à Richerenches, une association sportive USEP (Union sportive de l’enseignement du premier degré) affiliée à la FOL.

Il se maria à Orange, le 7 avril 1953, à une institutrice, Joséphine Albero, connue ensuite sous le nom de Josette Constant, en poste à Visan depuis 1952. Ses parents d’origine espagnole étaient des émigrés, lui de la première génération et elle de la seconde. Pierre et Josette Constant eurent deux filles, Claude née à Valréas le 3 mai 1956, devenue institutrice, et Fabienne, née à Orange le 30 avril 1963, professeur d’arts plastiques dans une structure rattachée à "France handicap".

Lorsque le poste de directeur de l’école de garçons de Visan se libéra à la rentrée 1955, Pierre Constant le demanda et l’obtint. Remarqué sept ans plus tard pour son sens des relations humaines, il fut appelé comme conseiller pédagogique auprès de l’inspecteur départemental de la circonscription d’Orange, puis en 1967, de celle de Bollène (Vaucluse). Durant 17 ans, chargé de la formation des instituteurs remplaçants, « il donna la pleine mesure de ses moyens » selon l’inspecteur de la circonscription. Bien qu’ayant en charge 44 maîtres remplaçants en 1964, il multipliait les visites auprès de chacun d’eux, une ou deux fois par trimestre.

De ses années de guerre et de résistance, Pierre Constant conserva le goût de l’intelligence collective, la seule qui vaille, disait-il, en toutes circonstances. Apprécié pour sa modestie, son calme et sa grande culture, il avait acquis une autorité certaine auprès de ses collègues. Aussi, durant quarante ans, son rôle fut prépondérant dans le développement du Groupe départemental vauclusien (GD 84) solidement amarré à l’ICEM (Institut coopératif de l’École moderne). L’événement marquant pour le GD 84 fut l’organisation du grand congrès ICEM à Avignon à Pâques 1960. Avec André Gente, il y fut responsable des contacts avec la presse.

Au sein du mouvement Freinet lui-même, il anima la commission des conseillers pédagogiques de 1964 jusqu’à sa retraite en 1979. Il fut également membre fondateur de l’association des Amis de Freinet en 1969. Sa volonté de s’ouvrir aux innovations l’amena à publier régulièrement dans L’Éducateur, des comptes rendus d’ouvrages et d’articles, notamment ceux de la revue L’école et la vie éditée par Armand Colin.

Ayant participé à des actions pour la paix aux côtés du PCF sans en être membre, Pierre Constant était devenu correspondant pour le Vaucluse, du journal régional communiste La Marseillaise.

Il devint maire de Visan en 1979 par suite du décès du maire en place et le resta jusqu’à 1989.

Titulaire de la Croix du combattant volontaire et de la Croix de guerre 1939-1945 avec étoile de bronze, il fut enterré dans sa commune natale. Le groupe scolaire élémentaire de Visan, inauguré en décembre 1992, porte le nom de son épouse, Josette Constant*.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article219697, notice CONSTANT Pierre, Éloi par Josette Ueberschlag, version mise en ligne le 21 octobre 2019, dernière modification le 31 janvier 2022.

Par Josette Ueberschlag

Pierre et Josette Constant
Pierre et Josette Constant
1984, départ en retraite de Josette Constant
Pierre Constant
Pierre Constant

ŒUVRE : La truffe, Bibliothèque de Travail, n° 292, 1er décembre 1954, co-auteur avec René Grosso et Pierre Laborderie. — Le Vaucluse, jardin de Provence, Bibliothèque de Travail, n° 435, 10 juin 1959, co-auteur avec le Groupe vauclusien de l’École moderne. — Articles nombreux dans L’Éducateur et un autre sur l’école à cinq classes de Josette Constant, Art enfantin, n°3-4, juin-sept. 1960, p. 26-27, le numéro entier étant consacré à l’exposition d’Art enfantin du 16e congrès ICEM à Avignon, Pâques 1960.

SOURCES : Arch. de l’inspection académique du Vaucluse, académie d’Aix-Marseille. —Arch. mun. de Richerenches et de Visan (dont état civil). — L’Éducateur n°9-10, 1er-15 fév. 1948, p. 40. — René Grosso, Histoire de la Fédération des œuvres laïques de Vaucluse, Avignon : FOL de Vaucluse, 1981, p. 383. — Témoignage de Pierre Constant in Le mouvement Freinet au quotidien. Des praticiens témoignent, Brest, éd. du Liogan, 1997, p. 34-35. — Renseignements fournis par ses filles Claude et Fabienne, et par Jean-Paul Blanc.

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