FRIBOURG Ernest, Édouard

Né à Paris le 26 mars 1834, mort à Neuilly-sur-Marne (Seine-et-Oise, aujourd’hui Seine-Saint-Denis) le 26 mai 1903 ; graveur décorateur, franc-maçon de la loge L’Avenir — Voir E. Thirifocq ; un des fondateurs de l’Internationale en France.

Fribourg fut, avec Tolain et Ch. Limousin, un des trois premiers secrétaires-correspondants pour la France de l’Association Internationale des Travailleurs fondée lors du meeting londonien du 28 septembre 1864. Ils ouvrirent, le 8 janvier 1865, le premier bureau de Paris au 44, rue des Gravilliers, IIIe arr.

Fribourg reçut, dans le courant de février, des cartes d’adhésion (cf. Correspondance K. Marx-F. Engels, op. cit., t. VIII, lettre du 10 février). Dans le courant de cette même année il rédigea, avec Ch. Limousin, une lettre destinée aux adhérents de l’Internationale en vue de préparer le premier congrès qui devait se réunir en 1865 à Bruxelles. (Le congrès fut remis à l’année suivante, mais une conférence eut lieu à Londres le 23 septembre, à laquelle Fribourg assista.) Cette lettre est donnée dans la brochure Congrès ouvrier. Association Internationale des Travailleurs reproduite pp. 16-24 du t. I de La Première Internationale (J. Freymond), op. cit. Toujours en 1865, Fribourg figure au nombre des rédacteurs du journal publié par le bureau parisien de l’AIT et qui s’intitula successivement la Tribune ouvrière, 4 juin-9 juillet (le n° 5, imprimé à Bruxelles, fut saisi), La Presse ouvrière (13 août, n° unique publié à Bruxelles et saisi en France), La Fourmi (24 septembre, n° unique publié à Bruxelles). Clémence, Tolain, Fribourg, Bourdon et Varlin, administrateurs du journal (cf. Fribourg, L’Association Internationale des Travailleurs, op. cit., n. 23) constituèrent une délégation qui protesta en vain contre l’impossibilité de répandre leur publication. En 1865-1866, Fribourg fut également un des correspondants au sein de l’A.I.T. du périodique La Mutualité. Revue du Travail, des sociétés coopératives et de secours mutuels dirigé par Jules Vinçard.

Du 3 au 8 septembre 1866 se tint à Genève le premier congrès de l’Internationale. Fribourg y participa, avec Bourdon, Camélinat, Chemalé, Cultin, Guyard, Malon, Murat, Perrachon, Tolain, Varlin, comme délégué des sections de Paris. Au cours de la séance du 4 septembre, il donna lecture du rapport établi par la délégation parisienne et fut élu membre de la commission qui eut à élaborer les statuts définitifs de l’association. Il fit également partie de la commission de cinq membres chargée de rédiger les règlements spéciaux de l’association. Le 6 septembre, à propos de l’article VI du programme : « Sociétés ouvrières. Leur passé, leur présent, leur avenir », il fit, au nom de la délégation parisienne, la proposition suivante qui fut adoptée :

« Le passé, c’est la corporation, c’est-à-dire le despotisme ; le présent, c’est l’insolidarité, l’isolement, c’est-à-dire l’antagonisme et l’asservissement au capital ; l’avenir, c’est l’identité du consommateur, du producteur et du capitaliste amenée par la coopération. » À propos de l’article VIII, il intervint encore, demandant la mise à l’étude pour le prochain congrès du « crédit international » et de « l’idée d’une fédération de toutes les banques ouvrières créées ou à créer pour les relier plus tard par un établissement central de l’Association Internationale des Travailleurs ». Le lendemain, 7, associé aux délégués Chemalé, Perrachon et Camélinat, il présenta une proposition relative à l’article IV du programme, « Travail des femmes et des enfants », proposition qui, combattue par Varlin et Bourdon, fut néanmoins adoptée. Elle disait notamment :

« Au point de vue physique, moral et social, le travail des femmes et des enfants dans les manufactures doit être énergiquement condamné en principe comme une des causes les plus actives de la dégénérescence de l’espèce humaine et comme un des plus puissants moyens de démoralisation mis en œuvre par la caste capitaliste.
« La femme n’est point faite pour travailler, sa place est au foyer de la famille, elle est l’éducatrice naturelle de l’enfant, elle seule peut le préparer à l’existence civique, mâle et libre [...] »

Après le congrès, le bureau de Paris se donna un règlement qui institua une commission administrative de quinze membres. Elle fut élue en octobre, et Fribourg en fit partie — Voir Tolain.

En février 1867, lors de la grève des bronziers parisiens, Fribourg se rendit à Londres avec Tolain et trois délégués des grévistes, Camélinat, Kin et Valdun, pour solliciter l’appui des Trade-Unions. Un soutien financier, à vrai dire léger, fut accordé, mais « l’effet fut immense ». On crut « que l’envoi des Anglais s’était élevé à plusieurs centaines de mille francs et l’Internationale laissa dire » (Fribourg, L’Association Internationale des Travailleurs, p. 101.)

En mars, ce fut la grève des ouvriers de Roubaix. Il y eut bris de machines par des grévistes. La troupe occupa la ville, et des dizaines d’arrestations furent opérées. Tolain, Fribourg et Varlin, en tant que secrétaires-correspondants de la commission parisienne, signèrent un manifeste qui défendait le droit des ouvriers à une augmentation proportionnelle alors que, par un nouvel outillage, une production plus considérable leur était imposée, mais qui mettait en garde les grévistes contre les actes de destruction dont ils s’étaient rendus coupables.

En juillet 1868, avec Chemalé, il lança Le Fédéraliste, dans lequel il était déclaré : « C’est à l’étude, c’est à la science que le Prolétariat demande désormais la solution des problèmes desquels dépend son émancipation. »

Contrairement à ce qu’affirme J. Guillaume dans Karl Marx pangermaniste, Fribourg, s’il assista au deuxième congrès de l’Internationale à Lausanne, en septembre 1867, n’y fut pas présent au titre de délégué, mais comme journaliste. Il assista au congrès de la Ligue de la Paix et de la Liberté tenu du 9 au 12 septembre à Genève et en rendit compte dans La Liberté. L’année suivante, il assista encore au congrès de la Ligue qui se tenait cette fois à Berne. Il était toujours membre de l’Internationale, mais, selon J. Guillaume (Karl Marx pangermaniste, p. 54, n. 1), « Fribourg, dès ce moment, avait commencé une évolution qui l’amena, en 1871 — ainsi que quelques autres ex-ouvriers parisiens, Tolain, Murat, Héligon — à se ranger parmi les adversaires de la Commune de Paris. »

En août, il s’était d’ailleurs démis de ses fonctions, mais pour des motifs « entièrement du domaine de la vie privée » — situation difficile comme commerçant et fabricant. Il demeurait toutefois membre de l’association, pour peu de temps il est vrai, sans qu’il soit possible de fixer avec précision la date de sa démission.

Après la Commune, en septembre 1872, Fribourg participa au sixième congrès de la Ligue de la Paix et de La Liberté tenu à Lugano (Arch. PPo., B a/438).

Nous donnerons pour finir, et sous toutes réserves, la note suivante concernant Fribourg, que nous avons trouvée à Arch. Nat. C 2876 :
« Dessinateur en broderies. Internationaliste. Moralité douteuse. Avait la confiance de M. É. de Girardin. A été l’homme du prince Napoléon avec Tolain. Était de la police. Mangeait à tous râteliers. Payé par la police municipale comme agent de police 100-150 F par mois. »

Cette note, datée Versailles, 15 juillet 1871, figure dans les dossiers concernant des citoyens compromis dans les affaires de la Commune. Elle est la « brève » copie que fit prendre M. de Kératry quand il était préfet de police. Elle fut transmise au comte Daru, président de la Commission d’enquête sur la Commune.

Fribourg se maria deux fois : en 1855, Paris avec Louise Joséphine Deprelles, décédée à Paris XXe le 7 novembre 1881, et le 22 décembre 1881 avec Maria Marcelline Darras, décédée à Paris XIIIe le 15 août 1894.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article59612, notice FRIBOURG Ernest, Édouard, version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 24 juin 2019.

ŒUVRE : L’Association internationale des travailleurs, A. Le Chevalier, Paris, 1871, 212 p. Bibl. Nat., 8° Lb 57/2616.

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE : État-civil. – La Première Internationale (J. Freymond), op. cit. — Correspondance K. Marx-F. Engels publiée par A. Bebel et E. Bernstein dans œuvres complètes de Karl Marx, Costes, Paris. — J. Guillaume, L’Internationale..., op. cit. et Karl Marx pangermaniste, Paris, 1915. — F. Pinon, Annuaire universel de tous les rites de la Maçonnerie. – Note de Jean-Pierre Bonnet.

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