GIOVANNELLI François

Par François Prigent

Né le 8 mai 1907 à Ajaccio (Corse) et mort le 26 novembre 1986 à Inzinzac-Lochrist (Morbihan) ; comptable aux Forges puis directeur de coopérative ; militant SFIO, syndicaliste CGT puis FO et coopérateur du Morbihan, dirigeant départemental de la SFIO du Morbihan, président fondateur de l’US Montagnarde, président de la FOL, secrétaire de la section SFIO d’Inzinzac-Lochrist (1944) ; résistant ; conseiller municipal (1938-1941), puis maire (1945-1977) d’Inzinzac-Lochrist.

Passé par l’EPS jusqu’à l’âge de 14 ans, son père Ange Giovannelli fut élu conseiller d’arrondissement radical à Ajaccio au début du siècle. Receveur-buraliste, il arriva en Bretagne en 1910, suite à une mutation.
Sorti également de l’école laïque à 14 ans, François Giovannelli entra aux Forges d’Hennebont en 1927 comme employé de bureau (comptable), adhérant immédiatement à la CGT où il côtoyait Le Levé* et Florimond.

Il était très actif à l’Économie ouvrière hennebontaise (EOH), principale « coopérative rouge » en dehors de Lorient, fondée en 1903. Successivement administrateur, vice-président en 1937, président en 1938 et président-directeur-général en 1941, il fut le pilier de ce milieu coopérateur jusqu’en 1972.
Il adhéra à la SFIO en 1935 au contact du réseau militant d’Emmanuel Svob* (maire SFIO de Lorient en 1925, 1935 et 1945, conseiller général depuis 1928).
En 1936, il fonda le patronage laïque de l’US Montagnarde (club désormais célèbre pour ses exploits répétés en Coupe de France), dont il fut le président emblématique jusque dans les années 60. Athé, il fut très actif durant toute sa vie militante dans les filières laïques, en premier lieu au sein de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) dès la fin des années 20. Etait il franc-maçon ?

Dans la foulée des grèves massives de 1938 aux Forges (employant 3 000 ouvriers), ce leader local de la CGT entra au conseiller municipal en février 1938 sous l’étiquette SFIO avec 7 autres ouvriers du bloc SFIO-CGT. La liste Giovannelli était cependant minoritaire face à la coalition radicale-conservatrice Le Grand, qui avait le soutien du Maître des Forges, conseiller général et maire de Hennebont, Camille Herwegh.

En 1941, les 8 jeunes élus SFIO (François Giovannelli, Joseph Le Sciellour*, Jean Dréano, Antoine Dubois, Jean Le Gras*, Jules Le Scanff, Joseph Le Goff et Joseph Mouillour) s’opposèrent aux autorités de l’Occupation, en démissionnant collectivement.

En 1942, il rencontra Louis L’Hévéder*, qui intercéda auprès des services de la préfecture lors de son arrestation en septembre 1942 sur dénonciation. Il fut amené au centre de tri de Quimper. Ces enjeux de résistance furent l’objet de conflits politiques à la Libération.

En 1944, il refonda la section SFIO d’Inzinzac-Lochrist, avant de passer la main comme secrétaire de section à Albert Poignant dans les années 1960 seulement.
En 1945, la liste socialiste de Jean Le Gars s’imposa dans une campagne très dure face à la liste de droite et surtout face à la liste communiste, dotée des relais syndicaux (militants CGT) très puissants. Si les communistes l’emportaient massivement dans les villages de Lochrist (habitat ouvrier près des Forges) et La Montagne, la SFIO était majoritaire dans les 2 villages d’Inzinzac et de Penquesten, composant la commune multipolaire d’Inzinzac-Lochrist. Ce fut finalement François Giovannelli qui fut élu maire SFIO à 38 ans.

Parmi ses proches à la SFIO, implantée dans les filières ouvrières, on retrouvait Joseph Jégousse* (ouvrier devenu contremaître qui fut son premier adjoint), Jean Félix* (ouvrier d’usine, deuxième adjoint), Emile Moutte (contremaître, également premier adjoint) et Joseph Le Sciellour (coopérateur et contremaître, conseiller municipal).

Dirigeant départemental de la SFIO jusqu’au début des années 70, il était une figure du réseau d’élus SFIO de la génération Jean le Coutaller*. Troisième homme fort de la fédération derrière Jean Le Coutaller et Julien Le Pan* à la Libération, il refusa d’être secrétaire fédéral lors de la crise interne de 1948-1950.
En 1948, François Giovannelli participa au plan départemental à la scission FO, sans véritablement prendre de responsabilités importantes dans la fédération FO.
Il figurait en 4e position sur la liste SFIO aux législatives de juin 1951, qui obtint 13.69 % des suffrages exprimés et 34 097 voix (un élu, Jean Le Coutaller).
Administrateur dès 1949 puis président de la FOL en 1950-1951, il prit la suite de Raymond Moysan* (conseiller général SFIO de Lorient en 1932 et en 1945), avant de passer la main en 1958-1959 à Louis Le Moënic* (dignitaire franc-maçon, conseiller général de Plouay de 1945 à 1970 et maire d’Inguiniel entre 1945 et 1981). Les réseaux socialistes contrôlaient en effet l’essentiel des structures laïques depuis la Libération : SNI avec René Dervout*, CAL avec Emmanuel Le Visage*, maire de Locmiquélic dès 1936, UFOLEA avec Michel Masson*, maire de Pontivy entre 1965 et 1983, sans compter les différents patronages laïques.
Extrêmement présent à chaque étape de la crise des Forges dès les années 1950, il fut notamment le président du Comité de Défense en 1963. Son action s’appuyait notamment sur le soutien des réseaux FO avec Lucien Herpe*, Albert Le Moing, Michel Burel et Lucien Cocoal notamment.

Il marqua son opposition à la guerre d’Algérie, cosignant un tract controversé en 1957, en compagnie de René Dervout (passé au PSA ensuite), Joseph Kergaravat* (conseiller général de Gourin en 1955) et Louis le Moënic.

Il était suppléant de Louis Le Moënic aux législatives à Hennebont en 1958, obtenant 9 791 voix soit 21.32 % des suffrages exprimés. Il fut également candidat aux sénatoriales de 1959 sur la liste SFIO (16. 2 % des voix). A nouveau devancé par le PCF, il fut également candidat face à Paul Ihuel aux législatives de 1962 pour la SFIO, avec le docteur Guy Cohic* comme suppléant (6 784 voix, soit 17.42 % des suffrages exprimés).

Il était très actif dans le mouvement Léo-Lagrange à partir de 1956, inaugurant notamment en 1964 un centre culturel (Centre des Loisirs Populaires) à La Montagne lors de la venue de Gaston Defferre, qui bénéficiait du soutien des Lorientais Yves Allainmat*, Jean Lagarde* et Yves Guélard*.

En 1964, il prit sa retraite de directeur de coopérative, associée depuis les années 1950 avec la l’union coopérative lorientaise (UCL), menée par Jean Ardhouin* (PD-G de la banque des coopérateurs nationales). De 1947 à 1965 il siégea au conseil fédéral des coopératives de l’Ouest. Il fut par ailleurs administrateur de la coopérative des HLM du Morbihan durant dix ans.

Déjà candidat aux cantonales en 1958, il faillit être élu conseiller général de Hennebont en 1964, enregistrant finalement une défaite serrée face au docteur Ferdinand Thomas* (résistant conseiller général SFIO depuis 1945, passé à droite en 1951). Ainsi, les tensions étaient fortes avec le maire PC de Hennebont, syndicaliste SNI Eugène Crépeau* qui gagna le canton en 1976.

En 1967, il fut à nouveau suppléant aux législatives de Le Moënic (8 151 voix, soit 18.24 % des voix). Pourtant devancé, le duo socialiste ne se désista pas formellement en faveur du candidat communiste, ce qui suscita des tensions vives en raison de l’accord national FGDS/PCF qui permit le retrait de Jean Maurice et la victoire de Yves Allainmat à Lorient face à Pierre Messmer.

François Giovannelli assura le passage de relais entre les générations socialistes, lançant notamment la fête de la Rose en 1972, symbole du renouveau du PS. La venue de Mitterrand à Inzinzac-Lochrist en 1974 marqua également un tournant dans l’implantation du nouveau socle militant du PS.

En 1977, il prit sa retraite politique à l’occasion des municipales qui virent l’élection de son fils François Giovannelli* (professeur), maire jusqu’en 1996 et député PS entre 1981 et 1993.

Son beau-frère Joseph Coeffic* (mort à 86 ans), adhérent SFIO, était secrétaire de mairie avant Angelo Giovannelli, alors que le plus jeune fils Albert était directeur général des services à la ville de Lorient dès la période Le Drian*. Du clan Giovannelli émane aussi une véritable génération d’élus : Pierre Giovannelli, conseiller général de Quévilly (proche de Fabius), Mathilde Bienvenu, conseillère municipale de Lorient.

Positionné sur les courants Mauroy puis Mitterrand, il resta adhérent du PS jusqu’à son décès en 1986 à 79 ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article73232, notice GIOVANNELLI François par François Prigent, version mise en ligne le 12 août 2009, dernière modification le 9 juin 2022.

Par François Prigent

SOURCES : Arch. Dép. Morbihan 85 J. — Arch. fédérales du PS du Morbihan. — Arch. de l’OURS, dossiers Morbihan — Arch. de la FJJ, dossiers Morbihan. — Arch. de la fédération coopérative régionale de l’Ouest, fonds Gaumont-Prache. — Arch. Privées Louis L’Hévéder. — Arch. Privées Jean Le Coutaller. — Ecomusée de Inzinzac-Lochrist. — Le Rappel du Morbihan (1951-1986). — Ouest-France. — Christophe Rivière, « Les maires du Morbihan (1929-1953) », Les Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, n° 2, t. 113, juin 2006. — François Prigent (dir), « Figures militantes et réseaux socialistes dans le Morbihan au XXe siècle », dossier spécial in Recherche socialiste, n° 42, mars 2008. — Entretiens avec Jean Giovannelli, Angelo Giovannelli, Jean-Pierre Bageot, Pierre Postollec*, Jeannine Le Coutaller. — Notice DBMOF par J. Gaumont et G. Prache.

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