DRET Henri, Prosper

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Maitron patrimonial (2006-2024)

Né le 5 avril 1875 à Périgueux (Dordogne), mort le 9 août 1941 à Villeneuve-Saint-Georges ; ouvrier cordonnier ; secrétaire général de la Fédération nationale des Cuirs et Peaux de novembre 1905 à juillet 1908, puis de septembre 1915 à 1934.

Fils d’un militant prénommé Pierre employé de commerce qui mourut en octobre 1913, syndiqué en 1891, Henri Dret devint, en 1901, secrétaire du syndicat parisien de la chaussure cousu-main et, quatre ans plus tard, secrétaire général de la Fédération des Cuirs et Peaux constituée en 1893. Voir Vézole.

En juin 1906, délégué par la CGT à la propagande rurale en Seine-et-Marne, il contribua à la naissance de plusieurs organisations, notamment du syndicat des ouvriers agricoles de Mormant avec quatre cents membres le jour de sa constitution le 24 juin et huit cents peu après (Matillon, Les Syndicats ouvriers dans l’agriculture, 1911). Cette même année 1906, il assista au XVe congrès national corporatif – 9e de la CGT – tenu à Amiens du 8 au 16 octobre et il signa l’ordre du jour syndicaliste révolutionnaire présenté par Griffuelhes. Il assista également, avant la guerre, aux XVIIe et XVIIIe congrès, Toulouse, octobre 1910, et Le Havre, septembre 1912.

À Toulouse, il affirma ainsi son antiparlementarisme : « Si nous sommes contre le contrat collectif, c’est d’abord à cause de sa source même  ; venant du Parlement, il n’implique rien de bon pour la classe ouvrière » – cf. compte rendu, p. 301.

Mais Dret n’était pas seulement homme de congrès et, le 30 juillet 1908, au cours de la répression violente de la manifestation organisée à Villeneuve-Saint-Georges pour protester contre la fusillade dirigée, le 2 juin à Draveil, contre les grévistes, H. Dret fut blessé et dut être amputé du bras droit.

Conseiller prud’homme de la Seine depuis 1908, Dret devint spécialiste des questions prud’homales et, jusqu’à sa mort, fut secrétaire de la commission exécutive des conseils de prud’hommes de France et des colonies et, de 1924 à 1926, président ou vice-président de la section des Tissus de la Seine. Depuis 1910, il était également secrétaire au conseil judiciaire de la Bourse du Travail de Paris.

Syndicaliste révolutionnaire très engagé – il appartenait au « noyau » de la VIe ouvrière de P. Monatte – H. Dret figurait au Carnet B. Inscrit le 29  septembre 1914 au Carnet vert secret établi d’après le Carnet B, Dret se rallia, dès la déclaration de guerre, à la majorité favorable à l’union sacrée et le demeura. Son amputation du bras droit lui permit d’être réformé. Il fut l’organisateur des repas populaires à Villeneuve-Saint-Georges et le créateur, en 1917, d’un dispensaire antituberculeux transformé en 1920 en dispensaire de médecine générale dont il fut l’administrateur.

L’Union des syndicats de la Seine avait fondé le 18 décembre 1906 l’Union typographique de Villeneuve-Saint-Georges plus connue sous le nom d’Imprimerie ouvrière. Le directeur Henri Leduc ayant été mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, Dret assura l’intérim. La Fédération des Cuirs et Peaux lui confia à nouveau le secrétariat fédéral en 1915. Le Xe congrès fédéral réuni à Paris du 20 au 23 septembre 1920 le réélut par 83 voix contre 21, 4 abstentions et 12 absents (selon le compte rendu, mais l’Humanité du 24 septembre 1920 annonça 77 voix contre 21, 4  absents, 7 abstentions). Le secrétaire général précisait que la Bataille avait utilisé son nom sans y être autorisée et qu’il n’était pas un des fondateurs du journal qui succédait à la Bataille socialiste (compte rendu, p. 84). Sur l’évolution du syndicalisme international, il déclara  : « Je me refuse pour le moment d’aller à Moscou. Je m’y refuse catégoriquement, surtout dans les conditions où l’on voudrait nous y faire aller, en victimes expiatrices pour quelques-uns […] Je me refuse à aller à Moscou, pour semer sur le chemin de retour les forces ouvrières si péniblement organisées » (c.r., p. 145). Dret resta donc à la CGT lors de la scission syndicale. Au XIe congrès de la Fédération des Cuirs et Peaux (Strasbourg, 25-28 septembre 1922) il précisa sa position sur les rapports avec la CGTU : « Accord avec la Fédération unitaire, non. Avec les éléments la composant, peut-être : cela dépend des situations locales et de l’examen des cas dans les localités. » Le congrès le réélut à l’unanimité avec Roux. Il conserva cette fonction jusqu’en 1935.

Henri Dret qui avait été membre du POF en 1898 avant de connaître une phase anarchisante, revint au socialisme et fut trois fois candidat aux élections législatives en Seine-et-Oise après la Première Guerre mondiale. Le 16 novembre 1919, troisième de la liste dirigée par Noël Hardy (mais cinquième après les résultats), il échoua comme tous ses colistiers, avec 37 734 voix (moyenne de la liste 37 422) sur 237 755 électeurs inscrits, 175 917 votants et 171 398 suffrages exprimés. Le Parti socialiste SFIO le présenta avec Barrion aux élections législatives partielles de juin 1923. Le 11 mai 1924, candidat socialiste sur une liste de douze partisans du Cartel des gauches qui n’eut qu’un élu, il obtint 23 211 voix (moyenne de la liste 23 284) sur 256 329 inscrits 220 879 votants et 217 335 suffrages exprimés. Dret avait été élu conseiller municipal socialiste de Villeneuve-Saint-Georges le 11 février 1923. Il le resta jusqu’en 1931 et fonda le dispensaire antituberculeux.

Son frère Gaston, né en 1879, ouvrier typographe domicilié rue de Pluvier à Villeneuve-Saint-Georges, travaillait à l’Imprimerie ouvrière.

Henri Dret s’était marié à Villeneuve-Saint-Georges (Seine-et-Oise) le 6 décembre 1924.

 

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/dret-henri-prosper/, notice DRET Henri, Prosper par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 25 septembre 2009, dernière modification le 7 octobre 2024.

Maitron patrimonial (2006-2024)

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat. F7/13015, rapport du 4 janvier 1917, F7/13583, F7/13620, F7/13697, F7/13698. — Arch. PPo., 300. — Arch. Ass. Nat., résultats électoraux. — Arch. Dép. Seine-et-Oise, M non classé. — Presse syndicale. — Comptes rendus des congrès syndicaux. — Compère-Morel, Grand dictionnaire socialiste. — La CGT, op. cit., p. 586. — Jean-Louis Robert, Les ouvriers, la Patrie et la Révolution. 1914-1919, Annales littéraires de l’Université de Besançon, 1995. — L’Atelier, n° 38, 30 août 1941. — État civil de Périgueux.

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