Par Daniel Grason
Maitron patrimonial (2006-2024)
Né le 21 août 1897 à Varsovie (Pologne), fusillé comme otage le 15 décembre 1941 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; marchand ambulant en bonneterie.
Fils de Wolf et d’Esther, née Nelmann (Melman), Ichook Klajnfinger épousa Chana Drwalnick, dont il eut un fils Wolf, né le 6 juin 1922 à Varsovie. La famille arriva en France en 1931. Pour cause de mésentente, ils se séparèrent en 1938. Il vivait avec Fanny Berkovicova, née le 8 décembre 1906. Le couple demeurait 3 rue Rébeval à Paris (XIXe arr.).
Le 6 janvier 1939, un refus de séjour était notifié à Ichook Klajnfinger. Le 7 mai, il obtint une carte d’identité au titre de « sans profession » valable jusqu’au 14 février 1942. La préfecture de police signifia le 9 novembre 1940 un refus de séjour à Fanny Berkovicova. Elle parvint à obtenir du service de l’éloignement une autorisation à résider en France jusqu’au 8 septembre 1941.
Conformément à la loi du 27 septembre 1940 « relative à la situation des étrangers en surnombre dans l’économie nationale », les Juifs étaient mis en cas de besoin à la disposition d’employeurs. Le gouvernement de Vichy promulgua le statut des Juifs le 3 octobre 1940, puis le 2 juin 1941. L’article 4 indiquait : « Les Juifs ne peuvent exercer une profession commerciale, industrielle ou artisanale, ou une profession libre ». Pour vivre, enfreindre la loi était le moyen de survivre.
Une rafle eut lieu au restaurant Goura, 59 rue du Faubourg du Temple, à Paris (Xe arr.), connu comme un lieu de rendez-vous de communistes juifs. Le patron Israël Goura était un militant actif de la sous-section juive du Parti communiste, l’un des fondateurs, en décembre 1932 de la société Arbeiter Orden (Union des travailleurs artisans et marchands forains). Le 13 juin 1941 à 12 h 45, à un moment de pleine activité du restaurant, il y eut vingt-six arrestations dont celles d’Ichook Klajnfinger, Noech Kalwarja et Jacob Feldman. Il y eut trois femmes et deux hommes internés à Beaune-la-Rolande (Loiret), quatre furent déportés à Auschwitz (Pologne), ils y moururent. Huit étaient des Juifs polonais, et un, Juif russe réfugié.
Le 14 juin 1941, Ichook Klajnfinger était inculpé pour infraction à la loi du 11 février 1941 sur les textiles, non-déclaration de stocks, création de commerce, outrage à un inspecteur de police. Incarcéré à la prison de la Santé, il fut condamné le 2 août par la 13e chambre du tribunal correctionnel de la Seine à quatre mois de prison. Il fut transféré au camp de Drancy (Seine, Seine-Saint-Denis) réservé aux Juifs, au motif qu’il « était suspect au point de vue politique. Fréquentait assidûment les lieux de rendez-vous des communistes juifs de Paris et se livrait à la propagande clandestine en faveur de la IIIe Internationale. Individu dangereux pour l’ordre public ».
Le 14 décembre 1941, le général Von Stülpnagel faisait paraître un « Avis » : « Ces dernières semaines, des attentats à la dynamite et au revolver ont à nouveau été commis contre des membres de l’Armée allemande. Ces attentats ont pour auteur des éléments, parfois même jeunes, à la solde des Anglo-Saxons, des Juifs et des Bolcheviks et agissant selon les mots d’ordre infâmes de ceux-ci. Des soldats allemands ont été assassinés dans le dos et blessés. En aucun cas, les assassins ont été arrêtés ». Ichook Klajnfinger fut désigné comme otage et passé par les armes le 15 décembre 1941 au Mont-Valérien, inhumé au cimetière de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine).
Sa femme Chana fut déportée par le convoi no 34 au départ de Drancy le 18 septembre 1942 : sur mille déportés, huit cent cinquante-neuf furent gazés à l’arrivée. Quand l’Armée rouge libéra le camp le 27 janvier 1945, il ne restait que vingt et un hommes survivants.
Wolf Klajnfinger, le fils, fut apprenti ajusteur chez Renault à Boulogne-Billancourt (Seine, Hauts-de-Seine) de septembre 1939 à juin 1940. Mobilisé dans l’armée polonaise en France le 10 juin 1940, il fut fait prisonnier par les Allemands le 23 juin à Pont-Château (Ille-et-Vilaine). Interné au stalag XI B, libéré le 11 avril 1945, il partit travailler chez un oncle à Casablanca (Maroc). Il revint en France en octobre 1948 et obtint la nationalité française. Il ignorait les circonstances de l’arrestation de ses parents.
Isaac était de la même famille que Samuel Melman, exécuté sommairement en Isère.
Maitron patrimonial (2006-2024)
Par Daniel Grason
SOURCES : Arch. PPo, BA 2439, KB 95, 77W 16, 77W 88, 1W 0715. – DAVCC, Caen, B VIII dossier 2 (Notes Thomas Pouty). – Louis Sadosky, brigadier-chef des RG, Berlin 1942, CNRS Éd., 2009. – David Diamant, Combattants, héros et martyrs de la Résistance, Éd. Renouveau, 1984. – S. Klarsfeld, Le livre des otages, op. cit. – Site Internet Mémoire des Hommes. – Site Internet CDJC.