LE MERRER Yvon

Par François Prigent

Maitron patrimonial (2006-2024)

Né le 20 juin 1929 à Plouha (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), mort le 20 juin 2008 à Plouha ; professeur de lycée (lettres classiques) ; militant SFIO (1953-1957) ; militant PSA puis PSU (1959-1975) et PS (1976-1992 et depuis 2002) de Guingamp (1959) ; maire PSU de Pabu (1965-1971) ; adjoint PS de Ploumagoar (1977-1983) puis conseiller municipal (1983-1989) ; conseiller général PS de Guingamp (1982-1988).

Yvon Le Merrer connut très peu son père, mécanicien dans la Marine Royale. Il fut donc élevé à Plouha par sa mère, paysanne aux ressources modestes, chrétienne convaincue proche des réseaux Jeune République et MRP. De santé fragile dans sa jeunesse, Yvon Le Merrer rejoignit en 1937 à l’internat du lycée Notre-Dame à Guingamp son frère, ami d’enfance d’Alain Le Guen, conseiller général et député démocrate-chrétien, avec qui il fit ensuite ses études de droit. Après l’obtention du baccalauréat en 1948, Yvon Le Merrer fréquenta la faculté de lettres à Rennes, dont il sortit à l’issue de la licence et du CAPES. Professeur dès 1953, tout comme sa femme, à Saint-Brieuc, il fut marqué par l’empreinte intellectuelle d’Antoine Mazier, député et secrétaire fédéral de la SFIO. Après une année à Poitiers en 1956, il fut nommé au lycée Pavie de Guingamp en 1957 où enseignait sa compagne Monique depuis 1955.

Doté par l’expérience du quotidien d’une perception des inégalités entre les classes sociales, il commença à basculer à gauche par le biais de son réseau relationnel universitaire où figuraient des fondateurs de la MNEF à Rennes comme Maurice Fanon ou Jean Bobet, sans pour autant militer activement à l’UNEF. Mais l’insertion dans sa belle-famille à partir de 1949 le fit entrer en contact avec les milieux SFIO. Son beau-père Théophile Corre, militant socialiste et laïque depuis les années 1930, était facteur à Paris puis à Lanvollon et Plouha après la Libération. Son beau-frère, Evenou, marin d’Etat était le secrétaire de la section de Plouha, dominée par la figure du notable SFIO Louis Droumaguet*, maire et conseiller général (1945-1964), notaire et franc-maçon, issu du radicalisme. Sous la houlette familiale, Yvon Le Merrer adhéra donc à la SFIO après les municipales de 1953. Il était également investi dans les réseaux laïques sportifs comme le REC Basket à Rennes et les Amicales Laïques à Saint-Brieuc (où il fit la rencontre du docteur Claude Le Moël, docteur, futur PSU, conseiller municipal à Guingamp). Marqué par les débats avec les enseignants au lycée Le Braz, entre Édouard Prigent (agrégé, PC) et le réseau d’Antoine Mazier, en lien inlassablement avec les différentes filières socialistes, il commença à se détacher de la SFIO tout en rejetant de façon viscérale le PC à partir de 1956.

Séduit par l’expérience Mendès France, ce lecteur de France-Observateur fut en rupture avec le milieu partisan au moment de la guerre d’Algérie. Il quitta d’ailleurs la SFIO à la fin de l’année 1957, avant de rejoindre le PSA derrière Antoine Mazier en 1959. Il existait au début des années 1960, un fort noyau du PSU dans la section de Guingamp, composé majoritairement d’enseignants au lycée (Jean Lautrou, Louis Bocquet, Yves Rousseau, Jean Carré, les couples Trovel et Le Moël…). D’ailleurs, Yvon Le Merrer entama en parallèle un parcours syndical dans le sillage de Louis Bocquet*, au SNES, autour de la tendance École émancipée. Militant associatif dès 1957 (basket et kermesse dans l’Amicale Laïque), militant culturel (ciné-club du Celtic, école des sports avec Pierre Donnart), proche des réseaux d’En Avant de Guingamp, il figurait en 1959 sur les listes d’union de la gauche, dirigée par François Leizour* (PC, maire en 1977 et député en 1978).

Basé à Pabu par la suite, il fut contacté par la liste de gauche, assez autonome de la fédération du PSU, dirigée par un leader venu de la FGDS, Yves Guyader, inspecteur des contributions indirectes et syndicaliste FO. Ce dernier emporta la mairie à la droite, mais il fut invalidé du fait de l’interdiction pour un fonctionnaire des impôts d’être élu dans son canton d’implantation professionnelle. Ce fut donc Yvon Le Merrer qui exerça la fonction de maire de Pabu jusqu’en 1971. Candidat aux législatives de 1968 à Guingamp avec Claude Guillou (technicien agricole, conseiller général PSU de Bégard en 1970), il rassembla 7 % des suffrages pour le PSU, avant que le tandem ne soit inversé en 1973. Membre de la direction fédérale du PSU, il semble avoir également été suppléant lors des sénatoriales de 1971. Il était alors très lié aux filières syndicales agricoles autour de Jean Le Floc’h (ancien président du CJA, formé à la JAC, conseiller général PS de Lanvollon depuis 1982). Sans mandat municipal en 1971 du fait de son départ pour Ploumagoar, il s’investit aux côtés du maire PSU passé au PS lors des Assises Louis Keromest* (EDF, CGT).

Cessant d’être encarté au PSU en 1975, il devint 3e adjoint de ce dernier en 1977, après avoir adhéré au PS à la fin de l’année 1976. Très présent dans l’émergence de Maurice Briand (député PS de Guingamp en 1981), il gagna en 1982 le canton de Guingamp, bastion communiste depuis 1945 (à l’exception de la période 1958-1964). Mais il fut devancé de 50 voix par Christian Le Verge* (PC) lors des municipales de 1983 à Ploumagoar dans un contexte de relations tendues entre le PS et le PC à l’échelle départementale. Battu par le PC lors du renouvellement cantonal de 1988 (le siège repassa au PS en 2001 avec Josette Horvais, remplacée depuis 2004 par Annie Le Houérou), il se retira de la vie politique locale en 1989.

Au conseil général, il fut plus actif à partir de 1985 (enseignant à mi-temps), notamment dans les nouvelles commissions décentralisées comme la Société d’études mixtes d’aménagement de l’équipement de Bretagne (SEMAEB), présidée par Yves Le Foll* (ancien député maire de Saint-Brieuc) ou dans les réseaux du tourisme au sein du Comité Départemental du Tourisme, voire après 1989 dans UDOTSI (Union départementale des Offices du Tourisme et des Syndicats d’Initiative). Il était notamment en lien avec Aimé Dagorn, proche collaborateur de Noël Le Graët (maire PS de Guingamp 1995-2008). De sensibilité rocardienne, il quitta ensuite le PS lors de son départ pour Plouha puis pour Rennes entre 1992 et 2002.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/le-merrer-yvon/, notice LE MERRER Yvon par François Prigent, version mise en ligne le 3 mars 2012, dernière modification le 3 mars 2012.

Maitron patrimonial (2006-2024)

Par François Prigent

SOURCES  : Arch. Dép. Côte d’Armor, 128 W 52-57. — Arch. l’OURS, dossiers Côtes-du-Nord. — Archives Fédérales du PS 22. — Archives de la FSU. — Archives privées Yves Dollo. — Le Combat Socialiste, 1953-1989. — Entretiens avec Yvon Le Merrer, Thierry Le Merrer, Jean Le Floch, Claude Guillou, Annie Le Houérou, Maurice Briand et Noël Le Graët. — Jean-Luc Guinement, La Fédération PSU des Côtes-du-Nord, DES de Science politique, Université de Rennes 1, 1974. — Soïg Malfroy, La fédération du Parti socialiste unifié des Côtes-du-Nord face au Programme Commun. Visions et division de l’unité de la gauche, mémoire IEP de Rennes, 2004. — François Prigent, « Football, Money and Socialism. “En Avant de Guingamp” from State Schoolteachers to Didier Drogba (1912-2004), in Socialist History, n° 31, juin 2007. — François Prigent et Jacqueline Sainclivier « Les réseaux socialistes PSU en Bretagne (1959-1981) : milieux partisans, passerelles vers le PS, rôle des chrétiens de gauche », in Tudi Kernalegenn, François Prigent et alii, Le PSU vu d’en bas. Un parti dans les régions : réseaux sociaux, mouvement politique, laboratoire d’idées (années 50 – années 80), PUR, 2008. 

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