LEGER Catherine, Jacqueline, Marie, épouse PARRENIN, puis THILLET

Par Pierre Alanche

Maitron patrimonial (2006-2024)

Née le 20 avril 1943 à Paris (XIIIe arr.) ; institutrice, ouvrière spécialisée, chargée de mission, puis directrice des ressources humaines au FAS (Fonds d’action sociale) ; syndicaliste CGT, CFDT, permanente à l’UPSM-CFDT.

Son père, Daniel Léger (1914-1995), était représentant en vins et spiritueux, sa mère, Jacqueline Ogès (1919-1996), était sans profession. Catherine Léger eut une sœur cadette, Elisabeth, qui décéda dans un accident automobile en 1973. La famille résidait boulevard Suchet à Paris (XVe arr.). Son père, blessé lors de la guerre de 1939, s’impliqua dans un réseau de protection des juifs. Les parents, catholiques non pratiquants, firent suivre à leurs enfants le parcours religieux classique, baptême, première communion, communion solennelle. Elle alla à l’école maternelle au cours Dupanloup, école privée catholique, 4 avenue Robert Schuman à Boulogne-Billancourt (Seine, Hauts-de-Seine) en 1948,puis à l’école primaire en internat chez les Sœurs de l’Assomption à l’institut Barral à Neuilly-sur-Seine (Seine, Hauts-de-Seine) de 1949 à 1954. Elle fit ses études secondaires au Lycée La Fontaine à Paris (XVIe arr.) de 1955 à 1962 et obtint le baccalauréat B série lettres en 1961 et philosophie en 1962. Elle commença ses études supérieures en propédeutique à l’Institut Catholique rue d’Assas Paris(VIe arr.) en 1963. Elle prépara ensuite une licence d’allemand au Grand Palais, annexe de la Sorbonne, de 1964 à 1966,et à la faculté de Vincennes après 1968. Tout en poursuivant ses études, elle enchaina les postes d’institutrice en maternelle, boulevard Murat Paris (XVIe arr.), en 1964, de surveillante d’externat au lycée La Fontaine à Paris (XVIe arr.)puis au lycée de Sèvres (Hauts-de-Seine) en 1965 et 1966, et d’institutrice vacataire au collège Jean Mermoz à Vélizy (Yvelines). Elle obtient une bourse pour poursuivre sa licence d’allemand à l’université de Sarrebruck dans le cadre du Deutscher Akademischer Austauschdienst (DAAD) pendant l’année scolaire1966-1967, tout en travaillant dans un bar. A son retour d’Allemagne en juillet 1967, elle se maria avec Jean-Daniel Parrenin. Ils résidèrent dans un petit appartement, impasse des Jardiniers à Paris (XIe arr.).En 1968, ils restèrent à l’écart des actions étudiantes jusqu’au mois de mai. Ce fut en suivant le récit des affrontements à la radio, dans la nuit du 10 mai, que tous deux décidèrent d’apporter nourriture et boisson aux manifestants. Après cette première prise de contact, ils participèrent à la manifestation des étudiants et des syndicats ouvriers du 13 Mai, puis, dans les semaines qui suivirent, assistèrent aux meetings, son mari à ceux de la Sorbonne, Catherine Léger à ceux du Grand Palais. Elle fit connaissance de Philippe Ivernel, enseignant en littérature allemande, homme de théâtre et militant PSU, qui participait à la réflexion sur le processus d’enseignement. En octobre 1968, le département allemand du Grand Palais fut intégré à la nouvelle université de Vincennes Saint-Denis. Pendant les vacances qui suivirent les événements de mai, en juillet 1968, elle participa avec quelques amis à un voyage à Berlin. Ce fut une semaine de politisation et de remise en question de toutes les valeurs acquises dans le milieu familial. Au retour, elle se sépara d’avec son mari. Elle adhéra à un cercle de l’Humanité Rouge et rejoignit son nouveau compagnon, Gilles Archambault, à Paris (IVearr.). En octobre 1968, elle reprit les études d’allemand à la faculté de Vincennes et obtint sa licence en juin 1969. Tout au long de l’année, elle approfondit son engagement politique et dans la ligne des orientations de l’Humanité Rouge (vitrine officielle du Parti communiste marxiste-léniniste de France (PCMLF) interdit) elle décida de « s’établir ».Elle se fit embaucher comme ouvrière spécialisée à l’usine CIT-Alcatel rue Keller Paris (XVearr.) en octobre 1969. Parallèlement à son activité salariée, en prolongement de ses études d’allemand, elle traduisit, avec Franz Rutten (un enseignant du département allemand de l’université), le livre Sexualité et lutte de classe, de Reimut Reich, sous le nom de Catherine Parrenin. Ayant eu, en 1970,une fille, Muriel, avec Gilles Archambault, elle fut en congé maternité sans indemnité journalière car elle avait moins d’un an d’ancienneté dans son entrepriseet reprit le travail en octobre 1970. L’établissement parisien de la CIT fit partie du flot de délocalisation des activités industrielles parisiennes vers les nouvelles zones d’activités de la proche banlieue. Elle fut mutée à Vélizy-Villacoublay (Yvelines) en février 1971.La politique « d’établissement » était très sérieusement suivie par le PCMLF; chaque semaine se tenait une réunion de cellule, sous le contrôle d’un membre du bureau politique régional et du responsable du suivi des cellules d’entreprises. Celle de Catherine Léger comprenait des « établis »des entreprises CIT et Rhône-Poulenc. A l’ordre du jour figuraient systématiquement les points suivants : actualité à l’usine (les évènements, les tracts, impact des tracts etc., le tract « rose » de Lutte Ouvrière), un point sur l’actualité des luttes en France,sur l’actualité internationale notamment en Chine, à partir de la version française du journal « Chine Nouvelle », un point de formation politique (économie, Marxisme…). Au début l’année 1973, le parti communiste chinois invita une délégation de huit membres du PCMLF, reconnu par eux comme le seul représentant des communistes français. Catherine Léger dut à sa situation de femme, ouvrière, établie en usine, de faire partie de la délégation. Celle-ci comprenait trois femmes (deux établies et une journaliste de l’Humanité Rouge) et cinq hommes (un établi, deux journalistes de l’Humanité Rouge, un membre du bureau politique, Jean-Guy Dufour, un membre du secrétariat du parti). L’objectif était d’aller en Chine, pour constater très concrètement le résultat de la révolution chinoise. La mission devait rapporter toutes ces informations en France et en faire la publicité dans les publications : l’Humanité Rouge et l’Humanité Nouvelle (journal clandestin du Parti). En contrepartie, elle devait rendre compte aux chinois de l’organisation des luttes en France. Le voyage fut organisé par les Amitiés franco-chinoises. Présenté comme étant à destination de Rome, le voyage se prolongea jusqu’à Pékin après une escale à Alger où les correspondants chinois remirent les papiers établis avec les pseudonymes clandestins utilisés en France. Catherine Léger s’appelait « Claude Liber », Jean-Guy Dufour « Maubourg ». À Pékin, des limousines arborant les drapeaux chinois et français attendaient la délégation, traitée en représentant officiel du seul et vrai Parti communiste français représentant de la pensée de Mao Ze dong en Europe, parti frère du Parti communiste chinois. Le séjour fut très encadré mais plaisant, fait de visites de fermes, d’usines, de chantiers en construction, d’écoles et d’un appartement dans un immeuble, qui venait juste d’avoir le gaz, à la grande satisfaction de la locataire qui en remerciait le Président Mao. Un banquet, dans une unité de l’Armée Populaire de Libération, accompagné de toasts très arrosés et de spectacles, compléta ce séjour d’où Catherine Léger revint très impressionnée, confortée dans son engagement prochinois qui se prolongea quelques années. Elle quitta le PCMLF en 1976. Elle resta à CIT-Alcatel en raison de son engagement syndical et de sa rencontre avec Jean-Claude Patrac, militant de Lutte Ouvrière et syndicaliste CFDT à la CIT depuis 1972, avec lequel elle eut une fille en 1977, Emma.
Dès son entrée dans l’entreprise, elle adhéra à la CGT puis, en désaccord avec sa section syndicale, elle la quitta en 1972 avec d’autres militants dont Renaud de Montaignac et Jean Claude Patrac et participa à la création de la section syndicale CFDT, encouragée par le PCMLF. Elle fut candidate lors des élections de délégués du personnel de 1972 et fut régulièrement réélue jusqu’en 1980. Désignée déléguée syndicale en 1975 elle assura cette fonction jusqu’en 1980. Elle fut élue membre du comité hygiène et sécurité de 1975 à 1980. Durant ces onze années, Catherine Léger contribua au développement de la CFDT auprès des ouvrières de l’atelier de fabrication de circuits imprimés où elle travaillait, cependant que cette organisation progressait chez les techniciens et ingénieurs techniciens des services techniques. La CFDT était devenue le syndicat majoritaire menant plusieurs grèves sur les salaires, et les conditions de travail.

Elle s’investit dans la mise en place du Syndicat Métaux des Yvelines Sud – CFDT (SMYS-CFDT), créé en juin 1977. Au sein de la commission exécutive, elle impulsa un travail important entre les sections des entreprises, situées en majorité dans la zone industrielle de Vélizy alors en plein développement, dans trois domaines principaux : l’activité culturelle des CE en s’appuyant sur les interventions de l’équipe théâtrale de Culture et Liberté, le théâtre du Levant animé par Christian Nouaux et Arielle Chenot; l’action sur la réduction du temps de travail ; la place des femmes dans le syndicalisme qui donna lieu à un stage, du 20 janvier au 1er février 1980, avec comme intervenants, Jeannette Laot et Hugues Blassel de la confédération CFDT, la sociologue Margaret Maruani, et la responsable nationale du planning familial Simone Iff (présidente du Planning familial de 1973 à 1980). Elle devint secrétaire générale du SMYS-CFDT au congrès de novembre 1980 à la suite de Pierre Alanche. Elle quitta l’entreprise en juin 1980 et fut embauchée le 1er décembre 1980 par l’UPSM-CFDT comme secrétaire régionale. Comme tous les permanents de la CFDT métallurgie de la région parisienne, elle cumulait cette responsabilité locale avec des responsabilités régionales au sein de l’UPSM-CFDT dont le secrétaire général était alors Claude Sardais. C’est la volonté de mixité de l’UPSM qui contribua à son recrutement Seule femme permanente parmi les huit responsables politiques, elle fut en charge de la réduction du temps de travail et participa à l’organisation de nombreuses manifestations à Paris mais aussi au voyage à Stuttgart pour l’action sur les 35 heures avec le DGB (Le Deutscher Gewerkschaftsbund – Confédération allemande des syndicats). Elle traduisit en allemand la plaquette 35 heures de la métallurgie parisienne à l’attention de l’IG Metall, regroupant les métallurgistes allemands. Elle mit en œuvre la décision du Bureau exécutif de l’UPSM, en concevant en 1982, avec le concours de Claude Sardais, le « Livret de création de sections syndicales », véritable mode d’emploi pour installer une section syndicale dans les entreprises. Il n’eut pas le succès espéré, la désyndicalisation ayant commencé à toucher l’ensemble du tissu industriel de la métallurgie Ile de France. S’investissant énergiquement dans les activités de formation, elle fut la cheville ouvrière, avec l’assistance de la secrétaire Monique Bozzoli, de la création de l’IFEAS (Institut de formation et d’études pour l’action sociale) en 1984. Cet institut rationalisa et développa les moyens de formation pour l’ensemble des syndicats métaux CFDT de la région parisienne en s’appuyant sur les compétences de nombreux militants, et en faisant appel aux cabinets conseils proches de la CFDT, tels SYNDEX pour les questions économiques, l’INPACT, pour les conditions de travail, mais aussi à des experts extérieurs au monde syndical, comme les économistes Benjamin Coriat, Alain Lipietz, la sociologue Danièle Lienhart, et les ergonomes du CNAM, les responsables formation de la confédération (Hugues Blassel notamment), des inspecteurs du travail (Claude Emmanuel Triomphe notamment), des militants aguerris et le Théâtre du Levant. A l’initiative de Daniel Richter, Catherine Léger mena avec l’IFEAS un projet ambitieux de collaboration avec l’équipe d’ergonomes du CNAM, sur l’étude des conditions de travail sur la chaine de montage de la Clio à l’usine Pierre Lefaucheux de Renault à Flins. Avec le concours d’Antoine Laville, François Daniélou, Sylvie Montreuil et Catherine Teiger, les membres CFDT des CHSCT firent une étude critique de la situation existante et proposèrent des solutions alternatives qui furent cependant refusées par la direction pour des raisons de coûts.
Elle fut membre du bureau fédéral de la FGMM-CFDT de 1983 à 1987.
Elle quitta ses fonctions à l’UPSM-CFDT en juin 1988, resta six mois au chômage en recherche d’emploi dans un contexte de récession qui rendait difficile le reclassement. Alain Gelly, ancien permanent UPSM, qui était au FAS (Fonds d’action sociale) proposa sa candidature à Michel Yahiel, le directeur de cet établissement public. Elle fut embauchée en janvier 1989 au siège du FAS, 209 rue de Bercy à Paris (XIIe arr.)en qualité de chargée de mission, dans le service du secrétariat général. Elle mit en place le plan de formation de l’établissement puis en devint la directrice des ressources humaines en 1992. Soutenue par les directeurs successifs, Michel Yahiel de 1988 à 1991, François Beaujolin de 1992 à 1994,Jean de Bodman de 1995 à 1997, Thierry Tuot de 1997 à 1999 et Olivier Rousselle de 1999 à 2005,elle s’investit pleinement dans son activité. Le concept de gestion des ressources était encore relativement nouveau dans la fonction publique. Elle employa toute son énergie, sa connaissance pratique des situations de travail, son expérience de l’organisation collective et son expérience de la négociation pour obtenir l’accord du comité de direction puis recueillir l’avis favorable des commissions paritaires. Elle fit valoir ses droits à la retraite le 1er janvier 2005.
Elle épousa Pierre Thillet en septembre 2001.
En 2005 et 2006, elle effectua à la Bibliothèque Nationale de France une recherche sur la vie de son grand-père, Maurice Léger, inventeur du premier hélicoptère et intervint le 15 septembre 2007 au Musée Océanographique de Monaco dans le cadre de la célébration du centenaire de l’hélicoptère
Elle eut également des activités dans le secteur associatif : Secrétaire de l’association de défense des locataires, de 2005 à 2008, dans son immeuble de Vélizy (Yvelines), ; Secrétaire puis Présidente de l’association de défense des usagers d’un terrain de loisirs, de 2004 à 2009 à Saint-Chéron (Essonne), ; membre actif du Foyer Rural en 2010 – 2011, de Saint-Ythaire (Saône-et-Loire), ;Secrétaire de l’association Jazz à Laroche Millay (Nièvre), en 2012 et 2013, ;Présidente de la chorale La Canterelle depuis 2014 de Saint-Gengoux-le- National (Saône-et-Loire).
Elle adhéra au parti de gauche de Saône-et-Loire à sa création en 2009.
Elle fut candidate aux élections municipales de Curtil-sous-Burnand (Saône-et-Loire) en 2008 sur la liste unique d’intérêt municipal et ne fut pas élue.

 

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/leger-catherine-jacqueline-marie-epouse-parrenin-puis-thillet/, notice LEGER Catherine, Jacqueline, Marie, épouse PARRENIN, puis THILLET par Pierre Alanche, version mise en ligne le 19 novembre 2021, dernière modification le 7 octobre 2024.

Maitron patrimonial (2006-2024)

Par Pierre Alanche

ŒUVRES : Reimut Reich, Sexualité et lutte de classe, Traduit de l’allemand par Catherine Parrenin et Franz Josef Rutten, Petite collection MASPERO, 1974.

SOURCES : Arch. UPSM-CFDT. — Jacqueline Carpine-Lancre, Maurice Léger et ses Hélicoptères 1901-1907, Edition Beausoleil JC, 2008.