PORELLI Vincent

Par Gérard Leidet

Maitron patrimonial (2006-2024)

Né le 8 février 1935 à Nice (Alpes-Maritimes) ; instituteur puis professeur de collège ; militant du SNI ; militant communiste, maire de Port-Saint-Louis-du-Rhône (Bouches-du-Rhône (1965-1989), conseiller général (1967-1973) et député des Bouches-du-Rhône (1973-1988).

Vincent Porelli naquit dans une famille bien enracinée dans les quartiers populaires du Vieux Nice. Son père, Charles Porelli, d’abord manutentionnaire, devint gardien de la paix à la Libération ; sa mère, née Madeleine Carlès, était vendeuse aux Galeries Lafayette, puis femme de ménage. Après avoir fréquenté l’école communale de la rue Barla à Nice, il passa quatre années (1943-1947) dans une école catholique où il s’adonna à l’étude du chant religieux dans le cadre d’une manécanterie animée par un prêtre. À l’âge de douze ans, il revint à l’école publique pour quatre années d’études au cours complémentaire Risso de Nice, avant d’être admis en classe de seconde (année scolaire 1951-1952) au lycée Masséna.

Il réussit le concours d’entrée à l’École normale d’instituteurs de Nice en 1952. Jusqu’en 1956, il eut pour condisciple de jeunes élèves-maîtres communisants, Jean Tardito*, de quatre ans son aîné (futur maire d’Aubagne) et Georges Thorrand* (futur maire de Miramas). À sa sortie de l’ENI, Vincent Porelli fut nommé instituteur à Charleval (Bouches-du-Rhône), avant d’enseigner au cours complémentaire de Port-Saint-Louis-du-Rhône à la rentrée d’octobre 1958. Il mit à profit un congé d’un an pour obtenir un certificat d’études littéraires à l’issue d’une année de propédeutique à la Faculté des Lettres d’Aix-en-Provence, ce qui lui permit de devenir professeur d’enseignement général de collège (Français-Histoire-Géographie).

Militant du Syndicat national des instituteurs depuis ses années passées à l’ENI d’Aix, puis secrétaire de la sous-section de Port-Saint-Louis, il fut très marqué par les fortes personnalités des dirigeants de la section départementale : Alfred Bizot, Jean Briand et Jean Buisson. Porelli exerça de 1958 à 1973 son métier de professeur au futur collège Maximilien Robespierre de Port-Saint-Louis.

Ses préoccupations vis-à-vis des questions sociales et ses choix politiques s’affermirent sous une double influence, celle de ces enseignants communistes du SNI mais aussi celle d’ouvriers dockers. Vincent Porelli adhéra très jeune au Parti communiste français, en 1953 ce qui contribua à son insertion dans la commune où il demeura longtemps enseignant : « quand je suis arrivé à Port-Saint-Louis, j’ai tout de suite été adopté, parce que j’étais enseignant et parce que j’étais communiste. ». À ce titre, il devint très vite secrétaire de la section locale du PCF.

À Port-Saint-Louis, en ce début des années 1960, il n’y avait, selon son témoignage, que « deux camps, les communistes d’un côté et tous les autres de l’autre ». Ces derniers se regroupaient dans la mouvance socialiste autour du maire SFIO, Gustave Vidal*. En effet, en 1904, la nouvelle commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône avait été créée tout en restant rattachée au canton d’Arles-Ouest. Les premières élections municipales organisées les 1er et 8 mai 1904 désignèrent pour maire Antoine Calment, candidat de la liste socialiste unifiée (qualifiée alors « extrême gauche »), produisant une situation politique tendue que les grandes sociétés n’avaient pas envisagée. Cette très ancienne implantation socialiste s’accompagna par la suite d’une âpre confrontation, constante, entre socialistes d’une part, militants communistes et cégétistes de l’autre. Dans ce climat singulier, Vincent Porelli vécut ses premières années de militantisme. Le jeune militant fut étonné de « l’absence » du maire socialiste et de sa municipalité qui « ignoraient complètement » les conflits sociaux qui agitaient le port et le monde ouvrier environnant. À Port-Saint-Louis-du Rhône, une industrie chimique (Gerland, Esso, le CRE, service des essences de l’armée) donnait naissance à un groupe-ouvrier bien encadré par la CGT. Cette situation (« la municipalité précédente n’ayant jamais été du côté du monde ouvrier Saint-Louisien » selon son témoignage) expliquait en grande partie qu’en mars 1965 la liste communiste qu’il conduisait l’ait emporté face à la municipalité sortante animée par le socialiste Gustave Vidal*, maire depuis 1947 et conseiller général. Vincent Porelli devait par la suite emporter chaque scrutin, local ou départemental, face à un candidat socialiste.

En 1962, Vincent Porelli participa à l’école centrale du PCF, pour les instituteurs communistes à Choisy-le-Roi. S’il n’occupa jamais de fonctions dans l’appareil du Parti, il devait exercer trois mandats d’élu à partir de 1965. En effet, Vincent Porelli devint maire de Port-Saint-Louis-du-Rhône lors des élections municipales de mars 1965 et demeura à ce poste jusqu’en mars 1989. Lors des deux premiers mandats, entre 1965 et 1977, il fut secondé dans cette tâche par son premier adjoint, Honoré Charrière, dirigeant du syndicat des dockers de Port-Saint-Louis-du-Rhône (1953-1975) et responsable de la Fédération CGT des Ports et Docks (1952-1966). Il devint ensuite conseiller général du canton de Port-Saint-Louis-du-Rhône (1967-1973). Succédant à Adrien Mouton, figure historique du communisme dans la région arlésienne depuis les années 1930, Porelli fut présenté par le PCF dans la 11e circonscription des Bouches-du-Rhône, face à Charles Privat*, lors des élections législatives de 1967 puis, lors des scrutins des 23 et 30 juin 1968, très difficiles pour le PCF : son suppléant avait été Louis Minetti, futur sénateur.

Il fut élu député de la 11e circonscription des Bouches-du-Rhône, en mars 1973, devançant Charles Privat, puis constamment réélu lors des scrutins suivants : législatures du 19 mars 1978 au 22 mai 1981, du 21 juin 1981 au 1er avril 1986, du 16 mars 1986 au 14 mai 1988.

Sur le plan local, la nouvelle équipe municipale arriva au moment où débutèrent certaines transformations et dut faire face aux « métamorphoses » de l’activité portuaire. Port-Saint-Louis à cette époque, « ce n’est pas que le port, mais ici c’est surtout le port » et les salariés qui y travaillent. C’est en effet autour de son port que Port-Saint-Louis-du-Rhône s’était développée depuis plus d’un siècle. Si les premiers bâtiments, hangars, habitats, quartiers furent érigés autour du bassin, c’est aussi autour des métiers portuaires que la communauté sociale s’était composée, au fil des immigrations successives : « Si le port n’existait pas, la ville n’existerait pas non plus. » Effectuant un retour sur cette période, Vincent Porelli fut marqué par les mutations complètes sur le plan technologique : introduction des roll on-roll off, des minéraliers, des pétroliers, toute une manutention mécanisée ultra moderne qui révolutionna l’activité du port, sans oublier la transformation de l’ancien docker – « porte-faix » victime de hernies discales récurrentes à cause du poids des charges – en docker « moderne »… Le PCF, à travers Porelli et son équipe, s’appuyèrent fortement sur ce monde du travail en extension et en pleine mutation.

Vincent Porelli et les équipes successives qu’il anima marquèrent de leur empreinte les évolutions locales dans le domaine de l’enseignement (créations dès 1967 des écoles maternelles Danielle Casanova, France Bloch et Anne Franck ; des écoles élémentaires Paul Eluard et Romain Rolland ; du collège Maximilien Robespierre, inauguré en 1978), de la culture (MJC Gérard Philipe), du sport (gymnase Pierre de Coubertin en 1969, gymnase Virgile Barel en 1979) et de l’urbanisme. Dans ce dernier secteur on peut retenir la promotion du Tourisme social avec la construction sur sept kilomètres de la route du Napoléon permettant l’accès à la plage Camarguaise avec une façade de dix kilomètres ; la rénovation de la viabilité avec l’assainissement de l’eau installé dans la ville ; le remplacement intégral sur dix kilomètres de la conduite d’eau potable avec la construction d’un nouveau château d’eau. Enfin dans le domaine de la santé, avec la création du centre médical géré par l’Union des mutuelles de travailleurs. Malgré ce bilan municipal, les élections de 1989 marquèrent la fin-provisoire de la gestion communiste sur Port-Saint-Louis. Avec 49,98 % de voix au premier tour, et cinq voix manquantes sur sept bureaux, Vincent Porelli était battu au second tour par Philippe Caizergues, candidat « apolitique ». Il anima durant dix ans l’opposition municipale, notamment autour du dossier de l’eau, son concurrent s’étant empressé de privatiser ce secteur alors municipalisé. Vincent Porelli mit à profit ce temps de réflexion pour analyser un des points faibles de sa gestion municipale : selon lui, la population avait été insuffisamment associée et il regrettait profondément que la démocratie participative n’ait pas été alors « à l’ordre du jour ». Depuis mars 2008, la municipalité est revenue dans le giron du PCF, avec l’élection de Jean-Marc Charrier.

Après avoir accompagné le courant des « refondateurs », animé dans les Bouches-du-Rhône par le député Guy Hermier, l’ancien député et conseiller général Marcel Tassy*, et l’élu marseillais Roger Ruzé*, Vincent Porelli participa aux débats qui se firent jour dans le contexte des comités anti-libéraux et dans le cadre de la candidature de la gauche antilibérale à l’élection présidentielle de 2007. Les militants communistes ayant choisi à 81,05 % (41 533 votes) de confirmer cette candidature (le choix du retrait n’ayant obtenu que 18,90 %), Vincent Porelli fut de ceux qui considérèrent ce vote comme l’acte qui portait la signature de la fin de la dynamique unitaire. Il démissionna du PCF en janvier 2007, consécutivement à la candidature de Marie Georges Buffet.

Professeur retraité et député-maire honoraire de Port-Saint-Louis, Vincent Porelli, divorcé, a une fille (Emmanuelle) aujourd’hui magistrate et une petite fille (née en 2001). En 2014, il vivait retiré à Aix-en-Provence, toujours investi dans le débat politique à travers notamment l’association ATTAC (Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne).

Interrogé pour un recueil de témoignages de certains de ses habitants, dans les années 2010, il faisait partager une partie essentielle de la mémoire de cette ville portuaire. Appartenant aux « figures historiques de Port-Saint-Louis », Vincent Porelli transmettait ainsi quelques traces de l’histoire sociale de cette cité afin que celle-ci ne demeure pas occultée.

 

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/porelli-vincent/, notice PORELLI Vincent par Gérard Leidet, version mise en ligne le 28 avril 2014, dernière modification le 7 octobre 2024.

Maitron patrimonial (2006-2024)

Par Gérard Leidet

SOURCES : Arch. com. de Port-Saint-Louis-du-Rhône.— Arch. de la Fédération du PCF des Bouches-du-Rhône. —J.-L. Charrière, C. Gontier, M. Meyer, B. Picon et A. Schleyer Lindenmann, Port-Saint-Louis-du-Rhône, 1904-2004, ou le Génie de l’adaptation, Aix-en-Provence, Edisud, 2004. — Entretien avec le militant, janvier-février 2014. — Notes de Micheline Abours.

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