Saint-Genis-Laval (Rhône), fort de Côte-Lorette, 20 août 1944

Par Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson, Dominique Tantin

Maitron patrimonial (2006-2024)

Le fort de Côte-Lorette à Saint-Genis-Laval (Rhône), où environ 120 hommes et femmes détenus à la prison du fort Montluc (Lyon) furent transportés le 20 août 1944 pour y être exécutés et leurs corps brûlés, constitue un des nombreux lieux de massacres de l’été 1944.

A l’approche de la Libération, les Allemands entreprirent de vider les prisons, et de déporter ou massacrer les patriotes qui y étaient détenus.
Le dimanche 20 août 1944 à l’aube, alors que les troupes alliées qui remontaient la vallée du Rhône, n’étaient plus qu’à quelques dizaines de kilomètres de Lyon (Rhône), Klaus Barbie et Walter Knabb, responsables de la Sipo-SD lyonnaise, firent transférer 110 à 120 détenus juifs et résistants de la prison du fort Montluc jusqu’au fort de Côte-Lorette à Saint-Genis-Laval. Vers 9 heures du matin, les deux véhicules (un autocar et un fourgon cellulaire ou deux autocars) qui transportaient les détenus les mains attachées deux par deux, pénétrèrent dans l’enceinte du fort de Côte-Lorette. Ils étaient escortés par des soldats allemands et des auxiliaires français de la Gestapo embarqués sur cinq ou six véhicules légers. Les détenus de Montluc furent descendus des véhicules et dirigés vers la maison inoccupée du gardien, où ils furent exécutés à la mitraillette. Ils furent d’abord entassés au 1er étage de la maison, contraints d’enjamber les corps de leurs camarades avant d’être eux-mêmes exécutés. Les autres furent abattus au rez-de-chaussée. Les rafales de mitraillettes furent entendues jusqu’à 10 heures. Trois détenus tentèrent de s’enfuir. Un seul parvint à atteindre le village et à donner l’alerte. Avant de se retirer les soldats allemands arrosèrent les corps d’essence et les brûlèrent. La maison du gardien fut minée. Les explosions se prolongèrent jusque vers 14 heures.
Avisé du massacre, le commissaire régional de la République, Yves Farge, donna l’ordre au préfet Ostier et au chef départemental des FFI, Nizier, de faire exécuter en représailles 80 prisonniers allemands détenus dans le département du Rhône.
Au cours des deux jours qui ont suivi le massacre, les équipes de la Croix-Rouge, les pompiers de Lyon et les habitants de Saint-Genis-Laval ont dégagé les corps carbonisés des gravas encore fumants, et les ont déposés dans des cercueils. Dans l’immédiat , une vingtaine de corps seulement ont pu être identifiés..
Les obsèques se sont déroulées le 23 août 1944 dans le cimetière de Saint-Genis-Laval en présence du cardinal Gerlier.
Au cours des jours, des semaines et des mois qui ont suivi, d’autres victimes ont pu être identifiées par leurs familles grâce à des alliances, des dentiers, des chaussures et des lambeaux de vêtements mal consumés.

Le 28 septembre 1947, un monument a été inauguré à l’emplacement du massacre. Les cercueils ont été réunis dans un « Caveau des martyrs » qui porte l’inscription :

« Ici
reposent
120 victimes de la barbarie allemande
massacrées sur ces lieux
le 20 août 1944
dans des conditions
qui déshonorent à jamais leurs bourreaux »

Les plaques commémoratives déposées par les familles des victimes ont été scellées sur le mur de pierres de la maison du garde détruite, encadrées par deux plaques sur lesquelles sont inscrits les noms des 82 massacrés qui avaient pu être pu être identifiés à la date de l’inauguration du monument.

La plaque de gauche comporte 46 noms sous l’inscription :
« En ce lieu, le 20 août 1944 furent tués et brûlés
environ 120 hommes et femmes détenus à
la prison de Montluc, sélectionnés dans le cadre
du décret NN (Nuit et Brouillard)
BADER Samuel
BARD Lucien
BEAUREGARD Alcide André
BERNARD Eugène
BERNHEIM Rose, née NETTER
BONIN André
BONNAVE Ernest Eugène Louis Joseph
BOTON (DE) Yves, Yoeser
BOURDIEU Pierre
BOURSIER François
BRAILLON Joanny
BRIACCA Jacques
BRINGUÉ Jean
BRONDEL Émile
BRUCKNER Renée, Dominique née PILAZ
CHAPOCHNIKOFF Alexis
CHARCOUCHET Paul
CHAZEAUX Georges
CONSTANT Roger
CREGUT Maurice
DA FONSECA Joachim
DENAVIT Adrien
DWERNICKI Josef (Jozef Gothard)
FERRARIO Jean
FREY Marcel
FRIQUEGNON Pierre
– FROISSART Jean
FUSS Auguste
– GARDEUX Guy
– GEOFFRAY Joannès
– GOMINET Hubert
– GRESPY-DULAC Marcel
– GUILLAUD Claude Robert
– GUTTINGER Philippe
– GUYONNEAU Henri
– HENCINSKI Paul
– HÉRITIER Antonin Félix
– HESS Albert
– HUGAND Benoit
ITKINE Sylvain
JAY Marcel
LALLEMENT Charles
– LAMY Jacques
LANOYERIE Paul
– LARUE François
LE FORESTIER Roger »

La plaque de droite comporte 36 noms sous l’inscription :
« Dans ce caveau reposent les corps en cendres,
identifiés ou inconnus de ces résistants et internés.
Ces noms gravés sur la pierre
resteront à jamais dans nos mémoires
LENVERS Joseph
– LEVY Mario
– LEVY-SOMMER Simone
LOUBET Jean (« Lepage »)
– MAGGIORINI Louis
MALIN Pierre
MARTIN Marguerite, Daisy
– MAZOYER Jean
MISME Gustave
– MONATTE Jean
– MONTAGUE Willie Paul
– MOREAU Raymond
PAYÉ Francisque
– PERICHON Claude
– PLASSE Georges
– POULY Adrien Louis Édouard
– PLUGNAIRE Roger
– RAY Lurent
– RADISSON Roger
– RANDU Robert
– RICHARD Antoine
ROCHER Jean-Jacques
– SARRAZIN Marcel
SCHMITT René
– SCHOTT Jean
– SMITH Jean
– SOMBARDIER Henri
SONTAG Jeanine
THOMAS Émile André Jean
TOURNEBIZE Régis
– VEDREINE André
VERDELET Georges
VEYRON-LACROIX Jean-Marie
– VIAL Alfred
– VIAL Marie Alphonse née JUNGO
– WACHTER François »

En 2004, l’Association Saint-Genoise du Patrimoine, des Arts et des Lettres (ASPAL) et les associations d’Anciens combattants de Saint-Genis-Laval ont réalisé une exposition du souvenir sur le site du fort de Côte-Lorette, à partir de documents issus du fonds Montluc des Archives départementales, ainsi que de photographies et de témoignages collectées auprès des familles des victimes du massacre.

Note de Dominique Tantin : autres victimes présumées (liste à compléter) :
BASSO Lazare Martin
GALDIN Henri Édouard
LUDWIG Roger
RENAUD E.
WILLIE Paul

Note de Jean-Luc Marquer : victimes présumées (Ass. des rescapés de Montluc, Les 15 derniers jours des internés à Montluc, 9-24 août 1944, août 2019.)
Outre Lazare Basso et Roger Ludwig, déjà cités, l’ouvrage propose les noms de :
GACHENY Alice, née PLU
GACHENY Charles
PASCALIS Gaston

 

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/saint-genis-laval-rhone-fort-de-cote-lorette-20-aout-1944/, notice Saint-Genis-Laval (Rhône), fort de Côte-Lorette, 20 août 1944 par Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson, Dominique Tantin , version mise en ligne le 23 mars 2019, dernière modification le 7 octobre 2024.

Maitron patrimonial (2006-2024)

Par Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson, Dominique Tantin

SOURCES : « 20 août 1944 – Saint-Genis-Laval – fort de Côte-Lorette», exposition présentée en 2014 par l’Association Saint-Genoise du Patrimoine des Arts et des Lettres. — Dominique Lormier, Les crimes nazis lors de la Libération de la France (1944-1945), Paris, Cherche-Midi, 2014, p. 167-170. — Bruno Permezel dir., Montluc Antichambre de l’inconnu (1942-1944), Éditions BGA Permezel, 1999. — Ass. des rescapés de Montluc, Les 15 derniers jours des internés à Montluc, 9-24 août 1944, août 2019. — Note Dominique Tantin. — Note Jean-Luc Marquer. — Mémorial GenWeb, Caveau des Martyrs (58 noms).