BONNIN Charlotte

Par Claude Pennetier

Née le 29 novembre 1887 à Baugy (Cher) ; dame-employée aux PTT, puis surveillante aux PTT ; syndicaliste CGT, secrétaire générale de la Ligue des Dames des PTT (1927-1928), puis de nouveau CGT ; féministe.

Domiciliée à Paris XVIIIe arrondissement, célibataire, surveillante à l’administration des PTT, Charlotte Bonnin fut la secrétaire générale de la « Ligue des Dames des PTT », organisation autonome des PTT créée au milieu des années 1920.

Il s’avéra en effet, que, loin de militer pour l’égalité homme/femme pourtant décidée depuis 1914 par les congrès syndicaux, les dirigeants confédérés des PTT avançaient parallèlement la revendication de la parité de salaire avec les institutrices. En juin 1925, le congrès du syndicat confédéré des agents refusa finalement de défendre la revendication des dames téléphonistes de l’égalité avec les hommes, pour opter officiellement pour la seconde revendication. Cela provoqua une crise dans le syndicat, et la constitution de cette “Ligue des dames des PTT”.

Créée en mars 1927, la Ligue n’avait pas initialement pour but de devenir une organisation dissidente des syndicats, et n’invitait pas les dames employées à quitter leurs syndicats respectifs, bien au contraire. Elle formulait quatre revendications principales : 1- Application de l’article 14 du traité de Versailles : “à travail égal, salaire égal” ; 2- Suppression des concours régionaux, et leur remplacement par le concours général unique entre les dames et les messieurs ; 3- Le retour au droit commun pour les mutations [changements de service, ou de département] ; 4- L’accession des dames à tous les emplois dans l’Administration des PTT.

Le 4 mai 1927, un premier meeting parisien, organisé par cette ligue, condamna les carences du syndicat national des agents des PTT. Le 31 août suivant, un second meeting de dames employées fut convoqué, salle des Horticulteurs, où parlèrent, pour les confédérés : Charlotte Bonnin, Mmes Blossier*, Noyon*, Jeanne Stranko, et, pour les unitaires : Adèle Lecocq.

En juillet 1928, alors qu’elle était secrétaire de la « Ligue des Dames », Charlotte Bonnin annonça son retour au Syndicat national des Agents (confédéré), et qui invita les dames-employées à l’imiter, dans Le Journal des Dames des PTT, la ligue se sabordant officiellement le 25 octobre 1928. La double appartenance syndicat / ligue des dames, n’ayant donc pas pu être durable, elle s’était donc placée un temps hors syndicat. L’ordre du jour voté dans cette réunion fut repris dans La Révolution prolétarienne du 1er décembre.

Intégrée dans la direction du syndicat, Charlotte Bonnin fut tout de suite mobilisées dans des meetings de protestation contre les lourdes sanctions que subirent les militants du syndicat en 1930 : 16 révocations, et 32 mises en disponibilité (pour Paris et la Province), à la suite d’une grève. Le 30 juin 1930, un avis publié dans Le Peuple la présente comme “oratrice révoquée”. Il semble qu’en juillet 1934 elle n’avait pas encore été réintégrée. En 1931 et 1932, au moins, elle était secrétaire générale adjointe du syndicat national des Agents des PTT de la CGT (voir Belin.).

Bonnin Charlotte était en 1938 trésorière du syndicat national des agents des PTT dont Giroux Henri était le secrétaire général.

Membre du bureau de la Ligue française du droit des femmes, elle déclarait "être syndicaliste, c’est bien, mais être à la fois et syndicaliste et féministe, c’est mieux, parce que le féminisme animera le syndicaliste qui risquerait de rester dans des données générales et d’oublier que la salariée est deux fois plus à plaindre parce qu’elle est exploitée deux fois : et comme femme et comme travailleuse."(Conseil national des femmes, États généraux du féminisme, Paris, CNFF, 1929, p. 96. Cité par Christine Bard).

Au printemps 1939, Charlotte Bonnin fit un voyage en Allemagne, avec son amie Henriette Minaire*. Elle en publia un compte rendu dithyrambique dans la Bataille des PTT des 16, 23 et 30 mai 1939. Elle déclara notamment « ... il ne faut pas oublier que, grâce à lui [Hitler], le peuple allemand a un sens extraordinaire de la dignité nationale ! ». « ... Une autre question, c’est celle de l’antisémitisme. Je dois dire que, là aussi, on a beaucoup exagéré... Ce sont surtout les riches qui ont trinqué. Ainsi à Hambourg où nous sommes allées, il y a des débardeurs juifs ? Ceux-là n’ont pas perdu leur place, vous voyez bien ». « Je reviens convaincue que le peuple allemand ne veut pas la guerre, et pas plus le gouvernement allemand que le peuple allemand ». Ce discours provoqua un tollé général dans la profession. Le 10 juillet 1939, au conseil national du SNA réuni en juillet 1939, des délégués lui demandèrent des précisions : « Pendant ce voyage, dit Charlotte Bonnin, j’ai pu constater que la presse française nous bourrait le crâne » peut-on lire dans le compte rendu du CN du SNA, publié dans le journal PTT du 20 juillet suivant. .

Principales féministes dans le Maitron

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article101099, notice BONNIN Charlotte par Claude Pennetier, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 2 septembre 2020.

Par Claude Pennetier

SOURCES : Comptes rendus des XIIe congrès (extraordinaire) tenu à Paris 18-19 juillet 1931 et XIIIe congrès, Paris 3-6 juin 1932. — Arch. PPo. 307. — Le Peuple, 21 mai 1930, 22 juin 1930 31 octobre 1930, 25 juillet 1934La Révolution prolétarienne, 15 mars 1927, 1er décembre 1928. — Le Journal, 1er septembre 1927. — L’Excelsior, 31 octobre 1928 — Christine Bard, " la recherche des diversités féministes dans le Dictionnaire [Maitron]", La Part des militants, Éditions de l’Atelier, 1996. — Georges Frischmann, Histoire de la Fédération CGT des PTT, Éditions sociales, 1969, p272-273 ; réédité en 2011 par l’IHS-CGT-FAPT. — Notes de Gilles Pichavant

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