ANSART Gustave

Par Frédéric Monier

Né le 5 mars 1923 à Roubaix (Nord), mort le 20 septembre 1990 à Mérignies (Nord) ; ouvrier métallurgiste à Croix (Nord) ; syndicaliste CGT et militant communiste du Nord, secrétaire de l’union des syndicats CGT des travailleurs de la métallurgie (USTM) du Nord-Pas-de-Calais (1951), secrétaire de la fédération du Nord du PCF (1955-1977), membre du bureau politique du PCF (1956-1990), directeur du journal Liberté (1958-1982) ; député du Nord (1956-1958, 1973-1990), député européen (1979-1981).

Gustave Ansart dans les années 1950
Gustave Ansart dans les années 1950
Assemblée nationale, Notices et portraits, 1956

Né dans le quartier populaire du « Pile » à Roubaix, Gustave Ansart était le deuxième enfant d’une famille ouvrière. Son père Joseph, né en 1897, lui-même fils d’un militant guesdiste, travaillait dans le textile. Syndicaliste, sympathisant de la SFIO, Joseph Ansart trouva un emploi dans une usine métallurgique en 1938 après avoir, un temps, tenu un cabaret à Roubaix (vers 1935). Sa femme, Octavie de Graeve, d’origine belge, était employée comme doubleuse à l’entreprise roubaisienne « la Lainière ». Enfant, Gustave Ansart fut influencé par l’un de ses instituteurs, Monsieur Leriche, militant communiste. Ayant obtenu son certificat d’études primaires à l’âge de douze ans, Gustave Ansart commença à travailler en 1936 dans une fabrique de tapis à Roubaix. Dans l’effervescence syndicale et politique du Front populaire, le jeune Gustave Ansart adhéra à la CGT à l’âge de treize ans, et assista à ses premières réunions politiques dont, probablement, un meeting de Marcel Cachin* en juillet 1937, à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Jules Guesde*.

En 1938, Gustave Ansart entra à l’usine où son père était employé comme cadre moyen : la CIMA - Wallut, (devenue la International Harvester), à Croix, filiale de la société Mac Cormick de Chicago, fabriquait des machines agricoles. Devenu métallurgiste, il assista à l’échec de la grève de novembre 1938. Après l’armistice de juin 1940, Gustave Ansart n’aurait pas repris le travail. En 1941, son frère aîné, Joseph, (né en 1920), fut, un temps, incarcéré comme otage à Valenciennes, puis libéré. Tandis que son frère était, en 1942 ou 1943, pris dans une rafle à Roubaix et envoyé en Allemagne, Gustave Ansart chercha à échapper au STO (Service du travail obligatoire). Aidé par sa famille et des résistants communistes, dont l’ouvrier métallurgiste Jules Florent, Gustave Ansart fut en contact avec Eugène Vanoverberghe. Il rencontra sa fille, Liane Vanoverberghe, (née le 1er septembre 1923), en janvier 1942. Il l’épousa le 7 novembre 1942. Au contact de sa belle-famille, se confirmèrent l’engagement politique de Gustave Ansart, ainsi que son goût pour la lecture. Au début de 1944, il entra, par le biais de Charles Miegens, dans les milices patriotiques. Secrétaire des Jeunesses communistes de Roubaix la même année, il disait n’avoir « pour ainsi dire pas milité », à part « la distribution de quelques tracts. »

À la Libération, Gustave Ansart réintégra la CIMA-Wallut. Syndicaliste, il adhéra à la CGT en 1947 et devint secrétaire de sa cellule d’entreprise ainsi que délégué d’atelier. Il fit ses premières armes de militant au cours des grèves de 1947, durant lesquelles il aurait été, d’après ses propres dires, « arrêté plusieurs fois par la police, aussitôt relâché ». À l’issue de cette grève, Gustave Ansart, élu au comité d’entreprise de la CIMA-Wallut, qui employait alors 5 000 personnes, fut confronté comme représentant ouvrier au conseil d’administration au mode de gestion américain de l’usine,. Inscrit au PCF en 1945, ce jeune militant à l’engagement précoce fut remarqué par Louis Manguine*, qui dirigeait l’union départementale CGT du Nord. Sa personnalité originale ressort notamment de plusieurs réponses à un questionnaire biographique de 1948, ainsi sur cette « large démocratie dans le parti » à opposer, selon lui, aux « provocations des agents des trusts ». Ces qualités furent évaluées de façon très positive : Gustave Ansart, en 1948, pouvait « devenir un cadre excellent. » Cela explique sans doute que, avec le soutien d’Ambroise Croizat*, Gustave Ansart ait quitté la CIMA-Wallut en 1951 pour devenir secrétaire de l’union des syndicats CGT des travailleurs de la métallurgie (USTM) du Nord et du Pas-de-Calais, qui comptait près de 25 000 adhérents. Membre du bureau de la Fédération nationale de la métallurgie, il se lia d’amitié avec Arthur Buchmann*, son homologue pour la Meurthe-et-Moselle.

Au PCF, son ascension fut rapide. Siégeant au bureau fédéral, pour le département du Nord, depuis 1951, Gustave Ansart suivit, à la fin de 1952 ou au début de 1953, l’école centrale du parti, alors dirigée par Roger Pannequin*. Promu membre suppléant du comité central au XIIIe congrès (Ivry) du PCF en juin 1954, il faisait partie d’un groupe de jeunes militants ouvriers, dont Georges Séguy*, distingués par la direction thorézienne. À l’été 1954, sur intervention de Jacques Duclos*, Gustave Ansart remplaça Louis Lambin* comme secrétaire de la fédération du Nord du PCF. Aux élections législatives de janvier 1956, deuxième sur la liste enlevée par Arthur Ramette*, il fut élu dans la circonscription de Lille-Roubaix-Tourcoing. Ce jeune dirigeant fut confirmé au XVIe congrès du PCF (Le Havre, juillet 1956), à l’issue duquel il se retrouva membre suppléant du bureau politique.

Ce passage très rapide, entre 1951 et 1956, d’un poste de permanent syndical à la direction nationale du PCF mérite quelques remarques. L’arrivée de Gustave Ansart à la tête de la fédération du Nord permit de stabiliser l’équipe dirigeante, successivement animée, de 1945 à 1949, par Arthur Ramette, par Louis Lallemand* en 1949, puis par Louis Lambin. Dans cette équipe, on remarquait, outre Gustave Ansart, Hector Viron* et Jean Colpin*, secrétaires fédéraux, et Albert de Bosschère, futur membre du comité central. Quant au choix de Gustave Ansart comme membre du bureau politique, il pouvait s’expliquer, entre autres facteurs, par l’absence de représentant du Nord dans cette instance, depuis l’éviction d’Arthur Ramette en 1950. Le contenu des interventions d’Ansart aux différentes réunions du comité central, de 1954 à 1958, concerne essentiellement les luttes sociales et politiques menées dans ce département. En ce sens, Gustave Ansart, père de deux garçons (Gustave, né le 1er septembre 1950, et Georges, né le 28 septembre 1956), dont la femme militait à l’UFF (Union des femmes françaises) et au Mouvement pour la paix, était le symbole de la relève, par la jeune génération, de la direction historique du PCF dans le Nord. Pour autant, Gustave Ansart ne rompit jamais les liens avec les dirigeants formés aux luttes des années trente et de la résistance, comme Louis Manguine* ou Jean-Marie Fossier*, ancien commissaire politique dans les Brigades Internationales, devenu directeur de l’imprimerie du quotidien régional du parti, Liberté.

Les années 1955-1962 furent, comme souvent, difficiles, compte tenu de la guerre d’Algérie et de l’échec, dans le département du Nord, de tous les candidats communistes aux élections législatives de novembre 1958. En 1959, c’est, semble-t-il, sur intervention de Maurice Thorez* que Gustave Ansart se vit confier la direction politique de Liberté, en remplacement de Léandre Letoquart*, dont le fils, insoumis, avait été soutenu par le journal en 1957. Avec l’aide de Jacques Estager*, rédacteur en chef, et de Louis Lallemand, devenu directeur administratif du quotidien, Gustave Ansart put conserver au PCF l’un de ses derniers organes de presse régionaux, tandis que l’équipe s’enrichissait de nouveaux venus, comme la femme de Jean Colpin, Françoise, en 1961. Si, face à la guerre d’Algérie, l’engagement de la fédération fut très progressif, avec l’arrivée au comité fédéral d’un représentant de la main-d’œuvre immigrée en 1961, il laissa néanmoins des souvenirs douloureux à Gustave Ansart. Alors qu’il n’intervint jamais sur ce sujet au comité central, de 1954 à 1958, il devait déclarer en 1981 qu’il avait « porté sa croix » durant ces années (La Croix du Nord, 19 juin 1981).

Habitant toujours à Roubaix, où son frère Joseph dirigeait l’union locale du parti, Gustave Ansart fut un candidat malheureux aux élections législatives de 1962 et 1967 dans la 7e circonscription du Nord (Lille-Roubaix-Tourcoing). Il dut attendre le XVIIe congrès du parti, en mai 1964, pour être nommé membre titulaire du bureau politique, poste qu’il occupa jusqu’à sa mort. Dans son itinéraire militant, le début des années 1970 allait marquer un tournant. Souvent dépeint comme un partisan de l’union de la gauche, Gustave Ansart fut nommé président, au XIXe congrès de février 1970, de la commission centrale de contrôle politique du PCF, dont faisait également partie Arthur Buchmann, alors secrétaire de la fédération communiste de Meurthe-et-Moselle. Chargé de négocier le volet « nationalisations » du programme commun avec le PS, il dut renoncer, en 1972, à demander la nationalisation de la sidérurgie et accepter de s’en tenir à une « prise de participation financière de l’État » dans ce secteur. Candidat dans la 20e circonscription du Nord (Denain) en remplacement du député communiste sortant, Henri Fievez*, il fut élu aux législatives de mars 1973. Nommé, en novembre de la même année, au premier conseil régional du Nord-Pas-de-Calais, où il présida le groupe communiste, il fut, enfin, représentant à l’Assemblée des communautés européennes.

En juin 1977, peu de temps avant la rupture officielle avec le PS, Gustave Ansart fut remplacé par Alain Bocquet à la tête de la fédération du Nord. Conseiller municipal de Denain de 1977 jusqu’à sa mort, réélu député de la 20e circonscription du Nord en 1978, Gustave Ansart fut présenté par le PCF comme tête de liste aux élections européennes de 1979. Au parlement de Strasbourg, il fut vice-président du groupe communiste. Réélu, au premier tour, député du Nord (Denain) en 1981, il renonça à son mandat européen.

Affirmant ne pas attendre « Mitterrand au coin du bois » (La Croix du Nord, 19 juin 1981), il fut élu président de la commission parlementaire de la production et des échanges à l’Assemblée nationale. Également membre du haut conseil du secteur public, il abandonna, en 1982, la direction politique de Liberté. Son échec aux élections européennes de 1984, en 22e position sur la liste conduite par Georges Marchais*, n’entama ni sa popularité, ni son assise locale. Dans une région entrée en crise, Gustave Ansart, au fond assez guesdiste d’inspiration, était le garant d’une certaine orthodoxie communiste et ouvrière, comme porte-parole des métallurgistes, dans leurs tentatives de résister à la direction d’Usinor et, plus généralement, dans leur lutte contre la désindustrialisation du Valenciennois. Réélu député du Denaisis en 1986 et en 1988, en dépit de la maladie dont il était atteint, Gustave Ansart sut conserver au PCF ce « bastion exceptionnellement résistant » (Béatrice Giblin). Des années cinquante à la fin des années quatre-vingt, Gustave Ansart, qui n’émit jamais de réserves sur les positions défendues par le PCF, finit par incarner le mouvement communiste dans le Nord.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article10134, notice ANSART Gustave par Frédéric Monier, version mise en ligne le 10 octobre 2008, dernière modification le 2 septembre 2016.

Par Frédéric Monier

Gustave Ansart dans les années 1950
Gustave Ansart dans les années 1950
Assemblée nationale, Notices et portraits, 1956
Assemblée nationale, Notices et portraits

ŒUVRE : De l’usine à l’Assemblée nationale, propos recueillis par Jacques Estager, Éditions sociales, 1977.

SOURCES : Arch. de la fédération du Nord du PCF (Espace-Marx, Lille). — Arch. comité national du PCF, dont les enregistrements sonores des réunions du comité central de 1952 à 1958, les listes des comités fédéraux et le dossier personnel de Gustave Ansart. — Arch. Dép. Nord : série W (police générale) ne contient aucun article portant explicitement sur le PCF pour les années 1950-1962. Sur ces sources, voir Dalila Lounici, Les Réactions du PCF dans le Nord face à la guerre d’Algérie, mémoire de maîtrise, université de Valenciennes, 1999. — Béatrice Giblin, « Un bastion communiste exceptionnellement résistant : le Douaisis et le Valenciennois », Communisme, n° 22-23, 1989. — Annie Laurent et Christian Wallon, « Permanence et évolution d’un bastion communiste : la 20e circonscription du Nord », Communisme, n° 4, 1983. — Roger Pannequin, Adieu camarades, Le Sagittaire, 1977. — Philippe Robrieux, Histoire intérieure du PCF, tome IV, Fayard, 1984. — Dictionnaires des Parlementaires français, t. I, La Documentation française, 1988. — Entretiens avec Liane Ansart.

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