BOUCHEZ Arthur

Par Jean Maitron et Claude Pennetier

Né le 7 février 1891 à Saint-Quentin (Aisne), mort le 12 mai 1984 à Bourges (Cher) ; ouvrier métallurgiste ; syndicaliste ; membre du Comité directeur du Parti communiste en 1923 : démissionnaire du PC en janvier 1928.

Fils d’Auguste Bouchez, manouvrier, et de Cléonice, née Trannois, tisseuse, Arthur Bouchez, dans sa lettre de démission du Parti communiste, en janvier 1928, fait remonter son attachement aux idées socialistes à 1910. Mais, sa participation active au mouvement ouvrier n’apparaît dans les rapports de police qu’en 1917, comme animateur avec son frère Charles (Voir Charles Bouchez) de l’aile révolutionnaire et pacifiste du syndicat des Métaux de Bourges (Cher). L’identité entre Arthur Bouchez, ouvrier mobilisé au Établissements militaires de Bourges, et le futur membre du Comité directeur est confirmée par l’origine de sa femme, Antoinette Martin, couturière ; née en 1893 à Bourges. Les frères Bouchez fréquentaient le groupe local des Amis du journal Ce qu’il faut dire (CQFD), créé en février 1917. Des libertaires originaires de Bourges y côtoyaient des syndicalistes révolutionnaires de la Seine et du Nord (Claude Pennetier, thèse, p. 366-367). Un Bouchez, vraisemblablement Arthur qui était l’aîné, siégeait au bureau du syndicat des ouvriers métallurgistes détachés à Bourges, constitué en décembre 1916 par Adolphe Van Gysel. Son organisation le délégua au comité intersyndical du Centre de tendance minoritaire. À l’issue des grèves de mai 1918 qui avaient eu une particulière ampleur aux Établissements militaires de Bourges, les autorités le sanctionnèrent en l’envoyant au 87e régiment d’infanterie. Il se confond vraisemblablement avec Bouchez, collaborateur de L’Internationale, journal de Raymond Péricat, en mars 1919.

Au début des années 1920, Arthur Bouchez habitait à Boulogne-sur-Seine (Seine). Son nom n’apparaît pas dans les listes électorales de 1919, mais, en 1925 il habitait 78 rue Galliéni et, le recensement de 1931 le signalait comme tourneur chez Farman tandis que son épouse travaillait comme couturière chez Boisserie. Lors du congrès de l’Union des syndicats de la Seine, les 14 et 28 novembre 1920, il était présenté comme le dirigeant du comité intersyndical de Boulogne-Billancourt. Il représenta le comité intersyndical de Boulogne au IIe congrès de la Seine en novembre 1921, au IVe congrès départemental CGTU en décembre 1923 et comme secrétaire de la section locale des Métaux, siégea à la CE de la Fédération unitaire des Métaux de 1922 à 1925. En juin 1923, il remplaça Jean Berrar au poste de secrétaire du syndicat unitaire des Métaux de la Seine.
Membre du Parti communiste depuis le congrès de Tours (décembre 1920), partisan de la gauche, Arthur Bouchez fut candidat au Comité directeur au titre de la motion Souvarine-Frossard, au congrès de Paris (15-19 octobre 1922). Les centristes ayant réussi à écarter la gauche des organismes de direction, il dut attendre le conseil national de Boulogne-sur-Seine (21 janvier 1923) pour entrer au Comité directeur qu’il quitta au congrès de Lyon en janvier 1924. Il eut ensuite essentiellement des responsabilités syndicales. En mai 1927, la commission syndicale centrale du Parti communiste décida de le placer à la direction de la Fédération des Métaux pendant la maladie d’Albert Vassart (IMTh, bobine 238). Bouchez dénonçait déjà les restrictions au droit de critique dans le Parti communiste français et le Parti communiste russe.
Il envoya, le 2 janvier 1928, sa lettre de démission à la cellule 1080 de Boulogne-Billancourt :

« Je vous envoie cette lettre pour vous annoncer que je donne ma démission de membre du Parti communiste. Les raisons ? Je ne crois pas devoir m’étendre trop longuement à ce sujet. L’exclusion de Trotsky, de Vouyovitch, de Préobrajensky, l’exclusion de Loriot, de Lucie Colliard, de Faussecave, les menaces qui pèsent sur Treint et Suzanne Girault qui dirigèrent le parti et qu’on tourne en dérision, le manque de clarté et de discussion dans le PCF aussi bien que dans l’Internationale, tout cela m’indique qu’il n’y a rien de changé depuis quelques années, mais qu’au contraire il y a aggravation des mœurs et des méthodes que j’ai critiquées, il y a deux ou trois ans ! Mon désaccord sur ces motifs est assez grand pour que je me retire du parti. Je dois dire en plus que j’ai signé le manifeste ou télégramme des trente qui fût envoyé au XVe congrès du PCR pour protester contre ce qui nous paraissait illogique. L’organisation défectueuse du parti empêche que la raison triomphe et cela durera encore longtemps. Je préfère me retirer pour le moment. Si un jour, il existe un Parti Français et International qui marche normalement sur la voie tracée par Guesde et Lafargue, Karl Marx et Engels, Lénine et Trotsky, c’est-à-dire sur la voie du socialisme et du communisme véritables, avec droit de discussion et de critique, sans doute y reviendrais-je ! Pour l’instant, ce n’est pas le cas. Je termine en vous certifiant que je reste fidèle aux idées et aux principes auxquels je suis attaché depuis 18 ans, idées et principes qui ne sont autres que ceux des maîtres que j’ai cité plus haut. Mon départ a pour motifs essentiels :

« 1) Le droit de discussion et de critique qu’on méconnaît ;

2) La déformation des paroles et des idées de l’Opposition, quand ce n’est pas la conspiration du silence, la calomnie ou l’injure ;

3) La répression qui s’abat à tort et à travers sur les membres de l’Opposition, même quand ceux-ci défendent les tactiques justes et les principes communistes dont le Centre n’a pas le monopole.

Vous pouvez faire part de ma lettre aux camarades du rayon.

À tous, mes sincères salutations socialistes et communistes. »

Nous ne trouvons aucune trace d’activité militante d’Arthur Bouchez après la publication dans Contre le Courant (n° 7, 22 janvier 1928) de cette lettre de démission. Son nom ne figurait plus sur les listes électorales de Boulogne-Billancourt en 1935. Il avait été conseiller prud’homme de la Seine en 1927-1928.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article101407, notice BOUCHEZ Arthur par Jean Maitron et Claude Pennetier, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 15 décembre 2021.

Par Jean Maitron et Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat. F7/13358, F7/13777 — Arch. Dép. Seine-Saint-Denis, 49 J. — IMTh, bobine 238. — Agendas de la Bourse du Travail de Paris. — L’Humanité, 13 octobre 1922. — Bulletin communiste, 5 octobre 1922. — Contre le Courant, n° 7, 22 janvier 1928. — Comptes rendus des congrès syndicaux de la Seine. — État civil de Saint-Quentin. — Claude Pennetier, thèse, op. cit.

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