BOULAY Henri

Par Jean Maitron

Né à Saint-Gengoux-de-Scissé (Saône-et-Loire) le 14 juillet 1889, mort à Mâcon le 7 octobre 1942. Propriétaire viticulteur. Principal animateur de l’organisation coopérative agricole en Bourgogne du Sud de 1925 à 1940. Député socialiste de Saône-et-Loire à partir de 1931.

Henri Boulay
Henri Boulay

Fils de propriétaires vignerons exploitants directs, Henri Boulay grandit dans un village à population très républicaine pénétrée depuis l’affaire Dreyfus par le radicalisme et l’anticléricalisme. Il fit de bonnes études à l’École pratique de Commerce et d’Industrie de Cluny à quelques kilomètres de sa terre natale mais garda toujours une âme de vigneron et la mort de son père le plaça tout jeune à la tête de la propriété familiale qui se doublait d’une pépinière viticole. Il se mit avec ardeur à développer son exploitation.

Mobilisé le 2 août 1914, blessé le 20 près de Sarrebourg, il fut fait prisonnier, passa un an au camp de Grafenwitz puis travailla quarante mois dans différents villages bavarois faisant tous les métiers et, finalement, celui de cultivateur. Il perfectionna ainsi sa connaissance jusqu’alors toute scolaire de la langue allemande et étudia l’économie et la vie bavaroise où il retrouva des analogies bourguignonnes. Il se persuada qu’un rapprochement franco-allemand était possible et qu’on pouvait créer un esprit européen et il fera de cette idée après 1930, un des thèmes favoris de ses discours politiques.

Libéré en 1919, il réorganisa son exploitation négligée pendant la guerre et fonda dans sa commune de Saint-Gengoux un syndicat agricole. Frappé par les fluctuations de prix des vins rouges du Mâconnais et par la spéculation du grand commerce au détriment des vignerons modestes — « en 1923, écrit-il, on a vu des vins livrés le 1er août à 55-60 F, qui trois semaines après, valaient 150 F », — H. Boulay visita en mars 1925 les caves coopératives du Var avec quelques vignerons de Saint-Gengoux et, en juin 1925, sous sa direction, fut fondée la cave coopérative de Saint-Gengoux qui recevait en 1926 la récolte de 85 coopérateurs qui avaient souscrit chacun une part de 100 F. L’ensemble avait coûté 360 000 F dont 200 000 couverts par un emprunt à 2 % remboursable en quinze ans au Crédit agricole. L’œuvre fit tache d’huile, H. Boulay parcourant inlassablement le vignoble mâconnais. Les résultats témoignèrent du succès : cinq caves coopératives en 1927 dans les limites du canton de Lugny, cinq nouvelles dans l’arrondissement de Mâcon en 1928, vingt-deux caves en 1930 dans le Mâconnais produisant 300 000 hl et groupant 3 000 coopérateurs.

Maire de sa commune depuis 1925, H. Boulay procéda à des réalisations municipales hardies : électrification de tous les hameaux, réfections des chemins ruraux et rectification routière, première adduction d’eau du Mâconnais rural, création d’un foyer communal, d’un marché...

Membre du Parti socialiste SFIO, M. Boulay fut désigné comme candidat à l’élection partielle législative de l’arrondissement de Mâcon des 5-12 juillet 1931. Il obtint au premier tour 5 391 voix (21 % des inscrits) et triompha au second tour avec 6 642 voix, succédant ainsi à Jacoulot indépendant de gauche. Les 1-8 mai 1932, il fut réélu : 8 191 voix au premier tour (31 % des inscrits), 11 816 au second. Il en fut de même, plus aisément encore, en 1936 : 9 015 voix au premier tour (35 % des inscrits), 13 343 voix au second, le candidat communiste Chevalier se retirant en sa faveur tandis que Dupuis, radical-socialiste maire de Mâcon, se refusant à soutenir un candidat du Front populaire, retirait seulement sa candidature.

À la Chambre l’action de Boulay s’exerça en plusieurs domaines : défense de l’école laïque, défense de la paix par une proposition de loi « tendant à rendre obligatoire l’enseignement de l’espéranto dans toutes les écoles publiques » (séance du 22 décembre 1938, proposition n° 463) mais il resta avant tout un coopérateur et, en 1933, il fondait la Confédération nationale des coopératives vinicoles et animait sa revue mensuelle Le Vigneron coopérateur. Il commença également à étendre au Mâconnais les réseaux de protection contre la grêle. Dans le domaine agricole et sur le plan parlementaire, il fit partie de la commission de l’Agriculture et du groupe de la coopération. Élargissant son action au marché de la viande où il fit figure de précurseur, il fut rapporteur d’un projet de loi tendant à l’assainissement du marché de la viande et du lait (n° 4878).

En 1937-1938, ce fut le pacifiste de toujours qui domina en lui devant la guerre qui menaçait. Il multiplia alors articles et discours et, même après Munich, voulut se persuader que la paix pouvait encore être sauvée.

Membre du Conseil national économique de 1936 à 1940, Henri Boulay présida la section de la viticulture et fit partie de la commission de la coopération agricole.

Il mourut le 7 octobre 1942 à Mâcon (Saône-et-Loire).

Sa déception fut profonde en septembre 1939 puis devant la débâcle de juin 1940. Le 10 juillet, il vota les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain puis se retira de la vie publique, se consacrant à sa pépinière viticole de Saint-Clément-lès-Mâcon. Peu avant sa mort, il fut chargé de surveiller le ravitaillement des villes de Lyon et de Saint-Étienne.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article101619, notice BOULAY Henri par Jean Maitron, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 11 août 2015.

Par Jean Maitron

Henri Boulay
Henri Boulay

SOURCES : Arch. Dép. Saône-et-Loire, série M (élections législatives) et 41 M. — Arch. Mun. Saint-Gengoux-de-Scissé. — Lyon Républicain 1930-1940. — L’Éclaireur du Mâconnais. — La Dépêche socialiste. — Le Vigneron coopérateur. — Dictionnaire des Parlementaires français. — Papiers personnels de H. Boulay conservés par son fils François Boulay, ingénieur agricole pépiniériste à Mâcon. — Notes de P. Goujon et M. Degueurce.

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