BOUVRAIN Henri, Jules

Par Justinien Raymond, Roger Pierre

Né le 7 octobre 1864 à Sèvres (Seine-et-Oise) ; instituteur ; militant socialiste de l’Ardèche et de la Seine-et-Oise.

Fils de Jules Bouvrain, bijoutier, et de Louise Costard, sans profession, Henri Bouvrain devint instituteur en Seine-et-Oise. Il adhéra au socialisme en 1898 puis, muté en Ardèche, joua pendant quinze ans un rôle de premier plan dans le mouvement socialiste de ce département.

Instituteur à Voguë, il y créa un groupe socialiste vers 1907, et il fut nommé secrétaire adjoint de la Fédération socialiste de l’Ardèche, lorsqu’elle se sépara de la Fédération de la Drôme au congrès de Voguë, dont Bouvrain avait été l’organisateur (janvier 1911). En 1909, il avait été l’un des fondateurs et le président de la coopérative « La Grande Famille » ; il contribua aussi à la création d’une section syndicale d’instituteurs comptant cent membres à la veille de la guerre, et sa femme, institutrice, animait un groupe universitaire féminin de deux cents adhérentes. Ces activités furent en avril et mai 1913 signalées par la préfecture au ministre de l’Instruction publique, et à la suite de ces rapports, Bouvrain et sa femme furent envoyés à l’autre extrémité du département, dans le village de Davézieux, près du centre industriel d’Annonay.

En 1919, Henri Bouvrain prit une part importante à la reconstitution des syndicats ouvriers de cette ville, et au réveil de la Fédération SFIO de l’Ardèche qui n’avait distribué au 1er décembre 1918 que quatre-vingts cartes et 510 timbres. Dans Le Réveil annonéen et dans son édition départementale Le Réveil ardéchois, il publia chaque semaine une chronique intitulée « Tribune socialiste, syndicaliste et coopératiste » qu’il signait du pseudonyme « Jean-Pierre Prolo ». À deux reprises, en 1920, le préfet signala au ministre de l’Intérieur cet instituteur, présidant « ostensiblement, un groupement à tendances révolutionnaires [...] dont tous les loisirs sont occupés à entretenir, sinon à accentuer l’agitation... [et] s’immisce dans tous les milieux ouvriers, qui ne manqueraient pas de le suivre si un mouvement venait à se produire ».

En réalité, les conceptions réformistes de Bouvrain l’opposaient au courant révolutionnaire ; hostile à l’adhésion à la IIIe Internationale, il ne put cependant empêcher le congrès de la Fédération socialiste de se prononcer par quarante mandats contre sept pour la motion Cachin-Frossard. Il se refusa à accepter les décisions du congrès de Tours ; dès janvier 1921, il prit à Annonay l’initiative de la scission en constituant un groupe SFIO, et il tenta, mais sans succès, de reformer la Fédération socialiste de l’Ardèche. S’opposant violemment par la plume et par la parole à ses anciens camarades qui avaient rejoint le Parti communiste, il écrivait le 12 février 1921 dans Le Réveil ardéchois : « ... des quelques armes dont nous disposons, c’est encore le bulletin de vote qui est la plus puissante et surtout la plus sûre ». Mais au lendemain du congrès de Tours, il était difficile de rallier à cette conception la plupart des militants ; le groupe SFIO d’Annonay disparut et la Fédération socialiste de l’Ardèche ne se reconstitua qu’en vue des élections législatives de 1924.

Henri Bouvrain, par contre, contribua à maintenir les syndicats ouvriers d’Annonay et de l’Ardèche, dans l’orientation confédérale majoritaire. Élu à la commission administrative de l’Union des syndicats de l’Ardèche lorsqu’en 1919 celle-ci se détacha de la Fédération de la Drôme, acquise depuis longtemps au courant minoritaire, il usa de toute son influence et de ses qualités oratoires pour la maintenir à la CGT. Artisan de la création, le 14 janvier 1923, d’une Union confédérée des syndicats ouvriers de l’Ardèche et de la Drôme, il en fut nommé secrétaire adjoint (Voir aussi Gravier Cyrille*).

Lorsqu’en 1924, Bouvrain quitta l’Ardèche, il passait pour être « le grand animateur » de la Fédération socialiste reconstituée (L’Humanité, éd. du Midi, 16 mars 1924), et il laissait derrière lui, surtout à Annonay, la marque de ses conceptions.

Revenu en Seine-et-Oise, Henri Bouvrain poursuivit son action socialiste. De 1928 à 1931, il fut membre puis secrétaire de la commission nationale des conflits. En octobre 1934, il fut candidat au conseil général dans le canton de Pontoise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article102064, notice BOUVRAIN Henri, Jules par Justinien Raymond, Roger Pierre, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 9 novembre 2022.

Par Justinien Raymond, Roger Pierre

SOURCES : Arch. Nat. F7/13091 et F 22 /15. — Arch. Dép. Ardèche, 15 M 11. — Compère-Morel, Grand Dictionnaire socialiste, op. cit., p. 81. — Hubert-Rouger, Les Fédérations socialistes I, op. cit., p. 110. — Le Réveil annonéen. — Le Réveil ardéchois, 1919-1922. — A. Darasse, op. cit., pp. 8-13. — Le Travailleur de Seine-et-Oise, octobre 1934. Biographie du t. 11 revue et complétée.

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