BOYET Joseph, Vincent

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 15 janvier 1882 à Champrier (Isère), mort en 1936 ; militant socialiste puis communiste ; membre du comité directeur du Parti communiste (1921) ; administrateur délégué de la Bellevilloise.

Fils d’un gendarme, Joseph Boyet était en 1900 domicilié à Lyon (VIe arr.) où il rencontra vraisemblablement celle qui allait devenir son épouse. Françoise, Antoinette Balmonet née à Lyon, divorcée de Paul Louis, habitait avec lui à Paris en 1911 (sous le nom de Fanny Boyet). Ils se marièrent le 1er septembre 1914 à Paris (IIIe arr.) et eurent un enfant.

Selon l’Humanité du 17 juillet 1921 l’engagement politique de Boyet remontait à son service militaire : « Dès le régiment — où il fut inculpé d’excitation de ses subordonnés à la révolte — (...) Boyet était des nôtres. Plus tard — étant sous-chef du contentieux dans une puissante compagnie d’assurance — Boyet fut remercié à cause de la propagande qu’il faisait parmi ses collègues. » Les registres matricules fournissent toutefois une autre version de son expérience militaire. Devançant l’appel, il s’était engagé pour une durée de cinq ans, en janvier 1900. Affecté au 96e régiment d’infanterie, il passa caporal en juillet 1900, caporal fourrier en septembre 1900, sergent fourrier en février 1901 et enfin sergent en juin 1901. Il fut mis en congés avec certificat de bonne conduite en août 1903, lorsque son frère fut lui-même appelé au service militaire.

Arrivé à Paris en 1907, Joseph Boyet s’installa dans le VIe arr. (d’abord 15 rue Jacob, puis de 1908 à 1911 38 rue Mazarine) et fut candidat socialiste aux élections municipales du 3 mai dans le quartier de Notre-Dame-des-Champs. En 1909, il devint comptable à la coopérative ouvrière La Bellevilloise (21 rue Boyer) dans le XXe arr. et s’installa dans le quartier, 94 rue de Ménilmontant. Les socialistes du quartier Notre-Dame-des-Champs lui demandèrent d’être à nouveau candidat aux élections municipales du 5 mai 1912. Boyet appartenait alors à la tendance dite « insurrectionnelle » (L’Humanité, 17 juillet 1921).

Mobilisé le 2 août 1914, Joseph Boyet fut réformé temporairement en juin 1916 et versé un an plus tard dans les services auxiliaires. Il put donc reprendre son action à la 3e section de la Seine où il militait depuis son emménagement 33 rue de Nazareth, en 1913.
Il était hostile à l’Union sacrée et membre du Comité pour la reprise des relations internationales, puis du Comité de la IIIe Internationale (réélu membre de la Commission exécutive le 13 mai 1921). Il siégea à la commission de contrôle du Parti socialiste de 1916 à 1920 (« minoritaire » en 1916, « ex-minoritaire » en 1918 après le renversement de majorité, réélu au congrès de Strasbourg, février 1920). Candidat dans le quartier des Enfants-Rouges (IIIe arr.) lors des élections municipales du 30 novembre 1919, il recueillit 747 voix sur 5 401 inscrits. Il fut délégué de la Seine au congrès national de Strasbourg (25-29 février 1920) et rapporteur de la commission de contrôle des finances : son intervention souligna les difficultés de transmission du poste de trésorier-comptable de Camélinat à Fernand Loriot, en donnant quitus à ce dernier.
En tant que membre de la Commission exécutive du Comité de la IIIe Internationale, Boyet fut le 5e signataire de la motion Loriot-Souvarine (dite aussi Cachin-Frossard) en faveur de l’adhésion de la SFIO à l’Internationale communiste. Il présida une séance du congrès national de Tours, le 28 décembre 1920, et fut élu au comité directeur du nouveau Parti communiste. Il quitta cette instance dès le congrès de Marseille (25-30 décembre 1921). Boyet apparaissait essentiellement comme un spécialiste des problèmes financiers et de la coopération. Peut-être entretenait-il des relations au-delà des frontières avec des partisans de la IIIe Internationale, car le ministère de l’Intérieur lui refusa un passeport pour se rendre à Berlin en novembre 1920.

Boyet fut candidat aux élections municipales partielles dans le quartier des Archives, le 17 juillet 1921. Il obtint 221 suffrages sur environ deux mille votants, contre 370 au socialiste Grabois, mais la 3e section décida de le maintenir au second tour (L’Internationale, 18 juillet 1921). Le ton de sa campagne électorale était très à gauche : il condamnait toutes les formes du parlementarisme bourgeois et affirmait que les communistes n’entraient dans les conseils de la bourgeoisie qu’à titre provisoire, pour les surveiller et les neutraliser en attendant l’heure de la Révolution (l’Humanité, 12 juillet 1921).
Lié à la Gauche du parti, il signa avec Treint, Loriot et Mercier, une déclaration pour la réorganisation du Comité directeur, publiée dans l’Humanité du 24 décembre 1921, et un texte paru dans le Bulletin communiste du 5 octobre 1922 : « Les militants de la Gauche soussignés, résolus à tenir quant à eux, les engagements contractés en commun, poursuivront sans réticence leur campagne pour faire prévaloir les motions répondant aux conceptions de l’IC. Rien ne les détournera de cette tâche ».
Boyet consacra l’essentiel de ses efforts à renforcer le courant communiste au sein du mouvement des coopératives, réuni à Bordeaux (Gironde) en juin 1923, il demanda aux communistes d’adhérer massivement. Lors du congrès de la Fédération à Nancy en mai 1925, il présenta une motion de protestation contre l’absence de représentation proportionnelle dans les congrès internationaux. En désaccord avec les dirigeants de la commission coopérative centrale du PC, il en démissionna puis revint y siéger.
Opposant à la bolchevisation, il signa en février 1925 la Lettre des 80 de l’opposition communiste, menée par Fernand Loriot.

Boyet, administrateur délégué de la Bellevilloise depuis 1923, démissionna de cette responsabilité le 12 novembre 1928. Il s’en expliqua dans une lettre à Marius Paquereaux : « Je me refuse à garder plus longtemps des fonctions dans l’exercice desquelles ma dignité d’homme et de travailleur ne trouve pas son compte (...) Depuis cinq ans que j’ai accepté de notre parti cette délégation de direction à la Bellevilloise, j’ai tout supporté, tout subi » et il détaillait ses griefs (I.M.Th.). Il revint vraisemblablement sur sa décision car la police le disait encore administrateur délégué en 1929 et, signalait sa condamnation en janvier, à deux cents francs d’amende pour « tromperie sur la qualité ». Le 29 juillet 1929, un gérant de la succursale des Économats de Villeneuve-la-Guyard (Yonne), porta plainte contre lui pour escroquerie. Boyet était également membre du conseil d’administration de la Banque ouvrière et paysanne. Albert Vassart commentant dans ses « Souvenirs » les ennuis financiers du PC en 1929-1930, qualifiait Boyet d’« élément douteux » (en y associant le nom de René Humberdot*) et l’accusait d’avoir truqué les bilans entraînant la liquidation de la Bellevilloise. Boyet ne fit plus parler de lui entre 1930 et son décès en 1936.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article102145, notice BOYET Joseph, Vincent par Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 14 avril 2020.

Par Jean Maitron, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat. F7/12992, F7/13091. — Arch. PPo. Ba/1697, 24 octobre 1929. — Arch. Dép. du Rhône, registres matricules (1 RP 1054). — I.M.Th., bobines 87, 111, 122, 299. — Arch. Jean Maitron. — Arch. A. Marty, B XXI. — L’Humanité, 24 novembre 1919, 29 novembre 1920, 12 et 17 juillet 1921. — L’Internationale, 18 juillet 1921. — Bulletin communiste, 5 octobre 1922. — Souvenirs inédits d’Albert Vassart. — J. Chuzeville, Fernand Loriot, le fondateur oublié du Parti communiste, L’Harmattan, 2012, p. 225. — Notes de Jacques Girault et Paul Boulland.

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