ATLAN Jean [ATLAN Jean-Michel]

Par Jean-Michel Brabant

Né le 21 janvier 1913 à Constantine (Algérie), mort le 12 février 1960 à Paris ; surveillant d’internat puis professeur dans divers établissements privés du secondaire ; militant communiste puis trotskiste ; poète et peintre.

Connu comme artiste peintre, Jean Atlan fut aussi un militant politique actif pendant sa jeunesse. Issu d’une famille juive de Constantine — son père était un négociant aisé en tissus — Jean Atlan arriva à Paris, après avoir obtenu son baccalauréat, à l’automne 1930 et commença des études de philosophie. Il travailla comme surveillant d’internat. Il adhéra à cette époque au Parti communiste dans le XIIIe arr. et à l’Union fédérale des étudiants (UFE). Pour avoir défendu le point de vue de l’opposition trotskiste, à laquelle il appartenait, sur le front unique avec les socialistes au sujet de la situation allemande, Jean Atlan fut exclu en août 1932. Il adhéra aussitôt à la Ligue communiste bolcheviks-léniniste et y milita pendant deux ans. Après un séjour en Algérie il servit de garde du corps à Léon Trotsky lors de son passage en France en décembre après sa conférence tenue à Copenhague. Responsable parisien de la Ligue communiste, il participa en janvier 1933 à la réunion de la Commission exécutive élargie dont il n’était pas, cependant, un membre titulaire.

Son engagement politique très marqué amena Atlan à s’affronter violemment avec les militants communistes qu’il côtoyait. Membre actif du Secours rouge international — il appartenait encore en 1933 à la commission exécutive de la section du quartier de la Gare dans le XIIIe arr. — il échangea des coups avec eux lors d’une réunion tenue en mai. Une semaine plus tard, délégué au congrès européen antifasciste de Pleyel des 4 et 5 juin avec un mandat d’une organisation de jeunesse de Ceylan, il fut séquestré et brutalisé ainsi que d’autres militants trotskistes dans le sous-sol de ces locaux puis ils furent expulsés manu militari par le service d’ordre.

L’activité politique de Jean Atlan était orientée dans plusieurs directions. Militant du SRI, on le vit intervenir en avril 1933 à un de ses meetings tenu à Belfort. Jean Atlan participa d’autre part à l’action anticolonialiste de la Ligue ; son origine algérienne l’y prédisposait. Il avait de fidèles et courageux amis dans l’immigration algérienne, nombreuse dans le XIIIe arrondissement où il demeurait. Ces compatriotes ne manquaient pas de lui tenir compagnie dans les moments où le cortège de la Ligue communiste risquait d’être agressée. L’un de ses compagnons à la Ligue s’appelait Guedj*. Ils étaient inséparables et surnommés « Castor et Pollux ». En septembre 1932 il parla lors d’un meeting tenu à Constantine et le 21 juillet 1933 publia dans La Vérité un article traitant de l’Algérie.

Ce fut cependant son soutien à la lutte des Indochinois qui lui valut ses plus graves ennuis. En mai 1933, après avoir participé à une délégation au siège du Gouvernement général d’Indochine et au sabotage d’une visite à la galerie d’art pour protester contre les arrestations de trotskistes indochinois et les procès de Saïgon, une bagarre éclata. On l’arrêta et il fut inculpé de « bris de clôture et de dégradation de monuments servant à la décoration publique ».

Dans le même temps, Jean Atlan animait avec Yvan Craipeau* le groupe des jeunes de la Ligue : Les Jeunesses léninistes. Il était en effet encore étudiant. En 1934 il devait obtenir son diplôme d’études supérieures de philosophie pour une étude portant sur la dialectique marxiste. Dernier domaine de son action militante, il intervint, en tant qu’enseignant, dans les débats internes de la Confédération générale du travail unitaire et signa à ce titre en juin 1933 un appel pour le respect de la démocratie syndicale à l’intérieur de cette Confédération.

Ce fut vers cette époque qu’Atlan débuta une réflexion qui devait le mener à la poésie puis à la peinture, son inspiration trouvant ses sources dans son origine méditerranéenne.

Mobilisé en septembre 1939, il fut envoyé à Laval et on le chargea, en décembre, d’enseigner la philosophie. Démobilisé en 1940, il enseigna quelque temps au lycée Condorcet à Paris. Relevé de son poste à cause de son origine juive, il fut arrêté avec sa compagne, Denise Véron, par la police le 9 juin 1942. Après six mois passés au Dépôt, il fut conduit à la Santé ; il simula alors la folie, fut interné à l’hôpital Sainte-Anne, grâce à l’aide d’amis psychiatres et échappa ainsi à la déportation ; la libération de Paris le trouva sur les barricades après sa sortie de l’asile, le 18 août 1944. Il a été homologué au titre de la Résistance intérieure française (RIF).

À cette époque commença sa carrière de peintre. Alors qu’il avait déjà publié des vers, il réalisa sa première exposition en décembre 1944. J. Atlan s’imposa dans le domaine de la peinture ; trois ans après sa mort une rétrospective de son œuvre fut organisée au Musée national d’art moderne de Paris.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article10331, notice ATLAN Jean [ATLAN Jean-Michel] par Jean-Michel Brabant, version mise en ligne le 10 octobre 2008, dernière modification le 6 novembre 2021.

Par Jean-Michel Brabant

Jean Atlan
Jean Atlan
Jean Atlan lors de son arrestation
Jean Atlan lors de son arrestation

SOURCES : La Vérité, 1932 et 1933. — Le Travailleur, n° 61, 15 juillet 1933. — Bernard Dahlan, Jean Atlan et l’inspiration méditerranéenne, Thèse de 3e cycle, Paris 1971. — B. Dorival, Atlan. Essai de biographie artistique, Paris, Éd. Pierre Tisné, 1962. — Le Monde, 10 mai 1996. — Atlan. Catalogue raisonné de l’œuvre complete, par Jacques Polieri, Denise et Camille Atlan, Gallimard 1996, 675 p. — Michel Ragon, Atlan, Kisler, 1960. — Témoignage d’André Domerq, membre de la Ligue communiste à cette époque. - Bureau Résistance GR 16 P 20248.

PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 171

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