AUBRY Louis

Par Michel Cordillot, Claude Pennetier

Né le 5 décembre 1911 à Auxerre (Yonne) ; instituteur puis maroquinier ; militant communiste puis oppositionnel puis socialiste.

Fils d’un ouvrier de l’usine Moreau (chocolat) et d’une matelassière, Louis Aubry fréquenta l’École normale d’Auxerre de 1928 à 1931. Instituteur à Saint-Florentin avec le trotskiste Honoré Luas* puis à Auxerre et à Noyers (Yonne), il créa les Jeunesses communistes d’Auxerre en 1929. En 1933, il gagna un concours littéraire de l’Humanité. Son texte fut publié dans l’Almanach ouvrier et paysan et dans Commune : « L’AEAR m’avait demandé de rester en contact avec eux ». Militant communiste, il s’opposa aux orientations du PCF en 1936 avec René Roulot*. Georges Marrane, maire d’Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne) les critiqua lors du congrès fédéral annuel. Il quitta alors le Parti et rejoignit le groupe Que faire qu’il avait connu à l’occasion d’une réunion contre la guerre tenue à Saint-Denis (Seine, Seine-Saint-Denis). Avec Robert Simon*, il diffusa Le Drapeau rouge, « journal communiste révolutionnaire » qui caractérisait le dilemme du Front populaire par la formule « politique bourgeoise ou politique prolétarienne ». Très influencé par Pierre Rimbert*, il suivit le groupe Que faire à la SFIO en 1937.

Louis Aubry anima le mouvement antifasciste dans ce département et fut secrétaire départemental des comités de lutte contre la guerre et le fascisme dès le mois de mars 1934 puis des comités « Paix et Liberté » avec lesquels il rompit à la fin de 1938. Un rapport d’Octave Rabaté consacré en mars 1938 à la Région communiste de l’Yonne, affirmait que Louis Aubry et Robert Simon (un autre instituteur), refusaient de transformer le mouvement Amsterdam-Pleyel en « Paix et liberté » et qu’ils voulaient utiliser leurs « comités de luttes » comme une « arme contre le Parti » ; tous les deux avaient démissionné du PCF mais, disait Octave Rabaté, la région avait « commis la faute de ne pas [l’]exclure ». Il signalait leur journal Front antifasciste (RGASPI, 517 1 1896).

À l’occasion de sa prise de distance avec « Paix et liberté », il écrivit au vieux militant de l’Yonne Gaston Clémendot : « Comme suite à l’attitude scandaleuse des organisations ouvrières lors des derniers événements, nous avons pensé que tout devait être tenté pour regrouper ceux qui ne veulent pas de la guerre. (...) Pour ma part, je suis décidé à laisser tomber les comités “Paix et Liberté” tout en entraînant dans mon départ le plus possible de militants. Mais il faut qu’auparavant, pour que ne soient pas abandonnés les 800 ou 1 000 adhérents qui me suivent, existe une autre organisation ». Gaston Clémendot ayant créé des conseils d’action contre la guerre, Louis Aubry en devint le secrétaire départemental à la propagande. Ces comités périclitèrent rapidement.

Louis Aubry fut révoqué de l’enseignement en juin 1940 et interné au camp de Vaudeurs pendant la guerre, avec le trotskiste Marcel Brocard et des militants communistes. Transféré à Voves, libéré pour raison de santé début 1943, il devint commerçant maroquinier à Auxerre. Il fut un témoin indirect de l’assassinat par des résistants de Marcel Brocard à Libération, mais, comme les autres militants locaux, il garda longtemps le silence. Dans le dossier du procès de 1945 Dans sa déposition au cours de l’instruction du procès Grégoire, Louis Aubry déclara qu’ il avait adhéré au Rassemblement national populaire (RNP) alors qu’ il était au camp de Voves , « pour tromper l’adversaire », mais que, de retour à Auxerre, il n’avait pas assisté aux réunions du RNP, bien qu’il ait été sollicité.
Au bas de sa déposition , il fut blanchi par André Cornillon qui était alors le président du comité de Libération d’Auxerre.
Ayant un sentiment d’échec devant la guerre, il cessa de militer.

N’ayant pas demandé sa réintégration dans l’enseignement, il tenait toujours, en 1999, son petit commerce de maroquinerie.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article10398, notice AUBRY Louis par Michel Cordillot, Claude Pennetier, version mise en ligne le 10 octobre 2008, dernière modification le 12 octobre 2021.

Par Michel Cordillot, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat. F7/13029, rapport du préfet du 16 avril 1934. — RGASPI, 517 1 1896 (noté par Jacques Girault). — Arch. Clémendot conservées au Centre d’histoire sociale du XXe siècle, Paris I. — Le Travailleur, 1934-1939. — Notice DBMOF par Jean Maitron et Claude Pennetier. — Rencontre de Michel Cordillot et Claude Pennetier avec Louis Aubry, 7 juillet 1999. — Notes de Guy Lavrat sur le procès Grégoire.

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