CHANTEMESSE Alice, épouse SERVE

Par Jean Lorcin, Jean-Michel Steiner

Née le 21 décembre 1898 à Lorette (Loire), morte le 10 mai 1991 à Saint-Étienne (Loire) ; institutrice ; syndicaliste CGTU de la Loire, militante communiste.

Prospectus de
Prospectus de "L’Ouvrière" diffusé par Alice Chantemesse

Fille de Louis Joseph, ouvrier mineur, né le 16 décembre 1865 à Grand Croix et de Claudine Audin, née le 31 mars 1867, à Grand-Croix, Alice Chantemesse habitait hameau des Charmières, commune de Lorette. Elle était la benjamine de la famille avec deux frères (Pierre et Ernest) et une sœur (Marie, née le 28 août 1891). Leur mère mourut le 16 février 1907 alors qu’Alice était âgée de huit ans.

Comme sa sœur aînée, Marie, Alice Chantemesse devint institutrice. Entrée à l’École Normale d’Institutrices de Saint-Étienne le 18 août 1916, elle en sortit le 30 septembre 1919. Après diverses suppléances elle effectua à partir du 1er octobre 1920 son stage dans l’école rurale du hameau de Prélager, dans la commune de Saint-Régis-du-Coin (Loire) où elle fut titularisée et demeura jusqu’au 30 septembre 1923. Elle enseigna ensuite à l’école de Planfoy (Loire) jusqu’au 30 septembre 1931. Dans ces deux communes du massif du Pilat elle se heurta à la concurrence des écoles privées catholiques et à la méfiance de parents à l’égard de l’enseignement public. D’octobre 1931 à septembre 1957, Alice Chantemesse exerça dans l’école de la rue Descours, quartier d’ouvriers mineurs de Saint-Étienne, proche des puits Montmartre et Couriot. C’est là qu’elle fut chargée d’une classe de perfectionnement à partir du 1er mars 1938. Pour sa dernière d’année d’activité professionnelle elle fut nommée directrice d’école autonome de perfectionnement à Tardy, rue Vergnette. Elle fut admise à la retraite à compter du 13 juin 1958.

Tous les rapports d’inspection qui jalonnèrent sa carrière ont souligné son engagement : « une forte et constante volonté éducatrice » (1928) ; « chargée à sa demande d’un service que d’aucuns trouveraient ingrat, Mme Chantemesse s’y emploie utilement avec beaucoup de cœur » (1934) ; « elle a foi dans l’efficacité des efforts qu’elle faits : elle ne se trompe pas » (1936) ; « Elle fait preuve d’un dévouement remarquable à l’égard des enfants déshérités qu’elle reçoit » (1945).

Alice Chantemesse était, dès 1924, une des militantes féminines en vue du Parti communiste et de la CGTU. En août 1928, toujours adhérente du syndicat unitaire, elle occupait des fonctions de direction : trésorière en 1926-1927, membre du conseil syndical en 1927-1928, secrétaire pédagogique en 1928-1929. Elle appartenait également au Groupe des Jeunes, dont elle dirigeait la bibliothèque.

En 1926, elle créa un groupe féministe unitaire « Les Amies ouvrières », dont elle fut la secrétaire jusqu’à sa disparition : à ce titre, elle participait au congrès annuel, et prépara un rapport sur les taudis qui fut publié. Dans un rapport interne de novembre 1928, Jeanne Buland responsable du travail femmes du PC précise que le groupe des Amies ouvrières ne doit pas être confondu avec un groupe des amies du journal l’Ouvrière : « c’était un parti communiste de femmes à côté de notre parti » (I.M.Th., bobine 295). Le 14 novembre 1928, cette organisation fusionna avec le groupe de l’Union des femmes contre la guerre dont A. Chantemesse devint secrétaire.

Secrétaire de la section féminine du comité de rayon communiste de Saint-Étienne, réélue le 20 février 1927, elle assista à la réunion du 14 mars 1928 où, en présence de deux délégués de la IIIe Internationale, on arrêta, pour la Loire, la tactique des élections législatives de 1928 : Alice Chantemesse s’opposa à ce que l’on y fit un sort spécial à la 4e circonscription de Saint-Étienne, se joignant sur ce point à Pierre Arnaud qui préconisait l’application intransigeante partout de la stratégie « classe contre classe ».

Arrêtée le 1er août 1929 avec Albert Dolmazon et Jean Baptiste Devidal lors d’une manifestation, puis condamnée à 112F d’amende par le tribunal de simple police, elle reçut le 17 décembre une réprimande de la part de l’Inspecteur d’Académie « considérant que cette sanction judiciaire est de nature à compromettre la considération dont une institutrice a besoin ». Elle répondit par une vigoureuse protestation : « bien que je ne cache aucunement mes idées, bien que je n’aie jamais rien fait pour flatter l’opinion publique, je vous déclare orgueilleusement, M L’Inspecteur d’Académie, que je jouis dans ma classe de toute autorité nécessaire et dans le village de toute considération souhaitable ».

Elle démissionna du comité de rayon en janvier 1929, mais on l’y retrouva en 1932 et 1935. Au congrès de rayon du 29 décembre 1931, elle critiqua la direction du rayon et demanda en outre, la création d’une commission de surveillance pour « dépister les agents de la police » dans les cellules. En 1932, elle était responsable, avec L. Granjon et Albert Dolmazon à la rédaction du journal Le Cri du Peuple, organe du PC de la Loire.

Le 13 avril 1935, elle épousa à Saint-Étienne François Serve, ajusteur en verrerie, né à Saint-Julien-Molin-Molette (Loire) le 28 décembre 1902. Selon le recensement de 1936, ils vivaient au 9 rue Henri Gonnard à Saint-Étienne. Son mari était secrétaire permanent de l’Union Confédérale des Locataires (section de Saint-Etienne et de la Loire).

Alice Chantemesse-Serve fut arrêtée le 12 novembre 1939 lors d’une réunion sans autorisation, au Café de la Paix, à Saint-Etienne. Il s’agissait de régler les problèmes liés à la dissolution d’une association de locataires considérée comme proche du PCF. Suite à l’arrêté du Général commandant la 13e Région du 4 septembre 1939, elle fut inculpée de propagande communiste, mais bénéficia des témoignages favorables du directeur de son école et de l’Inspecteur d’Académie et obtint un non lieu le 2 janvier 1940. En octobre 1943, elle se porta volontaire pour accompagner sa classe déplacée dans la région rurale de Saint-Jean-Soleymieux par mesure de précaution contre d’éventuels bombardements sur la région stéphanoise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article104864, notice CHANTEMESSE Alice, épouse SERVE par Jean Lorcin, Jean-Michel Steiner, version mise en ligne le 4 novembre 2010, dernière modification le 26 août 2022.

Par Jean Lorcin, Jean-Michel Steiner

Prospectus de "L'Ouvrière" diffusé par Alice Chantemesse
Prospectus de "L’Ouvrière" diffusé par Alice Chantemesse

ŒUVRE : « La Crise du logement, les habitations à bon marché » dans la « Tribune féministe » de l’École Émancipée du 6 mai 1928 ; « Le cottage social », ibid., 2 janvier 1929 ; Les taudis de notre siècle, ibid., 29 décembre 1929 ; « Ceux des taudis », ibid., 5 janvier 1930 ; « Causes des taudis », ibid., 19 janvier 1930 ; « L’enfance malheureuse », ibid., 1er juin 1930.

SOURCES : Arch. Nat. F7/13105, 13110, 13116, 13129, 13746, 13747. - Arch. Dép. Loire, 3 M 70, 3 M 75, 4 M 125, 4 M 588, 1132 W 67, dossier professionnel (1958) État-civil Grand-Croix : 3 E 104_9 (Mariages, 1890-1892) ; État-civil Lorette : 3 E 124_8 (Naissances 1894-1898), 3 E 124_14 (Décès 1905-1907), recensement Lorette : 6 M 566 (1901) ; 6 M 700, recensement Saint-Étienne sud-ouest 1936 - Renseignements communiqués par Jean Maitron. - L’École Émancipée. - Bulletin des GFEL - L’Unitaire, organe syndical mensuel des membres de l’enseignement laïque de la Loire. — A.-M. Sohn, Thèse, op. cit. — Note de Jacques Girault. — RGASPI, 495 270 5299, dossier au nom d’Alice Serve dans les archives du Komintern, demandé mais pas obtenu. Arch. Mun. Saint-Étienne : listes électorales : 1 K 29 (1944), 1 K 48 (1946).

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