Né le 8 avril 1900 à Saint-Paul-en-Gâtine (Deux-Sèvres), mort le 5 octobre 1982 à Saint-Germain-sur-Avre (Eure) ; mécanicien ajusteur, administrateur civil ; résistant ; militant syndical à la CGT et à la CGTU ; historien.
Paul Chauvet était le fils de Pierre Auguste Chauvet et de Marie Louise Augustine Chardon, tous les deux domestiques. Il se maria, le 26 avril 1926, avec Marie Juliette Souchard (1904-1991), à Saint-Hilaire-de-Voust (Vendée). Après son certificat d’études, qu’il obtint à la première place du canton, il entra en apprentissage chez un maréchal-ferrant, à l’âge de treize ans. En août 1918, il s’engagea volontairement dans l’armée et fut affecté au 101e régiment d’artillerie lourde comme 2e canonnier. Le passage sous l’uniforme constitua pour lui une instance de socialisation politique puisqu’il y rencontra un brigadier d’artillerie – bonnetier dans le civil à Troyes (Aube) – qui l’initia aux questions économiques et sociales ainsi qu’aux questions liées au mouvement ouvrier. Après l’armistice, il passa par plusieurs régiments d’artillerie lourde (121e, 100e, 83e) puis par le 52e régiment d’artillerie de campagne jusqu’à sa mise en congé illimité, le 9 décembre 1920. Il passa ensuite dans la réserve de l’armée active. De retour à la vie civile, il devint ajusteur-mécanicien et milita à la CGT puis à la CGTU. De 1923 à 1930, il tint un petit atelier de mécanique à Saint-Paul-en-Gâtine. Après la liquidation de celui-ci, il s’installa à Paris et travailla comme mécanicien. Il suivit, en parallèle, les cours par correspondance de l’École des Travaux publics et obtint également le certificat d’ancien élève de l’École supérieure de soudure autogène (ESSA).
L’année 1936 apparaît comme un tournant dans sa trajectoire. Ayant participé aux grèves de mai-juin 1936, il fut victime de la répression patronale et perdit son emploi. Cette période de chômage lui permit de devenir rédacteur au journal Paix et Liberté, au sein duquel il côtoya notamment Guy de la Batut, et d’écrire également dans Le Peuple, le journal de la CGT. À partir des années 1937-1938, profondément marqué par la faillite du Front populaire, il en rechercha les causes en se tournant vers l’Histoire. Il mena alors une première recherche sur les communes du Moyen Âge qu’il publia en plusieurs épisodes sous le titre « Le vrai visage du Moyen Âge », en 1939, dans la revue littéraire Jean-Jacques dirigée par Henri Poulaille. Il s’intéressa ensuite à la Révolution française et publia, également dans Jean-Jacques, un article intitulé « L’insurrection parisienne », annonçant la publication, en 1946, de son livre 1789, l’insurrection parisienne et la prise de la Bastille chez Domat-Montchrestien, dans la collection d’histoire sociale. Proche d’Henri Poulaille, il s’engagea également à ses côtés au « Musée du soir » et intervint également à l’Université de la jeunesse prolétarienne (UJP), ce qui fit dire au Libertaire que « Paul Chauvet fait partie de ces quelques pionniers qui, avec Poulaille, font actuellement les efforts les plus sympathiques pour la culture prolétarienne » (Le Libertaire, 15 juin 1939, p. 3).
Mobilisé le 1er septembre 1939, il fut affecté comme dessinateur à la Société nationale de construction de moteurs (SNCM) à Argenteuil (Seine-et-Oise, Hauts-de-Seine). Démobilisé le 15 juillet 1940, il quitta Paris le 23 juillet suivant et rejoignit Marseille (Bouches-du-Rhône) le 26 février 1941. Il gagna ensuite le Maroc, Casablanca puis Tanger, pour arriver enfin à Gibraltar où il rallia la Mission militaire française et se porta volontaire pour servir dans les Forces françaises libres (FFL). Il arriva à Londres le 19 novembre 1941. Il devint alors « rédacteur », puis chef de section (octobre 1943-février 1945) et enfin sous-chef de bureau (jusqu’à la fin des hostilités) au Commissariat à l’Intérieur. Il poursuivit également son engagement syndical en devenant le secrétaire général du Centre syndical français. Entretemps, il suivit le gouvernement provisoire à Alger.
Rentré en France après la Libération, il intégra le corps des « administrateurs civils » récemment créé et devint donc haut-fonctionnaire au ministère de l’Intérieur, ministère au sein duquel il dirigea le syndicat CGT. Après la publication de son livre sur la Révolution française en 1946, il se tourna vers l’histoire des ouvriers du livre. En 1952, il soutint à la Sorbonne, devant un jury composé de Georges Bourgin, Georges Lefebvre et Charles-Hippolyte Pouthas, une thèse intitulée Les ouvriers du livre en France des origines à nos jours : de 1789 à la constitution de la Fédération du livre. À la suite de cette thèse, il publia trois livres sur ce sujet : Les ouvriers du livre en France. De 1789 à la constitution de la Fédération du livre (Marcel Rivière, 1956) ; Les ouvriers du livre en France. Des origines à la Révolution de 1789 (Presses Universitaire de France, 1959) ; Les ouvriers du livre et du journal. La Fédération française des travailleurs du livres (Éditions ouvrières, 1971). Bien que Paul Chauvet n’appartînt pas « au Livre », ses travaux furent reconnus par la profession comme en témoignent les trois préfaces signées par Édouard Ehni, Fernand Besnier (secrétaires généraux de la Fédération française des travailleurs du Livre), Armand Prudhomme (secrétaire général du Syndicat du Livre parisien) et M.-A. Bernard (secrétaire de la Chambre syndicale typographique parisienne). Il publia quelques années plus tard, en 1979, un livre intitulé La Résistance chez les fils de Gutenberg dans la Deuxième guerre mondiale. Enfin, en 1981, il rédigea un livre pour le centenaire de la Fédération française des travailleurs du Livre (Un centenaire historique dans le livre). Le syndicat en fit un « typo d’honneur » pour le remercier de ces travaux.
En lien avec ses travaux historiques, Paul Chavet participa dès 1945 aux dîners des historiens sociaux organisés autour de Georges Bourgin et Édouard Dolléans et fut l’un des douze fondateurs de l’Institut français d’Histoire sociale (IFHS), le 18 mars 1949, en compagnie de Georges et François Bourgin, Émile Coornaert, Edouard Dolléans, Jean-Baptiste Duroselle, René Garmy, Bertrand Gille, Ernest Labrousse, Jean Maitron, Émile Tersen et Georges Vidalenc. Il y occupa les postes de secrétaire-adjoint et de directeur-adjoint, le secrétaire et le directeur étant Jean Maitron. Il joua notamment un rôle important dans la reconnaissance d’utilité publique de l’IFHS. Cependant, il dût démissionner pour raison de santé lors de l’Assemblée générale du 24 janvier 1959 et fut remplacé par Denise Fauvel-Rouif, déjà membre du comité exécutif. Proche de Georges Bourgin, il révisa et mit à jour les troisième (1965) et quatrième édition (1969) du Que sais-je ? sur la Commune de Paris rédigé par celui-ci et publié initialement en 1953.
Il décéda le 5 octobre 1982 à Saint-Germain-sur-Avre.
ŒUVRE :« Le vrai visage du Moyen Âge », Jean-Jacques, 15 avril 1939 ; 1er mai 1939 ; 15 mai 1939 ; 1er juin 1939 ; 15 juin 1939. — « L’insurrection parisienne », Jean-Jacques, 1er juillet 1939. —« Ce que fut l’esprit de 89 », Le Libertaire, 24 août 1939. — 1789, l’insurrection parisienne et la prise de la Bastille, Domat-Montchrestien, 1946. — Les ouvriers du livre en France. De 1789 à la constitution de la Fédération du Livre, Marcel Rivière, 1956. — Les ouvriers du livre en France. Des origines à la Révolution de 1789, PUF, 1959. — Les ouvriers du livre et du journal. La Fédération française des travailleurs du livre, Les Éditions Ouvrières, 1971. — La Résistance chez les fils de Gutenberg dans la Deuxième Guerre mondiale, chez l’auteur, 1979. — Un centenaire historique dans le livre, Syndicat général du livre, 1981.
SOURCES : Arch. Nat. : Archives internes de l’IFHS — SHD, dossiers Paul Chauvet (GR 16 P 124762 / GR 28 P 2 254) — L’Œuvre, 21 mai 1939 — « Encres et papier », Le Libertaire, 25 mai 1939 — Le Libertaire, 8 juin 1939 — « Paul Chauvet à l’UJP », Le Libertaire, 15 juin 1939, p. 3 ¬— « La vie syndicale », L’Écho d’Alger, 21 mars 1944, p. 2 — « Des historiens protestent contre la saisie du Précis d’Histoire du Parti Bolchevik », L’Humanité, 6 juillet 1949 — « Paul Chauvet », Les Cahiers de l’Institut CGT d’histoire sociale, n°3, décembre 1982, p. 37. — Notice DBMOF. — Notice établie par Isabelle Antonutti pour le Dictionnaire des ouvriers du Livre. — État-civil de Saint-Paul-en-Gâtine, Saint-Hilaire-de-Voust.