Par Jean Maitron
Né le 5 octobre 1877 à Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), mort en janvier 1940 ; tonnelier à Bordeaux (Gironde) ; militant actif de la Fédération du Tonneau CGT puis CGTU ; membre du Parti communiste.
Léopold Crispel était, en 1911, secrétaire adjoint de la Bourse du Travail de Bordeaux créée en décembre 1896 et adhérente de la CGT. Syndicaliste révolutionnaire inscrit au Carnet B, Crispel se déclara démissionnaire à la suite du vote d’un ordre du jour approuvant le secrétaire général de la Bourse qui préconisait une tactique excluant la violence — voir Mourgues Joseph.
En 1913, il exerçait les fonctions de trésorier, André Dumercq étant secrétaire général.
Après la Première Guerre mondiale, Crispel continua à jouer un rôle politique et syndical actif. Il adhéra au Parti communiste et à la CGTU.
Au Xe congrès de la Fédération du Tonneau, tenu à Montpellier du 15 au 17 août 1919, il fut désigné à l’unanimité comme rapporteur de la commission de contrôle. Crispel dans l’ordre du jour « déclare être pleinement d’accord avec le camarade Bourderon [...], approuve sans réserve l’attitude pleine de courage et d’abnégation qu’il manifesta » pendant la guerre. Cette déclaration fut adoptée à l’unanimité des 29 syndicats représentés. Par ailleurs Crispel blâma le bureau confédéral pour son attitude durant les hostilités et proposa un ordre du jour relatif à la collaboration du 2 août 1914 à 1917 (conférence de Clermont-Ferrand) ; il réclama « de la façon la plus formelle » un blâme pour certains membres du bureau confédéral qui avaient collaboré avec les membres du gouvernement. L’ordre du jour fut adopté par 22 voix contre 1 et 6 abstentions.
Crispel fut délégué au XIe congrès tenu à Paris du 23 au 26 septembre 1920. Il présenta l’ordre du jour, regrettant qu’au CCN de janvier Bourderon « ait cru devoir donner sa confiance aux membres sortants du bureau confédéral » contrairement au voeu émis par le congrès de Montpellier. L’ordre du jour de Crispel fut rejeté par 10 voix contre 9 (il y eut 12 abstentions). Crispel se déclara contre la participation aux bénéfices comme il avait été autrefois contre les retraites ouvrières « colliers passés au cou de la classe ouvrière ». Il ajoutait : « J’aime mieux rester avec les loups qui hurlent, qu’avec les chiens attachés à la niche d’un maître » ; « après avoir collaboré à sauver la bourgeoisie, on est mal placé pour vouloir reprendre les profits des bourgeois. La grève générale expropriatrice ne doit pas consister à se croiser les bras, mais à prendre possession des usines » ; et plus loin il affirmait la nécessité de « changer au moins tous les deux ans les fonctionnaires syndicaux ; quand on reste trop longtemps en fonctions, on perd le contact avec les masses, on finit par se croire indispensable ; quand le permanent est sincère le mal n’est pas grand, mais s’il ne l’est pas, cela devient très dangereux ». Il affirmait enfin : « la collaboration de classe n’a fait que rendre plus de force au pouvoir exercé par le capital, le sabre et le goupillon ». La motion Crispel, contre le bureau confédéral obtint 13 voix, la motion Collot qui lui faisait confiance 11 voix. Il y eut 8 abstentions.
Lors du renouvellement du bureau de l’UD-CGT en décembre 1921, tous les élus étaient majoritaires, mais il fut décidé que le minoritaire Crispel ferait partie de la commission de contrôle. Crispel, Constant, Lecouve, Georges Gaye et quelques autres se rallièrent à l’ISR. L’ordre du jour du congrès comportait : lutte contre la guerre qui vient, contre l’occupation de la Ruhr, contre l’arrestation de M. Cachin et de ses amis.
Le 3 avril 1924, Roger Rieu réunit au siège du PC les militants susceptibles de prendre la parole au cours de la campagne électorale pour les législatives mais aucun volontaire ne se manifesta et Crispel, sollicité, refusa.
En 1925, Crispel alors secrétaire de la Fédération ouvrière unitaire des tonneliers, suggéra l’union en un seul syndicat des tonneliers et des ouvriers des chais. L’année suivante, au congrès de l’UD, tenu le 2 mai, il fut désigné comme membre de la commission exécutive — voir Constant Ernest. En 1928, il était membre titulaire de la commission exécutive de l’UL et de l’Union régionale CGTU.
Devant le comité général de la 13e Un. rég., réuni le 24 juillet 1927, Crispel, qui était administrateur délégué de la société « L’Entraide », présenta un rapport sur les coopératives, ainsi qu’au IIIe congrès de l’UL le 17 juin 1928.
Membre de la cellule de Bacalan, Crispel était signalé comme ayant quitté Bordeaux, en février 1931.
Il s’agit sans doute de Léopold Crispel qui en 1930 était était membre de la cellule communiste de Bergerac (Dordogne) et gérant de la coopérative « Le Réveil social ».
Ses obsèques eurent lieu le 9 janvier 1940.
Par Jean Maitron
SOURCES : Arch. Nat. F7/12987, F7/12988, F7/12989, F7/13104, F7/13125, F7/13567, F7/13602, Arch. Nat. F7/13120, Bergerac, 15 août 1930.. — Compte rendu des congrès. — La CGT, op. cit., p. 449. — Notes de Rolf Dupuy, Claude Pennetier et Louis Botella. — Le Peuple, organe quotidien du syndicalisme, 16 août 1939, 18 janvier 1940 (BNF-Gallica).