LECLERC Marcel, Charles, Jean

Par Jacques Girault, Guy Putfin

Né le 26 avril 1899 à Équeurdreville (Manche), mort le 15 mars 1987 à Cherbourg (Manche) ; instituteur ; militant syndicaliste du SNI et mutualiste dans la Manche ; résistant déporté ; militant socialiste, conseiller municipal de Cherbourg.

Fils d’un surveillant technique à l’Arsenal maritime de Cherbourg, Marcel Leclerc reçut seulement le baptême catholique. Élève du cours supérieur de l’école primaire de la rue Dujardin, reçu au brevet élémentaire, il fut refusé en 1915 à la visite médicale précédant le concours d’entrée à l’école normale d’instituteurs. Commis chez un receveur de l’enregistrement, auxiliaire à l’Arsenal maritime de Cherbourg en 1916 puis surveillant à l’école primaire supérieure de Granville, après avoir obtenu le brevet supérieur en 1917, il devint instituteur suppléant à Bricquebec, Carentan, Villedieu et fut reçu au certificat d’aptitude pédagogique en 1921. Il exerça par la suite à Pierreville (1926-1931), à Chef-du-Pont (1931-1937, où il était aussi secrétaire de mairie), à Équeurdreville (1937-1938) avant d’être nommé à Cherbourg (1938) où il enseigna jusqu’à sa retraite en 1953.

Marcel Leclerc se maria en juin 1923 à Cherbourg avec une institutrice, née Suzanne Grandguillotte, parente d’André Grandguillotte. Les deux époux incroyants se marièrent à l’église par habitudes familiales. Le couple eut une fille qui fut seulement baptisée.

Membre, en 1920, de l’Amicale qui se transforma très vite en section départementale du Syndicat national, Leclerc devint membre du conseil syndical en 1928, du bureau peu après, puis secrétaire adjoint. Le secrétaire général du syndicat n’ayant pas organisé la grève du 12 février 1934 (il ne l’avait même pas faite), faisant preuve de plus de détermination avec d’autres collègues, il devint secrétaire général de la section du SN, qui devint Syndicat national des instituteurs, en mai 1934. En février-mars 1936, il démissionna de cette responsabilité pour raisons de santé tout en restant membre du conseil syndical. En 1938, il devint secrétaire adjoint de SNI de la Manche, chargé de la presse syndicale.

Soutenant la politique du gouvernement de Front populaire, partisans d’une politique encore plus active face au danger fasciste et gagnés à une politique différente de celle menée au moment de la guerre d’Espagne, la majorité des militants de la section prirent leurs distances avec la direction nationale du SNI, au moment des accords de Munich. Ils déposèrent, pour le congrès national de Montrouge, en juillet 1939, une motion d’hostilité à l’esprit munichois, texte dont Marcel Leclerc était l’un des rédacteurs.

Participant régulièrement aux congrès de l’Union départementale CGT, devenu secrétaire adjoint de la section départementale de la Fédération des fonctionnaires, le 21 février 1937, Leclerc fut gréviste, le 30 novembre 1938. Il avait participé à l’organisation de l’aide à l’Espagne républicain et à l’accueil des réfugiés.

Marcel Leclerc militait également au Parti socialiste SFIO depuis 1928 et fut secrétaire de la section qu’il avait contribué à créer à Pierreville. Depuis Chef-du-Pont, il créa en 1931 une autre section socialiste à Sainte-Mère-L’Eglise. Il adhéra à la section socialiste de Cherbourg en 1937-1938. Il appartenait à la Ligue des droits de l’homme depuis 1928 et se sentait très proche de la franc-maçonnerie.

Non mobilisé, il approuva la suspension des communistes de la direction de la section départementale. Il s’en expliqua lors de l’assemblée générale, le 15 mai 1940, à Coutances. En relation dès janvier 1941 avec les militants clandestins reconstituant l’organisation syndicale dans d’autres professions, il participa, le 14 juillet 1942, avec René Schmitt, son ami, à la naissance du mouvement Libération-Nord dans la Manche. En avril 1943, après l’évacuation de la population de Cherbourg, il dirigea une colonie d’enfants évacués de Cherbourg à Saint-James dans le sud du département.

Impliqué dans une filière d’évasion d’aviateurs américains, Marcel Leclerc fut arrêté par la Gestapo le 30 août 1943, à Saint-James. Sa femme, interrogée, fut laissée en liberté. Incarcéré à Avranches, à Saint-Lô, à Fresnes, déporté au camp de Schirmeck-Natzweiller-Struthof, le 11 novembre 1943, il y retrouva le responsable national du SNI Georges Lapierre. Transféré avec ce dernier, le 4 septembre 1944, à Dachau, il l’aida à rédiger un manuel d’histoire de France. Il partit en Kommando à Allach, près de Munich, du 8 septembre au 24 octobre, avant de revenir à Dachau. Libéré le 29 avril 1945, après un temps de repos sur les bords du lac de Constance, il rentra à Cherbourg le 3 juin 1945 où il retrouva sa famille. Dès son retour, il écrivit des souvenirs sur sa déportation et ses relations avec Lapierre et, lors du vingtième anniversaire de sa mort, publia cette évocation dans L’École libératrice (5 février 1965). il fut homologué FFC (Forces françaises combattantes, réseau Shelburn) et DIR (déportés et intrernés de la Résistance)

Après la guerre, Leclerc reprit son activité enseignante jusqu’à sa retraite en 1954. Il participa à la direction de la section syndicale de la Manche et en devint le secrétaire général en 1946 et le resta jusqu’en 1950, restant membre du bureau syndical comme secrétaire administratif. Lors de la réunion du conseil national du SNI, les 18-19 juillet 1945, il fit partie de la commission chargée de rédiger la motion corporative. Au congrès national, le 28 décembre 1945, il demanda que soit reconsidéré le traitement des déportés politiques. Lors de la réunion du conseil national, le 27 décembre 1946, il traita du sort des déportés. Dans le débat pour l’affiliation syndicale, lors du conseil national, le 28 décembre 1947, il indiqua que dans la Manche 80 % des militants souhaitaient quitter la CGT. Partisan de l’adhésion à la CGT-FO, membre de la commission exécutive de la CGT-FO, il revint militer exclusivement dans le SNI.

Réélu au Conseil départemental de l’enseignement primaire en 1951, Marcel Leclerc démissionna conformément à la demande de démission collective du SNI pour protester contre la politique répressive du gouvernement et sa politique antilaïque à la fin de 1953. Il fut réélu en janvier 1954 avec moins de voix qu’en 1951.

Il participa à la constitution de la section départementale de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale qu’il dirigea de 1947 à 1954.

Toujours militant socialiste SFIO, Marcel Leclerc, dans les années 1950, faisait partie de la commission exécutive de la fédération socialiste SFIO de la Manche. Lors d’une grave crise dans la section socialiste SFIO de Cherbourg, devant la menace de sa dissolution, le 10 mai 1955, il fut élu secrétaire et le demeura au moins jusqu’à la fin des années 1950. Il fut vice-président de la FGDS dans la Manche en septembre 1966 au nom des cercles Jean Jaurès.

Elu en 1953 conseiller municipal de Cherbourg, il le fut à nouveau le 21 février 1954 sur la liste « de concentration républicaine et d’administration municipale » conduite par le socialiste SFIO René Schmitt. Il obtint sur 18 771 inscrits, 4 723 voix et signes préférentiels.

Pour les élections au Conseil général, en octobre 1952, Schmitt, choisi comme candidat, refusa, si bien que Leclerc, qui avait déjà été candidat en 1945 et en 1951 dans le canton de Cherbourg, accepta de le remplacer, menant sa campagne sur deux thèmes principaux, le « défense de l’école laïque et la défense du pouvoir d’achat des travailleurs ».

Correspondant du Comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale, Marcel Leclerc travailla à l’établissement de statistiques sur la répression allemande et l’histoire de la Résistance dans la Manche. Il publia plusieurs articles sur la Résistance et la déportation. Il publia aussi des « Souvenirs de ma Déportation en Allemagne », fascicule destiné à être distribué dans les bibliothèques des écoles laïques.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article107761, notice LECLERC Marcel, Charles, Jean par Jacques Girault, Guy Putfin, version mise en ligne le 12 novembre 2010, dernière modification le 20 septembre 2022.

Par Jacques Girault, Guy Putfin

Œuvres :
« Statistiques de la Déportation dans le département de la Manche », Revue de la Manche, 1962,
« La Résistance dans la Manche, réseaux et mouvements. Juin 1940-août 1944 », Cherbourg, La Dépêche, 1980, 2ème tirage en 1982,
1940-1944, la Manche en images, en collaboration avec André Heintz, Bruxelles, Libro Sciences, 1978.

SOURCES : Arch. Nat., F/1cII/294. — Service historique de la Défense, Vincennes GR 16 P 349567,GR 28 P 4 256 295 ; Caen SHD/ AC 21 P 588809. — Arch. dép. de la Manche, Fonds Leclerc, sous-série 129 J. — Archives de l’OURS, 29 APO 1, « Souvenirs de ma déportation en Allemagne, 1943-1945 », dactylographié, 61 p., AGM 141, 2/APO/2, fonds de la FGDS, dossiers correspondances de la Manche. — Presse syndicale, locale et nationale. — DBMOF, notice par J. Girault et Y. Le Floch. — Renseignements fournis par l’intéressé à J. Girault et par sa fille Suzanne Hennequin à R. Crozet. — Notes de René Crozet, de Paul Delanoue, de Jean-Pierre Degive (SE-UNSA), de Gilles Morin.

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