LE FUR Marie

Par Jacques Girault, Claude Pennetier

Née le 20 décembre 1895 à Pluvigner (Morbihan), morte le 23 juin 1970 à Rennes (Ille-et-Vilaine) ; institutrice ; militante syndicaliste du SNI et communiste du Morbihan.

Marie Le Fur
Marie Le Fur
Communiqué par la mairie d’Hennebont

Fille d’un huissier (elle indiqua « petits commerçants » dans son autobiographie de 1937), Marie Le Fur fréquenta l’école primaire de Quiberon, l’école primaire supérieure de Pontivy, puis l’École normale d’institutrices de Vannes (Morbihan) de 1914 à 1917. Elle ne connaissait pas le breton. Elle enseigna à Guémené-sur-Scorff, Sainte-Anne-d’Auray, Melbrand, Brech et, à partir de 1929, à Hennebont.

Elle milita surtout dans le syndicalisme à partir de mai 1918. Dès 1920, elle était trésorière adjointe du syndicat des membres de l’enseignement laïque du département. La justice la condamna en février 1922, ainsi que plusieurs membres du syndicat, à 25 F d’amende pour infraction à la loi de 1884. Déléguée à presque tous les congrès fédéraux, elle intervint notamment lors du congrès national de Brest (août 1923) sur la question des postes déshérités. Elle proposa d’accorder une indemnité aux titulaires de ces postes, revendication reprise par le syndicat. Elle contribua particulièrement à l’action féministe en créant, dès 1920, avec Marceline Le Guen*, un groupe départemental dont elle fut à plusieurs reprises la secrétaire, notamment en 1921 et 1926-1927. Elle appartint de 1920 à 1922, à la direction nationale de la Fédération féministe universitaire. Elle siégea au conseil syndical départemental en 1920-1921, 1926-1928, 1932-1934. Anne-Marie Sohn la décrit ainsi : « Dans sa phase féministe, elle représente avec quelques outrances : bas de laine et antitabagisme, ces provinciales célibataires qui souffraient de leur situation anormale au point d’exiger qu’on les appelât “Madame” et de porter une alliance. » (Thèse,op. cit.).

Elle adhéra au Parti socialiste SFIO en 1918 puis au Parti communiste après le congrès de Tours (décembre 1920). Elle indiquait dans les quatre questionnaires biographiques remplis pour le PCF de 1945 à 1957 avoir adhéré au Parti communiste en mars 1919. S’agissait-il du premier Parti communiste fondé par Péricat ? Ses fonctions d’institutrice rurale ne lui permirent guère de fréquenter les réunions ; cependant à partir de 1925 elle fut affectée à la cellule des cheminots d’Auray puis en 1929 à la cellule de Lanester. Il n’y avait pas de cellule à Hennebont mais, en mars 1934, une carrière s’étant ouverte, des ouvriers communistes constituèrent une cellule dont elle fut la secrétaire. Elle fut aussi en 1938 membre du secrétariat de la section communiste de Lorient et membre du comité régional.

Militante du Parti communiste auquel elle resta fidèle, elle défendit, à partir de 1930, seule contre tous les syndicalistes enseignants du Finistère, la MOR (minorité oppositionnelle révolutionnaire communiste de la Fédération unitaire de l’enseignement).

En 1935, année où elle fit un voyage en URSS, Marie Le Fur animait le groupement des forces antifascistes d’Hennebont et créa le comité de Front populaire de cette ville. Dans son autobiographie du 4 août 1937, elle fit un développement qui sera noté par la commission des cadres qui ne lui en tiendra cependant pas rigueur : “ J’ai toujours été en accord complet avec la politique du parti sauf cependant en ce qui concernait la subordination des syndicats au parti que j’estimais trop mécanique. Mais disciplinée, je n’ai jamais fait partie d’une opposition. Je n’ai jamais été lié avec les trotskistes. Cependant, je vois parfois (une fois ou deux dans l’année) une famille d’instituteurs dont le mari tourne au trotskisme en ce moment. Amie d’enfance de la femme, je n’ai pas cru jusqu’ici devoir interrompre ces relations d’autant moins qu’il n’est pas rattaché au groupe trotskiste mais suis prête à cesser cette fréquentation si le parti le juge bon. ”

À la veille de la guerre, secrétaire de la section communiste d’Hennebont, elle était une des propagandistes communistes les plus actives du Morbihan. Le « Maître des forges » d’Hennebont menait une active campagne contre cette institutrice rendue responsable de la politisation des ouvriers.

Elle fut élue membre du conseil syndical de la section départementale du Syndicat national des instituteurs en 1938. Elle en fut exclue en novembre 1939 après son refus de renier le Parti communiste. Déplacée en décembre 1939 à Helléan, elle fut révoquée par décision préfectorale le 9 mai 1940.

Arrêtée, conduite à la prison de Nantes, le 11 mai 1940, transférée à Lorient en juillet 1940, elle fut libérée le 3 septembre 1940 à la suite d’un non lieu. Arrêtée à nouveau le 30 août 1941, internée à Châteaubriant, responsable de baraque, elle fut transférée à Aincourt où elle fut la responsable des femmes communistes. Tour à tour à Gaillon (Eure), à Monts (Indre-et-Loire), à la prison de la Pierre-Levée à Poitiers, elle s’opposa à toute demande de libération quand la question se posa parmi les militantes internées. En accord avec le Parti communiste, elle s’évada le 11 mai 1944 et, sous le pseudonyme d’Aline, devint « Inter femme » en Loire-Inférieure jusqu’en décembre 1944.

À la Libération, elle retrouva son poste d’institutrice à Hennebont. Réintégrée dans le conseil syndical, elle y demeura jusqu’en 1948.

Membre du bureau départemental de l’Union des femmes françaises et du bureau fédéral du Parti communiste français, elle devint membre du bureau de la section communiste d’Hennebont et du comité de la fédération dont elle fut écartée à la fin des années 1940. L’envoyé du comité central en 1947 la jugeait "un peu sectaire mais très disciplinée". Elle redevint membre du comité fédéral en 1956 et devint responsable à l’éducation. La conférence fédérale de 1957 l’élut à la commission fédérale de contrôle financier dont elle demeura membre jusqu’en 1964.

Marie Le Fur fut candidate aux élections de l’Assemblée nationale constituante en octobre 1945 en deuxième position sur la liste communiste. Mais à la suite d’un blâme de la section communiste d’Hennebont, elle ne fut pas candidate aux autres élections législatives. Toutefois elle figura en troisième position sur la liste des candidats communistes au Conseil de la République en 1946, puis en tête de la liste en 1952 et sur la liste communiste pour les élections sénatoriales en 1958. Elle fut aussi candidate au Conseil général.

Retraitée, en tête de la liste communiste, elle fut élue conseillère municipale d’Hennebont en 1947 et devint adjointe au maire. Elle fut réélue en 1953. En 1959, au deuxième tour, elle figurait sur la liste d’entente de la gauche (communistes, socialistes et radicaux-socialistes) mais fut battue. Elle présidait alors le foyer laïque d’Hennebont et l’organisation locale de l’ Union de vieux de France. Elle organisa des garderies d’enfants et des sorties au bord de mer. Elle faisait aussi partie du conseil d’administration de l’organisation départementale des fonctionnaires. Enfin elle militait dans les organisations locales de la FNDIRP et à l’ANACR.

Hospitalisée à Rennes en 1970, elle fut enterrée au cimetière de Quiberon après ses obsèques célébrés à Hennebont, le 26 juin où un hommage public lui fut rendu.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article107805, notice LE FUR Marie par Jacques Girault, Claude Pennetier, version mise en ligne le 14 novembre 2010, dernière modification le 21 janvier 2022.

Par Jacques Girault, Claude Pennetier

Marie Le Fur
Marie Le Fur
Communiqué par la mairie d’Hennebont
Tombe de Marie Le Fur au cimetière de Quiberon.

SOURCES : Arch. Nat. F1a/3655, F7/13747 et 13749. — Arch. Dép. Morbihan, série M. — RGASPI, Moscou, 495 270 3277. — Archives du comité national du PCF. — L’École émancipée, Bulletin syndical du Morbihan. — DBMOF, notice de Cl. Pennetier. — A.-M. Sohn, Thèse, op. cit. - F. Bernard, L. Bouët, M. Dommanget, G. Serret, Histoire de la Fédération de l’Enseignement des origines à l’unification de 1935.— Le Bars L., La Fédération unitaire de l’enseignement (1919-1935). Aux origines du syndicalisme enseignant, Paris, Syllepse, 2005. — Notes d’Eugène Crépeau*.

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