KERBELLEC Joseph, Marie

Par René Crozet, François Prigent

Né le 26 avril 1898 à Inguiniel (Morbihan), mort le 23 avril 1980 à Quéven (Morbihan) ; instituteur dans le Morbihan ; résistant ; militant mutualiste et socialiste, maire de Quéven (1947-1974).

Joseph Kerbellec était le fils de Joseph Kerbellec, maçon devenu exploitant de carrière, et de Marie-Mathurine Le Bozec, tous deux illettrés et ne parlant que le breton. Ils eurent cinq autres enfants dont trois décédèrent de tuberculose.

Joseph Kerbellec fit ses études primaires à l’école communale laïque de Bubry, commune où il passa toute son enfance. Il fréquenta ensuite, comme demi-pensionnaire, le cours complémentaire de Guéméné-sur-Scorff où il prépara le brevet élémentaire et le concours d’entrée à l’École normale d’instituteurs. Sa mère lui acheta sa première paire de souliers pour aller passer ce concours. Élève-maître de l’École normale d’instituteurs de Vannes, de 1913 à 1916, dès la fin de ses études, à 18 ans, il s’engagea volontaire en août 1916 au 3e dépôt des équipages de la flotte puis passa au 2e dépôt et effectua une grande partie de son service, de janvier 1917 à à mai 1919, à Corfou dans l’aviation maritime, avant d’être démobilisé en septembre 1919.

De retour à la vie civile, il fut nommé instituteur successivement à Monteneuf, à Gavres, à Riantec et enfin, en 1930 à Quéven dont il dirigea l’école dès son arrivée jusqu’à sa retraite en 1953.

Il se maria en septembre 1923 à Riantec. Le couple eut une fille. Son épouse, d’abord sans profession puis sage-femme, soutint son action militante.

Joseph Kerbellec était secrétaire général de la société de secours mutuels des instituteurs. Pour soigner une tuberculose, il fut admis au sanatorium de Sainte-Feyre (Creuse). Il participa alors à l’Association des malades en congés de longue durée dont il devint président. Après sa guérison, il continua à prendre fait et cause pour les instituteurs malades. En 1932, il se battit pour obtenir une représentation directe des malades au conseil d’administration de l’Union des sociétés de secours mutuels : il devint d’ailleurs cette année là l’un des quatre premiers représentants des malades (en tant qu’ancien malade).

Militant laïque, Joseph Kerbelec adhéra au Parti socialiste SFIO dès les années 1930. Secrétaire de la section socialiste SFIO de Cléguérec (Morbihan) en 1937-1938, il fut un des principaux orateurs du parti dans le département. Il collaborait au journal socialiste Le Rappel du Morbihan, créé en 1899. Très critique vis-à-vis de la ligne pacifiste de Louis L’Hévéder (notamment autour des enjeux de la guerre d’Espagne), il animait la tendance minoritaire de la fédération avec Jean Le Maux (maire de Keryado) et Jean Le Coutaller (futur député maire de Lorient) entre novembre 1936 et juillet 1938, date à laquelle il sembla entraîner une partie de la section de Kerdual-Quéven dans la scission pivertiste et le Parti socialiste ouvrier et paysan.

Après avoir accompli diverses missions de renseignements pour la Résistance, Kerbellec s’engagea en juin 1944, au 6ème bataillon de FFI, comme lieutenant. Il participa activement à la Résistance et à la libération du Morbihan et resta dans l’armée jusqu’au 1er septembre 1945. Il reçut la Croix de guerre avec palme puis fut fait chevalier de la Légion d’honneur.

Parmi les nombreuses fonctions annexes de l’instituteur rural de l’époque, Joseph Kerbellec fut quelque temps, à partir de 1940, administrateur et caissier du Crédit Agricole du canton de Pont Scorff, ce qui lui permit de bien connaître le milieu des agriculteurs, en menant à bien de délicates opérations d’adduction d’eau, d’électrification et de remembrement.

Joseph Kerbellec fut un pionnier de l’action mutualiste. Dès la constitution de la section du Morbihan de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale, le 27 mars 1947 à Vannes, il fut élu membre de la commission administrative nationale lors de la première assemblée générale qui remplaça certains membres nationaux volontaires par des militants des sections départementales. Jusqu’en 1965, il fut élu administrateur national de la MGEN. À ce titre, il participa aux commissions suivantes : Surveillance, Orphelinat, Affections graves : tuberculoses. En 1950, il devint membre du bureau de la section départementale MGEN et en fut le vice-président en 1964.

Joseph Kerbellec fut désigné comme conseiller municipal de Quéven à la Libération. Il fut maire socialiste SFIO de Quéven de 1947 à 1974, année de sa démission pour raisons de santé. Il adhérait au Parti socialiste depuis sa création. Il transforma cette commune de la banlieue lorientaise qui, de 1500 habitants en 1947, en comptait 6 000 en 1974. Il fit effectuer l’adduction d’eau, l’assainissement, le remembrement, réalisa de nombreuses constructions scolaires, l’installation d’une cantine scolaire, des équipements sportifs et culturels, lança la construction d’un collège qui fut inauguré peu de temps après sa démission. Il effectua un travail de grande importance dans les divers syndicats intercommunaux créés pendant ses mandats de maire.

Kerbellec comptait parmi les figures majeures de la fédération socialiste SFIO, dirigée par Jean Le Coutaller. Défenseur d’un socialisme municipal pragmatique, anticlérical et anticommuniste, il contribua notamment à la mise sur pied d’un réseau de maires SFIO, articulé autour des filières laïques. Proche de la tendance favorable à l’adhésion du SNI à la CGT-FO en 1948, il devint après sa retraite délégué départemental de l’Education Nationale pour son canton.

Véritable notable local socialiste SFIO dans le pays de Lorient, Joseph Kerbellec fut tour à tour suppléant de Jean Le Coutaller aux élections législatives de 1958 puis de Louis Le Moënic* en 1962 et enfin de Yves Allainmat en 1967 (élu député) et 1968 (battu). Il fut également candidat suppléant aux élections sénatoriales de 1959, où la SFIO présentait le trio Le Coutaller, Le Moënic* et Kergaravat*.

Quittant la mairie de Quéven en juillet 1974, il fut remplacé par Pierre Quinio* (ancien secrétaire adjoint de la fédération socialiste SFIO, directeur d’école, décédé en décembre 1980) avec qui il entretenait des relations difficiles. Son successeur Jean-Yves Laurent (comptable, conseiller général 1988-1994) conserva la mairie pour le PS jusqu’en mars 2008, où il fut défait par son adjoint communiste Marc Cozilis.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article107818, notice KERBELLEC Joseph, Marie par René Crozet, François Prigent, version mise en ligne le 16 novembre 2010, dernière modification le 5 novembre 2022.

Par René Crozet, François Prigent

SOURCES : Arch. Dép. du Morbihan, 85 J, état civil ; registre matricule — Arch. fédérales du PS du Morbihan. —Archives com. de Quéven. — SHD, Vincennes GR 16 P 318191. — JO, lois et décrets, 12 mai 1950. — Documentation MGEN.--- Informations fournies par la fille de l’intéressé, Mme Le Corre-Kerbellec et par Jean-Yves Laurent. — Notes d’Alain Dalançon, André Lainé et de Charlotte Siney.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable