Par Yves Le Maner, Claude Pennetier
Né le 7 décembre 1889 à Iwuy (Nord), mort le 15 novembre 1976 à Saint-Sauveur (Somme) ; commis-rédacteur, puis inspecteur des PTT ; socialiste et syndicaliste ; maire de Lille pendant l’Occupation.
Fils d’un "maréchal", domestique, Paul Dehove, titulaire du brevet d’enseignement primaire, était déjà employé des PTT lorsqu’il fit son service militaire en 1909. Ancien combattant de la Première guerre mondiale affecté au service de la télégraphie comme maréchal-des-logis, il vivait à Abscon (Nord), une commune du Douaisis en 1919. Il habitait Lille en 1924 et s’installa vers 1927, 22 place Philippe Lebon pour une longue période.
Commis-rédacteur, surnuméraire, puis inspecteur des services techniques des PTT, Dehove adhéra à la CGT, après la scission de 1921. Il devint secrétaire de la Fédération postale régionale CGT du Nord vers 1926. Il intervint fréquemment au congrès du Palais d’Orléans à Paris, en mai 1926. Il est l’un des porte parole des confédérés lors de la confrontation à Lille entre les syndicalistes postiers CGT et CGTU représentés par Emmanuel Fleury, le 21 juin 1929, à propos d’un conflit à l’imprimerie du Petit parisien qui a des conséquences aux PTT. Il fut en pointe lors de la grève du 15 mai 1930. À cette occasion il rencontra le ministre en charge des PTT, André Mallarmé puis il prit la parole le 15 juin 1930 à Roubaix pour tirer le bilan de l’échec de la grève. La Fédération lui demanda d’intervenir dans d’autres régions, ainsi le début novembre à Limoges. Sa volonté d’unir les travailleurs des PTT autour de manifestations artistiques prit la forme de la fête mutualiste du dimanche 3 mai 1931 : banquet, chorales. Son ultime moment fort syndical fut la manifestation du 12 février 1934 à Lille.
Dehove adhéra à la SFIO en 1929. Élu conseiller municipal de Lille en 1929 sur la liste de Roger Salengro, il joua un rôle important dans l’entre-deux tours. Salengro lui confia les questions relatives aux services publics. C’est ainsi qu’il dut arbitrer le conflit entre les employés du tramways de Lille et la compagnie, en décembre 1932, sans succès, en effet la compagnie appliqua la baisse de salaires. Il devint adjoint au maire délégué aux services publics en 1935 et joua un rôle majeur dans le processus de résolution des conflits sociaux notamment ceux des traminots.
Après le suicide de Roger Salengro en novembre 1936, il envisagea d’accéder à la première magistrature municipale, Denis Cordonnier fit de même, mais c’est Charles Saint-Venant qui fut considéré comme le candidat le plus consensuel et qui fut élu à l’unanimité le 21 décembre 1936. Dehove intervint encore dans le confit des traminots de janvier 1938 provoqué par une menace de 98 licenciements.
Lors de l’arrivée des troupes allemandes, Paul Dehove resta à Lille alors que Charles Saint-Venant était parti. Dehove accepta de devenir maire de Lille sur demande des autorités de Vichy et conserva ce poste jusqu’à la Libération de 1944. Il protesta contre la destruction par des soldats allemands, dans la nuit du 24 au 25 août 1940, du monument aux fusillés Lillois de la Première guerre mondiale comme il protesta contre la violence des occupants à l’égard des Juifs. Pour autant, il fut un vichyste exemplaire. Il créa les conditions d’application de la Charte du travail et institua un conseil municipal social en 1942. Il présida le conseil départemental du Nord en 1943 à 1944. Il établit sans enthousiasme les listes des célibataires de 18 à 50 ans pour le STO. Le discours qu’il fit lors de la réception de Philippe Henriot le 29 janvier 1944 le compromit encore plus. Même après le débarquement des Alliés en Normandie, il ne croyait pas à la défaite des Allemands.
Il fut la cible de la presse clandestine résistante et particulièrement des socialistes clandestins qui dénonçaient également Henri Salengro et Oscar Hermez.
Arrêté à la Libération, il fut interrogé par la police et par un juge d’instruction le 29 août 1945 puis jugé en janvier 1946 et acquitté.
Il fut évidemment exclu du Parti socialiste SFIO pour collaboration avec l’occupant.
C’est Denis Cordonnier qui lui succéda jusqu’en 1947.
Dehove reprit une activité professionnelle ; il dirigea une entreprise dénommée la TRU qui pratiquait le ramassage et le traitement des ordures ménagères.
Mort le 15 novembre 1976 à Saint-Sauveur, il fut inhumé dans l’intimité dans le caveau familial d’Iwuy.
Par Yves Le Maner, Claude Pennetier
SOURCES : Arch. Nat. F7/13810. —. — Renseignements fournis par la mairie de Lille. — Antoine Michel, Le parcours syndical de Paul Devoye (1924-1946), Master 1, Lille.