DEMONSAIS Édouard

Par Jacques Girault

Né le 4 mars 1885 à Échillais (Charente-Inférieure), mort le 28 mars 1974 à Toulon (Var) ; employé municipal ; syndicaliste ; secrétaire de la Bourse du Travail de Toulon (1926-1936) et de l’Union locale CGT en 1938-1939.

Fils d’un chef-journalier à l’Arsenal, Demonsais avait effectué le service militaire d’octobre 1906 à octobre 1908. Selon les archives du personnel de la mairie de Toulon, il avait été au « service de l’État » du 4 mars 1901 au 1er octobre 1906 et du 1er octobre 1908 au 13 septembre 1914. Il se maria à Rochefort (Charente-Maritime) en mars 1915. Il était entré à la mairie de Toulon le 17 août 1915 comme ouvrier électricien au service de l’assainissement. À partir du 19 mars 1919, il travaillait à l’Arsenal maritime comme ouvrier électricien immatriculé (direction des Constructions navales, atelier des réparations). Marié en mars 1915, il habitait la Basse ville.

Membre du groupe libertaire de la « Jeunesse libre » et du bureau de la section de l’ARAC, il devint membre du conseil d’administration du syndicat CGT de l’Arsenal, le 12 mars 1920 et secrétaire adjoint le 13 mai. Il fut un des quinze ouvriers grévistes congédiés à la suite de la décision du préfet maritime, le 10 mai 1920. Il devint alors un des porte-parole du courant minoritaire du mouvement syndical toulonnais. Il attaquait les majoritaires dans la presse locale, participait aux réunions pour l’amnistie intégrale, exaltait la désertion et la révolution russe. Aussi la police le classait-elle parmi les communistes, ce qui semble être une erreur.

Membre des CSR, il entra à la commission exécutive de l’Union départementale au congrès du 20 novembre 1921 et militait toujours au syndicat de l’Arsenal bien que révoqué. Il participa à la naissance du syndicat CGTU en mars 1922.

Membre des Comités de défense syndicaliste, il s’opposait à Flandrin* et aux communistes. Le 1er septembre 1922, selon la police, dans une réunion il indiqua :

« Qu’il vienne donc ce jour et nous verrons qui conduira le mieux la barque, de nous syndicalistes anarchistes avec notre idéal d’amour, de paix et de justice, ou de vous communistes, avec votre implacable et odieuse dictature qui brise quiconque ne pense pas comme vous ».

Il souhaitait rester à la CGTU d’autant que la motion qu’il présentait avec Robert, obtint 23 voix contre 19 à celle présentée par Flandrin qui condamnait les CDS. Toutefois, le 15 septembre 1922, il démissionna avec quatre autres militants CDS du CA pour protester contre l’utilisation de l’action de la Bourse du Travail dans le journal communiste. On le trouvait comme contradicteur des meetings communistes. Au congrès de l’Union départementale de la CGTU le 1er octobre 1922, il présenta le rapport financier comme trésorier de l’UD. Il proposa un ordre du jour de protestation contre l’arrestation de Schapiro qui fut repoussé à l’unanimité, sauf une abstention après les indications données par le délégué de la CGTU qui indiquait qu’une enquête était en cours. Dans la discussion, il accusa la Commission exécutive et le Bureau confédéral de la CGTU de « mettre le syndicalisme en danger par l’intrusion des politiciens de Moscou » (La Vie ouvrière, 13 octobre 1922). Selon le compte rendu du congrès publié dans l’Humanité le 14 octobre 1922, il avait prononcé un « chant triomphal en l’honneur de l’Internationale anarcho-syndicaliste de Berlin » et avait été un des fondateurs à la mi-septembre du Comité de défense syndicaliste. Il fut toutefois réélu trésorier de l’UD.

Le conflit anarchistes-communistes se développait. Il devait être tranché par le congrès extraordinaire de l’Union départementale. La motion présentée par Demonsais ne recueillit, le 6 juillet 1923, que 4 voix contre celle de Flandrin, qui en groupait six. Une motion le blâmant obtint le même résultat. Il remit sa démission de trésorier de l’UD.

Demonsais animait les attaques privées contre Flandrin. Son courant était toujours majoritaire à l’Union locale de Toulon. Il fut désigné le 20 juillet 1923 pour siéger au conseil d’administration de la Bourse du Travail.

Demonsais entra le 16 janvier 1922 dans le personnel communal au service de l’assainissement comme mécanicien. Il était devenu ajusteur électricien, le 1er mai 1923, et avait été titularisé, le 1er novembre, comme ouvrier professionnel, deuxième catégorie. Bien que, en application de la loi d’amnistie, le préfet maritime ait proposé sa réintégration « de plein droit » à l’Arsenal, le 2 avril 1925, il resta employé communal.

À partir de 1925, il animait le syndicalisme se réclamant de l’autonomie à Toulon. Militant syndical à la mairie (dès août 1925, il était chargé de dresser le cahier de revendications du personnel communal), il était secrétaire adjoint du comité d’action contre la vie chère et membre de la commission locale chargée d’élaborer un indice du coût de la vie. Secrétaire du syndicat autonome des employés et ouvriers communaux, il succéda à Baugé* comme secrétaire administratif de la Bourse du Travail, le 6 décembre 1926 par 25 voix contre 18 à Massoni, candidat de la CGT. Deux mois auparavant, il avait fait adopter par 18 voix contre 13 la suppression du poste de secrétaire permanent rétribué.

Il avait obtenu à partir de 1927, chaque année, un congé sans solde d’un mois justifié par ses responsabilités syndicales. En octobre 1929, il avait été chargé par la Bourse du Travail d’organiser des cours d’adultes et professionnels.

Demonsais, en 1929, reçut l’appui de la CGT lors du renouvellement de cette responsabilité. Le 24 janvier, il fut réélu avec 23 voix contre 20, à Nicolini*, candidat de la CGTU. Il fut aussi au cœur des actions favorables à l’unité syndicale qui se traduisirent dans le groupe qui publiait Germinal. Parlant aussi bien dans le cadre des réunions de la SFIO — ainsi le 26 novembre 1930, donna-t-il une conférence sur les Bourses du Travail et les syndicats au siège des Jeunesses socialistes — que dans les réunions de la CGTU — ainsi répondit-il favorablement, aux avances de la CGTU sur l’unité en novembre 1931 —, Demonsais était aussi présent dans les réunions de la CGT.

Administrateur de la caisse départementale des assurances sociales, toujours secrétaire de la Bourse du Travail, il était le candidat de la CGT en renouvellement de 1935. Il avait joué un rôle dans le rapprochement syndical à partir de 1934 et fut, le 28 février, réélu secrétaire de la Bourse à l’unanimité.

Secrétaire adjoint du syndicat réunifié du personnel des services publics de la ville, il participa à la commission de contrôle lors du congrès de fusion de l’Union départementale CGT, le 22 décembre 1935, et fut désigné comme membre de la commission exécutive.

En janvier 1936, il devint secrétaire adjoint de l’Union locale CGT et membre de la commission lors du congrès définitif, le 18 février 1936. Secrétaire aux procès-verbaux du comité local du Front populaire en 1936, il y montrait une attitude hostile au Parti communiste. Au congrès de l’Union locale CGT des 24-25 avril 1937, il ne fut pas réélu à la commission exécutive. Au congrès de l’Union départementale CGT, les 10-11 juillet 1937, il fut seulement élu suppléant de la commission exécutive avec 84 mandats.

Dans la crise qui affecta l’organisation syndicale toulonnaise, au congrès extraordinaire de l’Union locale, le 22 août 1937, il redevint secrétaire adjoint. Le 31 août, lors de la réunion extraordinaire en présence de Jouhaux et de Frachon, il fit partie de la commission des six qui fut alors désignée. Il fut au cœur de la campagne pour l’indépendance du syndicalisme qui se développa en 1938. Le 23 avril 1938, il redevint secrétaire général de l’Union locale et conserva cette fonction au début de la guerre. En novembre 1939, il était aussi secrétaire administratif de l’Union départementale. Il fut admis à la retraite de son emploi à la mairie, le 1er octobre 1940.

Dans sa demande de mise à la retraite, le 13 juillet 1940, il avait argué de « la double condition d’agent et de service » et souhaitait obtenir « un congé de mise à la retraite avec solde de trois mois à compter du 1er août 1940 ». Toutefois, il fut réintégré le 14 janvier 1945 à compter de 1940 « en raison de son attitude d’hostilité envers l’autorité de fait » de l’État français.

Demonsais participa à la reconstitution clandestine du mouvement syndical. Il était présent au début de 1942 à la réunion clandestine à la Caisse d’assurances « Le Travail ». Il participa à la réunion clandestine pour l’unification qui se tint quartier du Pont-de-Bois à Toulon entre ex-unitaires et ex-confédérés, en juin 1944.

À la Libération, le 29 août 1944, il signait comme membre du bureau provisoire l’appel pour la reconstitution de l’Union départementale paru dans le premier numéro du Var Libre. Le 16 octobre 1944, il présida la première réunion de l’Union départementale CGT et le 25 mars 1945, le premier congrès de l’Union locale. Secrétaire adjoint de l’Union locale à l’issue du congrès, il ne fut pas réélu à la commission exécutive au congrès suivant, le 23 mars 1946. Il avait notamment critiqué les analyses du secrétaire communiste Hérat* sur les nouveaux statuts.

Dès qu’apparurent les premiers noyaux se réclamant de Force Ouvrière, il en fut l’animateur et participa à la constitution des syndicats CGT-FO.

Le 29 avril 1945, Demonsais, candidat aux élections municipales de Toulon sur la liste socialiste, obtint 10 108 voix sur 60 365 inscrits. À nouveau candidat aux élections municipales le 8 mai 1949, sur la liste « d’Action républicaine et socialiste », il obtint 9 550 voix et signes préférentiels sur 73 245 inscrits.

Membre de la SFIO et de son bureau fédéral en 1946-1947, il était le responsable des Groupes socialistes d’entreprises. Par la suite, il demeurait au Comité fédéral avec la même responsabilité en 1958. Il n’était pas d’accord avec la majorité de la section de Toulon qui se rapprochait du Parti communiste sur le terrain municipal. À la suite de la signature du protocole d’accord lors de la réunion du comité fédéral, le 3 septembre 1955, il intervint.

« Je ne suis pas d’accord avec Le Bellegou* sur la tactique suivie [...] j’ai été comme militant syndicaliste trop en contact avec eux [les communistes]. Je crains qu’ils ne se servent à nouveau de nous et nous trahissent ensuite ».

Membre du conseil d’administration de l’Office départemental d’HLM, Demonsais présidait la Mutuelle médicale du Var. Il fut aussi administrateur du Bureau d’aide sociale de la Libération à sa mort.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article109420, notice DEMONSAIS Édouard par Jacques Girault, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 12 avril 2014.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat. F7/13021, 13165. — Arch. Dép. Var, 4 M 49.4.2, 4 M 50, 4 M 53, 4 M 54, 4 M 55, 4 M 55.2, 4 M 56.7, 4 M 59.2, 4 M 59.4.1 ; 16 M 19.1, 3 Z 4.2.1, 3 Z 4.23. — Arch. Troisième région mar. : 2 A4 12, 2 A4 19. — Arch. J. Charlot (CRHMSS). — Renseignements fournis par la mairie de Toulon. — Témoignages de MM. J. Sauli et E. Vernier. — Presse nationale et locale.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable