DUREL Joachim. Pseudonyme : VALENTINE Pierre

Par Élie Cohen-Hadria

Né en 1878 à Toulouse (Haute-Garonne), mort en octobre 1939 à Carthage (Tunisie) ; professeur à Tunis ; un des fondateurs de la SFIO en Tunisie, secrétaire général de la CGT (1922 à 1934).

Joachim Durel arriva en Tunisie en 1898 comme professeur au lycée Carnot à Tunis. Il apparut parmi les militants républicains et socialistes qui se rassemblèrent en 1906 dans le congrès républicain, radical et socialiste de Tunis dont fut un des rapporteurs. Il participa ensuite à la fondation de la fédération SFIO (1908 et 1912) ; c’est lui qui renseigna Jaurès en 1910-1911 sur les scandales de spoliation de terres que fut l’affaire Couiteas.

En 1919-1920, il entraîna une minorité socialiste à refuser l’adhésion à l’Internationale communiste et contribua au maintien de la SFIO. Pendant quelque temps, la fédération socialiste conserva le journal L’Avenir social qui devint en 1921 l’organe communiste ; Joachim Durel y écrivait alors sous le pseudonyme de Pierre Valentine.

Pratiquement, c’est Joachim Durel qui donna sa ligne doctrinale à la fédération SFIO. Il rédigea pour l’essentiel les résolutions des congrès fédéraux de 1919 à 1926, et celles des congrès interfédéraux d’Afrique du Nord comme celui d’Alger en 1919. Au nom de la fraternité des races, la seule solution, par le développement même de la colonisation, devait résider dans une assimilation par la culture française et Joachim Durel rejetait toute évolution nationale tunisienne. Son hostilité au nationalisme tunisien renforça son anticommunisme.

Il consacra toute son énergie et son éloquence à l’union des syndicats CGT dont il fut le secrétaire général de 1922 à 1934. En 1924, il intervint au congrès confédéral CGT pour que Jouhaux vienne en tournée en Tunisie. La secrétaire général de la CGT et lui-même se trouvèrent ainsi aux prises avec le mouvement de grèves de l’automne 1924 qui se traduisit par la création de la CGT tunisienne de Mohamed Ali, soutenue par les communistes. Au meeting du 24 octobre 1924, Durel quitta la salle et rompit donc les ponts pour mieux conduire l’opposition cégétiste avec le syndicalisme tunisien. La SFIO, le Parti nationaliste du Destour, et la section indigène du Grand conseil formèrent alors un cartel dont un des objectifs était de réduire la CGT tunisienne. Après 1926, la CGT demeura la seule organisation syndicale influente.

Lors de la campagne de répression engagée en 1934 par le Résident Peyrouton, Durel fut particulièrement visé et muté en France, au lycée d’Agen. Il fut candidat SFIO aux élections législatives d’avril 1936 à Villeneuve-sur-Lot (circonscription de Nérac) ; il obtint 1 247 voix au premier tour sur 12 924 inscrits et se désista au second. Il revint en Tunisie en 1937. Son activité se trouva ralentie par la maladie. Joachim Durel avait participé à deux congrès au moins de la SFIO : le congrès extraordinaire tenu à Paris, salle Huyghens, 26-29 décembre 1927 et le XXXIIIe congrès tenu lui aussi à Paris et salle Huyghens du 30 mai au 2 juin 1936.

Il revint en Tunisie et 1937 et mourut deux ans plus tard à Carthage.

Joachim Durel avait publié d’innombrables articles dans la presse socialiste et syndicale de Tunisie et de nombreux essais dont De Dieu, du troupeau et de l’autorité, La sagesse d’Henry Franck.. Il avait exercé, par son enseignement au lycée Carnot de Tunis, par ses discours et par ses écrits, une très grosse influence sur la jeunesse lycéenne et étudiante européenne et tunisienne.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article111760, notice DUREL Joachim. Pseudonyme : VALENTINE Pierre par Élie Cohen-Hadria, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 28 août 2022.

Par Élie Cohen-Hadria

SOURCES : Le Socialiste, L’Avenir social, Tunis socialiste. — Liauzu et Soumille, « La gauche française en Tunisie au printemps 1906 », Le Mouvement social n° 86, janvier-mars 1974. — Élie Cohen-Hadria, « Du protectorat français à l’indépendance tunisienne », Centre de la Méditerranée, Nice, 1976. — Aline Naura, « Les socialistes devant la crise de 1929 en Tunisie », Le Mouvement social, janvier-mars 1972. — Juliette Bessis, « Le Mouvement ouvrier tunisien de ses origines à l’indépendance », le Mouvement social, octobre-décembre 1974.

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