FIORINI Élie

Par Antoine Olivesi, Marie Barak

Né le 8 juin 1896 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 12 décembre 1974 à Marseille ; instituteur ; militant communiste de Marseille.

Né à Marseille, Élie Fiorini était le fils d’immigrés italiens. Son père, Ilio Fiorini, était un cordonnier anarchiste. Pendant le service militaire, l’officier le frappa à coups de cravache, Ilio lui enfonça son sabre dans la poitrine. Il put s’enfuir et franchir clandestinement les Alpes à pieds avec sa famille.

Élie Fiorini quitta l’école à quatorze ans, et travailla d’abord comme ouvrier maçon puis comme jardinier (placé chez un jardinier) dans la banlieue nord de Marseille, semi-rurale encore à l’époque. Plus tard il devint instituteur suite à des cours du soir.
Selon le témoignage de sa femme, Thérèse Fiorini : “Très jeune, il appartenait aux bandes vaguement anar de Saint-Louis… Tout ce qui était contre le gouvernement, pour les anars, c’était sacré.” Toujours selon Thérèse, il adhéra au parti communiste en 1926.
En 1932 il épousa Marie-Thérèse (dite Thérèse) Giovanetti (dont il reconnut la fille), avec qui il reconstitua le parti communiste dans les quartiers Nord de Marseille. Il est alors membre du Bureau régional du Parti communiste.
Membre de la CGTU, élu à a commission administrative de la 8e Union régionale unitaire en 1932 et au service de l’ISR, l’Internationale syndicale rouge, il suivait les marins, les cuirs et peaux, les raffineries. Il était également responsable des liaisons avec les syndicats de marins d’Extrême Orient et d’Allemagne, en collaboration avec le Club des Marins dirigé par Auguste Dumay.

En 1934, il participa à un meeting antifasciste, début février. En 1937, il était secrétaire du rayon de Saint-Antoine et il participa au congrès régional du PC à Marseille les 18 et 19 décembre 1937, à la veille du congrès national d’Arles.

Il résidait en 1939 à Saint-Antoine, toujours vers la sortie nord de la ville.

Sur le plan syndical, il fut souvent en conflit avec les représentants de l’École émancipée, trotskystes en grande majorité, dans les Bouches-du-Rhône.
Le couple s’était mis au service de "l’Internationale", en fait essentiellement l’ISR, l’Internationale Syndicale Rouge. Thérèse disait à sa petite-fille "on était du Service spécial". Marie-Thérèse et lui collaboraient avec Auguste Dumay, notamment pendant la guerre d’Espagne. Le couple accueillit des espagnol sen transit et des enfants dont ceux de Busteros, maire républicain de Porugalete.

En décembre 1939, le Parti communiste venant d’être mis dans l’illégalité, il fut l’un des premiers envoyés en résidence surveillée à Boulbon. À l’arrivée des Fiorini, la Légion locale refusa de prêter le serment au drapeau et à Pétain, tant que l‘instituteur communiste serait dans la commune. Selon Thérèse, l’académie envoya alors un inspecteur qui mit Élie Fiorini à la retraite pour invalidité, en raison de sa mauvaise vue.

Envoyé devant un tribunal militaire pour reconstitution de ligue dissoute, Élie Fiorini bénéficia d’un non-lieu le 6 avril 1940, personne n’ayant accepté de témoigner à charge, et il fut remis en liberté. La famille Fiorini déménagea à Mézoargues. Élie Fiorini jardina et vendit du lait.

Le Parti communiste demanda aux Fiorini d’entrer dans la Résistance. Sous le nom de Jules Delattre, Élie recruta des volontaires FTPF. Chargé avec sa femme d’organiser un maquis de repli, il forma une équipe pour récupérer les armes parachutées par Londres, cacher les armes, planifier des sabotages, héberger les combattants après une action puis les faire passer au maquis, en Espagne, ou à Londres. Élie fabriqua de fausses cartes d’identité.

Il fut incorporé dans les FFI à compter du 15 septembre 1943. Avec le grade de lieutenant FFI-FTPF, il assura la tâche d’instructeur et de chef de détachement, et il aida les services de renseignements. Le 13 août 1944, il fut dénoncé et arrêté. D’abord relâché grâce à ses dons de comédien et au témoignage de Georges de Régis, maire de Mézoargues, il fut reconnu par un milicien et fut à nouveau arrêté sous l’inculpation de chef de l’organisation des fausses cartes de la Résistance de la localité et de la région, et chef du Mouvement de résistance armée des cantons Nord des Bouches-du-Rhône. Emmené à la Kommandantur, il fut frappé à la tête, ce qui provoqua un début de décollement de rétine, diagnostiqué trop tard, qui le rendit aveugle et provoqua une maladie nerveuse. Grâce au débarquement allié, les Allemands fuyant il retrouva la liberté. L’attestation d’Alphonse Cozzone certifie néanmoins qu’il s’est évadé dans la soirée du 14 août et que Cozzone lui a porté secours. Impossible de corroborer l’une ou l’autre version.

Il reçut la médaille commémorative de la Guerre 39-45, "En reconnaissance de son activité contre l’occupant pendant la période de la Résistance et au cours des combats de la Libération et en remerciement de l’aide ainsi apportée aux Alliés” (Attestation du 15 septembre 1948), mais la pension militaire d’invalidité lui fut refusée, sous prétexte qu’il n’y avait “pas de preuves de l’origine des contusions à la tête” !
Élie Fiorini avait un sens de l’humour développé, adorait jouer des tours pendables dès l’école primaire, puis à ses collègues et amis, ce qui ne l’empêchait pas d’être un instituteur remarquable. Thérèse Fiorini racontait qu’à l’École de Saint-Antoine, “il avait choisi les gosses en retard, tous les gosses qui avaient plus de 9 ans, qui ne savaient pas lire ou qui n’arrivaient pas à suivre… Seulement il avait exigé d’en avoir 18 et pas plus.”

Selon Alfred Bizot, Élie Fiorini était “un peu brutal, n’aimant pas tellement les discussions…, c’était l’action quoi”. Thérèse disait : “C’était un révolutionnaire des temps anciens”.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article113346, notice FIORINI Élie par Antoine Olivesi, Marie Barak, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 27 octobre 2022.

Par Antoine Olivesi, Marie Barak

Thérèse et Elie Fiorini, avec Candido Busteros

SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, M 6/11379, rapports des 3 juin 1932 et 20 décembre 1937 ; III M/53. — Arch. Com. ville de Marseille, série K, listes électorales de 1937 et 1955. — Rouge-Midi, 10 février 1934. — Renseignements fournis par Michel Barak, Pierre Emmanuelli et Henri Peyrot. — Photo fournie par sa petite-fille Marie Barak. — Entretiens de Marie Barak avec Thérèse Fiorini (1989/1991), Fanette (1989/1992)), Alfred Bizot (1992), documents FTPF et FFI, divers documents officiels, lettres et articles de journaux consultés par Marie Barak. — RGASPI, Moscou, pas de dossier à son nom ni à celui de sa femme dans les dossiers nominatifs du Komintern.

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