Par Jacques Girault
Né à Alès (Gard), le 11 février 1884 ; mort à Aubagne (Bouches-du-Rhône) le 21 novembre 1959, comptable : adjoint au maire de La Seyne (Var), 1944-1950.
Son père, protestant, franc-maçon, originaire de l’Ardèche, cheminot, mécanicien, s’était marié à une couturière, originaire de La Seyne, catholique, de parents italiens. Leurs quatre enfants furent baptisés. Pierre Fraysse, l’aîné, demeura infirme à la suite d’une chute, après ses études primaires à Langogne (Lozère) où son père travailla pendant vingt ans. Il continua ses études à l’école primaire supérieure Rouvière de Toulon (Var).
Après la mort de son mari en avril 1914, sa mère, travaillant comme couturière, vint avec ses quatre enfants vivre à La Seyne. Son frère, Fraysse Baptistin, s’engagea au début de la guerre. Soutien de famille, Pierre Fraysse travailla comme comptable dans un chantier naval, puis aux Forges et Chantiers de la Méditerranée. Le 9 août 1919, il écrivait dans Le Petit Var
Limogé des FCM, sanctionné en fait en raison de sa position favorable aux grévistes, il trouva un emploi de comptable à Fréjus (Var). Le conseil municipal de La Seyne, le 7 septembre 1921, le présenta au ministère des Finances pour remplir les fonctions du Receveur municipal spécial de la ville. Il n’eut que douze voix. En deuxième position, il retira sa candidature pour devenir deuxième candidat le 3 mars 1922. Puis, il passa un examen pour entrer comme commis à la mairie de Toulon. Admis le 1er avril 1924, il travailla dans divers services (service des eaux, le 14 avril 1925, expéditionnaire, le 1er juin 1926, comptable au bureau de l’Instruction publique, le 1er février 1927) et acquit ainsi une solide expérience.
P. Fraysse, franc-maçon initié en 1918, ordonnateur et orateur de la Loge « Le Triomphe de la Concorde » de 1929 à 1937, 30e degré en 1939, participait régulièrement aux convents du Grand-Orient de France dont il était Grand Maître. Il présidait la section seynoise et la Fédération varoise des Jeunesses laïques et républicaines. Il fonda la section de Toulon le 28 mars 1925. À ce titre, il participait au bureau d’une réunion à La Seyne du Comité de vigilance républicaine contre le péril fasciste en 1926. Il fut par la suite un des animateurs de ce comité. Membre du Parti radical-socialiste, figurant sur la liste du « comité de concentration républicain pour la défense des intérêts locaux. Radicaux socialistes et Républicains socialistes » pour les élections municipales de La Seyne, le 5 mai 1929, il obtenait 887 voix (dernière position de la liste) sur 5 077 inscrits.
P. Fraysse était le correspondant régulier de journaux parisiens, L’Auto puis plus tard L’Œuvre, ou locaux, Le Petit Niçois, Les Coulisses. Il y écrivait sous les pseudonymes de Pierre Carrée et de Papyrus. Par exemple, dans Les Coulisses, parurent des articles sur l’activité fasciste dans le Sud-Est (novembre 1926), sur la situation aux Chantiers (juin 1929), sur la nécessité de vacances pour les travailleurs (septembre 1939) etc., il publiait aussi diverses chroniques d’art et d’histoire. En effet, passionné de recherches historiques, il étudiait dans différentes directions, notamment la Franc-maçonnerie. Il publia de nombreux ouvrages dont une biographie de Rigouard, évêque constitutionnel franc-maçon.
Membre, animateur ou fondateur d’associations artistiques (« La Seynoise »), de loisirs (« Loisirs et Sports », « Les Amis de la Montagne »), philanthropiques (« Comité de la Misère »), son éclectisme, sa générosité et son dévouement étaient légendaires.
Lors du congrès de la Fédération radicale en septembre 1933, il devint trésorier adjoint.
Fortement marqué par la montée du fascisme et la tension intérieure, membre de la Ligue des droits de l’Homme, il participa au bureau du meeting organisé par les syndicats CGT et CGTU le 12 février 1934 à la Bourse du Travail de La Seyne.
Le 25 février 1934, il démissionnait du Parti radical-socialiste au congrès extraordinaire de Carnoules qui affirmait sa confiance au gouvernement Doumergue.
Dès lors, Fraysse se rapprocha de plus en plus du courant unitaire qui se manifesta très précocement dans la région. Le 10 janvier 1935, il présidait à La Seyne, le meeting des comités de Vigilance républicaine et de lutte contre le fascisme et la guerre. Le 21 décembre 1936, il présidait une réunion du comité Amsterdam-Pleyel. Le 15 janvier 1937, il était élu secrétaire général du comité local de Front populaire. Ses archives montrent son travail intense à ce poste de responsabilité.
Parallèlement, il avait une activité syndicale et, dans la première partie de 1937, participa à toutes les actions du personnel communal à Toulon.
Pendant la guerre, il se livra à La Seyne et à la mairie de Toulon à une activité de résistance (réseau F2). Il fut, en outre, le fondateur et le responsable du district ouest de Toulon de Libération. Ses sœurs, notamment, l’aidaient dans son activité clandestine. Le 26 juillet 1943, il était arrêté à La Seyne par la Gestapo. Emprisonné à la caserne Grignan, puis à Imperia (Italie) enfin aux Baumettes à Marseille, il fut libéré le 13 juin 1944.
Président local du Mouvement de Libération nationale puis du Comité local de Libération, à la tête de la mairie, il eut des difficultés avec les Francs-Tireurs. Le 15 août 1944, il fit partie de la délégation municipale mise en place le 29 septembre 1944, au titre des MUR. Au congrès des comités locaux de Libération, le 9 décembre 1944, il se plaignait, dans son intervention, de la lenteur de l’épuration. Au congrès du MLN le 21 janvier 1946, il devint membre du bureau départemental. Il collaborait régulièrement à son hebdomadaire, Résistance du Var.
Fraysse travaillait avec sa sœur, comptable à La Seyne. Il adhéra au Parti communiste français.
Candidat aux élections municipales sur la liste « d’Union républicaine et antifasciste », il fut élu conseiller municipal, le 29 avril 1945, avec 4 976 voix sur 11 637 inscrits. Adjoint à l’Instruction publique (le docteur Sauvet était alors maire), il fut réélu le 19 octobre 1947 sur la liste « républicaine et résistante et de défense des intérêts communaux ». Premier adjoint du maire communiste, il fut à nouveau élu le 18 juin 1950 sur une liste analogue.
Président de la section de La Seyne, il devint le 30 novembre 1946, trésorier général pour le Var de la FNDIRP.
Fraysse accordait une grande partie de son activité municipale aux personnes âgées et à l’école. Il s’occupait notamment des colonies de vacances. P. Fraysse mourut à la suite d’un accident survenu à Cuges (Bouches-du-Rhône) en revenant de visiter une propriété dans l’Allier que la mairie projetait d’acheter pour en faire une colonie de vacances.
Son nom a été donné à une artère de la ville.
Par Jacques Girault
SOURCES : Arch. Nat. F7/13021 et 13747. — Arch. Dép. Var, 2 M 7.32.3, 4 M 47, 4 M 56/9, 4 M 56/10, 4 M 59/2, 16 M 38, 18 M 12, 18 M 35, 18 M 43, 18 M 89, 3 Z 4.19. — Arch. Com. La Seyne. — Arch. Com. Toulon, service du personnel. — Arch. OURS, fédération socialiste SFIO du Var. — Presse locale. — COMBES (André), La Franc-Maçonnerie sous l’Occupation. Persécution et résistance (1939-1945), Paris, Editions du Rocher, 2001. — — Renseignements et archives communiquées par sa sœur Mme Fraysse-Ribet. — Notes de Jean-Marie Guillon.