LAVERGNE Bernard

Par Jacques Gans, Jean Gaumont

Né le 15 décembre 1884 à Nîmes (Gard), mort le 8 octobre 1975 à Paris ; professeur de droit et d’économie politique ; théoricien et militant coopérateur.

La famille paternelle de Bernard Lavergne était originaire du Tarn, où son grand-père, le docteur Bernard, Martial, Barthélémy Lavergne, fut, sous la monarchie de juillet et le Second Empire, un des chefs républicains les plus actifs.
Le jeune Bernard Lavergne fut élève au lycée de sa ville natale de 1890 à 1901, puis suivit les cours de la faculté de Droit de Paris, particulièrement ceux de Charles Gide qui y enseignait l’économie politique. La séduction du maître s’exerça sur le jeune étudiant qui fit sienne la doctrine rochdalienne du théoricien de l’École de Nîmes.
En 1908, Bernard Lavergne soutint sa thèse sur Le Régime coopératif. En 1909-1910, il adhéra à « La Famille » du VIIe arr. de Paris, rue Malar, dont il devint administrateur. La même année, on le désigna comme membre suppléant du comité central de l’Union coopérative et comme vice-président avec Barrault, de la Coopérative de Gros fondée en 1909. Partisan de l’unité du mouvement coopératif français dont il avait pu mesurer la faiblesse comparativement aux mouvements anglais, allemand et suisse, il participa comme délégué d’une petite société du Xe arr., « Notre Famille », au congrès de Calais de la Bourse socialiste. Il y fut élu membre du Comité confédéral de la Confédération des coopératives socialistes et ouvrières, nouveau nom de la Bourse. Le congrès de Calais discuta pour la première fois de façon sérieuse et objective, en présence de Daudé-Bancel, secrétaire du Comité central de l’Union coopérative, et de Barrault, nouveau président de la coopérative de Gros, l’opportunité de la reconstitution de l’unité. Le Pacte d’unité, rédigé par Charles Gide, fut discuté dans trois réunions tenues en juillet 1912, par sept délégués de chacune des organisations, Bernard Lavergne figurant dans la délégation de l’Union coopérative. Le pacte fut signé à l’unanimité et approuvé par les congrès des deux unions.
Le congrès unitaire tenu à Tours du 29 au 31 décembre 1912 créait une nouvelle Fédération nationale et Lavergne était élu parmi les vingt et un membres du Conseil central chargé de l’administrer. Peu après, la fusion du Magasin de Gros de la Confédération et de la Coopérative de Gros de l’Union était aussi réalisée ; le conseil d’administration du nouvel organisme comptait Lavergne parmi ses membres.
La situation financière du Magasin de Gros était loin d’être brillante. On résolut de faire appel à la Banque de l’Union coopérative anglaise et de lui emprunter 100 000 f ; Lavergne fut un des négociateurs de l’opération qui fut couronnée de succès, sans doute grâce à la garantie personnelle qu’il voulut bien spontanément lui offrir.
Mobilisé de 1914 à 1916, Bernard Lavergne occupa ensuite la chaire d’économie politique dans différentes facultés : Alger, Nancy, Lille, et, à partir de 1945, la chaire de coopération créée pour lui à la Faculté de droit de Paris par le ministre René Capitant. Atteint par la limite d’âge, il fut mis à la retraite en 1956. Depuis sa nomination aux chaires magistrales, Bernard Lavergne n’avait plus occupé aucun poste d’administrateur dans les organisations coopératives, mais sa participation au mouvement ne s’en était trouvée nullement diminuée. La Fédération nationale des coopératives le désigna comme membre du Conseil économique du Travail créé par la CGT en 1919 ; c’est à lui surtout, appuyé par Charles Gide et Léon Jouhaux, qu’est dû le projet de nationalisations industrialisées adopté finalement par le Conseil Économique du Travail, défendu à l’Assemblée nationale en 1946 par Ramadier et qu’ont repris par la suite quelques-unes des Fédérations nationales des services publics. Lavergne assista à plusieurs congrès nationaux, mais c’est surtout dans le domaine de la théorie coopérative que le rôle de Lavergne a été fructueux. En 1921, avec Charles Gide, il fondait la Revue des Études coopératives, qu’il administra et dirigea seul jusqu’en 1960. Il a figuré au nombre des premiers adhérents fondateurs de la coopérative d’édition « Les Presses universitaires ».
En 1931, encore avec Charles Gide, il prenait la part la plus active à la création d’un Institut international d’études coopératives, dont il a assuré, jusqu’à la disparition de celui-ci en 1939, les réunions et les publications pour les pays de langue française.
Après la Libération en 1944, on le retrouve au nombre des fondateurs de l’éphémère Association des amis de la coopération dont il rédigea le manifeste qui fut adopté, et au sein duquel on lui confia un poste d’administrateur (novembre 1945-janvier 1946). Il fut appelé en mai 1946 à effectuer une tournée de conférences en Suisse pour y traiter du problème des nationalisations et des régies coopératives. Les ouvrages qu’il a publiés à ce sujet font autorité.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article116525, notice LAVERGNE Bernard par Jacques Gans, Jean Gaumont , version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 21 mai 2021.

Par Jacques Gans, Jean Gaumont

ŒUVRE : Régime coopératif, Paris 1908. — Philosophie et avenir de l’ordre coopératif, Paris, 1928. — La Primauté du consommateur, Paris, 1936. — Le Problème des nationalisations, Paris, 1946. — La Révolution coopérative ou la Révolution de l’Occident (ouvrage le plus important de B. Lavergne). — Traité général de la coopération de consommation.L’Hégémonie du consommateur, Paris, 1958. — Le Socialisme à visage humain. L’ordre coopératif, Paris, 144 p.
B. Lavergne a écrit divers autres ouvrages de doctrine coopérative ou politique ainsi que des articles dans des revues, en particulier dans la Revue des Études coopératives.
Parmi les nombreux ouvrages de B. Lavergne étrangers au domaine coopératif le plus important est Le Gouvernement des démocraties modernes, Paris, 2 t., 1933.
B. Lavergne a narré ses souvenirs dans Les Idées politiques en France de 1900 à nos jours, Paris, 1965.
Depuis 1928, B. Lavergne dirige la revue L’Année politique et économique.

SOURCES : J. Gaumont, Histoire de la coopération, op. cit., t. II. et le 50e anniversaire de la FNCC, Paris, 1963, 96 p. — Brizon et Poisson, La Coopération, op. cit. — O. Postel-Vinay, « Mort de Bernard Lavergne, un socialiste dans le désert », Le Monde, 10 octobre 1975. — Le Coopérateur de France, n° 646, 1er novembre 1975. — Hommage à Bernard Lavergne, Bruxelles, Les propagateurs de la coopération, 1972.
Biographie revue par Bernard Lavergne, mars 1971.

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