LE GRIEL Charles, Jules, Edmond, Albéric, Jacques

Par Jean Lorcin

Né le 8 mai 1884 à Castres (Tarn), mort le 20 juin 1963 à Saint-Étienne (Loire) ; avocat ; militant socialiste puis communiste ; exclu du Parti communiste en 1932 ; adjoint au maire de Saint-Étienne.

Fils d’un directeur de la Banque de France, Jacques Le Griel fit des études à Castres et à la Faculté de Poitiers, il s’inscrivit au barreau de Saint-Étienne en 1908. se maria en 1911 avec Louise Cognet, employée dans un bureau de tabacs. D’après la police, en 1913, il vivait en mauvaise intelligence avec ses parents et avait peu de ressources personnelles.

Rapidement, il plaida des délits politiques. C’est ainsi qu’il prit la défense, en janvier 1913, de l’anarchiste Benoît Liothier , inculpé pour sabotage de voies ferrées. Il défendit avec succès —ils furent acquittés — devant la cour d’appel de Lyon, les 11 et 19 novembre 1928, trois communistes de la Loire, dont Benoît Frachon, secrétaire de la région lyonnaise du PC, condamnés par le tribunal correctionnel de Lyon à 1 an de prison et 100 F d’amende pour " provocation de militaires à la désobéissance dans un but de propagande anarchiste ".

Il défendit avec succès _ ils furent acquittés _ devant la cour d’appel de Lyon, les 11 et 19 novembre 1928, trois communistes de la Loire, dont Benoît Frachon, secrétaire de la région lyonnaise du PC, condamnés par le tribunal correctionnel de Lyon à 1 an de prison et 100 francs d’amende pour « provocation de militaires à la désobéissance dans un but de propagande anarchiste ».

Militant socialiste, il s’affirma comme l’un des dirigeants de la SFIO pour le département de la Loire. Il collaborait à l’Action ouvrière et paysanne, organe de la fédération socialiste. Il brigua, à partir de 1910 plusieurs mandats électifs : conseiller général en 1910 dans le canton nord-ouest de Saint-Étienne, en 1913 dans le canton de Rive-de-Gier, conseiller d’arrondissement en 1911 dans le canton de Saint-Jean-Soleymieux et député en 1914 dans la troisième circonscription de Saint-Étienne.

Mobilisé en 1914, Le Griel fit la guerre en première ligne et, dès sa démobilisation, reprit sa place au barreau. Il était alors très proche des « Amis de la Vague » qui refusèrent néanmoins son adhésion en 1919. Il se présenta, en vain, aux élections législatives du 16 novembre 1919, mais fut élu, quelques jours plus tard (le 30 novembre), conseiller municipal du canton sud-ouest de Saint-Étienne sur la liste du Bloc des Gauches et devint maire adjoint.

Après le congrès de Tours (décembre 1920), il rallia les rangs du Parti communiste et choisit d’y rester en 1922 en rompant ses liens avec la Franc-maçonnerie et la Ligue des droits de l’Homme. Il s’associa à la campagne du Parti communiste contre Vital Descos et Ferdinand Faure qui allaient fonder l’Union socialiste-communiste. Le 25 janvier 1923, à la réunion constitutive de la section communiste stéphanoise, il estima que la crise interne que le parti venait de traverser était désormais surmontée.

En accord avec la section communiste qui voyait dans les subventions accordées à l’école des Mines une participation de la municipalité à la caisse noire du comité des Forges et des Houillères, Le Griel démissionna de ses fonctions au conseil municipal. Il retrouva son siège, le 3 mai 1923, lors des élections partielles, et le garda jusqu’au scrutin de 1925. Candidat du PC aux élections cantonales de 1925, dans le canton de Rive-de-Gier, il eut au premier tour 537 voix sur 9 700 inscrits et 5 755 suffrages exprimés, et se retira entre les deux tours.


En 1928, membre du comité de rayon, Le Griel fut candidat aux élections législatives dans la première circonscription de Saint-Étienne. Il obtint au premier tour 4 769 suffrages sur 20 690 votants. Il n’eut pas davantage de réussite, la même année, en se présentant au conseil général. Il conduisit la liste communiste aux élections municipales de 1930 provoquées par la dissolution du conseil en raison d’une opération foncière (qui fit scandale), mais fut battu.

À partir de 1931, à l’occasion d’élections cantonales, Le Griel fut soupçonné de se compromettre avec Louis Soulié, maire sortant. On l’accusait ouvertement d’électoralisme. En 1932, pour les élections législatives, le Bureau politique s’opposa à sa candidature. Benoît Frachon vint signifier cette décision en énumérant les « désaccords profonds » qui l’avaient écarté de longue date de la ligne du parti. Le Griel se déclara « prêt à en appeler aux électeurs ». Cet acte d’indiscipline semble avoir retourné contre lui l’opinion du parti dans la Loire et la décision du Bureau politique fut approuvée, à l’assemblée générale du rayon de Saint-Étienne, par plus de cent voix contre six. Le soutien des mineurs ex-unitaires, de tendance syndicaliste révolutionnaire, dont il faisait état pour maintenir sa candidature, acheva de le discréditer.

Après son exclusion du Parti communiste (qui jeta quelque trouble parmi les militants), Le Griel maintint sa candidature dans la première circonscription sous l’étiquette « socialiste-communiste » qui l’apparentait au Parti d’unité prolétarienne. Il obtint 1 750 suffrages sur 26 958 inscrits et 19 623 votants.

C’est toujours sous l’étiquette du PUP que Le Griel, après sa réélection au conseil municipal stéphanois en 1935 sur la liste de Front populaire, se présenta, sans succès, aux élections législatives de 1936 dans la troisième circonscription.

Le Griel réadhéra au Parti communiste avant la Seconde Guerre mondiale. Il se présenta sous cette étiquette à l’élection sénatoriale partielle de mars 1938, les représentants du Front populaire n’ayant pas réussi à s’entendre, face à Antoine Pinay qui l’emporta dès le premier tour.

Il démissionna de ses fonctions municipales le 7 octobre 1939 « profondément ulcéré et démoralisé par le fait que les républiques socialistes de Russie ne se rangent pas aux côtés de la France dans la guerre contre l’Allemagne ».

Après la Libération, il défendit, avec un courage reconnu par tous, des miliciens, un franciste et un agent de la Gestapo traduits devant le Tribunal de Saint-Étienne, érigé en Cour martiale. En 1948 et 1949, il organisa la défense des mineurs condamnés et révoqués par suite de la grève de 7 semaines.

À ses obsèques, en 1963, maints discours et articles de presse évoquèrent la grande figure du barreau stéphanois et de défenseur de la classe ouvrière qu’il incarnait. Il était alors toujours membre du Parti communiste.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article117383, notice LE GRIEL Charles, Jules, Edmond, Albéric, Jacques par Jean Lorcin, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 7 juin 2022.

Par Jean Lorcin

SOURCES : CAC 940459 art. 165 doss. 15120. — RGASPI : 517.1 607, 539.3. 539.3.1174 et 1177. — Arch. Nat. F7/13035, 13105, 13110, 13516 et 13121. — Arch. Dép. Loire, 3 M 55, 63-64, 66, 68, 70-73, 75-77 ; 4 M 12, 4 M 120, 125 ; 6 M 53bis, 10 M 187 ; série 10 M (1907-1922) ; M 541 (1920-1925), 85 W 94, 95, 154. . — Bulletin municipal, Saint-Étienne, 5 décembre 1919. — Le Peuple de la Loire, 16 septembre 1919. — Le Cri du peuple, 23 mars 1927, 5 mai 1928, 19 mars 1932, 16 et 23 avril 1932, 11 septembre et 30 septembre-1er octobre 1944. — La Tribune républicaine, 1919-1938. — La Loire républicaine, 30 et 31 décembre 1922, 14 avril 1932. — Le Mémorial de la Loire, 30 avril 1928, 11 avril 1932, 8 avril 1936, 21 mars 1938. — Le Progrès, 27 novembre 1963 (J.-Marc Ledot, " Des cachots et des geôles ... "). — Le Progrès-La Tribune, 11 décembre 1964. — Hebdo-Saint-Étienne, 19 décembre 1964. — Jean Tenant, Souvenirs en désordre, Saint-Étienne, 1967. — Henry Destour, Les syndicalistes révolutionnaires et le mouvement syndical dans la Loire entre les deux guerres mondiales. Aperçu des luttes de tendances dans les syndicats ouvriers de la Loire entre les deux Guerres mondiales, Mémoire de Maîtrise, Saint-Étienne, 1971, 131 p. — Pétrus Faure, La Terreur rouge, Saint-Étienne, Imprimerie Dumas, 1975, 19 cm., 166 pages. — Sylvie Guillaume, Antoine Pinay ou la confiance en politique, Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, 1984, 231 pages. — Jacques Girault, Benoît Frachon Communiste et syndicaliste, Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, 1989, 364 pages. — État civil de Castres.

ICONOGRAPHIE : Photographie des candidats communistes, Le Cri du peuple, avril 1928. — Caricature de Le Griel dans {Le Renégat}, feuille de propagande éditée par les cellules de Saint-Chamond et de L’Horme (Arch. Dép. Loire, 3 M 73, pièce 212).

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable