LELIÈVRE Roger

Par Jean Limonet

Membre du bureau de la Fédération de la Métallurgie CFTC (1937).

En 1937, Roger Lelièvre était responsable syndical CFTC aux usines Gnôme-et-Rhône (fabrication de moteurs pour avions puis pour motos). Cette entreprise fut à l’origine de la création de la SNECMA au moment de la nationalisation. Il intervint au XVIIIe congrès de la Fédération française des syndicats de la Métallurgie et parties similaires, les 6 et 7 novembre 1937. Il présenta un rapport très complet et expliqua en quoi consistait les sections syndicales d’entreprises et ce qu’on devait en attendre pour le développement et la propagande des organisations CFTC. À l’issue du congrès, il fut élu au bureau de la fédération. Il fit partie de la délégation composée de Jean Pérès, H. Galtier, Lucien Léonard et Joseph Botton qui participa aux négociations du contrat collectif entre l’Union syndicale des industries aéronautiques et la Fédération française des syndicats de la Métallurgie et parties similaires CFTC. Ce contrat fut signé le 23 mai 1938, et fut la première convention collective signée par la CFTC dans cette branche.

Il assista, le 19 novembre 1938, à la dernière assemblée générale du syndicat des ouvriers de la métallurgie de Paris, avant la déclaration de guerre. Le conseil syndical ayant constitué son bureau le 3 décembre 1938, Roger Lelièvre fut élu président, avec Lucien Léonard, Dufour, et Machecourt comme vice-présidents et Lobgeois comme secrétaire. Le conseil fixa également les différents taux des nouvelles cotisations. Dans les mois suivants, Roger Lelièvre participa à de très nombreuses actions : il intervint aux usines Renault pour garantir la continuité du contrat de travail aux camarades qui avaient fait la grève le 30 novembre 1938 ; auprès des services de l’inspection du travail jusqu’au ministre du Travail au sujet des établissements Gnome et Rhône, ceux-ci voulant faire venir travailler le personnel le dimanche ; auprès des chambres patronales pour des réajustements de salaires ; contre une décision passée au JO du 17 janvier 1939 concernant la convention aviation modifiant le tarif d’embauche dans la branche.

Après la déclaration de guerre, les activités syndicales étant très perturbées (départ de nombreux dirigeants, militants et adhérents), deux permanents, Jean Pérès et Lucien Léonard, restèrent à Paris assurant les contacts avec les pouvoirs publics et veillant à l’application de la législation sociale. En septembre 1940, après la débâcle de juin, les dirigeants de la métallurgie parisienne se regroupèrent autour des deux permanents et les activités syndicales reprirent. Lorsque le conseil syndical, présidé par Roger Lelièvre, prit connaissance du décret du 9 novembre 1940 annonçant officiellement la dissolution de la CFTC, il jugea cette décision arbitraire et fit appel au Conseil d’État. À cette occasion, il noua des contacts avec les dirigeants de la Fédération des Métaux de la CGT dont la confédération avait été également dissoute. Il allait avoir de nouvelles entrevues avec la Fédération des Métaux, ex-CGT, dans le but d’exposer la nécessité du pluralisme syndical.

Dès février 1941, Roger Lelièvre participa à la réorganisation des sections locales ou d’entreprise de nombreux camarades démobilisés. Il fit en sorte qu’à l’issue d’une réunion interfédérale concernant les salaires, le coût de la vie, le chômage, le respect des conventions collectives, une délégation intervint le 7 mars 1941 auprès du ministre du Travail. Il demanda que le conseil syndical se prononcât, en avril, sur les critiques portant sur les activités de Jean Pérès en zone occupée. Le conseil rendit hommage à Jean Pérès pour avoir assuré en grande partie la lourde responsabilité de la direction du mouvement syndical chrétien depuis la débâcle.

À l’occasion du 1er mai 1941, Roger Lelièvre adressa une lettre au maréchal Pétain qui dénonçait le déséquilibre des salaires, la fixation arbitraire des allocations familiales, la hausse injustifiée du coût de la vie illustrée par un tableau comparatif du prix de diverses denrées courantes en mai 1940 et en avril 1941 qui montrait une augmentation de 500 % pour certaines d’entres elles. Après les réunions du bureau fédéral, présidé par Charlemagne Broutin, le 5 juillet, et celui de 6 juillet pour le conseil national interfédéral, Roger Lelièvre demanda au conseil syndical de la métallurgie de se prononcer sur la position à adopter vis-à-vis de la future Charte du travail. Après avoir étudié les grandes lignes de cette future organisation sociale, ses membres, tout en manifestant leur position en faveur du pluralisme syndical et de la liberté syndicale, furent d’accord pour y « participer, en principe ». Même si, en novembre, ils protestèrent contre le syndicalisme unique et obligatoire, les associations mixtes et autres points douteux et troublants, ils considéraient qu’il y avait certains points d’organisation professionnelle et sociale conformes à ceux conçus par la CFTC.

Roger Lelièvre fut au cœur des contacts qui eurent lieu au cours du dernier trimestre 1941 et du premier trimestre 1942 avec les représentants de la Fédération des Métaux ex-CGT, réitérant la position de son syndicat en faveur du pluralisme et de la liberté syndicale contre l’adoption du syndicalisme unique. À la suite des circulaires ministérielles des 21 novembre, 15 décembre, et du 13 janvier 1942, au sujet de la constitution des comités sociaux d’entreprises provisoires, il conclut, après des discussions, qu’il fallait y participer. Enfin, Roger Lelièvre donna son appréciation sur la « famille métallurgie », actuellement en cours de formation suivant les prescriptions de la Charte du travail.

Après la Libération, Roger Lelièvre continua à militer. Il participa au congrès fédéral de la métallurgie de septembre 1945 et à la première réunion de bureau du 10 novembre suivant. Il fit état, au cours de cette réunion, du projet des structures fédérales et fut chargé de réaliser un graphique comparatif concernant les impôts cédulaires.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article117560, notice LELIÈVRE Roger par Jean Limonet, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 6 avril 2014.

Par Jean Limonet

SOURCE : P. Trimouille, « Les syndicats chrétiens dans la Métallurgie française de 1935 à 1939 », Le Mouvement social, n° 62, janvier-mars 1968.

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