LE MANSOIS-DUPREY Charles, Marcel [appelé le plus souvent LE MANSOIS]

Par Jacques Girault

Né le 6 avril 1909 à Paris (XIVe arr.), mort le 4 juin 1992 à Bondy (Seine-Saint-Denis) ; marin mutin de Calvi ; militant communiste exclu puis à nouveau membre à la Libération ; dirigeant de la FSGT ; maire adjoint de Blanc-Mesnil.

Son père fut séminariste. Royaliste convaincu, il devint ouvrier métallurgiste dans une société de construction mécanique à Levallois-Perret et s’y distingua surtout comme homme-lige de son patron. Indiqué comme "livreur" en 1909 lors de la naissance de son fils dont la mère était "concierge" d’un immeuble de la rue Blanche (Paris, IXeme arr.), il s’occupa peu de son épouse, de sa fille Suzanne et du petit dernier Charles. La famille habita Aulnay-sous-Bois au Nord-Est de la capitale. Charles Le Mansois obtint son certificat d’études primaires et, bien que bon élève, travailla à douze ans et demi et à partir de 1923 dans une maison de crédit, "Le Progrès commercial". Il avait un oncle, René-Jean Duprey-Le Mansois, commissaire de 1ère classe, qui appartenait à l’encadrement de l’École Navale désigné souvent « La Royale ».

En 1928, renvoyé pour avoir pris le parti d’un employé contre le directeur, fâche avec son royaliste de père, il s’engagea pour cinq ans dans la Marine nationale malgré « l’opposition clairvoyante » de ses parents. Condamné à la suite d’une rixe à deux ans de prison avec sursis, affecté sur le Paris, il reprit des études et devint matelot gabier. Au cinquième dépôt des équipages à Toulon (Var), après une absence illégale de six jours, pour « mauvaise conduite habituelle et incorrigible », le conseil de discipline, le 7 août 1929, l’envoya aux sections spéciales de Calvi (Corse). Là, des incidents éclatèrent le 20 octobre 1930, conduisant au refus collectif d’obéissance. Selon le rapport d’un officier chargé de l’enquête, Le Mansois appartenait au Parti communiste ou désirait reprendre contact avec celui-ci. Les communistes, en effet, accordaient une grande place à la lutte contre le régime disciplinaire aussi bien dans l’armée que dans la marine.

Le procès des cinq mutins de Calvi s’ouvrit à Toulon, le 25 février 1931. La presse locale et nationale, et tout particulièrement l’Humanité, en rendit compte. Leurs avocats, dont Jacques Sadoul , appartenaient au Secours rouge international. Parmi les témoins cités, figurait André Marty. Ils furent acquittés trois jours après. En avril 1931, Jean Le Gouin, organe communiste de défense et de lutte des marins, publiait la photo de Le Mansois, suivie de la légende : « Un des cinq mutins de Calvi qui ont été acquittés grâce à l’appui révolutionnaire des ouvriers et des marins. »

Rendu à la vie civile, Le Mansois reprit son emploi de comptable. Il habitait chez son père, au Blanc-Mesnil (Seine-et-Oise), et était, en fait, salarié par le Parti communiste pour militer à l’Union fraternelle des marins et anciens marins. Il devait aussi créer une Association des anciens disciplinaires de Calvi. Dans le cadre de son activité, il prépara une brochure Engagez-vous dans la Marine dont il signa l’épilogue, en octobre 1931.

Le Mansois se rendait souvent à Toulon. Pendant ces séjours, hébergé à la Bourse du Travail, il participait aux campagnes du Secours rouge international, écrivait dans la presse communiste des articles préconisant l’alliance des marins et des ouvriers en lutte. Témoignant lors d’un nouveau procès des mutins de Calvi, le 5 août 1931, il fut expulsé de la salle du tribunal maritime. Mais son attitude et son mode de vie inquiétaient les dirigeants du rayon communiste de Toulon qui demandèrent au Comité central son rappel en novembre 1931. Très surveillé par la police, il fut arrêté à Toulon, le 20 décembre suivant, pour vol qualifié d’une bourriche de noix, d’un appareil photo et d’un jeu de cartes. Un revolver fut découvert lors de la fouille. Il fut acquitté. En raison de son mode de vie peu orthodoxe le « rayon » communiste de Toulon avait déjà exprimé son souhait de le voir retourner à Paris, ce qu’il fait.

Le 10 novembre 1934, Rouge-Midi, hebdomadaire communiste, dénonçait ce « provocateur » qui avait été démasqué, voici trois ans.
Deux ans plus tard il sera (pour quelle raison ?) qualifié de « provocateur » dans l’hebdomadaire « Rouge Midi ».

De retour en région parisienne Charles Le Mansois s’installa à Blanc-Mesnil avec sa compagne, couturière, dont il eut deux filles. Le couple se maria en 1936 sans faire pour autant de Charles Le Mansois un mari et un père attentionné. Toujours passionné de sports , il s’investit dans les clubs locaux et nationaux de la Fédération Sportive et Gymnique du Travail, dont il fut membre du comité directeur. En 1938, il devint secrétaire de l’Office Municipal des Sports de Blanc-Mesnil.

L’ancien mutin banni de la marine fut mobilisé en août 1939 dans l’armée de terre. Il fut nommé caporal puis caporal-chef. Fait prisonnier en juin 1940, il se prétendit cheminot, sachant que les occupants ont besoin de se type de personnel en France, ce qui lui permit d’être libéré le 25 septembre. Il forma un « triangle » avec deux de ses camarades de la FSGT et il entra au mouvement « Sport libre » , à la création des sections de Stains, Blanc-Mesnil à Paris et à celle des arbitres régionaux. Il écrivit dans Jeunesse, journal local clandestin des jeunes communistes.

En juin 1944 Charles Le Mansois réadhèra au Parti communiste français Il fut élu président du comité local de « Sport Libre » du Blanc-Mesnil et devint salarié de la FSGT puis, à partir de 1949, responsable aux sports du comité central d’Entreprise de la SNECMA.

Toujours très actif aussi au Blanc-Mesnil, élu conseiller municipal et adjoint aux sports en 1953, il le resta jusqu’en 1977. Quelques mois après son décès en 1992 la municipalité du Blanc-Mesnil lui rendit hommage en inaugurant le complexe sportif « Macé-Le Mansois ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article117642, notice LE MANSOIS-DUPREY Charles, Marcel [appelé le plus souvent LE MANSOIS] par Jacques Girault, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 2 février 2022.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat. F7/13164. — Arch. Dép. Var, 4 M 49.4.2, 3 Z 4.29. — Arch. Troisième Région mar., 2 A 1/2104, 2 A 4/37. — Presse locale et nationale. — Notes de Jean Rabaté.

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