LEPEZ Adrien, Ernest, et LEPEZ Albert, Georges

Par Jean Sagnes

Ernest : né le 24 novembre 1880 à Déville-lès-Rouen (Seine-Inférieure), mort le 4 juillet 1927 à Fécamp (Seine-Inférieure).

Albert : né le 3 mai 1885 à Rouen (Seine-Inférieure), mort le 13 décembre 1955 à Besançon (Doubs).

Albert Lepez
Albert Lepez
Encyclopédie socialiste, t. III, p. 187.

Militants socialistes, puis communistes ; syndicalistes et coopérateurs de la Seine-Inférieure, de l’Hérault et de la Seine.

Leur mère était lingère ; leur père, maçon-plâtrier à Rouen, était mis à l’index par le patronat pour ses activités syndicales et politiques. Excellent élève de l’école communale, Ernest Lepez fut placé comme commis aux écritures chez un marchand de grains. Il apprit la comptabilité et fut reçu à l’examen de comptabilité de la Banque de France, mais perdit sa place à cause de son militantisme.

Au début du siècle,les frères Ernest et Albert Lepez travaillaient comme comptables aux chais de Rouen et militaient au Parti socialiste. De 1900 à 1903, Ernest fut secrétaire de la Fédération départementale. En 1907, ils nouèrent des contacts avec des militants socialistes de Bessan (Hérault) dont la coopérative vinicole, « Les Vignerons paysans de Bessan », possédait un entrepôt à Rouen. Au début de 1908, les deux frères et leur famille arrivèrent à Bessan pour prendre la direction de la coopérative.

Pendant deux années, ils furent de très actifs militants du Parti socialiste SFIO et de la coopération à Bessan et dans le département de l’Hérault. Sous leur impulsion, la section socialiste locale se développa ainsi que diverses organisations coopératives directement dépendantes du Parti socialiste. À la coopérative de production vinicole « Les Vignerons paysans de Bessan », fondée en 1906, vint s’ajouter la coopérative de consommation « La Libératrice » qui possédait une chorale enfantine se produisant dans tout le département au profit du Parti socialiste.

Du 28 mars 1909 au 5 juin 1910, Albert Lepez fut secrétaire de la Fédération de l’Hérault du Parti socialiste SFIO. Il représenta cette Fédération aux congrès nationaux à Toulouse (15-18 octobre 1908), à Saint-Etienne (11-14 avril 1909), à Nîmes (6-9 février 1910).

Ernest Lepez fut d’abord un militant actif de la coopération, membre du bureau de la Fédération des coopératives de consommation de l’Hérault affiliée à la Bourse des coopératives socialistes de France. Puis, le 5 juin 1910, il succéda à son frère au poste de secrétaire de la Fédération socialiste de l’Hérault. Favorable à la tendance hervéiste, il fut un des délégués de la Fédération aux congrès nationaux de Saint-Étienne (11-14 avril 1909) et de Paris (15-16 juillet 1910). Les Lepez reçurent même chez eux, à Bessan, Gustave Hervé* pendant quelque temps.

Les deux familles qui, depuis 1908, passaient chaque année quelques mois à Paris, quittèrent définitivement Bessan à l’automne 1910. Il semble que leur départ ait été lié à la très grande difficulté de continuer à faire fonctionner « La Libératrice ».

Les Lepez vécurent quelques années à Charenton, puis à Paris et, à partir d’octobre 1913, à Fécamp. Là, tandis qu’Albert travaillait comme sténo-dactylo chez Remington, Ernest tint un petit commerce à son compte. Après la guerre (il fut mobilisé d’août 1914 à juin 1919), Ernest Lepez reprit aussitôt l’activité militante et fut tête de liste socialiste aux élections municipales de 1919. En 1920, les deux frères adhéraient à la IIIe Internationale.

Ernest, surtout, fut un actif militant communiste et syndicaliste de la Seine-Inférieure. Domicilié à Fécamp (son frère habitait à Rouen), il devint en octobre 1922 secrétaire de l’interfédération communiste du Nord-Ouest (Calvados, Eure, Eure-et-Loir, Manche, Orne, Sarthe, Seine-Inférieure). Il fut nommé délégué régional permanent en octobre 1922 mais ce poste fut supprimé en août 1924. Il assuma ensuite la fonction de secrétaire adjoint à la propagande de la région Basse-Seine jusqu’en 1927. Les Cahiers du bolchevisme du 4 février 1926 avait publié sa contribution à la Tribune de discussion, sur « La crise du parti ». Ses « Propos d’un simple » paraissaient dans le Travailleur, journal communiste sous la signature de « Maître Arsène ». On lui doit également deux brochures : une Monographie de la Seine-Inférieure éditée en septembre 1921 qui lui avait demandé plusieurs années de recherches, et Le communisme en Seine-Inférieure (s.d.). Autodidacte, Ernest Lepez avait acquis dans de nombreux domaines des connaissances étendues.

Délégué au IIe congrès de la CGTU tenu à Bourges en novembre 1923, il dirigea avec Marcel Gretz une grande grève des ouvriers métallurgistes de Fécamp puis créa, en février 1926, l’Union locale unitaire. Elle groupa bientôt 2 700 adhérents. Ernest Lepez en fut le secrétaire et l’âme, avant de laisser sa fonction à Étienne Cudennec. Son commerce boycotté par la bourgeoisie locale avait périclité, de plus ses tentatives pour trouver du travail à Fécamp se heurtèrent au refus du patronat. En octobre 1926, le Conseil paysan français (organisation créée par le Parti communiste) envisagea la mise en place d’un service commercial appelé Union des paysans travailleurs. Ernest Lepez accepta avec enthousiasme d’en prendre la direction. Il s’installa alors à Saint-Denis (Seine) tout en revenant fréquemment à Fécamp. La Voix paysanne (dont il était l’administrateur) du 9 juillet 1927 décrivit en ces termes son action : « Possédant une grosse expérience des affaires, il se mit immédiatement à la besogne, et réussit en peu de mois à jeter les bases d’une organisation solide, malgré l’incompréhension ou l’indifférence et parfois l’hostilité, avouée ou non. Les résultats encourageants obtenus après huit mois de fonctionnement de notre organisme commercial, les perspectives pleines de promesses pour l’avenir, furent évoqués par notre ami à la dernière réunion du bureau du Conseil paysan. Plein de foi et de robuste optimisme, il nous fit part de ses projets immédiats ou lointains ; il reçut pleins pouvoirs pour préparer pour le mois prochain la constitution définitive de notre coopérative. » En 1926, il écrivit dans les Cahiers du bolchevisme sur les problèmes paysans.

Diabétique, ses multiples activités eurent raison de sa santé. Quand, en juin 1927, les pêcheurs bretons en grève lui demandèrent de venir organiser la vente directe du poisson, il prit froid en haranguant les grévistes. Dès son retour il s’alita pour mourir d’une pneumonie trois jours plus tard, le 4 juillet 1927. Un millier de personnes suivirent son enterrement à Fécamp le 6 juillet 1927. Marie Bréant de la CGTU et Renaud Jean du Parti communiste prononcèrent des discours. La cellule communiste de Fécamp prit plus tard son nom.

Albert Lepez, qui joua un rôle syndical important lors des grèves de marins de Fécamp dans les années 1920, quitta ensuite la ville pour aller diriger une école de sténo-dactylo à Besançon. L’Humanité du 30 juin 1926 publia, dans la rubrique « La vie du Parti », une lettre de lui sur la propagande par le théâtre. Il mourut à Besançon en 1955.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article117929, notice LEPEZ Adrien, Ernest, et LEPEZ Albert, Georges par Jean Sagnes, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 16 janvier 2018.

Par Jean Sagnes

Albert Lepez
Albert Lepez
Encyclopédie socialiste, t. III, p. 187.

ŒUVRE : Ernest Lepez, Monographie de la Seine-Inférieure, Imprimerie coopérative, Rouen, 1921, 63 p. — Le Communisme en Seine-Inférieure.

SOURCES : Arch. Nat. F7/13091, F7/1358. — Arch. Dép. Seine-Inférieure, 1 MP 587, 4 MP 2604. — Bibliothèque marxiste de Paris, microfilm 30, 64, 209 et 278 (Jacques Girault). — Le Combat social, 1908-1910. — Le Devoir socialiste, 1909-1910. — Le Prolétaire normand, 1926-1927. — Le Travailleur d’Eure-et-Loir, 14 octobre 1922. — Le Travailleur, 9 juillet 1927. — Comptes rendus des congrès socialistes. — Hubert-Rouger, Les Fédérations socialistes II, op. cit., pp. 187, 588 à 603, passim. — Témoignages de Mme Fabre (fille d’Ernest Lepez) et d’Ernest Coste, ancien maire de Bessan. — État civil.

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