LEROY Maxime, Auguste

Par Nicole Racine

Né le 28 mars 1873 à Paris, mort le 15 septembre 1957 à Paris ; juriste, professeur ; historien social.

Maxime Leroy était fils de Léon Leroy, critique musical. « Sans appartenir à aucune école socialiste ni à aucun parti, et sans être d’origine ouvrière, Maxime Leroy est le premier juriste et sociologue français qui se soit intéressé à fond au syndicalisme naissant, qui l’ait étudié avec une ardente sympathie compréhensive et qui lui ait consacré des ouvrages désormais indispensables à l’intelligence de ce grand fait social contemporain » écrit Boris Souvarine* dans l’hommage posthume qu’il lui rendit.

Maxime Leroy fit ses études de droit à Nancy, ville dans laquelle il fonda une Université populaire. Il eut très tôt comme juriste la conscience de son rôle social (il avait adressé au Temps une lettre à la suite d’un jugement du président Magnaud au sujet d’une femme qui avait volé du pain pour nourrir son enfant). Attiré par l’action judiciaire, il devint en 1908 juge de paix à Colombes, fonction qu’il exerça pendant trente-cinq ans dans la banlieue parisienne puis à Paris. Il eut une action conciliatrice à ce poste qui lui semblait être un poste d’écoute privilégié pour l’observateur social.

Sans être lui-même un militant, Maxime Leroy sympathisait avec de nombreux syndicalistes. Ami de Victor Griffuelhes* qui fut secrétaire général de la CGT jusqu’en 1908, il assista au congrès d’Amiens en 1906 et suivit l’élaboration de la Charte d’Amiens (« j’en ai revu avec eux bien des brouillons, bien des épreuves » écrivit-il dans un article consacré à Griffuelhes et Merrheim) dont il donna un remarquable commentaire dans La Coutume ouvrière. Il était particulièrement lié à Alphonse Merrheim* avec lequel il entretint une longue correspondance. En 1907, il montra la force croissante du syndicalisme dans Les Transformations de la puissance publique ; en 1909 paraissait Syndicats et Services publics. Avec La Coutume ouvrière (1913) qui allait devenir un classique, Maxime Leroy décrivait le droit né de l’action ouvrière ; il avait voulu, écrivit-il, « tenter l’œuvre nouvelle d’une systématisation de la pratique syndicale actuelle, qui s’est développée librement, en dehors de la loi » et entreprendre « une explication descriptive de la coutume ouvrière, selon la méthode générale proposée par la nouvelle sociologie qui s’est mise à l’école de l’Histoire ». Après la guerre de 1914-1918, il décrivit avec perspicacité les « tendances nouvelles du syndicalisme » selon le titre d’un de ses ouvrages, et considéra particulièrement l’avènement du syndicalisme fonctionnaire. Maxime Leroy regarda avec curiosité l’expérience révolutionnaire russe et préfaça la traduction française du livre de H.-G. Wells, La Russie telle que je viens de la voir ; il s’y montrait d’ailleurs plus près de Jean Jaurès* que de Lénine.

Maxime Leroy s’intéressa aux doctrines sociales ; il écrivit plusieurs livres sur Saint-Simon et le saint-simonisme. Il entreprit une monumentale Histoire des idées sociales en France en trois tomes qui resta inachevée. Il s’intéressa aux idées politiques et sociales de Descartes, Stendhal, Taine, Sainte-Beuve (il édita les œuvres complètes de ce dernier dans la collection La Pléiade). Il donna une édition critique de De la capacité politique des classes ouvrières de P.-J. Proudhon.

En 1938, Maxime Leroy fut appelé à l’École libre des sciences politiques à succéder à Élie Halévy. À côté du cours qu’il y professa de 1938 à 1949, il organisa, rue Saint-Guillaume, un séminaire où il invita des syndicalistes, des écrivains. En 1954, il fut élu à l’Académie des sciences morales et politiques.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article118142, notice LEROY Maxime, Auguste par Nicole Racine, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 16 août 2022.

Par Nicole Racine

ŒUVRE CHOISIE : Le Droit des fonctionnaires, 1906, 195 p. (Ligue française pour la Défense des droits de l’Homme et du citoyen). — Les Transformations de la puissance publique. Les syndicats de fonctionnaires, Giard et Brière, 1907, 288 p. — Syndicats et services publics, A. Colin, 1909, XII-324 p. — La Coutume ouvrière : syndicats, bourses du travail, fédérations professionnelles, coopératives, doctrines et institutions, Giard et Brière, 1913, 2 vol., 935 p. — L’Alsace et la Lorraine, porte de France et porte d’Allemagne, Ollendorff, 1914, XII, 279 p. — La Société des Nations, l’ère Wilson, Giard et Brière, 1917, III, 241 p. — Les Techniques nouvelles du syndicalisme, M. Rivière, 1921, 211 p. — Préface à H.-G. Wells, La Russie telle que je viens de la voir, Éd. du Progrès civique, 1921, XXXII-171 p. — Vers une république heureuse, id., 1922, XV-380 p. — Le Socialisme des producteurs. Henri de Saint-Simon, M. Rivière, 1924, XIX-195 p. — La Vie véritable du Comte Henri de Saint-Simon, Grasset, 1925, 339 p. — Fénelon, Alcan, 1928, 118 p. — Stendhal politique, Le Divan, 1929, 67 p. — Descartes, le philosophe au masque, Rieder, 1929, 2 vol., 203, 192 p. — Descartes social, Vrin, 1931, XL-74 p. — La Société des Nations. Guerre ou paix ? Pedone, 1932, 239 p. — Taine, Rieder, 1933, 222 p. — Introduction à l’art de gouverner, Sirey, 1935, 219 p. — Les Tendances du pouvoir et de la liberté en France au XXe siècle, Recueil Sirey, 1937, 167 p. — « Griffuelhes et Merrheim », l’Homme réel, n° 40, avril 1937. — La Pensée de Sainte-Beuve, Gallimard, 1940, 251 p. — La politique de Sainte-Beuve, id., 1941, 291 p. — Le Socialisme en Europe des origines à nos jours, Centre de documentation universitaire, 1943, 366 p. — Vie de Sainte-Beuve, Janin, 1947, 206 p. — Le Socialisme, 3 vol., Université de Paris, Institut d’études politiques, 1946-1947. — Histoire des idées sociales en France, Gallimard, 3 vol. : 1. De Montesquieu à Robespierre, 1946, 392 p. ; 2. De Babeuf à Tocqueville, 1950, 551 p. ; 3. D’Auguste Comte à P.-J. Proudhon, 1954, 398 p. — Les Précurseurs français du socialisme. De Condorcet à Proudhon, Temps présent, 1948, 448 p.
On y ajoutera les éditions critiques suivantes : P.-J. Proudhon, De la capacité politique des classes ouvrières, Rivière, 1924, 423 p. (dans la nouvelle édition des œuvres complètes de P.-J. Proudhon, sous la direction de C. Bouglé et H. Moysset). — Sainte-Beuve, œuvres complètes, Gallimard, 1949, 1951, 1224 et 1561 p. (Bibl. de la Pléiade).

SOURCES : Hyacinthe Dubreuil, « Maxime Leroy et la classe ouvrière », Le Contrat social, novembre 1957. — Maxime Leroy. In memoriam, G. Lang, 1958, 45 p. (notamment B. Souvarine, « Maxime Leroy, écrivain social). — Édouard Bonnefous, Notice sur la vie et les travaux de Maxime Leroy, 1973-1957, Académie des Sciences morales et politiques, séance du 2 mars 1959, Impr. Firmin-Didot, 1959, 22 p. — G. Lefranc, Le mouvement syndical sous la Troisième République, Payot, 1967, 452 p. — René Mouriaux, « La Charte d’Amiens a 70 ans », Études, octobre 1976, p. 361-372. — Jean-Claude Drouin, « Maxime Leroy et le syndicalisme », colloque de Nérac, 2006. — Chatriot Alain, « Maxime Leroy, la réforme par le syndicalisme », Mil neuf cent, n° 24, 2006 : Le syndicalisme révolutionnaire. La charte d’Amiens a cent ans, p. 73-94.

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