Par Justinien Raymond
Né le 18 décembre 1884 à Paris, mort le 3 mai 1964 à Paris ; professeur de l’enseignement supérieur dans les facultés de droit ; militant socialiste.
Dans son orientation universitaire comme dans ses options politiques, Henri Lévy-Bruhl est bien le fils de Lucien Lévy-Bruhl. Ce dernier, né à Paris le 10 avril 1857, devait y mourir en mars 1939. Il avait subi l’influence du père de la sociologie Émile Durkheim et en devint, à son tour, un des maîtres, en même temps qu’un philosophe et un anthropologue de réputation mondiale. Il avait accompli son œuvre tout en prodiguant son enseignement à la Sorbonne.
Lucien Lévy-Bruhl avait connu Jean Jaurès à l’École normale supérieure et ils se lièrent d’une amitié indéfectible. Tous deux étaient alors fervents républicains et si Lucien Lévy-Bruhl ne donna jamais son adhésion au Parti socialiste, il adhéra sincèrement à l’idée, sans doute par attachement à Jean Jaurès, mais aussi à la faveur du combat dreyfusard, dans lequel il s’engagea dès les premiers jours. Il participa à la fondation de la Ligue des droits de l’Homme et du citoyen. En avril 1904, Lucien Lévy-Bruhl participa également à la fondation de l’Humanité. Il était l’un des dix-huit actionnaires de la Société anonyme du journal dissoute à la fin de l’année 1906 en sa présence et celle de Jean Jaurès. Sa contribution à hauteur de 100 000 francs fut violemment mise en cause par Charles Rappoport lors du huitième congrès du Parti socialiste unifié (Saint-Quentin, 16-19 avril 1911) qui l’accusa d’avoir servi de prête-nom à la banque Rothschild. Son intervention s’inscrivait dans un contexte où la vénalité de la presse comme les propos antisémites étaient largement répandus.
En 1907, Henri Lévy-Bruhl participa à l’augmentation du capital de la Société nouvelle du journal l’Humanité, souscrivant quatre actions d’une valeur de 25 francs en faveur quotidien socialiste. Son père souscrivit quant à lui 28 actions.
Henri Lévy-Bruhl fut reçu au concours de l’agrégation de droit en 1919. Sa carrière professorale se déroula à la faculté de Lille, puis à celle de Paris où, de 1930 à 1958, il enseigna le droit romain. Ses travaux portent la marque d’une double orientation, due à sa formation d’historien du droit mais aussi à la large culture sociologique qu’il tenait de son père. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, il fonda et dirigea l’Institut de droit romain de l’université de Paris, dont il fit un centre actif de rencontres internationales.
Henri Lévy-Bruhl, à la différence de son père, était membre du Parti socialiste SFIO. Adhérent, sans ambitions électorales ou autres, il était attaché à la vie idéologique du parti. Il y participa activement, après la Seconde Guerre mondiale, comme membre du comité de rédaction et d’administration de la Revue socialiste, publiée sous l’égide du parti. Il y collaborait aussi assidûment, notamment sur les questions touchant aux problèmes de droit. Par une lettre du 17 juin 1954, publiée dans le n° 79 de juillet 1954 de cette revue, Henri Lévy-Bruhl donna sa démission du comité de rédaction, en compagnie du directeur de la revue, Ernest Labrousse et de six autres membres des comités de rédaction ou de patronage. Le Parti socialiste SFIO venait de se rallier à la Communauté européenne de défense et Henry Lévy-Bruhl ne voulait pas, si peu que ce soit, cautionner un choix qu’il réprouvait.
Il devait mourir quelques années plus tard en état de divorce idéologique avec la SFIO.
Par Justinien Raymond
SOURCES : Compère-Morel, Grand Dictionnaire socialiste, p. 477. — Marie Gramet, " Lucien Lévy-Bruhl, socialiste ", Revue socialiste, n° 110, octobre 1957. — Le Monde, 11 avril 1957, 5 mai 1964. — Arch. Lavoignat — Alexandre Courban, L’Humanité : de Jean Jaurès à Marcel Cachin (1904-1939), Éditions de l’Atelier, Ivry-sur-Seine, 2014.