LEYMARIE Michel, Henri, Joseph

Par Jacques Girault, Jean Maitron, Claude Pennetier

Né le 22 septembre 1904 à Aurillac (Cantal), mort le 14 décembre 1986 à Aurillac ; instituteur ; militant syndicaliste du SNI ; militant communiste dans le Cantal, adjoint au maire d’Aurillac.

Michel Leymarie
Michel Leymarie

Fils d’un tailleur de pierre devenu contremaître et d’une femme de ménage, Michel Leymarie reçut les premiers sacrements catholiques. Tour à tour berger (1916), apprenti typographe (1918), employé dans l’entreprise de son père (1919), élève du cours complémentaire d’Aurillac, il entra à l’École normale d’instituteurs d’Aurillac en 1920. Il exerça dans diverses localités du Cantal, Trémouille, Maurs (1928), Saint-Flour, Vieillespesse, Saint-Hippolyte, Bassignac (1936), Saint-Jacques-des-Blats (où il fut aussi secrétaire de mairie) avant d’être nommé, en 1958, à l’école Paul Doumer et au cours complémentaire, puis professeur au collège d’enseignement général d’Aurillac.

Michel Leymarie effectua son service militaire dans l’infanterie. Il suivit l’école des officiers de réserve et devenu lieutenant de réserve, fut révoqué pour « antimilitarisme » en 1934.

_Membre du Syndicat national des instituteurs à partir de 1924, il fut l’un des fondateurs du groupe de Jeunes et en fut le secrétaire de 1927 à 1930. Ces jeunes instituteurs créèrent la section départementale du Syndicat des membres de l’enseignement laïc, affilié à la Fédération CGTU de l’Enseignement. Il appartint à son conseil à partir de 1927, puis exerça les fonctions de secrétaire de 1932 à 1935. Toutefois, toujours membre de la section départementale du SNI, il fut délégué du Cantal aux congrès nationaux des Groupes de Jeunes jumelés avec ceux de la Fédération unitaire de l’Enseignement (1927, 1928, 1929). Il était le correspondant départemental de l’Internationale des travailleurs de l’Enseignement. Après la fusion de 1936, il milita au Syndicat national des instituteurs, fut membre du conseil syndical de la section départementale, secrétaire à l’éducation sociale en 1937.

Michel Leymarie se maria uniquement civilement en avril 1930 à Vieillespesse, avec Jeanne Buchon, institutrice syndiquée, future communiste et résistante. Le couple eut deux enfants.

Membre du Parti communiste depuis 1927 (en fait, il donnait plusieurs dates d’adhésion mais précisait qu’il avait adhéré à Maurs, influencé par l’instituteur communiste Louis Escuroux, d’où en 1928-1929), il créa la section communiste de Champagnac en 1936. Il appartint au comité du rayon communiste, puis au comité et au bureau de la région Auvergne (octobre 1936), responsable à l’organisation. Il contribua à la création de l’hebdomadaire communiste le Cantal ouvrier et paysan en 1936 et en assura la direction-rédaction. En 1937, trésorier de la cellule communiste de Saint-Jacques-des-Blats, secrétaire adjoint de la région communiste du Cantal, après la grève du 30 novembre 1938, il reprocha au secrétaire régional, un postier, de ne pas avoir fait grève et fut rétrogradé du bureau au comité régional en 1939. Mais il y avait d’autres raisons : opposition avec la majorité des militants du bureau régional sur les questions de la guerre et des relations avec le syndicalisme. D’autre part, il ne partageait pas le point de vue de la direction justifiant la lutte contre les trotskistes, et en 1937 écrivait son autobiographie, « à force de voir partout des trotskistes on finit par les créer". En effet, dans le rapport sur le trotskisme remis au bureau politique, le 28 juillet 1938, les auteurs considéraient que dans les différentes biographies remplies, les réponses données par Leymarie étaient « insuffisantes ». Il avait déclaré avoir été le premier à lutter contre Escuroux, mais continuait à entretenir de relations avec un militant qu’il présentait lui-même comme « trotskiste-ferratiste ». D’autre part, peu de temps avant, l’envoyé de la direction du Parti communiste constatait que Leymarie, malgré un accord passé avec la fédération socialiste, continuait dans ses articles du Cantal ouvrier et paysan à « égratigner » Léon Blum, ce qui n’était pas compris des militants qui espéraient beaucoup d’une union de la gauche.

Candidat sans succès aux élections municipales d’Aurillac en mai 1935, Michel Leymarie se présenta au conseil général dans le canton de Saignes, en octobre 1937. Il obtint 206 voix (9,36 % des suffrages exprimés) alors que le candidat socialiste, le docteur Basset, en réunissait 1 498 (68,09 %).

Secrétaire du comité de Front populaire de l’arrondissement de Mauriac, il participa à la réorganisation du syndicat des mineurs de Champagnac à la veille de leur grève de 1936 et à la constitution de syndicats d’ouvriers agricoles. Il fut gréviste, comme son épouse, le 30 novembre 1938. Ils furent sanctionnés de huit jours de retenue de salaire.

Parallèlement, il faisait œuvre d’historien et son histoire de la Révolution française dans le Cantal fut publiée en feuilleton dans le Cantal ouvrier et paysan, en 1939.

Mobilisé jusqu’en février 1940 comme soldat de deuxième classe, Michel Leymarie participa à une réunion clandestine communiste en août 1940. Arrêté le 14 octobre 1940, pour conserver son traitement, il écrivit à l’inspecteur d’Académie « qu’il n’appartenait plus au parti depuis sa dissolution ». Suspendu par arrêté ministériel du 5 novembre, admis à la retraite proportionnelle, emprisonné à Aurillac, à Mons (Puy-de-Dôme) en novembre 1940, au centre de séjour surveillé de Nexon (Haute-Vienne) en janvier 1941, il fut transféré, en avril 1941, en Algérie (camps de Djelfa et de Bossuet). A la suite d’une intervention faite en sa faveur par un commerçant auprès du gouvernement pour qu’il vienne soigner son épouse, il signa en 1942 une demande de libération, mais précisa plus tard en 1944, dans le questionnaire biographique du Parti communiste français, "je n’ai jamais signé de déclaration de fidélité à Pétain". Après le débarquement, libéré, le 3 juin 1943, il réintégra l’enseignement à Oran, après avoir travaillé dans un atelier d’artillerie, occupa les fonctions de secrétaire adjoint du syndicat des instituteurs de l’arrondissement d’Oran et de membre de la commission exécutive de l’union locale CGT d’Oran, responsable de la commission juridique et rédacteur de Travail.

Les dirigeants du Parti communiste à Alger cherchèrent à le faire revenir en France. Il indiqua, en décembre 1943, qu’il ne se sentait pas « capable de vivre la vie du militant clandestin » dans une France occupée. A Oran, il dirigea une cellule de quartier tout en étant professeur du cours politique à l’école de cadres du Parti, regroupant les membres du Parti communiste algérien et des militants métropolitains sortis des camps. Instructeur pour le tirage des journaux communistes, il représenta le Parti communiste, le 14 juillet 1944 au rassemblement de la France combattante à Mers-el-Kébir, dans un meeting d’Oran avec 4000 musulmans, puis en août, à l’inauguration du square Gabriel Péri à Arzew. A partir de novembre 1944, il demanda à plusieurs reprises à regagner la France, ce qui finalement se produisit en décembre.

Michel Leymarie fut immédiatement intégré dans le secrétariat de la fédération communiste du Cantal. Mais peu après, cette responsabilité dirigeante fut remise en cause par la direction du PCF qui demandèrent, en raison des « faiblesses » constatées en Algérie. Sa remise à la base fut demandée. Il accepta cette sanction par lettre le 2 février 1945 tout en la trouvant « exagérée » mais en ajoutant, « je ne crois pas que vous puissiez vous passer complètement d’un militant catalien qui connaît parfaitement son petit pays ». Reconnaissant qu’il avait, comme d’autres militants, connu « un instant de fatigue » et « quelque fois flanché », plutôt que d’être « rejeté à la base », il demanda au comité central « de reconsidérer mon affaire dans l’intérêt de la région du Cantal ». Cette sanction fut annoncée dans Le Cantal ouvrier et paysan au début de 1945 qui publia aussi son communiqué où il acceptait cette sanction. Toujours directeur de l’hebdomadaire communiste, il composa, après les élections, un article leader, le 27 octobre sous le titre "L’avènement du communisme" signé par le bureau fédéral. Il fut critiqué pour avoir laissé supposer qu’il envisageait une « montée au pouvoir ». Il s’en défendit indiquant qu’il n’entendait que « venue » ou « arrivée » du communisme. André Marty, notamment, exigea des rectifications pour retrouver une ligne juste.

Il ne fut pas renouvelé au comité fédéral par la conférence fédérale de 1946. Par la suite, son activité militante continua : comité de la section communiste d’Aurillac, administration et rédaction du Cantal ouvrier et paysan, trésorier de cellule, orateur dans les réunions publiques du Parti sur la résistance, condamnation à 10 000 francs d’amende en 1950 par le Tribunal correctionnel pour « voie de fait à agent » lors d’une manifestation à Aurillac contre la saisie du journal. Mais proposé comme candidat par la fédération au Conseil de la République en 1948, il fut récusé par le secrétariat du PCF comme trois ans plus tard pour une candidature au Conseil général.

Après avoir montré une grande fermeté lors des discussions qui traversèrent la vie du PCF (affaires Marty, Lecœur, 1956, culte de la personnalité), Michel Leymarie réintégra progressivement la direction fédérale comme membre de la commission fédérale de contrôle financier en 1956, puis entra au bureau fédéral en 1959 jusqu’en 1970, responsable des questions culturelles à partir de 1964. Il redevint en 1970 membre et président de la commission de contrôle financier, responsabilité qui cessa à sa demande en 1979.

Devenu secrétaire adjoint de la section départementale du Cantal du SNI de 1945 à 1948, il milita également à la FEN-CGT jusqu’en 1954, puis fut membre du bureau de la section du SNI : en tant que trésorier adjoint, il était le responsable de la caisse de solidarité et de la défense laïque. Il fut élu, dans cette période, à la commission administrative paritaire départementale. Il était en outre membre du conseil d’administration de la Fédération des œuvres laïques.

Michel Leymarie se présenta aux élections législatives dans la première circonscription (Aurillac) en 1967 : il obtint 6 621 voix sur 56 398 inscrits et se désista au second tour pour le candidat socialiste. En 1968, il obtint 6 926 voix sur 57 014 inscrits et se désista à nouveau pour le candidat de gauche. En 1973, l’ancien équilibre se modifia ; il obtint, sur 59 412 inscrits, 9 532 voix au premier tour et 14 795 le dimanche suivant, la presse remarquant qu’il ne réunissait pas l’ensemble des voix de gauche du premier tour.

Il fut aussi candidat au Conseil général dans le canton Aurillac-Nord en avril 1958 (660 voix sur 4 048 suffrages exprimés), puis en 1964, en 1970, en 1973 dans le canton Aurillac-Sud où il habitait.

Élu conseiller municipal communiste d’Aurillac en octobre 1947, responsable du groupe communiste, Leymarie fut réélu jusqu’en 1983 et fut adjoint au maire, chargé de l’enseignement et des affaires culturelles, de 1965 à 1971. Pour les élections municipales de 1971, il conduisait la liste communiste ce qui était une innovation, selon la presse, le secrétaire fédéral prenant d’habitude la tête de la liste. Pour celles de 1977, il figurait en cinquième position sur la liste des candidats communistes.

Administrateur de la société « La Haute Auvergne », Leymarie fut un des initiateurs et des réalisateurs de l’exposition « Aurillac, dix siècles de son histoire ». Il poursuivit ses recherches d’histoire locale sur la période révolutionnaire, en relations avec Albert Soboul* (articles dans la Revue de la Haute-Auvergne et dans les Annales historiques de la Révolution française notamment). La société de la Haute Auvergne préparait, en 2011, une réédition de ces articles.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article118464, notice LEYMARIE Michel, Henri, Joseph par Jacques Girault, Jean Maitron, Claude Pennetier, version mise en ligne le 24 novembre 2010, dernière modification le 3 mai 2021.

Par Jacques Girault, Jean Maitron, Claude Pennetier

Michel Leymarie
Michel Leymarie

ŒUVRE : Les débuts du mouvement ouvrier et les premières fêtes du travail à Aurillac, préface de Serge Mazières, sd, Aurillac, 25 p. — Nombres de ses études ont été rassemblées en deux tomes par la société La Haute Auvergne en 1993. — Collaboration aux Annales historiques de la Révolution françaises.

SOURCES : Arch. Nat. F7/13310. — Arch. Dép. Cantal, 4 M, fonds M. Leymarie. — RGASPI, 517 1 1815, 1863, 1884, 1891, 1908. — Presse locale et nationale. — DBMOF, notice par J. Girault, J. Maitron et Cl. Pennetier.— Notes d’A. Ganne. — Renseignements fournis par l’intéressé, son épouse, son fils et Louis Taurant.

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