MALBERG Henri

Par Claude Willard

Né le 26 janvier 1930 à Paris (XXe arr.), mort le 13 juillet 2017 à Paris ; pareur de peaux, puis fraiseur ; dirigeant parisien et national de l’UJRF (1952-1961) ; secrétaire politique de Waldeck Rochet* (1961-1965) ; conseiller municipal du XXe arr. (1965) ; membre du Comité central du PCF à partir de 1972 ; directeur adjoint de France Nouvelle (1976-1979) ; premier secrétaire de la fédération communiste de Paris (1979-1995) ; président du groupe communiste du conseil municipal depuis 1989 ; directeur de Regards dès sa création en avril 1995.

Henri Malberg
Henri Malberg

Henri Malberg était le fils unique de deux juifs polonais, Ignace Malberg, artisan pareur de peaux, et Fanny Szwizgold, immigrés en 1919 et 1928. "Ils étaient de gauche et absolument pas religieux."

La scolarité d’Henri Malberg fut brusquement arrêtée, avant son entrée en sixième, par la rafle du Vél-d’Hiv, le 16 juillet 1942. Assistant à l’arrestation de plusieurs voisins, les Malberg — qui portaient tous trois l’étoile jaune — quittèrent précipitamment leur logement. Cachés durant un mois dans l’atelier des Fiszbin (voir Henri Fiszbin, ils franchirent la ligne de démarcation. Trahis par leur passeur, ils furent sauvés par un paysan et trouvèrent refuge en Touraine. Mais, en février 1943, les gendarmes cueillirent la famille, qui fut internée dans le camp de Douadic (Indre).

En septembre 1944, les Malberg regagnèrent Paris. Henri Malberg, qui se souvient avoir été politisé dès cette époque, travailla chez son père comme pareur de peaux (1944-1948). Baignant dans l’atmosphère de la Libération, Henri Malberg adhéra, en octobre 1944, à la JC, rue de Belleville, et fut, au début de 1945, chargé, dans son cercle de la diffusion de L’Avant-Garde. En octobre 1946, il suivit une école élémentaire de section et accéda à la direction de l’UJRF du XIXe arr. Très actif, il fut, à l’automne 1949, condamné à un mois de prison avec sursis pour s’être couché devant des cars de police, place des Fêtes, lors d’une manifestation contre la guerre d’Indochine.

Après avoir suivi une formation professionnelle, Henri Malberg devint fraiseur chez Richard (XIXe arr.), à la SNCASE (La Courneuve) et à la SOMUA (Saint-Ouen). Deux années (1948-1950) décisives pour la formation militante d’Henri Malberg, dans ce milieu fort combatif et solidaire des métallos de la région parisienne.

Mobilisé, en avril 1950, au 5e régiment d’infanterie à Coblence, puis dans une école de sous-officiers à Strasbourg, Henri Malberg continua à militer, distribuant des tracts et faisant signer l’Appel de Stockholm.

Le 8 mars 1952, Henri Malberg se maria avec Francine Barillet, Bellevilloise de souche. Le couple eut deux enfants : Joëlle (1955) et Christine (1958).

Henri Malberg devint permanent en avril 1952, lorsqu’il fut élu au secrétariat de l’UJRF de la Seine (premier secrétaire : Paul Laurent). Le 28 mai 1952, lors de la manifestation contre Ridgway, il fit partie, avec Madeleine Vincent et André Voguet, du « triangle » dirigeant le puissant défilé de l’Odéon. D’octobre 1953 à février 1954, Henri Malberg suivit l’école centrale du PCF de quatre mois.

De 1952 à 1961, Henri Malberg, à la direction parisienne de l’UJRF, puis de la JC, participa à de nombreuses luttes : contre la guerre froide, contre les guerres coloniales (Indochine, Algérie), contre le putsch d’Alger et la mise en place du régime gaulliste. Il fit partie, à l’automne 1952, d’une des toutes premières délégations françaises en Chine populaire — une délégation unitaire de la Jeunesse —, délégation qui fut reçue par Mao Tsé-toung. Henri Malberg contribua aussi à l’organisation de plusieurs Festivals de la Jeunesse.

En 1961, Henri Malberg devint secrétaire politique de Waldeck Rochet, son plus proche collaborateur. En même temps, il dirigea la section du XXe arr. et fut élu, le 24 juin 1962, au comité fédéral de Paris (dont il avait déjà été membre en 1956-1957).

Élu conseiller municipal du XXe arr., en mars 1965, Henri Malberg demanda à être déchargé du secrétariat de Waldeck Rochet. Il fut élu, le 11 décembre 1966, au bureau de la fédération communiste de Paris, chargé du secteur des intellectuels. Poste passionnant en cette époque de bouillonnement, marquée notamment par le CC d’Argenteuil. En mai 1968, Henri Malberg dirigea l’activité du PCF au Quartier latin, y passant jours et nuits. Il demeura secrétaire de la section communiste du Ve arr. de 1968 à 1972.

Henri Malberg fut élu membre suppléant du CC au XXe congrès (décembre 1972) et demeura membre de cet organisme jusqu’à nos jours. Il fut d’abord affecté, avec René Piquet, à la section de propagande. En mai 1976, il remplaça Francette Lazard comme directeur-adjoint de France Nouvelle. Dans cet hebdomadaire, où régnait une certaine liberté de ton, Henri Malberg se sentit à la fois marteau et enclume.

En mars 1979, en pleine « affaire Fiszbin », Henri Malberg remplaça Henri Fiszbin (qui était d’ailleurs un de ses cousins), comme premier secrétaire de la fédération de Paris. Il quitta ce poste en mars 1995, lors de la création de Regards, dont il fut le directeur.

Henri Malberg fit, lors de congrès nationaux du PCF, plusieurs interventions. La première au XXIIIe congrès (février 1976), « Socialisme et démocratie », critiquant la répression qui sévissait dans les pays de l’Est, eut un fort écho dans la presse ; au XXIVe congrès (février 1982), il revint sur la crise Fiszbin (« Sur deux problèmes actuels : l’appréciation de la situation, le centralisme démocratique ») ; au XXVIe congrès (décembre 1987), il intervint sur l’élection présidentielle (« Pas de vote plus fort, plus clair, contre la droite arrogante et le patronat, que le vote communiste »)... Dans Les Cahiers du Communisme de mars 1991, un article d’Henri Malberg se terminait ainsi : « La mutation est en cours. Pour rester soi-même, certes. Mais une mutation quand même ».

Conseiller municipal de son arrondissement natal, le XXe arr., depuis 1965 (sauf de 1974 à 1983), président depuis 1989 du groupe communiste, Henri Malberg mena l’essentiel de ses combats contre la spéculation régnante : la « rénovation » de Belleville, l’opération Italie... Avec une attention pour que le XXe arr. puisse sauvegarder son caractère populaire, sa diversité, sa capacité d’intégration d’habitants venus de divers horizons. Sous son impulsion, le groupe communiste du Conseil de Paris, pratiquement seul durant une période, développa une conception de la capitale fondée sur la diversité et la mixité. Il s’opposa frontalement à l’évolution de Paris vers un centre financier, commercial et touristique de standing, avec l’idée « Paris devenue Venise ne serait plus la capitale de la France », Paris ne devant pas devenir un centre spécialisé entouré d’une banlieue servante. Donc, diversité des fonctions, des activités et de population, lutte contre la désindustrialisation et les expulsions.

Avec Georges Sarre et Bertrand Delanoë, Henri Malberg dirigea la campagne des élections municipales de 1995, qui permirent le basculement à gauche de six des mairies parisiennes.

En 1995, Henri Malberg fut à l’initiative de la reparution du journal communiste Regards. La même année, il manifesta avec son écharpe d’élu en tête de cortège de la gaypride contre l’homophobie.

Avec plusieurs anciens déportés, parmi lesquels Léon Ziguel, Jo Nissenman et Jacques Grimberg, ainsi que deux enseignants du XXe arrondissement de Paris – Pierre Cordelier et Catherine Vieu-Charier –, Henri Malberg co-fonda en 1997 le comité Tlemcen, dont l’objectif fut de collecter les noms des enfants juifs déportés durant l’Occupation. Ce travail permit ultérieurement apposition de plaques commémoratives dans chaque école de l’arrondissement. La première, apposée à l’entrée de l’école de la rue Tlemcen, se fit en présence de Geneviève Anthonioz-De Gaulle et de Michel Charzat, alors maire du XXe arrondissement.

En 2000, Henri Malberg devint responsable de la commission Justice du Parti communiste. Dans ce cadre, il travailla sur la question des prisons, des conditions de détention et du sort des détenus. Il participa à la campagne qui, dans le même temps, se préoccupa du sort des anciens d’Action directe et des indépendantistes basques.

Un an plus tard, il prit la présidence de la société des lecteurs et lectrices de l’Humanité. En 2007, il ajouta à cette responsabilité la présidence de Ciné Archives, association qui gère les œuvres audiovisuelles portant sur le monde ouvrier.

Personnalité très populaire du PCF en raison de sa personnalité souriante, réactive, devenu membre du groupe de travail sur la mémoire du Parti communiste, il publia deux ouvrages, en 2008 et 2014, qui furent pour lui l’occasion de revenir sur son parcours militant et de poser ses jalons pour l’avenir du parti.
Mort le 13 juillet 2017 à Paris, un hommage lui fut rendu au siège du Parti communiste le 8 novembre.
Une place du XXe arr. prit son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article119679, notice MALBERG Henri par Claude Willard, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 7 juin 2021.

Par Claude Willard

Henri Malberg
Henri Malberg

ŒUVRE : De nombreux articles et éditoriaux (surtout dans France Nouvelle et Regards). Il collabora à l’ouvrage Le Théâtre hors les murs. — Parce que le Parti communiste a un avenir, Le Temps des cerises, 2008, 166 p. — Incorrigiblement communiste, Les Éditions de l’Atelier, 2014.

SOURCES : Arch. du comité national du PCF. — Henri Fiszbin, Les bouches s’ouvrent, Grasset, 1980. — Interview (1998). – Dominique Vidal, Les bouches s’ouvrent, Agone, 2003. – Entretiens dans plusieurs documentaires : Le Camp de Douadic, Charonne, Camarades. – Renseignements communiqués par l’intéressé. – Notes de Julien Lucchini. —Le Monde, 19 juillet 2017. — Libération, 18 juillet 2017.

Filmographie : Ciné Archives (on y voit Henri Malberg animer une réunion de jeunes syndiqués).

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