Par Justinien Raymond, Marcel Henriot
Né le 2 janvier 1875 à Paris, mort le 13 septembre 1944 à Chaumont (Haute-Marne), professeur d’histoire et géographie au lycée de Chaumont ; secrétaire de la Fédération socialiste de la Haute-Marne ; syndicaliste et coopérateur.
Admissible à l’agrégation d’histoire et de géographie, Louis Mann était professeur au lycée de Vitry-le-François (Marne) quand la mort soudaine de Charles Gros le fit nommer en la même qualité à Chaumont où il enseigna du 22 janvier 1906 au 30 septembre 1935.
Il prit aussi, au sein de la section socialiste de Chaumont, la place de Charles Gros, s’y lia avec son collègue Henri Focillon et collabora à ses côtés à la fondation et à la vie de l’université populaire. Il siégea à son comité d’organisation et donna, sous ses auspices, trois conférences sur les partis politiques sous la Révolution.
Il fut aussi, avant 1914, le président de la section chaumontoise de la Ligue des droits de l’Homme. Mobilisé pendant toute la guerre, Louis Mann n’agira à nouveau sur la scène chaumontoise qu’à la paix.
Dès sa démobilisation, Louis Mann reprit l’activité politique qu’il avait amorcée avant la guerre de 1914. Aux élections municipales de novembre 1919, il figura en second sur la liste présentée par le Parti socialiste SFIO. Il accepta de faire alliance avec les radicaux-socialistes pour le second tour et fut porté sur la liste de "concentration à gauche" avec cinq autres socialistes. Quelques jours après, il fut élu deuxième adjoint suivant les accords conclus avec les radicaux-socialistes. Mann continua à être un membre influent parmi les socialistes haut-marnais. Secrétaire de la Fédération socialiste haut-marnaise pendant quelque temps, il fut contraint de donner sa démission quand il se sentit en désaccord avec la majorité de cette section au sujet de l’adhésion à la IIIe Internationale, il fut alors remplacé par Franconin.
Il reprit sa place dès qu’une section socialiste fut réorganisée à Chaumont. Paul Évrard lui demanda de présider la grande réunion du 22 novembre 1924, veille du jour du transfert des cendres de Jaurès au Panthéon. Mann présenta en fin de séance un ordre du jour saluant la mémoire de Jaurès "guide éclairé du socialisme, apôtre de l’humanité, et martyr de la paix".
L’activité de Mann fut d’ailleurs très diverse. La coopération l’attirait. On le vit assister Billon à la conférence coopérative du 16 mai 1920 où prirent la parole Thomas, secrétaire adjoint de la Fédération nationale des coopératives et Alice Jouenne. A l’assemblée générale de la coopérative chaumontaise "L’Avenir" du 22 octobre 1920, il se fit, avec Billon, le défenseur de l’idée de coopération. Il expliqua que "si l’Avenir entendait fermer sa porte à certaines classes sociales, la coopération s’exposerait à péricliter." En novembre 1921,"L’Avenir chaumontais" ayant composé son bureau rendit hommage à l’esprit coopératif de Louis Mann en le désignant comme vice-président aux côtés de Billon, président.
En 1926, il accepta d’être le secrétaire général du syndicat des professeurs de l’Enseignement secondaire.
Néanmoins, c’est sur le plan municipal qu’il concentra ses efforts. A chaque élection, il fut candidat socialiste. En mai 1925, il fut maintenu premier adjoint à l’unanimité. Le 5 mai 1929, il fut encore aux côtés de ses anciens colistiers, Émile Billon, Paul Évrard, Lucien Morel et Auguste Parrat qui furent élus avec lui sur la liste du conseil sortant. Bien qu’ayant perdu des voix par rapport aux dernières élections, il fut encore nommé premier adjoint à l’unanimité moins une voix. Le 5 mai 1935, Mann figura sur la liste complète que le Parti socialiste de Chaumont présenta et qui ne recueillit aucun succès au premier tour. Au scrutin de ballottage, l’alliance s’étant faite avec les radicaux-socialistes, Mann fut parmi les socialistes choisis avec ses anciens collègues au conseil municipal, Évrard, Morel, et Parrat et aux côtés de nouveaux venus au Parti socialiste tels que Lucien Michaut, gérant des coopératives, Robert Vauthier, ingénieur civil et Paul Louis Régnier, commis des PTT.
Malgré les services éminents rendus par Louis Mann à la ville de Chaumont, surtout depuis que le maire, élu député en 1924, lui avait abandonné pratiquement ses fonctions, les électeurs chaumontais semblèrent quelque peu l’abandonner en désignant avant lui, comme socialistes, Évrard, Michaut, Vauthier, Régnier et Parrat. La municipalité le dédommagea en le maintenant premier adjoint, faisant ainsi de lui le véritable administrateur de la ville de Chaumont. Mais Mann ne pouvait oublier son métier de professeur et il centra son action sur l’enseignement et l’éducation. En 1921, il avait appuyé ses camarades socialistes du conseil municipal qui réclamaient un "Cercle populaire". Finalement ce projet vit le jour et le Cercle populaire fut annexé au patronage laïque. Et Mann se souvenant de ses premières armes faites à l’Université populaire de son ami Michel Alexandre se présenta pour être l’un des premiers conférenciers.
La même année 1921, Louis Mann fit encore à une séance du conseil municipal un remarquable rapport sur le développement de l’enseignement laïque.
Mais alors que son camarade Paul Évrard orientait son activité vers l’enseignement secondaire féminin, Louis Mann se tournait vers le technique. Très tôt il participa à la création de la Société d’encouragement à l’enseignement technique dont il devint l’un des administrateurs. Aussitôt il s’occupa de l’organisation des concours d’apprentissage et des cours de perfectionnement auxquels il donna une telle impulsion que, depuis cette époque, l’apprentissage s’est développé en Haute-Marne d’une façon constante. Louis Mann fut le promoteur de l’organisation de l’apprentissage dans le département et c’est sans doute ce qui lui valut d’être promu chevalier de la Légion d’honneur en 1927.
Il mourut le jour de la libération de Chaumont.
Par Justinien Raymond, Marcel Henriot
SOURCES : Archives du lycée de Chaumont. — Arch. Com. Chaumont, K 37. — Le Petit Haut-Marnais, 3 février, 27 mars 1906, 9 mai 1915. — La Haute-Marne libérée, 10, 17 et 18 septembre 1944.