MARGAILLAN Ernest, Martin

Par Jacques Girault

Né le 2 janvier 1904 à Montclar (Basses-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence), mort le 13 novembre 1999 à Marseille (Bouches-du-Rhône) ; instituteur dans les Bouches-du-Rhône puis dans la Seine ; militant syndicaliste ; militant socialiste.

Fils d’un négociant forgeron (selon l’état civil), de paysans éleveurs (selon son témoignage), Ernest Margaillan perdit son père à l’âge de sept ans, et passa sa jeunesse avec sa mère qui tenait un petit commerce. Il fit ses études au cours complémentaire de Seyne-les-Alpes puis à l’École normale d’instituteurs d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), promotion 1920-1923, et obtint le brevet supérieur.

Dès sa sortie de l’école normale, Ernest Margaillan adhéra au syndicat des instituteurs. Nommé à Marseille où il passa son certificat d’aptitude pédagogique, il exerça ensuite à Meyrargues où il fonda en 1929 le club de football, l’Association sportive de Meyrargues dont il devint le secrétaire. Puis il dirigea de 1934 à 1936 l’école à cinq classes de Trets.

Sur le plan syndical, Ernest Margaillan appartint au Syndicat général de l’enseignement issu d’une tentative de fusion des syndicats d’enseignants CGT et CGTU dans les Bouches-du-Rhône et fut le président du groupe de Jeunes des Bouches-du-Rhône en janvier 1925 dont le secrétaire était Pascal Léna*. Ce groupe avait pour but d’étudier les revendications spécifiques aux jeunes (questions de pédagogie et d’éducation syndicaliste) et admettait tous les jeunes, syndiqués et non-syndiqués. Lors de l’assemblée générale du 15 janvier 1925, Margaillan proposa de demander aux syndicats enseignants d’intégrer un membre de leur groupe à leurs conseils syndicaux. Le 2 avril 1925, le groupe des jeunes prit connaissance de courriers émanant d’Andréa Brissaud*, secrétaire général du groupe des jeunes et épouse de Gabriel Brissaud*. Elle demandait que le groupe des Bouches-du-Rhône, conformément aux décisions du congrès des Groupes de jeunes de Paris d’août 1924 (motion Jean Aulas*) soit rattaché au Syndicat des membres de l’enseignement laïque (CGTU). Considérant que le groupe était formé d’instituteurs appartenant au SMEL, au SN et au Syndicat général, que les membres du SMEL ne se résoudraient pas à voir le groupe qu’ils avaient formé se rattacher à un autre syndicat et que les autres syndiqués ne souhaitaient pas être rattachés au SMEL, Margaillan et ses camarades décidèrent de conserver provisoirement leur situation autonome. En juin 1924, considérant que le certificat d’aptitude pédagogique « ne prouvait rien après un stage de trois à l’école normale », ils proposaient sa suppression et une titularisation par promotion au 1er janvier qui suivait la sortie de l’école. En octobre 1925, devenu secrétaire du groupe de jeunes, Margaillan estimait que tous les jeunes devaient travailler pour l’unité syndicale. Le 29 avril 1926, la majorité se prononça pour la défense de l’autonomie.

Après la dissolution du Syndicat général, Margaillan adhéra au syndicat affilié à la Fédération unitaire de l’Enseignement. Il fut élu au conseil fédéral au titre de la Minorité oppositionnelle révolutionnaire lors du congrès de la FUE à Bordeaux (août 1932). Il fit partie de ceux qui se détachèrent de la tendance pour se rapprocher de la majorité fédérale, avec Jean Cornec* et Joseph Rollo*. Lors du dernier congrès de la FUE à Angers (août 1935), il présenta un rapport sur le chômage et fut élu au bureau fédéral et désigné comme secrétaire corporatif. Lors du dernier congrès de la CGTU (septembre 1935), dans son intervention sur l‘unité syndicale, il exprima son désaccord avec la majorité qui, selon lui, déniaient à ses amis « révolutionnaires » la possibilité de « faire entendre » les « voix qui s’élèvent contre une politique de collaboration des classes ». Membre du bureau syndical de la sous-section d’Aix-en-Provence du Syndicat national (CGT), il était délégué de cette sous-section au conseil syndical de la section départementale. Il en resta membre comme représentant de la sous-section de Trets. Il participa à la grève générale du 12 février 1934. 

Après la réunification, il continua à militer dans un sens favorable à la majorité sur les questions de la lutte pour la paix, pour l’école laïque, contre l’organisation des minorités, pour que les instituteurs luttent contre le danger fasciste dans les zones rurales.

Membre du Parti socialiste SFIO depuis 1924, Margaillan, secrétaire de la section socialiste où il exerça, appartint à la commission exécutive fédérale des Bouches-du-Rhône et, pendant quelques années, fut secrétaire fédéral adjoint.
En 1937, Margaillan fut nommé dans la Seine, où il reprit place au Parti socialiste SFIO et au Syndicat national des instituteurs. Jusqu’en 1939, secrétaire de la section syndicale du VIIe arrondissement, il participa à la grève du 30 novembre 1938 (deux instituteurs grévistes seulement dans l’arrondissement, deux cents environ dans la Seine).

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Margaillan fut en contact avec Georges Lapierre* et René Bonissel*. Instituteur au cours complémentaire de l’école Anatole France à Issy-les-Moulineaux, à la Libération, il participa à la réorganisation du syndicat et fut désigné, en novembre 1945, comme membre du conseil syndical élu de la sixième circonscription (VIIe et XVe arrondissements). Membre du bureau de la section départementale du SNI à partir de mars 1948, il fut responsable des commissions administrative (1945), pédagogique (1945-1949), de la commission corporative (1952-1953) et de celle des élus du personnel (1949-1952). Il devint secrétaire général adjoint en novembre 1949, succédant à Edmond Breuillard* et fut élu au Conseil départemental de l’enseignement primaire, en décembre 1948 dans la 6eme circonscription (arrondissement de Sceaux). Réélu en 1952, il démissionna collectivement à la demande du SNI pour protester contre la politique répressive du gouvernement et sa politique antilaïque à la fin de 1953. Il fut réélu en janvier 1954 dans le sixième secteur avec beaucoup plus de voix qu’en 1951 et en demeura membre jusqu’en janvier 1958. En outre, il siégea à la commission administrative paritaire départementale de novembre 1948 à 1952.

Le 17 juin 1946, Margaillan fut candidat suppléant du SNI au Conseil d’enseignement de l’enseignement du premier degré. Lors de la réunion du conseil national du SNI, le 17 juillet 1947, il intervint sur la situation de la presse syndicale. Lors du congrès national du SNI, le 21 juillet 1947, dans son intervention sur le fonctionnement des commissions paritaires dans la fonction publique, il proposa que le président soit toujours un membre de l’administration mais que sa voix prépondérante lui soit retirée en cas d’égalité lors des votes. Le bureau national du SNI, le 23 septembre 1947, le désigna pour participer à la commission à mandat limité chargée des questions de la fonction publique.

Margaillan participa à la grève des instituteurs de la Seine en novembre-décembre 1947 et à tous les autres mouvements qui suivirent. En 1947, secrétaire administratif du Syndicat de l’enseignement de la région parisienne (Fédération de l’Éducation nationale), il obtint l’admission à la Bourse du Travail de Paris. Il devint secrétaire général de la section du SNI de la Seine en octobre 1952, succédant à Robert Coustal*, et le resta jusqu’en février 1954, signant de nombreux éditoriaux de L’École du Grand Paris, bulletin de la section syndicale. Il resta membre de son bureau et secrétaire de commissions jusqu’en 1959. Pendant cette période, il se montra particulièrement vigilant en condamnant les tentatives d’action commune avec la CGT émanant des sections où les responsables des sous-sections étaient de la tendance « cégétiste ».

Désigné comme membre de la commission des conflits par le conseil national du SNI en décembre 1949, lors du congrès national du SNI, le 20 juillet 1950, lors de la discussion du rapport sur l’organisation administrative de la carrière, Margaillan proposa de définir les critères de nominations aux postes de directeur. Le congrès rejeta sa motion. Assesseur lors d’une séance du congrès national de Saint-Malo en juillet 1951, candidat au bureau national en 20eme position sur la liste « Pour un syndicalisme indépendant et constructif » conduite par Henri Aigueperse*, il ne fut pas élu par le conseil national du 27 décembre 1951.

Lors de la réunion du conseil national, le 15 juillet 1953, après son intervention pour défendre les cours complémentaires, il fut nommé à la commission chargée de préparer le texte sur la réforme de l’enseignement. Lors du congrès national en juillet 1954, dans la discussion du rapport moral, il traita du recrutement des instituteurs soulignant notamment qu’il devait « rester un recrutement prolétarien », ce qui constituait une défense des écoles normales qui devaient recruter des futurs instituteurs en fonction des besoins pour éviter le recours à des bacheliers issus de l’enseignement secondaire.

Au congrès de la FEN de novembre 1952, Margaillan fut élu à la commission administrative fédérale sur la liste « autonome », au titre de la section départementale de la Seine. Il entra au bureau fédéral, remplaçant Henri Maunoury* qui venait de décéder. Permanent, il fut chargé du secrétariat des commissions fédérales « structure et propagande » et « questions corporatives ». Au congrès de novembre 1956, il cumula au bureau fédéral les fonctions de membre du secrétariat national et de trésorier. Il abandonna ces responsabilités avant son départ à la retraite, lors de la réunion de la commission fédérale du 29 novembre 1959, qu’il présida. Georges Aulong* le remplaça au bureau fédéral comme secrétaire - trésorier.

Pendant la guerre, Margaillan avait continué à être en relations avec des militants socialistes. Un temps franc-maçon, toujours membre du Parti socialiste SFIO sans occuper de responsabilité, il le quitta en 1958 pour adhérer au Parti socialiste autonome puis au Parti socialiste unifié. Il adhéra au Parti socialiste après le congrès d’Épinay.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article120168, notice MARGAILLAN Ernest, Martin par Jacques Girault, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 5 avril 2022.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F 17/ 17778. — APPO, B 12, 43701 (dossier Breuillard) . — Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, M 6/11379. — DBMOF, notice par Jean Maitron qui avait recueilli son témoignage. — Presse syndicale. — Thèse de Robert Hirsch, publiée sous le titre Instituteurs et institutrices syndicalistes. Une pratique syndicale de masse dans la Seine de 1944 à 1967, Paris, Institut de recherches de la FSU-Syllepse, 2010. — Notes de Jean Brun (transmise par Gérard Leidet), de Loïc Le Bars, de G. Leidet et de Guy Putfin.

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