MAS Auguste, Élie

Par Jean Sagnes

Né et mort à Béziers (Hérault) : 10 janvier 1895-25 mai 1977. Assureur ; délégué au IIe congrès national du Parti communiste (Paris, 1922) ; secrétaire général de l’Association touristique populaire de la Côte d’Azur (1936-1938).

Fils d’un employé de la Banque de France, septième et dernier enfant, Auguste Mas fit des études à l’école des frères de Béziers. Il suivit ensuite les cours de l’école de commerce de Montpellier d’où il sortit diplômé. Mobilisé le 1er décembre 1914, il fut blessé en 1916 et réformé, le 6 novembre, avec une pension à 60 % comme mutilé de guerre (handicapé moteur). Après son rétablissement et parce qu’il parlait très bien l’espagnol, il fut nommé à Cadix au consulat de France où il aurait travaillé selon sa famille pour le contre-espionnage français (1917-1918). Revenu en France, il fut quelque temps élève-inspecteur d’assurances à Paris puis secrétaire aux établissements Achille Gaillard (fabrique de clôtures) de Béziers.

Il adhéra alors au Parti socialiste SFIO et fut membre du Comité de la IIIe Internationale, comme les principaux militants de la section socialiste de Béziers. En compagnie de Joseph Garrigues (dit Maurice Morelly) et de Joseph Lazare, il fut délégué de la Fédération de l’Hérault au IIe congrès du Parti communiste qui se tint à Paris du 15 au 19 octobre 1922. Il faisait alors partie, avec ses camarades, de la gauche du parti fidèle à l’Internationale et opposée à la tendance du secrétaire général L.-O. Frossard. Membre de la commission des conflits, il monta à la tribune le 19 octobre pour donner lecture du rapport dans lequel était demandée l’exclusion de Pierre Brizon, Raoul Verfeuil, de François et Marie Mayoux et de Henri Sellier. L’exclusion de ce dernier était réclamée par la Fédération de l’Isère et le rapporteur lut les considérants qui accompagnaient cette proposition. Selon le compte rendu de L’Humanité, « le paragraphe final qui reproche à Sellier de s’être réclamé de la tradition de Jaurès pour fonder un grand parti démocratique provoque un violent incident. Lussy croit devoir s’écrier : « vous venez d’exclure Jaurès ». Ce mot déchaîne un tumulte épouvantable. » Plusieurs délégués crièrent « Vive Jaurès » et Frossard, « défaillant, quitta bientôt la salle exploitant à fond l’événement, ce qui lui permit de conserver au congrès une majorité bien compromise jusqu’au moment de l’incident. Après le vote de diverses motions, Mas (dont le nom fut orthographié faussement Maze par L’Humanité) reprit son rapport. Selon son compagnon Joseph Garrigues, il garda son calme et s’expliqua posément sur l’incident en déclarant : « La commission avait réparti les divers conflits qui lui étaient confiés entre ses divers membres et il s’est cru couvert dans l’application des statuts dont l’autorité compétente du citoyen Dupont, président de la Commission nationale des conflits qui siégeaient dans la Commission ». Un peu plus tard, toujours à la tribune, il précisa les difficultés des membres de la Commission, les uns faisant également partie d’autres commissions, d’autres assistant aux séances du congrès. Selon ses dires, le rapporteur reprit purement et simplement une formulation collective qui était peut-être celle de la fédération de l’Isère.

Également responsable de l’USTICA, Mas quitta bientôt Béziers où il était devenu assureur pour Marseille puis Nice, tout en continuant à militer au Parti communiste. En 1933, il créa le journal mensuel Mercure, revue d’enquêtes économiques et d’informations judiciaires des Alpes-Maritimes dont il fut le directeur. Il y écrivit des articles économiques et financiers, attaqua les « 200 familles » et, en 1936, y publia le programme du Rassemblement populaire. Durant l’été 1936, il fut chargé de mettre sur pied l’Association touristique populaire (ATP) de la Côte d’Azur dont le président était Virgile Barel mais dont il fut, en fait, la cheville ouvrière. L’ATP faisait partie de la Fédération des associations et sociétés s’intéressant au tourisme populaire, dénommée « Partir », liée au PC qui avait pour mission d’organiser l’accueil et l’installation des ouvriers en congés payés dans les hôtels de la Côte d’Azur. Auguste Mas y déploya une très grande activité, manifestant son esprit d’entreprise et d’innovation. Pendant deux ans, il fit également des causeries hebdomadaires à Radio-Nice PTT où il tenait la chronique du tourisme populaire.

Candidat aux élections cantonales des 9 et 16 octobre 1937 dans le canton de Menton, il fut bien placé pour l’emporter au deuxième tour mais fut violemment attaqué par l’Éclaireur de Nice. Ce journal accusait l’ATP de mauvaise gestion et d’escroquerie à l’égard des vacanciers. Si Auguste Mas échoua aux élections (34,6 % des inscrits contre 38,6 % à son adversaire), par contre le procès que l’ATP intenta à l’Éclaireur de Nice fut gagné.

Cependant, en juin 1938, la cellule à laquelle Mas appartenait (section Nice-centre) décida son exclusion sans qu’il ait pu, selon ses dires, ni en connaître les motifs, ni être entendu. Cette mesure fut ratifiée par le comité régional le 29 janvier 1939. La presse non-communiste de l’époque mit son exclusion en rapport avec l’élimination d’autres cadres du PC niçois dont le secrétaire de section Pattela. Selon des témoignages familiaux Auguste Mas fut très affecté par cette exclusion. A la veille de la guerre, il était devenu directeur général de « La Côte d’Azur pour tous » (sorte d’agence de voyages ou d’intermédiaire pour le placement des vacanciers en hôtel). Il ne prit pas à l’égard du parti de positions critiques ou hostiles.

Après l’interdiction du PC (septembre 1939), il fut très surveillé par la police. En 1942, il jugea préférable de résider à Béziers. Il y acheta un petit portefeuille d’assurances. Par une lettre du 28 juin 1946, il demanda à la direction nationale du Parti communiste de réviser la mesure d’exclusion qui l’avait frappé. On ne sait si cette lettre, dont la famille possède le double, reçut une réponse. Il ne fit plus de politique active mais demeura jusqu’à sa mort fidèle aux idées de sa jeunesse. En 1960, malade, il vendit son portefeuille d’assurances et cultiva quelques vignes.

Marié en 1926 à Marseille, Auguste Mas se remaria en 1942 à Montpellier.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article120807, notice MAS Auguste, Élie par Jean Sagnes, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 4 juin 2019.

Par Jean Sagnes

SOURCES : L’Ordre communiste, 1922. — L’Humanité, 20 octobre 1922. — Le Mercure, 1935-1936. — Témoignage de Maurice Morelly. — Notes de J.-R. Bézias. — Interview d’Yvonne Mas. — État civil.

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